Documentation

Informations sur la décision

Contenu de la décision

Competition Tribunal  Tribunal de la concurrence

 

Référence : Stargrove Entertainment Inc c Universal Music Publishing Group Canada,

2015 Trib Conc 26

No de dossier : CT 2015-009

No de document du greffe : 82

 

 

DANS L’AFFAIRE de la demande présentée par Stargrove Entertainment Inc. visant à obtenir une ordonnance en vertu de l’article 103.1 de la Loi accordant l’autorisation de présenter une demande en vertu des articles 75, 76 et 77 de la Loi sur la concurrence, LRC 1985, ch. C-34, telle que modifiée;

 

ET DANS L’AFFAIRE de la demande présentée par Stargrove Entertainment Inc. visant à obtenir une ordonnance en vertu des articles 75, 76 et 77 de la Loi;

 

ET DANS L’AFFAIRE de la demande présentée par Stargrove Entertainment Inc. visant à obtenir une ordonnance en vertu de l’article 104 de la Loi;

 

 

CT Seal - Sceau TC ENTRE :

 

Stargrove Entertainment Inc.

(demanderesse)

et

Universal Music Publishing Group Canada, Universal Music Canada Inc,

Sony/ATV Music Publishing Canada Co, Sony Music Entertainment Canada Inc, ABKCO Music & Records, Inc, Casablanca Media Publishing, et

Agence canadienne des droits de reproduction musicaux ltée

(défenderesses)

 

 

Rendue en fonction du dossier de l’affaire. Devant le membre judiciaire : M. le juge Barnes.

Date de l’ordonnance et des motifs de l’ordonnance : 14 décembre 2015

 

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE ET ORDONNANCE FAISANT DROIT À UNE DEMANDE DE CONTRÔLE JUDICIAIRE EN VERTU DE L’ARTICLE 103.1 DE LA LOI SUR LA CONCURRENCE


  1. Aperçu

 

[1]  La demanderesse, Stargrove Entertainment Inc. (« Stargrove »), cherche à obtenir une autorisation, en vertu de l’article 103.1 de la Loi sur la concurrence, LRC 1985, c C-34 (« Loi »), telle que modifiée, de présenter une demande contre les défenderesses pour les réparations substantielles suivantes :

 

  • (a) une ordonnance en vertu du paragraphe 75(1) de la Loi, exigeant que les défenderesses acceptent la demanderesse en tant que cliente dans les 15 jours suivant l’ordonnance du Tribunal, selon les mêmes conditions commerciales applicables aux autres demanderesses auprès de lAgence canadienne des droits de reproduction musicaux ltée (« ACDRM »);

 

  • (b) une ordonnance en vertu du paragraphe 76(2) de la Loi, interdisant aux défenderesses de continuer à adopter les pratiques qui constituent le fondement de la présente demande;

 

  • (c) une ordonnance en vertu du paragraphe 76(2) de la Loi, exigeant que les défenderesses acceptent la demanderesse en tant que cliente, dans les 15 jours suivant l’ordonnance du Tribunal, conformément aux mêmes conditions commerciales habituelles applicables aux autres demanderesses auprès de lACDRM;

 

  • (d) une ordonnance en vertu du paragraphe 76(8) de la Loi, interdisant aux défenderesses de continuer à adopter les pratiques qui constituent le fondement de la présente demande;

 

  • (e) une ordonnance en vertu du paragraphe 76(8) de la Loi, exigeant que les défenderesses acceptent la demanderesse en tant que cliente, dans les 15 jours suivant l’ordonnance du Tribunal, selon les mêmes conditions commerciales habituelles applicables aux autres demanderesses auprès de lACDRM;

 

  • (f) une ordonnance en vertu du paragraphe 77(2) de la Loi, interdisant aux défenderesses de continuer de pratiquer l’exclusivité;

 

  • (g) une ordonnance en vertu du paragraphe 77(2) de la Loi, exigeant que les défenderesses acceptent la demanderesse en tant que cliente, dans les 15 jours suivant l’ordonnance du Tribunal, selon les mêmes conditions commerciales habituelles applicables aux autres demanderesses auprès de lACDRM.

 

[2]  À l’appui de sa demande d’autorisation, Stargrove a déposé un dossier de demande et un dossier de demande supplémentaire. Les défenderesses ont répondu par des représentations écrites. Un affidavit de Sony Music Entertainment Canada Inc. (« Sony Canada »), déclarant qu’elle « ne possède ni ne contrôle les droits d’auteur des œuvres musicales » [traduction], a été joint aux documents en réponse. Cet affidavit a été déposé à l’appui de l’argument de Sony Canada selon lequel cette dernière n’est pas partie aux présentes procédures. Un affidavit similaire a été déposé au nom de Casablanca Media Publishing (« Casablanca »). Cette dernière a demandé l’autorisation de déposer cet affidavit en vertu de la règle 119(3) des Règles sur le Tribunal de la concurrence, DORS/2008-141, mais Sony Canada a négligé de faire cela. Lorsque Stargrove a déposé sa réponse, elle a aussi inclus un affidavit sans en avoir demandé l’autorisation. Cet affidavit incluait un courriel pertinent qui n’avait délibérément et manifestement pas été inclus dans le dossier de demande pour des raisons de protection des renseignements personnels.

