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Tribunal de la concurrence Competition Tribunal Référence : La commissaire de la concurrence c. La Brasserie Labatt Ltée et al., 2007 Trib. conc. 9 de dossier : CT-2007-003 de document du greffe : 0040

AFFAIRE INTÉRESSANT une demande de la commissaire de la concurrence en vue d’obtenir une ordonnance provisoire conformément à l’article 100 de la Loi sur la concurrence, L.R.C. 1985, ch. C-34, et ses modifications, et une enquête menée en vertu de l’alinéa 10(1)b) de la Loi sur la concurrence au sujet de l’acquisition proposée par La Brasserie Labatt Ltée de la totalité des parts en circulation de Lakeport Brewing Income Fund.

ENTRE : La commissaire de la concurrence (demanderesse)

et La Brasserie Labatt Limitée Lakeport Brewing Income Fund Lakeport Brewing Limited Partnership Roseto Inc. Teresa Cascioli (défenderesses)

Dates de l’audience : 20070326-20070327 Juge président : le juge Phelan Date des motifs : 30 mars 2007 Motifs signés par : le juge M. Phelan

MOTIFS DE L’ORDONNANCE DU 28 MARS 2007 PORTANT REJET DE LA DEMANDE DE LA COMMISSAIRE EN VUE D’OBTENIR UNE ORDONNANCE PROVISOIRE FONDÉE SUR L’ARTICLE 100

INTRODUCTION [1] Le 1 er février 2007, La Brasserie Labatt Limitée (Labatt) a présenté une offre d’acquisition de la totalité des parts en circulation de Lakeport Brewing Income Fund (Lakeport Fund). Labatt a produit la déclaration détaillée exigée le 12 février 2007.

[2] Le 15 février 2007, la commissaire a autorisé la tenue d’une enquête concernant l’acquisition proposée de Lakeport par Labatt. Le 22 mars 2007, la commissaire a produit une demande d’ordonnance provisoire conformément à l’article 100 de la Loi sur la concurrence, L.R.C. 1985, ch. C-34 (la Loi), afin d’interdire aux défenderesses de réaliser ou de prendre des mesures pour réaliser l’acquisition proposée par Labatt de la totalité des parts en circulation de Lakeport Fund. Le 28 mars 2007, j’ai rejeté la demande. Voici mes motifs à l’appui de cette décision.

I. LES PARTIES [3] Labatt est une société de régime fédéral contrôlée indirectement par InBev S.A./N.V., société ouverte basée à Louvain, en Belgique. Labatt est la deuxième brasserie en importance en Ontario et le troisième participant en importance sur le marché de la bière à bas prix.

[4] Lakeport Fund est une fiducie à capital variable et à but restreint qui n’est pas dotée de la personnalité morale et qui est constituée sous le régime des lois de l’Ontario. Lakeport Brewing Limited Partnership (Lakeport) est une société en commandite composée de Lakeport Brewing Income Fund, de Roseto Inc. et de Teresa Cascioli et constituée sous le régime des lois du Manitoba, en plus d’être une filiale indirecte de Lakeport Fund. Lakeport brasse neuf types de bières exclusives qui sont commercialisées à titre de bières moins chères que les autres marques. À l’heure actuelle, Lakeport détient une part de 12 p. 100 du marché de la vente de bière à bas prix pour emporter.

II. CONTEXTE [5] Le 1 er février 2007, Labatt a annoncé son intention d’acheter la totalité des parts en circulation de Lakeport Fund, qui possède une participation de 78 p. 100 dans Lakeport. M me Cascioli et Roseto Inc., qui détiennent la participation qui reste (22 p. 100), ont signé avec Labatt une entente par laquelle elles convenaient de convertir leur participation dans Lakeport en parts de Lakeport Fund. Le conseil d’administration de Lakeport Fund a recommandé à l’unanimité que les porteurs de parts acceptent l’offre de Labatt au prix de 28 $ par part. La clôture de l’acquisition par Labatt devait avoir lieu le 29 mars 2007.

[6] Le 12 février 2007, Labatt et Lakeport ont remis à la commissaire la déclaration détaillée exigée conformément à l’article 114 de la Loi et à l’article 17 du Règlement sur les transactions devant faire l’objet d’un avis, DORS/87-348, et ses modifications. Les défenderesses ont offert dès le départ d’être liées par une entente de séparation d’actifs d’une durée limitée, afin de préserver la distinction entre Lakeport et Labatt pendant un mois suivant la clôture de la

transaction. Selon cette entente, les actifs de Lakeport auraient été tenus séparément de ceux de Labatt, mais des représentants de celle-ci auraient pu être présents dans les établissements de Lakeport. La commissaire n’a pas accepté cette offre.

[7] Sur la foi des renseignements reçus ainsi que des renseignements recueillis au cours de l’examen récent d’autres fusionnements dans l’industrie de la bière, la commissaire a conclu qu’elle avait des raisons de croire à l’existence de motifs justifiant une ordonnance fondée sur l’article 92 de la Loi. En conséquence, elle a ouvert une enquête le 15 février 2007, conformément au sous-alinéa 10(1)b)(ii) de la Loi, dont voici le libellé :

10. (1) The Commissioner shall 10. (1) Le commissaire fait étudier, dans l’un ou l’autre des cas suivants, toutes questions qui, d’après lui,

... (b) whenever the Commissioner has reason to believe that

...

(ii) grounds exist for the making of an order under Part VII.1 or Part VIII, ...

cause an inquiry to be made into all such matters as the Commissioner considers necessary to inquire into with the view of determining the facts.

