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Tribunal de la concurrence Competition Tribunal TRADUCTION OFFICIELLE Référence : Steven Olah c. Sa Majesté la Reine, représentée par le Service correctionnel du Canada et al., 2008 Trib. conc. 29 N o de dossier : CT-2008-008 N o de document du greffe : 0024 DANS L’AFFAIRE de la Loi sur la concurrence, L.R.C. 1985, ch. C-34, modifiée; ET DANS L’AFFAIRE d’une demande présentée par Steven Olah en vue d’obtenir une ordonnance fondée sur l’article 103.1 autorisant le dépôt d’une demande en vertu de l’article 77 de la Loi sur la concurrence;

ENTRE : Steven Olah (demandeur)

et Sa Majesté la Reine, représentée par le Service correctionnel du Canada, et Gravenhurst Home Hardware (défenderesses)

Rendue en fonction du dossier de l’affaire. Date des motifs et de l’ordonnance : 5 novembre 2008 Motifs et ordonnance signés par : Madame la juge Sandra J. Simpson

MOTIFS ET ORDONNANCE REJETANT UNE DEMANDE DE PERMISSION EN VERTU DES ARTICLES 103.1 ET 77 DE LA LOI SUR LA CONCURRENCE

I. INTRODUCTION [1] Steven Olah (le demandeur) demande au Tribunal de la concurrence (le Tribunal), en vertu de l’article 103.1 de la Loi sur la concurrence, L.R.C. 1985, ch. C-34, modifiée (la Loi), la permission de présenter une demande en vertu de l’article 77 de la Loi.

II. LES PARTIES [2] Au moment la demande a été déposée, le demandeur était détenu à l’établissement à sécurité minimale Beavercreek, situé près de Gravenhurst, en Ontario. Il avait été antérieurement détenu à l’établissement à sécurité moyenne Fenbrook (l’établissement Fenbrook), situé également à Gravenhurst. L’avis de demande a été déposé pour le compte du demandeur ainsi que pour le compte de tous les détenus de l’établissement Fenbrook.

[3] La défenderesse Sa Majesté la Reine, représentée par le Service correctionnel du Canada (Sa Majesté la Reine), était responsable, pendant toute la période pertinente, de l’exploitation de l’établissement Fenbrook.

[4] La défenderesse Gravenhurst Home Hardware (Home Hardware) est une quincaillerie située à Gravenhurst, en Ontario.

III. LES PRÉTENTIONS DES PARTIES [5] Le demandeur soutient dans son avis de demande que la mise en œuvre à l’établissement Fenbrook par la défenderesse, Sa Majesté la Reine, d’un service d’approvisionnement privatisé destiné aux détenus qui les oblige d’acheter des marchandises exclusivement de Home Hardware (la pratique alléguée) constitue une pratique d’exclusivité au sens du paragraphe 77(1) de la Loi. Le demandeur porte plainte au sujet de la pratique alléguée parce que Home Hardware majore ses prix de 10 % pour les articles de bricolage et de 20 % pour les articles d’usage courant qui ne sont pas en stock régulièrement.

[6] Dans ses observations écrites, datées du 22 octobre 2008, la défenderesse Sa Majesté la Reine conteste la demande de permission et fait valoir que le Tribunal n’a pas de compétence sur l’administration par la Couronne de l’établissement Fenbrook. Elle soutient également que rien ne démontre que le demandeur est directement et sensiblement gêné dans son entreprise ni que la pratique d’exclusivité existe effectivement.

[7] Home Hardware n’a pas déposé d’observations écrites. IV. COMPÉTENCE [8] L’application de la Loi à la Couronne est régie par l’article 2.1 qui énonce ce qui suit : 2.1 Les personnes morales mandataires de 2.1 This Act is binding on and applies to an Sa Majesté du chef du Canada ou d’une agent of Her Majesty in right of Canada or a

province sont, au même titre que si elles n’étaient pas des mandataires de Sa Majesté, liées par la présente loi et assujetties à son application à l’égard des activités commerciales qu’elles exercent en concurrence, réelle ou potentielle, avec d’autres personnes.

[9] Dans Sebastian c. Saskatchewan (Dept. of Highways & Transportation) (1987), 61 Sask. R. 71, la Cour du Banc de la Reine de la Saskatchewan a dit qu’une personne morale mandataire de la Couronne est assujettie à l’application de la Loi, mais non la Couronne.