 

[3]  Par la suite, lAgence canadienne des droits de reproduction musicaux ltée (« l’ACDRM ») a demandé l’autorisation de présenter une réponse de 10 paragraphes, qui, en grande partie, répétait les arguments qui ont été avancés dans les représentations écrites. Cet exposé écrit a soulevé une objection de la part de Stargrove, qui a, également, profité de l’occasion pour répéter certains de ses précédents arguments. L’ACDRM a alors répondu à cette réponse, cette fois sans en demander l’autorisation.

 

[4]  Alors que les Règles du Tribunal de la concurrence prévoient un certain degré d’absence de formalisme, elles n’acceptent pas un nombre illimité de dépôts non autorisé. Lorsqu’une autorisation est exigée pour déposer une preuve par affidavit ou soumettre des représentations supplémentaires, elle doit être demandée.

 

[5]  De même, les Règles ne contiennent aucun pouvoir permettant de déposer une contre-preuve de plein droit, et le seul fondement pour ce faire est la règle 2 avec autorisation. Cela s’applique également à la présentation d’argumentation en réponse à une réponse, et en réponse à toute réponse subséquente.

 

[6]  Nonobstant les irrégularités susmentionnées, j’ai tenu compte des éléments de preuve supplémentaires reçus compte tenu du fait que ces affidavits auraient été accueillis si l’autorisation avait été demandée de manière appropriée.

 

[7]  L’autorisation est refusée en raison des réponses subséquentes de l’ACDRM et de la réponse de Stargrove en réponse à la réponse. Les exposés écrits n’ajoutent rien d’important aux questions dont je suis saisi et, pour cette raison, je les ai ignorés.

 

 

  1. Faits

 

[8]  Stargrove affirme que, depuis 2014, elle exerce ses activités en tant que maison de disques, produisant et vendant des disques compacts (« CD ») de musique à des prix compétitifs. Elle qualifie la défenderesse, l’ACDRM, de société de gestion des droits d'auteurs de musique qui représente les intérêts des éditeurs de musique, au nom desquels elle délivre des licences pour la reproduction d’œuvres musicales moyennant le paiement des frais appropriés. Les autres entreprises défenderesses déclarent être des maisons de disques ou des éditrices de musique qui, dans ce cas, possèdent ou contrôlent a priori les droits d’auteur de certaines œuvres musicales pour lesquelles la délivrance d’une licence de reproduction mécanique est nécessaire avant d’en effectuer la reproduction. Stargrove s’estime lésée par le refus des défenderesses de délivrer cinq licences de reproduction mécanique qui l’autoriseraient à reproduire cinq chansons, à savoir : « Love Me Do » par The Beatles, « Can’t Buy Me Love » par The Beatles, « Little Red Rooster » par The Rolling Stones, « It Ain’t Me Babe » par Bob Dylan et « Fun, Fun, Fun » par The Beach Boys. En l’espèce, bien que le droit d’auteur sur l’enregistrement sonore soit expiré, le droit d’auteur de l’œuvre musicale existe toujours en faveur de certaines défenderesses au moins.

 

[9]  Selon l’affidavit du seul directeur et agent de Stargrove, M. Terry Perusini, son modèle d’affaires est fondé sur la production et la vente de disques à bas prix pour trois types d’œuvres musicales :

 

  • (a) les enregistrements sonores pour lesquels Stargrove possède les droits d’auteur;

 

  • (b) les enregistrements sonores dont Stargrove en détient une licence de diverses maisons de disques indépendantes;

 

  • (c) les enregistrements sonores qui font maintenant partie du domaine public et pour lesquels une licence d’enregistrement originale n’est plus légalement nécessaire, mais des licences de reproduction mécanique sont toujours exigées par les éditeurs.

 

[10]  Au début de 2015, Stargrove a présenté une demande à l’ACDRM pour obtenir des licences de reproduction mécanique afin de reproduire les cinq chansons susmentionnées. Il a payé 13 799,10 $ en redevances, c’est-à-dire à un taux de redevance de reproduction mécanique « standard » de 0,083 $ par chanson. L’ACDRM a encaissé le chèque de Stargrove et cette dernière s’est mise à produire des CD (12 400 unités) destinés à la vente par un distributeur chez Walmart au prix au détail de 5 $. Les ventes pour certains de ces CD étaient importantes.

 

[11]  Selon M. Perusini, à partir du 22 janvier 2015, chacune des défenderesses a pris des mesures pour refuser ou empêcher la délivrance des licences de reproduction mécanique à Stargrove, ou pour autrement décourager la vente de ses CD. Le 25 février 2015, l’ACDRM a retourné le paiement de redevance de Stargrove. Au même moment, des avis négatifs ont commencé à apparaître sur le site Web de Walmart, critiquant la qualité des CD de Stargrove. Selon la preuve déposée par Stargrove, ces prétendus avis de clients étaient le produit d’une campagne à l’interne enclenchée par la défenderesse, Universal Music Canada Inc (« Universal Canada »), visant à convaincre Walmart de retirer les CD de Stargrove de ses étagères et, par conséquent, de protéger sa part du marché.