III. QUESTION EN LITIGE [8] La commissaire est d’avis qu’elle a besoin d’un délai supplémentaire pour achever l’enquête; en conséquence, elle a présenté une demande fondée sur l’article 100 de la Loi afin d’obtenir du Tribunal une ordonnance provisoire interdisant la réalisation du fusionnement jusqu’à la fin de son enquête.

IV. L’ARTICLE 100 A) Modifications apportées à la disposition [9] L’ancienne version et la version actuelle de l’article 100 sont jointes aux présents motifs à l’annexe A. Avant 1999, l’article 100 prévoyait qu’avant de rendre une ordonnance provisoire, le Tribunal devait conclure que le fusionnement proposé « aura vraisemblablement pour effet d’empêcher ou de diminuer sensiblement la concurrence ». Dès 1995, le Bureau avait proposé que le texte de cette disposition soit modifié de façon à lui accorder plus de temps pour mener son enquête avant de décider d’engager une demande fondée sur l’article 92 ou de permettre le

nécessitent une enquête en vue de déterminer les faits : ... b) chaque fois qu’il a des raisons de croire : ...

(ii) soit qu’il existe des motifs justifiant une ordonnance

en vertu des parties VII.1 ou VIII, ....

fusionnement. Un comité consultatif nommé par le ministre de l’Industrie de l’époque, l’honorable John Manley, a souligné dans son rapport final que « la Loi ne prévoit aucun mécanisme efficace pour empêcher la réalisation d’une transaction, à moins que le Bureau n’ait décidé de contester la transaction devant le Tribunal de la concurrence » (Rapport du comité consultatif sur la modification de la Loi sur la concurrence présenté au directeur des enquêtes et recherches le 6 mars 1996) et a recommandé que le libellé de l’article 100 soit modifié de façon à ne plus exiger que le Tribunal en arrive à la conclusion que le fusionnement proposé aura vraisemblablement pour effet d’empêcher ou de diminuer sensiblement la concurrence.

[10] Le législateur a modifié le délai supplémentaire que le commissaire peut obtenir, lequel est passé de 21 jours à 30 jours, et a prévu la possibilité pour celui-ci de demander une autre prorogation de 30 jours, « à cause de circonstances indépendantes de sa volonté ». La demande présentée en application de l’alinéa 100(1)a) doit désormais être précédée dans tous les cas d’un avis aux parties au fusionnement alors qu’auparavant, le Tribunal pouvait accorder l’autorisation sur présentation d’une demande ex parte.

[11] Malgré la modification du libellé de l’article 100 et la volonté apparente du législateur d’appuyer la recommandation du comité consultatif et de faciliter l’obtention par le commissaire d’un délai supplémentaire pour achever son enquête, le Tribunal doit encore conclure que son aptitude à remédier à l’influence du fusionnement proposé sur la concurrence serait « sensiblement » réduite en l’absence d’une ordonnance provisoire (la « question de la réduction de l'aptitude du Tribunal »).

B) Le critère à appliquer selon l’article 100 [12] Pour savoir s’il y a lieu de rendre une ordonnance interdisant tout geste qui pourrait tendre à la réalisation d’un fusionnement, le Tribunal doit appliquer le critère à deux volets suivant : 1) la question de savoir si une enquête est en cours et si le commissaire a besoin d’un délai supplémentaire pour l’achever et 2) la question de savoir si, en l’absence d’une ordonnance provisoire, l’aptitude du Tribunal à remédier à l’influence du fusionnement proposé sur la concurrence serait sensiblement réduite du fait de gestes des parties qui seraient alors difficiles à contrer.

[13] Le second critère est le critère important et difficile à établir. En résumé, il consiste à savoir si, en l’absence d’une ordonnance provisoire interdisant tout geste qui pourrait tendre à la réalisation ou à la mise en oeuvre du fusionnement, une personne posera vraisemblablement des gestes qui, parce qu’ils seraient alors difficile à contrer, auraient pour effet de réduire sensiblement l’aptitude du Tribunal à remédier à l’influence du fusionnement, si celui-ci est contesté.

C) La jurisprudence [14] La seule autre décision rendue en application de l’alinéa 100(1)a) l’exclusion des consentements) concernait une demande que le juge Rothstein (aujourd'hui juge à la Cour

suprême du Canada) a entendue en 1998, dans l’affaire Directeur des enquêtes et recherches c. Supérieur Propane et al (1998) CT-98/02, 6 décembre 1998, Motifs de l'ordonnance concernant la demande d'ordonnance provisoire en vertu de l'article 100 de la Loi sur la concurrence, [1998] D.T.C.C. no 20 (QL) (Trib. conc.), en vertu de la disposition en vigueur avant la modification. Le juge Rothstein a rejeté la demande, parce qu’il n’estimait pas que le fusionnement proposé aurait vraisemblablement pour effet d’empêcher ou de diminuer sensiblement la concurrence. Les motifs du rejet ne pourraient plus être invoqués aujourd’hui, en raison de la modification apportée au libellé de la disposition législative. Cependant, le juge Rothstein a également commenté le bien-fondé d’une entente de séparation d’actifs dans le contexte d’une demande fondée sur l’article 100. Il a mentionné dans une remarque incidente que, étant donné que l’entente en question serait une mesure pouvant tendre à la réalisation du fusionnement et que la seule ordonnance que le Tribunal pouvait rendre lorsqu’il était saisi d’une demande fondée sur l’article 100 (ce qui est encore le cas aujourd’hui) était une ordonnance interdisant tout geste qui pourrait tendre à la réalisation ou à la mise en oeuvre d’un fusionnement, le législateur n’avait pas accordé au Tribunal le pouvoir d’ordonner une entente de cette nature.

