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Tribunal de la Concurrence

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Competition Tribunal

TRADUCTION OFFICIELLE

 

Référence : Commissaire de la concurrence c. Toronto Real Estate Board, 2012 Trib. conc. 08

No de dossier : CT-2011-003

No de document du greffe : 437

 

DANS LAFFAIRE de la Loi sur la concurrence, L.R.C. 1985, ch. C-34, dans sa version modifiée;

 

ET DANS L’AFFAIRE d’une demande du commissaire de la concurrence fondée sur l’article 79 de la Loi sur la concurrence;

 

ET DANS L’AFFAIRE de certaines règles, politiques et ententes relatives à la prestation de services de courtage immobilier résidentiel du système interagences du Toronto Real Estate

 

 

E N T R E :

 

Competition Tribunal Seal / Sceau du Tribunal de la concurrence Le commissaire de la concurrence

(demandeur)

et

Le Toronto Real Estate Board

(défendeur)

 

et

 

L’Association canadienne de l’immeuble et Realtysellers Real Estate Inc.

(intervenantes)

 

 

Date de la conférence téléphonique : le 17 février 2012

Juge présidant : Mme la juge Simpson (présidente)

Date de l’ordonnance: le 21 février 2012

Ordonnance signée par : Mme la juge Sandra J. Simpson

 

ORDONNANCE STATUANT SUR LA REQUÊTE PRÉSENTÉE PAR LE DÉFENDEUR POUR OBTENIR UN AFFIDAVIT SUPPLÉMENTAIRE PLUS COMPLET DE LA PART DU COMMISSAIRE


[1] Le Toronto Real Estate Board (le « TREB ») présente une requête en vue d’obtenir une annexe B supplémentaire plus complète, à l’affidavit souscrit par Nadia Brault le 20 janvier 2012 (l’« affidavit ») produit pour le compte du commissaire de la concurrence (le « commissaire »). Les deux parties ont déposé des mémoires des faits et du droit et le commissaire a présenté un autre affidavit souscrit par Nadia Brault le 15 février 2012. Aucun affidavit n’a été déposé au nom du TREB.

 

[2] Le Tribunal a entendu les observations des avocats du TREB et du commissaire par conférence téléphonique le vendredi 17 février 2012.

 

[3] L’annexe B de l’affidavit fait la liste de 1 171 documents dans lesquels un ou plusieurs des privilèges suivants sont invoqués : le secret professionnel de l’avocat, le privilège relatif au litige, le privilège relatif aux règlements et le privilège d’intérêt public. Les documents sont désignés sommairement par des mots comme [traduction] « réunions » et « scénarios ». Dans de nombreux cas, aucune date n’est donnée et l’auteur ou le destinataire du document est simplement désigné comme « un tiers ».

 

[4] Le TREB affirme qu’il ne peut évaluer, sans autres éléments d’information, si le privilège est fondé. Le commissaire fait valoir que la communication d’autres renseignements permettrait au TREB d’identifier les personnes qui ont aidé le commissaire au cours de son enquête (les « tiers »), ce qui contrevient aux principes sur lequel repose le privilège d’intérêt public.

 

[5] Ces principes sont analysés de façon détaillée dans la décision Commissaire de la concurrence c. United Grain Growers Ltd., 2002 Trib. Conc. 35, aux paragraphes 29 à 33.

 

[6] En somme, la raison d’être du privilège d’intérêt public est de garantir la confidentialité des renseignements que les plaignants et les autres membres de l’industrie révèlent au commissaire en échange de leur collaboration, à moins qu’ils soient appelés à témoigner. Ce caractère confidentiel signifie que ceux qui collaborent avec le commissaire n’ont aucune raison de craindre des mesures de représailles et que l’examen du commissaire sera à la fois exhaustif et efficace.

 

[7] Les deux obligations suivantes remédient à l’absence de certains renseignements à l’annexe B :

 

  • l’obligation, pour le commissaire, de fournir avant le début des interrogatoires préalables un document dans lequel sont regroupés les renseignements qu’il a obtenus de tiers. Il doit y inscrire les renseignements qui appuient ses arguments et ceux qui sont favorables au TREB(le « document synthèse »);

  • si un tiers doit témoigner, l’obligation de fournir avant la tenue de l’audience la déclaration complète du témoin et tous les documents pertinents.