 

[12]  Stargrove s’est donc efforcée de négocier avec l’ACDRM et certaines défenderesses (Sony/ATV Music Publishing Canada Co, Sony Canada, ABKCO Music & Records, Inc (« ABKCO ») et Casablanca) afin d’obtenir les licences de reproduction mécanique nécessaires. L’ACDRM a obtenu les autorisations pour quelques-unes des chansons en cause, mais pas pour la plupart d’entre elles. Stargrove n’a pas été en mesure de poursuivre ses activités commerciales prévues relativement aux titres de chansons protégées et M. Perusini estime avoir subi une perte immédiate de 150 000 $ en ventes en gros chez Walmart.

 

[13]  M. Perusini qualifie l’incidence globale de la conduite des défenderesses de la façon suivante :

 

 

Le modèle commercial de Stargrove dépend en grande partie de la production de compilations d’enregistrements sonores sur CD qui font partie du domaine public. Le refus des défenderesses de délivrer les licences à Stargrove selon les conditions de délivrance de licences habituelles a entraîné des pertes à Stargrove et empêche toute éventuelle croissance de l’entreprise.

 

J’estime que, si Stargrove peut continuer à exercer ses activités et que nous pouvons vendre une combinaison d’enregistrements sonores pour lesquels nous détenons une licence, nos propres enregistrements sonores et des enregistrements faisant partie du domaine public, nous réaliserons des ventes de trois à cinq millions de dollars par année au Canada.

 

Selon notre modèle d’affaires actuel, si nous n’obtenons pas les licences de reproduction mécanique selon des conditions habituelles de l’ACDRM, Stargrove fera faillite.

 

[traduction]

 

[14]  L’affidavit de Mario Bouchard déposé au nom de Stargrove décrit les arrangements commerciaux habituels qui s’appliquent à la délivrance de licences de reproduction mécanique au Canada. M. Bouchard est un ancien avocat général de la Commission du droit d’auteur. Il reconnaît que l’obligation de délivrer une licence pour enregistrer une œuvre musicale a pris fin en 1988, mais « en droit, une maison de disques [par exemple, Stargrove] devrait obtenir les licences de reproduction mécanique nécessaires avant de produire un CD, encore moins avant sa sortie » [traduction] (voir para 29). Néanmoins, selon M. Bouchard – et confirmé par David Basskin dans un affidavit de 2009 souscrit en Ontario sans lien avec la présente procédure– en pratique, les producteurs de disques sortent régulièrement de nouveaux enregistrements sans d’abord obtenir les licences de reproduction mécanique exigées des titulaires de droits d’auteur ou de l’ACDRM. Lorsqu’une licence de reproduction mécanique est délivrée par l’ACDRM au nom du titulaire du droit d’auteur, les redevances nécessaires sont payées par le titulaire de la licence selon les conditions commerciales généralement applicables. Il est important de noter que l’affidavit de M. Basskin affirme également que [traduction] « un titulaire d’un droit d’auteur peut refuser une demande de licence et [qu’]il pourrait bien le faire […] » (voir Dossier de la demande, à la p 381, para 51). D’un autre côté, les éditeurs de musique seront souvent incités à obtenir les redevances appropriées pour la reproduction de leurs chansons.

 

[15]  Les faits généraux de la revendication de Stargrove pour obtenir réparation sont décrits dans les quatre premiers paragraphes de son avis de demande proposé :

 

 

 

  1. Stargrove est une maison de disques qui produit des compilations d’enregistrements sonores sur CD des Beatles, des Rolling Stones et d’autres artistes, destinés à être vendus à coût moindre (5 $) dans les magasins Walmart. Elle peut offrir des prix aussi bas parce que les enregistrements sonores qu’elle utilise ne sont plus protégés par un droit d’auteur; ils font partie du domaine public. Par conséquent, Stargrove n’a pas à payer une « licence maîtresse d’enregistrement sonore » pour utiliser les enregistrements.

 

  1. Bien que les enregistrements sonores fassent partie du domaine public, les œuvres musicales (les chansons) sur les enregistrements continuent d’être protégées par le droit d’auteur. Stargrove a besoin de ce que l’on appelle des « licences de reproduction mécanique » pour chaque chanson qu’elle cherche à utiliser. Au Canada, il existe des pratiques et des conditions normalisées dans l’industrie, lesquelles régissent la délivrance des licences de reproduction mécanique; pour ce qui est des chansons pertinentes à la présente demande, c’est l’Agence canadienne des droits de reproduction musicaux qui est chargée de leur gestion. Stargrove est prête à se conformer à ces conditions et à ces pratiques. Cependant, les défenderesses se sont réunies pour écarter Stargrove, en s’assurant que l’ACDRM refuse d’accorder toute licence de reproduction mécanique à Stargrove (et non pas juste pour les titres en cause).