[15] Les décisions qui ont été rendues en application de l’article 104 et qui ont pour effet d’accorder une injonction une fois que le commissaire a déposé une demande sous le régime de la partie VIII ne s’appliquent pas vraiment à l’article 100, puisque le critère est différent et que les réparations disponibles sont plus étendues.

V. LA POSITION DES PARTIES A) La commissaire [16] Selon la commissaire, les deux premiers critères prévus à l’alinéa 100(1)a) sont manifestement établis. La commissaire a attesté qu’une enquête était en cours et que, à son avis, un délai supplémentaire était nécessaire pour l’achever. M. Peters, haut-fonctionnaire du Bureau de la concurrence, mentionne dans son affidavit qu’un délai supplémentaire de 30 jours est sollicité.

[17] M. Peters explique dans son affidavit que le Bureau considère ce fusionnement comme une opération très complexe dont l’examen nécessite habituellement une période de cinq mois. Dès que l’enquête a été lancée, la commissaire a demandé des ordonnances fondées sur l’article 11 en vue d’exiger la production de documents par différents intervenants du marché de la bière. Elle a encore besoin de temps pour analyser cette information afin de savoir si une demande fondée sur l’article 92 est justifiée.

[18] Selon les arguments formulés pour le compte de la commissaire à l’audience, l’opinion de celle-ci quant au délai nécessaire devrait, par analogie avec les normes de contrôle, appeler la plus grande retenue et ne devrait être mise en doute que si elle semble manifestement déraisonnable.

[19] La commissaire soutient que le dernier critère doit être compris comme la question de savoir si le geste envisagé par les parties serait « difficile à contrer », de sorte que l’aptitude du Tribunal à remédier à l’influence du fusionnement proposé sur la concurrence serait sensiblement réduite. Étant donné que la clôture de la transaction serait « difficile à contrer », la capacité du Tribunal serait sensiblement réduite. De plus, en permettant la réalisation du fusionnement, le Tribunal ne pourrait rendre d’ordonnances fondées sur l’alinéa 92(1)f) de la Loi, qui prévoit des réparations dans les cas le fusionnement n’a pas encore été réalisé, notamment une ordonnance interdisant la réalisation du fusionnement, total ou partiel.

LES DÉFENDERESSES [20] Les défenderesses soutiennent que la demande de la commissaire doit être rejetée pour deux raisons : elle n’a pas réussi à prouver que l’aptitude du Tribunal à remédier à l’influence du fusionnement sur la concurrence serait sensiblement réduite si le fusionnement était réalisé et, même s’il conclut que les conditions de l’alinéa 100(1)a) ont été établies, le Tribunal devrait, en l’occurrence, exercer son pouvoir discrétionnaire de façon à ne pas rendre l’ordonnance demandée.

[21] La première condition de la disposition législative est manifestement établie : les défenderesses ne contestent pas le fait que l’enquête est actuellement en cours. Cependant, en ce qui a trait à la deuxième condition, les défenderesses font valoir que l’avis de la commissaire n’est pas bien exprimé, étant donné que, dans sa demande d’ordonnance, la commissaire demande simplement que le fusionnement ne soit pas réalisé afin qu’elle ait le temps de terminer son enquête, sans préciser le délai nécessaire. Selon les défenderesses, la commissaire ne peut déléguer à un fonctionnaire du Bureau la responsabilité liée à la communication du délai nécessaire.

[22] Les principaux arguments des défenderesses concernent le troisième critère, soit la diminution sensible de l’aptitude du Tribunal à remédier à l’effet du fusionnement proposé sur la concurrence. Les défenderesses soutiennent essentiellement qu’aucun élément ne montre que le fusionnement réduirait sensiblement l’aptitude du Tribunal à ordonner la dissolution ou le dessaisissement, étant donné, surtout, qu’elles ont proposé de respecter une entente de séparation d’actifs semblable à celles que le Tribunal a appuyées dans le passé.

[23] Les défenderesses ajoutent que le Tribunal devrait exercer son pouvoir discrétionnaire et s’abstenir de rendre l’ordonnance, pour deux raisons : la commissaire a eu amplement le temps de déterminer si la présentation d’une demande fondée sur l’article 92 était justifiée, compte tenu des enquêtes antérieures menées au sujet du marché de la bière, et la commissaire a refusé, sans tenter de négocier, la réparation provisoire que les défenderesses offraient, soit l’entente de séparation d’actifs.

ANALYSE [24] Il s’agit de la première demande fondée sur le texte modifié de l’article 100. La distinction majeure réside dans le fait que le Tribunal n’est plus tenu de conclure que « le fusionnement proposé aura vraisemblablement pour effet d’empêcher ou de diminuer sensiblement la concurrence » dans le cadre de son analyse. Il importe de conserver cette distinction à l’esprit au moment d’examiner la décision que le juge Rothstein a rendue dans l’affaire Supérieur Propane.

[25] Malgré l’élimination de l’obligation d’examiner un empêchement ou une diminution sensible de la concurrence, l’article 100 conserve certains vestiges de cette condition, étant donné qu’il exige que le Tribunal examine son aptitude à remédier à l’influence d’un fusionnement sur la concurrence.

[26] Lors de l’examen de l’article 100, il faut tenir compte des articles 92 et 104, qui concernent le contrôle des fusionnements proposés et réalisés.