 

[8] Une remarque au sujet de l’intervenante Realtysellers Real Estate Inc. (« RS ») s’impose à ce stade-ci. RS, la société qui l’a précédée et plusieurs de ses dirigeants ont engagé un vaste contentieux avec le TREB au cours des dix dernières années sur la question des conditions auxquelles TREB assujettit l’accès aux données de son service interagences, le Multiple Listing System, (« MLS »). RS poursuit actuellement le TREB pour plusieurs millions de dollars dans le cadre de deux procès intentés devant la Cour supérieure de justice de l’Ontario. RS et ses dirigeants n’ont aucune raison de craindre des représailles et tous supposent qu’ils font partie des plaignants dans la présente affaire. RS a offert de fournir un affidavit dans le cadre de son intervention, mais elle aurait révélé dans cet affidavit l’identité de ses personnes-ressources auprès du commissaire. Or, comme le TREB s’oppose à la participation de RS au processus de production de documents, RS n’a pas reçu l’ordre de soumettre un affidavit de documents.

 

[9] Dans ce contexte, j’examinerai maintenant les demandes formulées par le TREB en vue d’obtenir une annexe B supplémentaire et plus complète.

 

[10] Le TREB demande que l’annexe B :

  • indique tous les documents dont RS est l’auteur ou le destinataire;

  • identifie, de manière cohérente, par une lettre ou un numéro, les autres tiers.

 

[11] Or, sa demande pose problème parce que, après que les documents de RS auront été communiqués – ce qui en soi n’est pas problématique pour les motifs ci-dessus exposés – et que d’autres lettres auront été assignées à d’autres tiers pour les identifier individuellement, le TREB pourra discerner une tendance qui lui permettra de déterminer leur identité. Pour cette raison, je refuse sa demande.

 

[12] Le TREB demande également que les dates soient indiquées en ce qui concerne les pièces numérotées de 1 à 229 et il ajoute que, si les documents ne sont pas datés ou si les dates sont illisibles, l’affidavit devrait le mentionner. Cette demande est à mon avis raisonnable. Sans date, il sera impossible de suivre les documents pendant le déroulement du procès; en revanche, j’estime que si des dates sont ajoutées sans préciser l’identité de l’auteur ou du destinataire, il n’y a aucun risque de contrevenir au privilège d’intérêt public. Toutefois, dans son affidavit supplémentaire, Nadia Brault affirme que même les dates peuvent permettre de révéler l’identité de tiers dans le cas de certains documents. Pour cette raison, le commissaire fournira la date de toutes les pièces, sauf les pièces nos 16, 17 et 18, 32 et 33, 37 à 53, 55 à 73 et 80. Dans le cas des carnets de notes des administrateurs, en l’occurrence les pièces nos 1 à 13, les dates devraient correspondre aux premières et aux dernières inscriptions de chaque carnet.

 

[13] Le TREB demande que les administrateurs dont les cahiers de notes ont été produits soient identifiés par leur nom plutôt que par les lettres présentement utilisées. Le commissaire ne s’est pas opposé à cette demande et, à mon avis, la question de l’identité des enquêteurs ne permet pas d’invoquer un privilège. Le nom de ces personnes doit donc être fourni.

 

[14] Les pièces nos 675, 720 à 723, 838 à 840 et 883 sont décrites comme étant des [traduction] « documents produits au dossier du Tribunal ». Le commissaire a convenu que huit de ces pièces faisaient partie du dossier public du Tribunal et qu’elles devaient par conséquent être transférées à l’annexe A. Le TREB demande également que le neuvième document soit versé à l’annexe A. À mon avis, le neuvième document ne peut demeurer à l’annexe B que si l’on dépose un affidavit pour indiquer qu’il n’a pas effectivement été rendu public. Si cette preuve ne peut être produite, le document est présumé être public et devra être transféré à l’annexe A.