 

  1. Stargrove est ciblée en raison de son modèle de bas prix, mais les véritables victimes sont les consommateurs. Au lieu de pouvoir acheter des chansons populaires pour juste 5 $ par CD, ils doivent payer beaucoup plus.

 

  1. Les défenderesses ont entrepris de faire obstacle à Stargrove en faisant pression sur le distributeur de Stargrove, et ce, en créant de faux avis négatifs sur les CD de Stargrove et en s’assurant que l’ACDRM refuse de faire affaire avec Stargrove selon les conditions habituelles.Elles ont violé les articles 75, 76 et 77 de la Loi sur la concurrence en privant les consommateurs de prix compétitifs et en étendant artificiellement le droit d’auteur aux enregistrements faisant partie du domaine public, ce qui a eu une incidence négative sur la concurrence. Stargrove cherche à être traitée de manière équitable, selon les conditions commerciales habituelles. Puisque les défenderesses refusent de négocier avec Stargrove, cette dernière demande au Tribunal de leur ordonner à le faire.

 

  [traduction]

 

[16]  Les défenderesses s’opposent à l’octroi de l’autorisation pour divers motifs abordés ci-dessous.

 

 

Le critère d’obtention de l’autorisation

 

[17]  Le paragraphe 103.1(1) de la Loi sur la concurrence, LRC 1985, c C-34, telle que modifiée (« Loi »), permet à toute personne de demander au Tribunal l’autorisation de présenter une demande en vertu des articles 75, 76 et 77 – les trois dispositions en vertu desquelles Stargrove cherche à obtenir réparation.

 

[18]  Le paragraphe 103.1(7) déclare que l’autorisation de présenter une demande peut être accordée en vertu des articles 75 ou 77 si le Tribunal « a des raisons de croire que l’auteur de la demande est directement et sensiblement gêné dans son entreprise en raison de l’existence de l’une ou l’autre des pratiques qui pourraient faire l’objet d’une ordonnance en vertu de ces articles ».

 

[19]  Le paragraphe 103.1(7.1) autorise le Tribunal à accorder une autorisation de présenter une demande en vertu de l’article 76 s’il a des raisons de croire que l’auteur de la demande est directement gêné en raison d’un comportement visé à ce même article qui pourrait faire l’objet d’une ordonnance. Les termes « sensiblement gêné » sont absents du libellé de cette disposition.

 

[20]  L’approche générale en matière d’octroi d’une autorisation en vertu de l’article 75 est établie par le juge Marshall Rothstein dans Symbol Technologies Canada ULC c Barcode Systems Inc, 2004 CAF 339, [2005] 2 RCF 254 :

 

[16]  Dans la décision National Capital News Canada c Canada (Président de la Chambre des communes) (2002), 23 C.P.R. (4th) 77 (Trib. conc.), la juge Dawson, à titre de membre du Tribunal de la concurrence, a examiné le critère applicable à l’octroi d’une demande de permission en application du paragraphe 103.1(7). Après avoir cité des précédents portant sur l’interprétation de l’expression « motifs raisonnables de croire », elle a déclaré au paragraphe 14 de ses motifs :

 

Par conséquent, me fondant sur le sens ordinaire des termes utilisés au paragraphe 103.1(7) de la Loi et sur la jurisprudence à laquelle je me suis reportée, je conclus que la norme appropriée en vertu du paragraphe 103.1(7) consiste à se demander si la demande de permission est appuyée par des éléments de preuve crédibles suffisants pour qu’on puisse croire de bonne foi que le demandeur a pu être directement et sensiblement gêné dans son entreprise à cause d’une pratique susceptible d’examen et que cette pratique pourrait faire l’objet d’une ordonnance.

 

Je suis du même avis que la juge Dawson, et j’endosse son analyse et sa conclusion quant au critère applicable pour faire droit à la demande de permission en vertu du paragraphe 103.1(7).


[17]  La charge qui incombe à l’auteur de la demande de permission n’est pas très lourde. Il n’a qu’à fournir une preuve crédible suffisante de ce qui est allégué pour faire naître une croyance légitime dans l’esprit du Tribunal. Il s’agit là d’une norme de preuve moins élevée que la norme de la prépondérance de la preuve, laquelle s’appliquera à la décision sur le fond.

 

[18]  Toutefois, il est important de ne pas confondre la norme de preuve peu élevée applicable à la demande de permission avec le type de preuve devant être présenté au Tribunal et considéré par lui pour trancher cette demande. Pour obtenir une ordonnance suivant le paragraphe 75(1), le refus de vendre n’est pas simplement le refus d’un fournisseur de vendre un produit à un client intéressé. Les éléments de la pratique commerciale susceptible d’examen que constitue le refus de vendre, éléments devant être prouvés pour que le Tribunal puisse rendre une ordonnance, sont ceux qui sont énoncés au paragraphe 75(1). Ces éléments se combinent et doivent tous être considérés par le Tribunal, et ce, non seulement lorsqu’il examine l’affaire au fond, mais aussi lorsqu’il se penche sur une demande de permission selon le paragraphe 103.1(7). Cela s’explique du fait que, s’il ne considérait pas tous les éléments de la pratique énoncés au paragraphe 75(1) pour trancher la demande de permission, le Tribunal ne pourrait conclure, comme le prescrit le paragraphe 103.1(7), qu’il existait des motifs de croire qu’une pratique alléguée pourrait faire l’objet d’une ordonnance en vertu du paragraphe 75(1).