[27] Il importe également de se rappeler l’évolution législative de l’article 100. Plus précisément, lorsque le juge Rothstein a rendu sa décision, la Loi sur la concurrence accordait au commissaire (alors le directeur des enquêtes et recherches) un délai de 21 jours pour examiner un fusionnement avant que les parties puissent clore la transaction, sous réserve d’une ordonnance du Tribunal. Tel qu’il est mentionné plus haut, le Tribunal devait également conclure que le fusionnement proposé aurait vraisemblablement pour effet d’empêcher ou de diminuer sensiblement la concurrence. Les nouvelles dispositions de la Loi (article 123) accordent au commissaire un délai de 42 jours pour examiner le fusionnement en cause et éliminent l’exigence relative à la conclusion susmentionnée (article 100).

[28] Bien que ces changements donnent à penser qu’une demande fondée sur l’alinéa 100(1)a) serait désormais une procédure plus facile, ils ont également créé une attente accrue qu’un délai de 42 jours devrait suffire pour l’examen d’un fusionnement.

[29] Toutefois, malgré la suggestion selon laquelle il devrait être plus facile de freiner temporairement un fusionnement proposé, le législateur a conservé l’obligation importante pour le commissaire de prouver que l’aptitude du Tribunal à remédier à l’influence du fusionnement proposé sur la concurrence serait sensiblement réduite si le fusionnement en question (ou un autre geste) était difficile à contrer. Le mot « geste » n’est pas défini; cependant, dans la présente affaire, il s’agit de la clôture de l’achat des parts de Lakeport Fund. Il semble donc que le législateur n’avait pas l’intention de faire de l’obtention de cette ordonnance une procédure relativement simple dont le succès reposerait principalement sur le fait que le commissaire a besoin de plus de temps pour examiner le fusionnement.

[30] L’alinéa 100(1)a) ne couvre pas seulement la clôture d’une transaction. Il engloberait également tout geste « préalable à la clôture » qui causerait le préjudice visé par la disposition, soit la réduction sensible de l’aptitude du Tribunal à remédier à l’influence du fusionnement.

[31] La demande fondée sur l’alinéa 100(1)a) comporte plusieurs éléments, et ils ne sont pas les mêmes que ceux de la demande présentée sous le régime de l’article 104. Ces éléments sont les suivants : [i] un geste qui pourrait constituer la réalisation ou la mise en oeuvre du fusionnement proposé, ou y tendre, lequel fusionnement n’est pas contesté à cette date; [ii] l’attestation par la commissaire de la tenue de l’enquête prévue à l’alinéa 10(1)b); [iii] l’avis de la commissaire selon lequel un délai supplémentaire est nécessaire pour achever l’enquête; [iv] la conclusion du Tribunal selon laquelle, en l’absence d’une ordonnance provisoire, des gestes qui, parce qu’ils seraient alors difficiles à contrer, auraient pour effet de réduire sensiblement son aptitude à remédier à l’influence du fusionnement proposé sur la concurrence; [v] le pouvoir discrétionnaire résiduel du Tribunal de rendre une ordonnance. Gestes préalables au fusionnement/demande fondée sur l’article 92 - enquête [32] Bien que l’alinéa 100(1)a) couvre peut-être plus de gestes que la réalisation d’un fusionnement, le seul geste en cause en l’espèce est la clôture de l’opération visant à acquérir les parts de Lakeport Fund. De plus, il est évident qu’aucune demande fondée sur l’article 92 n’a été présentée.

[33] La nature inhabituelle d’une demande fondée sur l’alinéa 100(1)a) ressort du fait que la demande vise à empêcher la clôture d’une transaction sans que le Tribunal ait conclu qu’une diminution sensible de la concurrence est probable (comme c’était le cas en vertu de la disposition précédente) et avant que la commissaire ait déposé d’actes de procédure ou tiré de conclusions au sujet de la transaction, si ce n’est qu’elle a des raisons de croire qu’il existe des motifs justifiant une ordonnance en vertu de l’article 92.

[34] Comme le montrent clairement les renseignements confidentiels qui ont mené à l’ouverture d’une enquête, la commissaire a examiné cette industrie au moins jusqu’à la fin de 2006 et a en main des éléments de preuve sur la structure du marché, sur le fonctionnement de celui-ci, sur ses caractéristiques et sur ses participants.

[35] En tout état de cause, la commissaire respecte le seuil initial relativement bas qui s’applique à la présentation d’une demande fondée sur l’alinéa 100(1)a). L’enquête a débuté et il est évident qu’elle se poursuit.

L’avis de la commissaire [36] La commissaire a attesté la nécessité d’obtenir un délai supplémentaire pour achever l’enquête. Les détails de l’enquête et l’avis quant à la nécessité d’un délai supplémentaire sont explicités dans le témoignage du haut-fonctionnaire responsable du déroulement quotidien de l’enquête.

[37] Je n’accepte pas l’argument des défenderesses selon lequel la commissaire elle-même doit préciser le délai dont elle croit avoir besoin pour achever l’enquête. Le texte de la disposition législative n’exige pas ce degré de précision. L’affidavit d’un haut-fonctionnaire qui est au courant de l’affaire suffit aux fins de la communication du délai exact nécessaire.

[38] En ce qui a trait à la contestation liée au délai demandé et à l’efficience de l’enquête, les défenderesses font valoir que le Tribunal ne devrait pas accepter la preuve de la commissaire. Il ne s’agit pas d’un contrôle judiciaire et la question de la norme de contrôle a une application limitée. À mon avis, le Tribunal n’est pas en mesure, à la lumière de cette preuve, de conclure que l’opinion de la commissaire est dénuée de tout fondement. Il n’y a aucune façon pour le Tribunal, dans ce type de demande, d’examiner en profondeur la façon dont la commissaire a mené l’enquête, les ressources affectées à celle-ci et les facteurs d’ordre budgétaire pouvant entrer en ligne de compte.