 

[15] Le TREB réclame une description plus détaillée des pièces nos 85, 86 et 87, qui sont présentement qualifiés d’[traduction] « enregistrements ». Je suis d’accord et j’ordonne au commissaire de préciser le type d’enregistrement et l’objet des enregistrements, par exemple : un enregistrement audio de l’entrevue réalisée avec un tiers.

 

[16] Le TREB a formulé une demande semblable en ce qui concerne les nombreuses pièces décrites comme étant des [traduction] « réunions ». Je conviens que cette description est mal choisie et qu’à chaque mention de ce terme, le commissaire doit préciser le type de documents dont il s’agit, par exemple : un procès-verbal, un ordre du jour, etc.

 

[17] Le TREB demande également que le commissaire désigne avec plus d’exactitude les documents qui sont présentement décrits comme étant des [traduction] « scénarios » à l’annexe B. Cette demande est raisonnable. J’ordonne donc au commissaire de désigner de façon plus exacte chacun des documents en question.

 

[18] Enfin, dans plusieurs documents, le TREB est désigné soit comme auteur soit comme destinataire. Selon le TREB, le commissaire n’est pas fondé d’invoquer le privilège d’intérêt public à l’égard de documents dont il est l’auteur ou le destinataire. Le TREB affirme également qu’il a besoin de connaître le nom du tiers en question, ainsi que d’avoir une meilleure description du document. Toutefois, dans son affidavit supplémentaire, Mme Brault affirme que les documents dont le TREB est l’auteur ou le destinataire ont été fournis par des tiers dont l’identité serait révélée si ces documents étaient communiqués. À mon avis, si ces renseignements sont fournis, le privilège d’intérêt public ne pourra s’appliquer à eux. En conséquence, aucune ordonnance ne sera rendue en ce sens.

 

D’AUTRES POINTS SOULEVÉS

 

[19] Le TREB a demandé, sans avoir toutefois soulevé ce point dans son avis de requête, une liste détaillée des documents actuellement produits en liasse sous le numéro de cote 229. Il s’agit des documents à l’égard desquels le secret professionnel de l’avocat a été invoqué, et l’avocat du commissaire s’est engagé à dresser une liste détaillée. Par conséquent, aucune ordonnance n’est nécessaire.

 

[20] Le TREB demande qu’un document synthèse soit rédigé de manière à indiquer les faits pertinents pour un intervalle donné par exemple, une période de six mois ou d’un an , et que ces faits soient énoncés de façon distincte pour chaque tiers. J’estime que s’il est fait droit à cette demande, le TREB pourrait vraisemblablement identifier les tiers et, pour ce motif, je ne prononcerai pas d’ordonnance en ce sens. Le TREB a toutefois demandé que le document synthèse soit remis au plus tard le 2 mars 2012. Comme les interrogatoires préalables peuvent commencer le 12 mars, cette demande est raisonnable et le commissaire doit agir en conséquence.

 

POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL ORDONNE CE QUI SUIT :

 

[21] Le commissaire devra déposer et signifier une annexe B supplémentaire et plus complète à son affidavit, au plus tard le 27 février 2012, conformément aux paragraphes 12 à 17 et 20 des présents motifs.

 

[22] Le TREB réclame la somme de 8 500 $ à titre de dépens avocat-client. Le Tribunal estime qu’il n’y a pas lieu d’adjuger les dépens selon ce barème. Par conséquent, le commissaire est condamné à payer au TREB la somme de 2 500 $ à titre de dépens.

 

 

FAIT à Ottawa, ce 21e jour de février 2012.

SIGNÉ au nom du Tribunal par la présidente.

 

Sandra J. Simpson

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Linda Brisebois, LL.B.


AVOCATS :

 

Pour le demandeur :

 

Le commissaire de la concurrence

 

John F. Rook

Andrew D. Little Roger Nassrallah

 

 

Pour le défendeur :

 

Le Toronto Real Estate Board

 

Donald S. Affleck Renai E. Williams

 

 

Pour les intervenantes :

Realtysellers Real Estate Inc.

Rishi Hargovan

 

L’Association canadienne de l’immeuble

 

Sandra A. Forbes

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