 

[19]  Le Tribunal peut examiner chaque élément brièvement pour respecter la nature expéditive de la procédure de permission prévue à l’article 103.1. Pourvu que chaque élément paraisse être pris en considération, la décision discrétionnaire du Tribunal de faire droit ou non à la demande de permission sera traitée avec déférence par la Cour. Mais le pouvoir discrétionnaire du Tribunal n’est pas absolu. Il doit prendre en considération tous les éléments énoncés au paragraphe 75(1).

 

[20]  Les termes utilisés au paragraphe 103.1(1) confortent cette interprétation des conditions prescrites au paragraphe 103.1(7). Le paragraphe 103.1(1) exige que la demande de permission soit accompagnée d’une déclaration sous serment faisant état des faits. Cette déclaration sous serment doit donc contenir les faits pertinents par rapport aux éléments de la pratique commerciale susceptible d’examen que constitue le refus de vendre, énoncés au paragraphe 75(1). C’est cette déclaration qu’examinera le Tribunal pour trancher une demande de permission en vertu du paragraphe 103.1(7). Bien que la norme de preuve soit moins élevée au stade de la demande de permission qu’à celui de l’examen au fond, il demeure que les mêmes considérations sont pertinentes et doivent être examinées aux deux stades.

 

[21]  Les arguments susmentionnés servent également de fondement à l’octroi d’une autorisation en vertu des articles 76 et 77 (voir aussi : Safa Enterprises Inc c Imperial Tobacco Company Limited, 2013 Trib conc 19, au para 15).


  1. Analyse

 

[22]  Je ne suis pas convaincu que Stargrove s’est acquittée de son fardeau pour l’autoriser à présenter une demande de réparation en vertu des articles 75 ou 77. Je suis toutefois convaincu que l’autorisation de présenter une demande de réparation en vertu de l’article 76 est justifiée.

 

[23]  La demande de Stargrove visant des réparations en vertu des articles 75 et 77 présente deux lacunes fondamentales. Une décision du Tribunal dans Canada (Directeur des enquêtes et des recherches) c Warner Music Canada Ltd, [1997] DTCC no 53, 78 C.P.R. (3d) 321 (« Warner Music »), empêche carrément une demande visant des réparations en vertu de l’article 75. Je suis en désaccord avec l’affirmation de Stargrove, selon laquelle cette décision est distincte ou, par ailleurs, qu’elle devrait être ignorée.

 

[24]  Dans Warner Music, le directeur a présenté une demande, soutenant que le refus des défenderesses (collectivement « Warner Music ») d’accorder à un compétiteur des licences relatives au droit d’auteur selon les conditions de commerce normales afin de lui permettre de réaliser des enregistrements sonores à partie de leurs bandes maîtresses contrevient à l’article 75 de la Loi.

 

[25]  Warner Music a réussi à faire radier la demande. En radiant la demande du directeur, le Tribunal a tenu les propos suivants :

 

  • 30 Après examen des observations des parties et des éléments supplémentaires que renferment leurs mémoires, le Tribunal conclut, à partir des faits en l’espèce, que les licences ne sont pas un produit au sens de l’article 75 de la Loi, parce qu’une interprétation raisonnable de cette disposition ne permet pas de l’appliquer en l’occurrence. Bien qu’une licence relative au droit d’auteur puisse constituer un produit aux fins de la Loi, il est clair que le mot « produit » n’est pas employé isolément à l’article 75, mais doit plutôt être interprété dans son contexte. Les exigences de l’article 75 selon lesquelles il doit y avoir une « quantité amplement suffisante » d’un « produit » et des conditions de commerce normales à l’égard d’un produit montrent qu’un droit exclusif en matière de propriété intellectuelle ne peut constituer un « produit » – il ne saurait en effet y avoir une « quantité amplement suffisante » de droits en matière de propriété intellectuelle, qui sont exclusifs de par leur nature même et il ne peut y avoir de conditions de commerce normales lorsqu’une licence peut être refusée. Le droit accordé par le législateur d’exclure autrui est fondamental en matière de propriété intellectuelle et ne peut être jugé anticoncurrentiel. Rien ne permet de conclure que le législateur a voulu faire de l’article 75 de la Loi une disposition qui prévoit l’octroi obligatoire de licences en matière de propriété intellectuelle.

 

  • 31 Aussi, le Tribunal fait droit aux observations des défenderesses selon lesquelles, considéré dans le contexte de l’article 32 et du paragraphe 79(5) de la Loi, le terme « produit » employé à l’article 75 ne peut être interprété comme englobant les licences relatives au droit d’auteur. Ces observations étant analysées précédemment, il est inutile de les répéter.