[39] Les défenderesses sont frustrées par la lenteur de l’enquête, ce qui est compréhensible, compte tenu des procédures précédentes entre le Bureau et Labatt ainsi que de l’intervention antérieure et récente de la commissaire dans cette industrie. Cependant, la connaissance de la commissaire est davantage pertinente en ce qui concerne la question de la réduction de l'aptitude du Tribunal, qui est commentée plus loin dans les présents motifs.

Le fusionnement proposé [40] Selon l’avis unanime des parties, auquel je souscris, pour analyser cette disposition législative et la question de la réduction de l’aptitude du Tribunal, il faut procéder comme si le fusionnement proposé avait été réalisé. Un fusionnement proposé (du moins dans la présente affaire) ne crée pas en soi d’effet sur la concurrence. Il y a un effet sur la concurrence une fois que le fusionnement proposé est réalisé.

Remédier à l’influence sur la concurrence réduction de l'aptitude [41] La métaphore des « oeufs brouillés », qui renvoie essentiellement à l’impossibilité de rétablir les conditions du marché qui existaient avant la clôture de la transaction, a été évoquée à plusieurs reprises au cours des plaidoiries, comme si cette mesure relevait de la compétence du Tribunal. La commissaire soutient que l’aptitude du Tribunal à remédier à l’influence sur la concurrence est sensiblement réduite, parce que la clôture a pour effet de retirer de l’arsenal de réparations que le Tribunal peut accorder le pouvoir d’ordonner à une personne de ne pas procéder au fusionnement ainsi que toute autre réparation prévue à l’alinéa 92(1)f).

[42] En ce qui concerne le rétablissement des conditions qui existaient avant le fusionnement, dans l’arrêt Directeur des enquêtes et recherches c. Supérieur Propane et al, [2000] A.C.F. 1518 (C.A.), le juge Linden s’est demandé, dans le contexte d’une demande fondée sur l’article 104, jusqu’à quel point l’analogie avec les « oeufs brouillés » pouvait s’appliquer et a décidé que la situation d’une société fusionnée n’était pas tout à fait la même que celle des oeufs brouillés. Un fusionnement peut être annulé et la concurrence peut être rétablie, malgré les difficultés et inconvénients que cette mesure occasionnerait.

[43] Au moment d’examiner l’aptitude du Tribunal à remédier à l’influence du fusionnement, il importe de tenir compte des limites touchant le pouvoir du Tribunal de rétablir les conditions qui existaient avant le fusionnement. Dans l’arrêt Directeur des enquêtes et recherches c. Southam, [1997] 1 R.C.S. 748, aux pages 789 et 790, la Cour suprême du Canada a explicitement rejeté l’idée d’un rétablissement à la situation concurrentielle qui existait avant le fusionnement, lequel concept est un critère appliqué dans les affaires antitrust américaines. La norme consiste à « rétablir la concurrence de façon qu’il ne soit plus possible de dire qu’elle est sensiblement inférieure à ce qu’elle était avant le fusionnement », soit à rétablir la situation de façon à ce que la prévention ou la diminution sensible de la concurrence prenne fin.

[44] C’est au regard de ce critère que le Tribunal doit chercher à savoir si la clôture du fusionnement réduirait sensiblement son aptitude à remédier à l’influence de celui-ci.

[45] Quant à l’argument de la commissaire selon lequel, en permettant la clôture du fusionnement, le Tribunal perd son pouvoir d’ordonner la cessation de la mise en oeuvre du fusionnement proposé, ce qui constitue une réduction sensible, cet argument comporte au moins deux difficultés.

[46] D’abord, sous réserve des simples conditions préalables de l’existence d’une enquête et de la conviction de la nécessité d’un délai supplémentaire, une demande fondée sur l’alinéa 100(1)a) serait pour ainsi dire automatique parce que, sans ordonnance, les parties peuvent clore la transaction, ce qui empêchera éventuellement l’application de l’alinéa 92(1)f). Cette interprétation rendrait inutile l’examen du critère plus onéreux de la « réduction de l'aptitude du Tribunal » qui est prévu à l’alinéa 100(1)a). Si le législateur avait vraiment souhaité pareil résultat, il aurait modifié le texte de l’alinéa 100(1)a) de façon à éliminer l’examen de la réduction de l’aptitude à remédier à l’effet du fusionnement de façon conforme au critère fixé par la Cour suprême du Canada.

[47] La deuxième difficulté est liée à la première : selon le raisonnement invoqué pour mettre un frein à un fusionnement proposé, la dissolution et le dessaisissement après celui-ci ne permettraient pas de remédier efficacement à la diminution sensible de la concurrence. La position de la commissaire ne tient pas compte de la question de savoir si la clôture réduirait sensiblement l’aptitude du Tribunal à remédier à la diminution sensible de la concurrence. Cet élément de l’alinéa 100(1)a) met l’accent sur l’aptitude à remédier et non sur la disponibilité d’une réparation donnée.

[48] La commissaire doit prouver que la réduction de l’aptitude du Tribunal à remédier à l’influence du fusionnement est importante. La nature et le degré de la preuve seront dictés par les circonstances de l’affaire, mais il ne suffit pas de dire que les conditions qui existaient avant le fusionnement ne peuvent être rétablies ou compensées. La commissaire doit prouver qu’en l’absence d’une ordonnance, les réparations que le Tribunal peut accorder après le fusionnement ne permettraient pas d’éliminer la diminution sensible de la concurrence.