[10] En l’espèce, l’action a été intentée directement contre Sa Majesté la Reine et non contre un mandataire de la Couronne. De plus, ni Sa Majesté la Reine ni le Service correctionnel du Canada ne constituent des personnes morales qui exercent des activités commerciales. La pratique alléguée en l’espèce constitue une décision stratégique relative au fonctionnement du service de l’approvisionnement des détenus mis en place à l’établissement Fenbrook et non une activité commerciale. Pour ce motif, la Loi ne s’applique pas.

[11] Compte tenu de cette conclusion, la demande de permission sera rejetée relativement à Sa Majesté la Reine.

[12] J’examinerai maintenant la demande de permission relativement à Home Hardware. V. CRITÈRE RELATIF À LA DEMANDE DE PERMISSION [13] Le critère relatif à la demande de permission fondée sur l’article 77 de la Loi est énoncé comme suit au paragraphe 103.1(7) de ladite Loi :

103.1(7) Le Tribunal peut faire droit à une demande de permission de présenter une demande en vertu des articles 75 ou 77 s’il a des raisons de croire que l’auteur de la demande est directement et sensiblement gêné dans son entreprise en raison de l’existence de l’une ou l’autre des pratiques qui pourraient faire l’objet d’une ordonnance en vertu de ces articles.

[Non souligné dans l’original.] [14] Dans National Capital News Canada c. Milliken, 2002 Trib. conc. 41, le Tribunal a conclu que « la norme appropriée en vertu du paragraphe 103.1(7) consiste à se demander si la demande de permission est appuyée par des éléments de preuve crédibles suffisants pour qu’on puisse croire de bonne foi que le demandeur a pu être directement et sensiblement gêné dans son entreprise à cause d’une pratique susceptible d’examen et que cette pratique pourrait faire l’objet

province that is a corporation, in respect of commercial activities engaged in by the corporation in competition, whether actual or potential, with other persons to the extent that it would apply if the agent were not an agent of Her Majesty.

103.1(7) The Tribunal may grant leave to make an application under section 75 or 77 if it has reason to believe that the applicant is directly and substantially affected in the applicants’ business by any practice referred to in one of those sections that could be subject to an order under that section.

d’une ordonnance ». Ce critère a par la suite été adopté par la Cour d’appel fédérale dans Symbol Technologies Canada ULC. c. Barcode Systems Inc., 2004 CAF 339.

[15] Les éléments de la pratique commerciale susceptible d’examen doivent tous être considérés et les faits pertinents par rapport à ces éléments doivent être énoncés dans l’affidavit déposé à l’appui de la demande de permission. Voir Barcode, précité, au paragraphe 18.

[16] L’affidavit souscrit par le demandeur, le 27 août 2008, à l’appui de sa demande de permission ne fournit aucun élément de preuve établissant que le demandeur est directement et sensiblement gêné dans son entreprise par la pratique alléguée comme l’exige le paragraphe 103.1(7) de la Loi, ni aucun élément établissant que la pratique alléguée pourrait faire l’objet d’une ordonnance sous le régime du paragraphe 77(2) de la Loi. De plus, la pratique alléguée en l’espèce ne constitue pas une pratique d’exclusivité au sens du paragraphe 77(1) de la Loi puisqu’elle n’est pas le fruit de l’initiative du fournisseur. La preuve révèle que c’est le Service correctionnel du Canada qui a décidé de traiter exclusivement avec Home Hardware relativement à l’approvisionnement des détenus.

[17] Compte tenu de ces conclusions, la demande de permission sera également rejetée relativement à Home Hardware.

POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL ORDONNE CE QUI SUIT : [18] La demande de permission présentée à l’encontre des deux défenderesses est rejetée, et il est adjugé à la défenderesse, Sa Majesté la Reine, un montant de 100 $, qui devra lui être payé sans délai par chèque certifié.

FAIT à Ottawa, le 5 novembre 2008 SIGNÉ au nom du Tribunal par la présidente du Tribunal (s) Sandra J. Simpson

Traduction certifiée conforme Semra Denise Omer

AVOCATS : Pour le demandeur Steven Olah John L. Hill Pour les défenderesses Sa Majesté la Reine, représentée par le Service correctionnel Canada Matthew Sullivan Susan Keenan

Gravenhurst Home Hardware Non représentée

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