 

  • 32 Bien que le Tribunal s’y prononce sur l’application de l’article 79 et en matière de propriété intellectuelle (marques de commerce), nous sommes d’avis que l’extrait suivant de la décision Directeur des enquêtes et recherches c Télé-Direct (Publications) Inc est très pertinent vu les circonstances de la requête dont nous sommes saisis :

 

Le refus d’octroyer des licences d’utilisation de leurs marques de commerce relève entièrement de la prérogative des défenderesses. Le droit du propriétaire d’octroyer de telles licences comporte nécessairement celui de déterminer s’il convient d’en accorder et à qui; la protection des marques de commerce repose sur la possibilité d’opérer une sélection. Les marques de commerce des défenderesses constituent des éléments d’actif de grande valeur, dont l’achalandage est considérable. La décision d’accorder une licence – c’est-à-dire, essentiellement, de partager cet achalandage – relève d’un droit appartenant entièrement au propriétaire de la marque. Le refus d’octroyer une licence se distingue de l’assujettissement d’une licence à des conditions anticoncurrentielles.

 

La Loi sur le droit d’auteur s’apparente à la Loi sur les marques de commerce en ce qu’elle permet au propriétaire d’une marque de commerce de refuser d’accorder une licence et ne restreint aucunement le droit exclusif d’en octroyer une. [Notes en bas de page omises.]

 

[26]  Cette analyse s’applique entièrement à la réparation sollicitée par Stargrove en vertu de l’article 75. Une réparation n’est tout simplement pas permise en vertu de cette disposition, où la conduite contestée implique le refus d’accorder une licence de droit d’auteur pour des œuvres. Les motifs dans Warner Music sont également renforcés par l’exception énoncée au paragraphe 76(3), permettant une réparation de maintien des prix nonobstant l’existence de droits exclusifs de propriété intellectuelle. Si l’intention du législateur était que les réparations en vertu des articles 75 ou 77 soient possibles face à un tel droit exclusif, il l’aurait vraisemblablement mentionné, comme il l’a fait à l’article 76.

 

[27]  Les préoccupations générales exprimées par le Tribunal dans Warner Music s’appliquent également aux réparations permises en vertu de l’article 77. Il n’existe tout simplement pas d’interprétation raisonnable de l’article 77 qui les rendrait applicables aux arguments factuels avancés par Stargrove. Autrement dit, la conduite dont se plaint Stargrove n’est pas une forme d’exclusivité ou de vente liée, au sens donné à ces termes dans la Loi.

 

[28]  La deuxième lacune fondamentale dans la demande d’autorisation de Stargrove en vertu des articles 75 et 77 découle de la preuve qu’elle a déposée concernant l’incidence de la présumée conduite de ses activités. Le paragraphe 103.1(7) exige la preuve d’une gêne directe et considérable. La preuve présentée par Stargrove est manifestement insuffisante pour s’acquitter de son fardeau de montrer une gêne « considérable ». Bien que M. Perusini reconnaisse que le modèle commercial de Stargrove inclut la vente d’œuvres musicales qu’elle contrôle ou qui font maintenant entièrement partie du domaine public, il n’a fourni aucun élément de preuve quant au pourcentage de l’ensemble de ses activités relativement à la mise en marché des œuvres musicales en cause.

 

[29]  Je ne doute pas que les CD protégés par un droit d’auteur que Stargrove cherche à produire et à vendre représentent un marché possiblement lucratif, mais au vu du dossier, il m’est impossible de dire si l’accès à ces produits est possiblement existentiel ou simplement profitable dans une certaine mesure qui, en grande partie, est sans fondement. Pour qu’il existe un fondement, il doit y avoir un effet qui est « importan[t] ou notable »; il n’est pas nécessaire que la partie gênée ne soit pas en mesure de poursuivre ses affaires : voir Nadeau Ferme Avicole Limitée c Groupe Westco Inc et al, 2009 Trib conc 6. M. Perusini offre la simple conclusion que Stargrove fera faillite si elle n’a pas accès à ces produits, mais il ne fournit aucune donnée crédible à l’appui de cette opinion ou de ses estimations quant à d’éventuelles ventes possibles. Dans l’ensemble, cette preuve est insuffisante pour que le Tribunal puisse croire de bonne foi que le refus de permettre l’accès aux œuvres en cause en l’espèce pourrait sensiblement gêner les affaires de Stargrove, et la demande présentée en vertu des articles 75 et 77 est rejetée pour cette raison également.

 

[30]  Je suis convaincu que Stargrove a toutefois atteint le seuil relatif à l’autorisation en vertu de l’article 76 de la Loi. Comme je l’ai susmentionné, le paragraphe 103.1(7.1) exige seulement qu’une partie soit « directement gêné[e] » par la présumée conduite susceptible de contrôle. En ce qui concerne l’autorisation, cette exigence est manifestement satisfaite.