[49] Eu égard à la preuve dont je suis saisi, je ne suis pas convaincu que la commissaire s’est acquittée de ce fardeau. Une bonne partie de la preuve présentée au Tribunal portait sur la question de savoir si l’entente de séparation d’actifs proposée par les défenderesses était appropriée ou adéquate. Pour les raisons expliquées plus loin, il faut évaluer le fusionnement au regard de l’alinéa 100(1)a) sans tenir compte de cette entente à laquelle la commissaire refuse de participer, alors que cette participation est essentielle.

[50] M. Nelson, le principal témoin expert de la commissaire sur les questions liées aux incidences des fusionnements, a soulevé un certain nombre de questions concernant la concurrence, mais il a toutefois commenté ces questions sous l’angle des règles de droit américaines, qui visent à rétablir la concurrence aux conditions qui existaient avant le fusionnement.

[51] En réponse aux questions qu’il a posées au sujet du témoignage de M. Nelson concernant l’influence du fusionnement (en l’absence d’une entente de séparation d’actifs) et de la réduction de l’aptitude du Tribunal à remédier à cette influence, le Tribunal a été invité à lire le paragraphe 44 du rapport de ce témoin, celui-ci a conclu que le Tribunal ne pourrait ordonner le paiement d’une indemnité au consommateur qui paierait un prix plus élevé pour la bière après la clôture. Cependant, cette conclusion repose sur l’application du critère juridique américain, et non de celui que la Cour suprême du Canada a articulé. Il appert manifestement de l’ensemble du rapport du D r Nelson que les conclusions de celui-ci sont fondées sur le rétablissement des conditions qui existaient avant le fusionnement; même ses dernières remarques concernant le dessaisissement reposent sur le même critère.

[52] Le Tribunal sait pertinemment que la commissaire a étudié cette industrie récemment et pendant une période prolongée. La commissaire a eu plus de 40 jours pour revoir la transaction en cause aujourd’hui; pourtant, la preuve présentée au sujet de la structure et des conditions du marché ne permet pas en soi d’établir la réduction de l’aptitude du Tribunal à remédier à l’influence du fusionnement conformément aux exigences juridiques canadiennes.

[53] La contre-preuve que les défenderesses ont présentée concernait principalement la transaction qu’elles étaient disposées à accepter, c’est-à-dire la transaction assortie d’une entente de séparation d’actifs. Les défenderesses ne s’attardent pas vraiment à la question de la réduction de l'aptitude du Tribunal en l’absence d’une entente de séparation d’actifs, mais ce fardeau ne leur incombait pas; il appartenait à la commissaire.

Gestes difficiles à contrer/entente de séparation d’actifs [54] La demanderesse soutient que le fusionnement est difficile à contrer. Les défenderesses affirment le contraire, parce qu’elles concluraient une entente de séparation d’actifs et s’engageraient envers le Tribunal à en respecter les conditions. Une preuve abondante a été

présentée au sujet des avantages et inconvénients de ce type d’entente. Une bonne partie de la preuve de la commissaire concernait le caractère inadéquat de ce type d’entente et la facilité avec laquelle ses conditions pouvaient être violées. En ce qui a trait au risque de violation de l’entente, en l’absence d’éléments de preuve montrant que Labatt ne se conformera vraisemblablement pas à l’entente, le Tribunal ne peut supposer que l’entente ne serait pas respectée et il peut également infliger des sanctions en cas de violation.

[55] En général, il n’appartient pas au Tribunal de contraindre la commissaire à conclure des ententes. Le Tribunal peut simplement examiner les faits tels qu’ils sont vraiment et non comme une partie aimerait qu’ils soient.

[56] L’entente de séparation d’actifs aurait apparemment été calquée sur celle qui a été invoquée dans l’affaire Supérieur Propane, les défenderesses soutenant qu’il était déraisonnable de la part de la commissaire de refuser de la conclure.

[57] L’entente de séparation d’actifs dépend en grande partie de la participation active de la commissaire; en fait, elle ne peut fonctionner sans cette participation. D’autres types d’accords, comme les accords de maintien du statu quo, qui ne dépendent pas de la participation de la commissaire, seraient peut-être moins problématiques, mais l’entente de séparation d’actifs ne peut fonctionner lorsqu’un participant demeure récalcitrant. Même si le Tribunal pouvait, en vertu de son pouvoir d’imposer des conditions, obliger la commissaire à conclure l’entente de séparation d’actifs, je ne le ferais pas, parce que ce serait une situation intenable.

[58] La commissaire a peut-être des raisons politiques valables de ne pas conclure l’entente de séparation d’actifs; cependant, si méritoire que soit sa politique, elle entraîne la conséquence suivante : la transaction en cause devient difficile à contrer, mais pas nécessairement difficile à corriger.

[59] En ce qui a trait à l’argument selon lequel la transaction serait « difficile à contrer », voici les extraits pertinents de l’alinéa 100(1)a) :

... the Tribunal finds that in the absence of an ... il conclut qu’une personne, partie ou non au interim order a party to the proposed merger or any fusionnement proposé, posera vraisemblablement, other person is likely to take an action that would en l’absence d’une ordonnance provisoire, des substantially impair the ability of the Tribunal to gestes qui, parce qu’ils seraient alors difficiles à remedy the effect of the proposed merger on contrer, auraient pour effet de réduire sensiblement competition under that section because that action l’aptitude du Tribunal à remédier à l’influence du would be difficult to reverse; [...] fusionnement proposé sur la concurrence, si celui-ci devait éventuellement appliquer cet article à l’égard de ce fusionnement; [...]

