Documentation

Informations sur la décision

Contenu de la décision

Tribunal de la Concurrence

Canada Coat of Arms / Armoiries du Canada

Competition Tribunal

Référence : Le Commissaire de la concurrence c Direct Energy Marketing Limited, 2014 Trib conc 18

N° de dossier : CT-2012-003

N° de document du greffe : 135

AFFAIRE INTÉRESSANT la Loi sur la concurrence, LRC 1985, c C-34, dans sa version modifiée;

ET une demande par le commissaire de la concurrence aux termes de l’article 79 de la Loi sur la concurrence;

ET de certaines politiques et procédures de Direct Energy Marketing Limited.

ENTRE :

Le commissaire de la concurrence

(demandeur)

et

Direct Energy Marketing Limited

(défenderesse)

et

National Energy Corporation

(intervenante)

Competition Tribunal Seal / Sceau Tribunal de la Concurrence

Date de l’audience : Le 22 octobre 2014

Devant le membre judiciaire : Monsieur le juge Rennie (président)

Date des motifs et de l’ordonnance : Le 31 octobre 2014

MOTIFS DE L’ORDONNANCE ET ORDONNANCE RELATIVE À LA REQUÊTE DU COMMISSAIRE


[1]  Le Commissaire de la concurrence (le « commissaire ») sollicite une ordonnance enjoignant au Tribunal de se saisir de la demande du commissaire contre Direct Energy Marketing Limited (« Direct Energy ») (CT-2012-003) conjointement avec la demande déposée contre Reliance Comfort Limited Partnership (« Reliance ») (CT-2012-002). Pour les motifs qui suivent, la requête du commissaire est rejetée.

[2]  Le commissaire fait valoir que les deux demandes partagent certaines questions de fait et de droit et que le fait de les réunir permettrait d’épargner temps et argent au Tribunal, à l’intervenante et au commissaire. Il est même d’avis que la durée totale de l’audience pourrait être réduite d’environ une semaine et demie. Il ajoute également que les coûts additionnels engagés par la défenderesse découlant du regroupement des demandes pourraient être atténués au moyen d’une attribution de dépens, selon le succès obtenu.

[3]  Reliance et Direct Energy s’opposent à la requête du commissaire. Ils prétendent que ce dernier ne s'est pas acquitté du fardeau, établi par la jurisprudence, de démontrer que (i) la requérante subira un préjudice si les audiences sont tenues séparément et (ii) que les parties défenderesses ne subiront pas de préjudice si les demandes sont entendues conjointement. De plus, elles font valoir qu’elles sont des compétitrices aux visées opposées et que l’audition conjointe des deux demandes sera moins efficace et ralentira le processus en raison du risque de litiges pouvant porter sur des questions procédurales. Lors de l’audience de la requête, l’avocat de Direct Energy a fourni plusieurs exemples de litiges possibles.

[4]  Direct Energy soutient également que l’audience sera entachée des preuves touchant les agissements de Reliance et note que le commissaire présentera les déclarations de 15 témoins sur les pratiques alléguées de Reliance mais qu’il ne présentera que 2 témoignages de clients concernant Direct Energy. Il ajoute que l’audition conjointe des demandes augmentera le risque de préjudice, et ce, en raison des similitudes qui existent entre celles-ci.

[5]  Malgré certains enjeux communs dans les demandes, Reliance prétend qu’elles sont distinctes puisqu’elles traitent de produits et de marchés différents pour chacune des défenderesses et qu’elles se fondent sur des faits différents.

[6]  En appliquant l’article 34 des Règles du Tribunal de la concurrence, DORS/2008-141, je me réfère à l’article 105 des Règles des Cours fédérales, DORS/98-106, qui prévoit que la Cour peut ordonner, à l’égard de deux ou plusieurs instances qu’elles soient entendues conjointement ou successivement.

[7]  En l’espèce, après avoir examiné tous les facteurs pertinents, notamment les questions mixtes de faits et de droit, le prétendu préjudice que subiront les défenderesses, les circonstances et les considérations d’équité ainsi que les intérêts de la justice, j’en conclus que le commissaire n’a pas réussi à me convaincre que les demandes devraient être entendues conjointement (voir le paragraphe 9(2) de la Loi sur le Tribunal de la concurrence, LRC 1985, c 19 2e suppl; Eli Lilly and Co c Novopharm Ltd, 1994, 55 CPR 3e 429; Halifax (Regional Municipality) c Canada (Travaux publics et services gouvernementaux), 2008 CF 1159; Sanofi- Aventis Canada Inc c Novopharm Ltd, 2009 CF 1285).

[8]  Je suis d’accord avec Direct Energy et Reliance que l’audition conjointe des demandes augmentera le risque de litiges sur des questions d’ordre procédural, notamment en ce qui a trait à la divulgation de renseignements confidentiels, la conduite des contre-interrogatoires et la complexité des questions liées à l’admissibilité la preuve. Par exemple, l’avocat de Direct Energy a indiqué vouloir obtenir l’autorisation du tribunal pour contre-interroger les témoins de Reliance dans l’éventualité où ces derniers feraient référence aux agissements de Direct Energy. Direct Energy et Reliance sont des compétiteurs et sont également des parties adverses dans une instance devant la Cour supérieure de justice. La nature des enjeux procéduraux qui seraient soulevés viendrait neutraliser les avantages soulevés par le commissaire au niveau du temps et de l’argent.

[9]  Il est également difficile de prédire actuellement toutes les embûches procédurales qui pourraient survenir si les demandes étaient entendues conjointement.

[10]  Des audiences séparées nécessiteront des dossiers distincts. Cela permettra à chaque défenderesse de bien identifier et bien comprendre la preuve qui est présentée contre elle et cela leur permettra de bien l’analyser et de préparer leur défense.

[11]  Comme cela a été expliqué ci-dessus, le commissaire fait valoir que l’audition conjointe des demandes permettra d’épargner temps et argent au Tribunal, à l’intervenante et au commissaire. Toutefois, l’audition conjointe des demandes engendrera des dépenses supplémentaires pour chacune des défenderesses qui devront participer à l’audience conjointe. Je ne peux accepter un argument qui favorise les économies de temps et d’argent d’une partie et d’un intervenant au détriment des autres parties même si des dépens peuvent être accordés par la suite.

[12]  Dans le cas de deux demandes distinctes mettant en cause des concurrents de l’industrie qui ne partagent pas les mêmes intérêts et dont les fondements factuels sont différents, et lorsqu’il y a un risque sérieux que l’audition conjointe des demandes soulève des enjeux procéduraux, le tribunal sera prudent avant d’ordonner que les demandes soient entendues conjointement sans qu’il y ait des facteurs compensatoires. Des arguments qui sont fondés principalement sur des raisons de commodité sont insuffisants (voir: Mon-Oil Ltd c Canada 1989, 26 CPR 3e 379; Sanofi-Aventis Canada Inc c Novopharm Ltd, 2009 C F 1285).

POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL ORDONNE CE QUI SUIT :

[13]  La requête du commissaire est rejetée. Les dépens suivront l'issue de la cause.

FAIT à Vancouver, ce 31e jour d’octobre 2014.

SIGNÉ par le président au nom du tribunal.

(s) Donald J. Rennie


COMPARUTIONS

Pour le demandeur :

Le Commissaire de la concurrence

Jonathan Hood

Pour la défenderesse :

Direct Energy Marketing Limited

Donald B. Houston

Christine Wadsworth

Pour l’intervenante :

National Energy Corporation

Derek D. Ricci

Michael Finley

 

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.