 

[31]  À la lumière de la portée limitée de l’affaire Warner Music, il reste à trancher la question de savoir si un droit d’auteur est, à certaines fins législatives, un « produit ». Au paragraphe 30 de Warner Music, le Tribunal reconnaît cette possibilité : voir aussi Cinemas Guzzo Inc c Canada, 2005 CF 691, au para 56, conf. par 2006 FCA 160.

 

[32]  Un des aspects les plus importants est la reconnaissance dans le sous-alinéa 75(1)a)(ii) que le maintien du prix susceptible d’être examiné inclut une conduite discriminatoire directe ou indirecte motivée par le régime de bas prix d’une autre personne.

 

[33]  Si Stargrove est en mesure d’établir que certaines ou toutes les défenderesses ont, individuellement ou conjointement, fait preuve de discrimination envers elle en refusant de lui accorder les licences de reproduction mécanique en raison de son régime de bas prix, un argument en faveur d’une réparation en vertu de l’article 76 serait possible. Les arguments en faveur d’une réparation pourraient être renforcés par une preuve crédible qui démontrerait que les licences de reproduction mécanique sont régulièrement accordées habituellement par les éditeurs de musique aux maisons de disques selon des conditions commerciales habituelles et que Stargrove a été traitée de manière différente.

 

[34]  Dans The Queen v Royal LePage Real Estate Services Ltd, [1994] AJ No. 823, 27 WCB (2d) 428, la Cour du Banc de la Reine de l’Alberta affirme que selon l’ancien équivalent de la disposition criminelle, une discrimination est le fait de [traduction] « traiter une personne de manière différente sans raison valable » (voir para 25). De même, dans un texte intitulé Competition Law of Canada (Huntington, New York, Juris Publishing, 2003) (feuilles mobiles, révision 22-2009) (Davies, Ward et Beck), les auteurs déclarent :

 

 

Le document de référence indique aussi, en ce qui concerne l’interdiction relative au refus de fournir [traduction] « ou de discriminer autrement » prévu par l’alinéa 61(1)b), maintenant abrogé (l’actuel sous-alinéa 76(1)a)(ii)), les documents contextuels notent également que la discrimination peut [traduction] « englober certaines pressions inéquitables qui ne représentent pas un refus direct de fournir un produit, mais qui a une incidence néfaste sur les fournisseurs du détaillant, par exemple la discontinuité d’un produit ou des commandes perdues ou retardées ». [Notes en bas de page omises.]

 

[traduction]

 

 

[35]  En vertu de l’alinéa 76(3)c), le fait que la conduite contestée soit réalisée par une partie ayant un droit exclusif de propriété intellectuelle ne rend pas une réparation impossible. On peut supposer qu’en adoptant cette disposition, le législateur a reconnu que certaines formes de conduite anticoncurrentielle devraient permettre une réparation, nonobstant l’existence de droits de propriété intellectuelle. À la lumière de cette disposition, je suis en désaccord avec le fait qu’il est clair que le pouvoir d’ordonner une licence obligatoire réside uniquement dans l’article 32 de la Loi. De plus, il m’apparaît évident qu’une conduite discriminatoire visée par l’article 76 peut ne pas être « le simple exercice d’un droit de [propriété intellectuelle] », selon Apotex Inc c Eli Lilly and Company, 2005 CAF 361, aux paras 28 et 34.

 

[36]  Je suis également d’accord avec Stargrove qu’il reste à trancher la question de savoir si, dans tous les cas, l’article 76 exige la revente du produit ou que les intrants sur le produit ne peuvent jamais faire l’objet d’une réparation. Ces questions méritent un examen plus approfondi.

 

[37]  Il y a aussi l’argument selon lequel une réparation pour une conduite susceptible de contrôle en vertu de l’article 76 n’est effectivement pas l’équivalent d’un régime de licences obligatoires. Si, dans un cas précis, une violation de l’article 76 est établie, il est certainement loisible au Tribunal d’ordonner la réparation appropriée en vertu de cette disposition. Cela ne permettrait prétendument pas à n’importe qui d’obtenir une licence de droit d’auteur, indépendamment de la raison du refus. Lorsque le titulaire d’un droit exclusif de propriété intellectuelle refuse d’accorder une licence et que ce refus est justifié en droit, la partie gênée ne disposera d’aucune réparation obligatoire.

 

[38]  Je suis également convaincu que suffisamment d’éléments de preuve ont été produits pour croire de bonne foi que le fait d’exclure Stargrove du marché pourrait avoir une incidence néfaste sur la concurrence du marché. Dans un courriel joint à l’affidavit de Mme Anna Kusmider, un représentant d’Universal Canada a indiqué qu’une semaine de ventes de CD d’Universal chez Walmart équivaut à 4 172 unités. L’auteur s’est dit préoccupé quant au maintien de sa part du marché. D’autres éléments de preuve présentés par M. Perusini montrent le succès initial de Stargrove sur le marché de la vente au détail et l’intérêt continu de Walmart pour les CD de Stargrove. Les présumés démentis des défenderesses au sujet d’un accès satisfaisant au marché pourraient également être un signe de leur préoccupation quant au préjudice sur l’actuel marché de prix élevés pour cette musique.