[60] Les mots « parce qu’ils seraient alors difficiles à contrer » se prêtent à deux interprétations possibles. Selon la première, la réduction sensible de l’aptitude du Tribunal à remédier à l’influence du fusionnement réside dans le fait que le geste est difficile à contrer.

Lorsqu’un geste est difficile à contrer, l’aptitude du Tribunal à y remédier est sensiblement réduite. Selon la seconde interprétation, l’aptitude du Tribunal à remédier à l’influence du fusionnement est réduite parce que le Tribunal ne peut plus imposer une certaine réparation du fait que le geste qui a été autorisé sera certainement difficile à contrer, et ce geste était suffisamment important pour avoir un effet sensible sur la réparation. En d’autres termes, la réparation est liée à ce geste. Si la réparation consiste à vendre un élément d’actif et que celui-ci n’existe plus, l’aptitude du Tribunal à remédier à l’influence du fusionnement sera sensiblement réduite.

[61] La version française de la disposition législative ajoute un certain degré de confusion. Elle énonce clairement qu’en l’absence d’une ordonnance provisoire, une partie pourrait poser des gestes qui, parce qu’ils seraient alors difficiles à contrer, auraient pour effet de réduire sensiblement l’aptitude du Tribunal à remédier à l’influence du fusionnement sur la concurrence. Or, dans la version anglaise, ce sont les mots « difficult to reverse » qui sont employés. Le mot « contrer » n’a pas le sens de « reverse ». Il s’entend plutôt de l’action d’une force opposée pour corriger une situation. Cette version appuierait la seconde interprétation et est compatible avec les réparations que le Tribunal peut accorder pour contrer une diminution sensible de la concurrence. La question n’est pas de savoir si le geste peut être inversé, mais plutôt s’il peut être contré. Encore là, il faut se demander si la réparation est réduite plutôt que s’interroger strictement sur le caractère réversible du geste.

[62] Des deux interprétations, la seconde est préférable, car la première mène à un résultat absurde. Il serait possible en effet de soutenir que les gestes sont toujours difficiles à inverser (l’analogie avec les oeufs brouillés), de sorte que l’aptitude du Tribunal serait sensiblement réduite dans tous les cas, si bien que le critère serait inutile. Selon la seconde interprétation, l’importance du geste réside dans l’élément qui explique qu’il soit difficile à inverser : le Tribunal est privé de la possibilité d’accorder une réparation significative parce que le geste est perçu comme un geste difficile à inverser.

[63] La commissaire a soutenu que, si les parties sont autorisées à aller de l’avant avec l’acquisition, le Tribunal se privera de la possibilité ultérieure, dans le cadre d’une demande fondée sur l’article 92, d’ordonner aux parties de ne pas fusionner. Toutefois, la commissaire n’a pas prouvé en quoi l’absence de cette réparation réduirait sensiblement l’aptitude du Tribunal à remédier à l’influence du fusionnement sur la concurrence, si un empêchement ou une diminution sensible de celle-ci était établi. En d’autres termes, la commissaire n’a pas prouvé que l’acquisition empêchait le Tribunal d’accorder des réparations qui pourraient être suffisantes pour remédier à la diminution sensible de la concurrence et que l’aptitude du Tribunal était sensiblement réduite par la perte de la possibilité d’interdire le fusionnement.

Le pouvoir discrétionnaire [64] Dans l’affaire Supérieur Propane, le juge Rothstein a fait allusion, dans le cadre de l’examen de l’alinéa 100(1)a), à la compétence extraordinaire (et non ordinaire, contrairement à ce qui est mentionné dans certains recueils de jurisprudence) du commissaire (directeur) de solliciter cette réparation et a décidé que, même si le commissaire avait établi le critère relatif à l’application de l’alinéa 100(1)a), le Tribunal pourrait encore refuser la demande.

[65] L’exercice de ce pouvoir discrétionnaire ne se pose pas en l’espèce, parce que la commissaire n’a pas établi les conditions de l’alinéa 100(1)a). Compte tenu de la conclusion du Tribunal, il n’est pas nécessaire d’examiner plus à fond cette question du pouvoir discrétionnaire.

CONCLUSION [66] Pour les motifs exposés ci-dessus, le Tribunal a rejeté la demande de la commissaire. FAIT à Ottawa, le 30 mars 2007. SIGNÉ au nom du Tribunal par le juge président. (s) Michael L. Phelan Traduction certifiée conforme Thanh-Tram Dang, B.C.L., LL.B

ANNEXE A [67] Version actuelle de l’article 100 : Loi sur la concurrence, L.R. ch. 19 (2 e suppl.) art. 45, modifié par L.C. 1999, ch. 2, art. 24.

100. (1) The Tribunal may issue an interim order forbidding any person named in the application from doing any act or thing that it appears to the Tribunal may constitute or be directed toward the completion or implementation of a proposed merger in respect of which an application has not been made under section 92 or previously under this section, where (a) on application by the Commissioner, certifying that an inquiry is being made under paragraph 10(1)(b) and that, in the Commissioner’s opinion, more time is required to complete the inquiry, the Tribunal finds that in the absence of an interim order a party to the proposed merger or any other person is likely to take an action that would substantially impair the ability of the Tribunal to remedy the effect of the proposed merger on competition under that section because that action would be difficult to reverse; or (b) the Tribunal finds, on application by the Commissioner, that there has been a contravention of section 114 in respect of the proposed merger. (2) Subject to subsection (3), at least forty-eight hours notice of an application for an interim order under subsection (1) shall be given by or on behalf of the Commissioner to each person against whom the order is sought.