 

[39]  Je reconnais que les éléments de preuve quant aux motifs de chaque défenderesse ne sont pas particulièrement convaincants. Il s’agit toutefois d’éléments de preuve qui dépendent exclusivement des connaissances des défenderesses et elles n’ont produit aucune contre-preuve. À la lumière d’une preuve non contestée par Stargrove, je suis convaincu qu’elle a atteint le seuil de preuve relativement bas sur ce point.

 

[40]  Sony Canada soutient que la demande d’autorisation de Stargrove devrait être rejetée parce qu’elle n’est pas une éditrice de musique et qu’elle n’a pas d’intérêts en matière de droits d’auteur dans aucune des œuvres musicales en cause. Casablanca tient des arguments similaires. Cette dernière affirme que Stargrove attribue erronément des droits d’auteur à Casablanca pour trois chansons qui, depuis le 30 septembre 2015, sont détenues ou contrôlées par un tiers (Red Brick Songs).

 

[41]  Dans un affidavit souscrit par Mme Jennifer Mitchell, présidente de Red Brick Songs et de Casablanca, il est affirmé que « les trois chansons n’ont jamais été gérées par Casablanca » [traduction]. Elle déclare également que Casablanca « n’a pas la capacité d’accorder des licences pour Red Brick Songs ».

 

[42]  Ces éléments de preuve sont apparemment contredits dans un courriel de l’ACDRM à Stargrove, qui déclare que Casablanca représente les trois chansons en cause et qu’elle a demandé à l’ACDRM de ne pas accorder de licences à Stargrove. Cette contradiction évidente n’est pas résolue à partir du dossier dont je suis saisi et, tant qu’elle ne l’est pas, il n’y a aucune raison de rejeter la demande contre Casablanca.

 

[43]  De même, je ne suis pas convaincu qu’il soit approprié, à cette étape préliminaire, de rejeter la demande d’autorisation contre Sony Canada. Il pourrait s’avérer véridique que Sony Canada ne possède ni ne contrôle les droits d’auteur des œuvres musicales, mais ce fait peut ne pas être suffisant à lui seul pour la soustraire à une quelconque forme de réparation en vertu de l’article 76. Il existe des éléments de preuve dans le dossier selon lesquels certaines défenderesses peuvent avoir agi ensemble afin d’exclure Stargrove. Il s’agit d’une question qui mérite un examen plus approfondi de la preuve. La même préoccupation est soulevée relativement à l’implication de l’ACDRM. Cette dernière est présumée avoir agi en tant qu’agent, mais le fait qu’elle soit jointe en tant que défenderesse peut être nécessaire pour donner effet pratique à toute ordonnance qui pourrait en fin de compte être rendue en faveur de Stargrove.

 

[44]  ABKCO soutient que la présente demande présentée contre elle devrait être rejetée, le Tribunal n’ayant pas compétence, puisque la signification a été attribuée ex juris. Cependant, la majorité des arguments d’ABKCO touchent directement le bien-fondé de la demande. Je suis d’accord avec Stargrove que l’approche appropriée quant à cette question nécessite la présentation d’une requête distincte qui conteste la compétence du Tribunal. En contestant le bien-fondé de la présente demande, ABKCO accepte la compétence du Tribunal; voir Van Damme c Gelber, 2013 ONCA 388, au para 22.

[45]  Pour les motifs susmentionnés, la présente demande est accueillie en partie avec dépens en faveur de Stargrove au milieu de la fourchette de la colonne IV.

 

 

EN CONSÉQUENCE, LE TRIBUNAL ORDONNE CE QUI SUIT :

 

[46]  La demande d’autorisation visant à obtenir une réparation en vertu de l’article 76 de la Loi est accueillie;

 

[47]  La demande d’autorisation visant à obtenir une réparation en vertu des articles 75 et 77 est rejetée;

 

[48]  Les dépens sont adjugés à la demanderesse, et les défenderesses sont condamnées conjointement et solidairement, à payer des dépens au milieu de la fourchette de la colonne IV.

 

 

FAIT à Ottawa, ce 14e jour de décembre, 2015.

 

SIGNÉ au nom du Tribunal par le président de l’audience.

 

 

 

(s)  R.L. Barnes


AVOCATS :

 

Pour la demanderesse :

Stargrove Entertainment Inc Nikiforos Iatrou

Scott McGrath Bronwyn Roe

Sangeetha Punniyamoorthy Thomas Kurys

 

 

Pour les défenderesses :

 

Universal Music Publishing Group Canada Universal Music Canada Inc

 

Donald B. Houston

 

 

Sony/ATV Music Publishing Canada Co Sony Music Entertainment Canada Inc

 

Mahmud Jamal Peter Franklyn

 

 

ABKCO Music & Records, Inc. Casablanca Media Publishing

 

Michael Osborne

 

Agence canadienne des droits de reproduction musicaux Ltée Christopher M. Hersh

Casey M. Chisick Eric Mayzel

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.