(3) Where the Tribunal is satisfied, in respect of an application for an interim order under paragraph (1)(b), that (a) subsection (2) cannot reasonably be complied with, or (b) the urgency of the situation is such that service of notice in accordance with subsection (2) would not be in the public interest, it may proceed with the application ex parte. (4) An interim order issued under subsection (1) (a) shall be on such terms as the Tribunal considers necessary and sufficient to meet the circumstances of the case; and

100. (1) Le Tribunal peut rendre une ordonnance provisoire interdisant à toute personne nommée dans la demande de poser tout geste qui, de l’avis du Tribunal, pourrait constituer la réalisation ou la mise en oeuvre du fusionnement proposé, ou y tendre, relativement auquel il n’y a pas eu de demande aux termes de l’article 92 ou antérieurement aux termes du présent article, si : a) à la demande du commissaire comportant une attestation de la tenue de l’enquête prévue à l’alinéa 10(1)b) et de la nécessité, selon celui-ci, d’un délai supplémentaire pour l’achever, il conclut qu’une personne, partie ou non au fusionnement proposé, posera vraisemblablement, en l’absence d’une ordonnance provisoire, des gestes qui, parce qu’ils seraient alors difficiles à contrer, auraient pour effet de réduire sensiblement l’aptitude du Tribunal à remédier à l’influence du fusionnement proposé sur la concurrence, si celui-ci devait éventuellement appliquer cet article à l’égard de ce fusionnement; b) à la demande du commissaire, il conclut qu’il y a eu contravention de l’article 114 à l’égard du fusionnement proposé. (2) Sous réserve du paragraphe (3), le commissaire, ou une personne agissant au nom de celui-ci, donne à chaque personne à l’égard de laquelle il entend demander une ordonnance provisoire aux termes du paragraphe (1) un avis d’au moins quarante-huit heures relativement à cette demande.

(3) Si, lors d’une demande d’ordonnance provisoire présentée en vertu de l’alinéa (1)b), le Tribunal est convaincu : a) qu’en toute raison, le paragraphe (2) ne peut pas être observé; b) que la situation est à ce point urgente que la signification de l’avis aux termes du paragraphe (2) ne servirait pas l’intérêt public, il peut entendre la demande ex parte. (4) Une ordonnance provisoire rendue aux termes du paragraphe (1) : a) prévoit ce qui, de l’avis du Tribunal, est nécessaire et suffisant pour parer aux circonstances de l’affaire;

(b) subject to subsections (5) and (6), shall have effect for such period of time as is specified in it. (5) The duration of an interim order issued under paragraph (1)(a) shall not exceed thirty days. (6) The duration of an interim order issued under paragraph (1)(b) shall not exceed (a) ten days after section 114 is complied with, in the case of an interim order issued on ex parte application; or (b) thirty days after section 114 is complied with, in any other case.

(7) Where the Tribunal finds, on application made by the Commissioner on forty-eight hours notice to each person to whom an interim order is directed, that the Commissioner is unable to complete an inquiry within the period specified in the order because of circumstances beyond the control of the Commissioner, the Tribunal may extend the duration of the order to a day not more than sixty days after the order takes effect.

(8) Where an interim order is issued under paragraph (1)(a), the Commissioner shall proceed as expeditiously as possible to complete the inquiry under section 10 in respect of the proposed merger. [68] Version antérieure de l’article 100 : Loi sur la concurrence, L.R., 1985, ch. 19 (2 e suppl.), art. 45. 100. (1) Where, on application by the Director, the Tribunal finds, in respect of a proposed merger in respect of which an application has not been made under section 92 or previously under this section, that (a) the proposed merger is reasonably likely to prevent or lessen competition substantially and, in the opinion of the Tribunal, in the absence of an interim order a party to the proposed merger or any other person is likely to take an action that would substantially impair the ability of the Tribunal to remedy the effect of the proposed merger on competition under section 92 because that action would be difficult to reverse, or (b) there has been a failure to comply with section 114 in l’influence du fusionnement proposé sur la concurrence,

b) sous réserve des paragraphes (5) et (6), a effet pour la période qui y est spécifiée. (5) La durée d’une ordonnance provisoire rendue en application de l’alinéa (1)a) ne peut dépasser trente jours. (6) La durée d’une ordonnance provisoire rendue en application de l’alinéa(1)b) ne peut dépasser : a) dans le cas d’une ordonnance provisoire rendue dans le cadre d’une demande ex parte, dix jours à compter du moment les exigences de l’article 114 ont été respectées; b) dans les autres cas, trente jours à compter du moment les exigences de l’article 114 ont été respectées.

(7) Lorsque le Tribunal conclut, sur demande présentée par le commissaire après avoir donné un avis de quarante-huit heures à chaque personne visée par l’ordonnance provisoire, que celui-ci est incapable, à cause de circonstances indépendantes de sa volonté, d’achever une enquête dans le délai prévu par l’ordonnance, il peut la proroger; la durée d’application maximale de l’ordonnance ainsi prorogée est de soixante jours à compter de sa prise d’effet.

(8) Dans le cas une ordonnance provisoire est rendue en vertu de l’alinéa (1)a), le commissaire est tenu d’achever l’enquête prévue à l’article 10 avec toute la diligence possible. 100. (1) Dans les cas où, à la suite d’une demande du directeur, le Tribunal conclut, à l’égard d’un fusionnement proposé relativement auquel il n’y a pas eu de demande aux termes de l’article 92 ou antérieurement aux termes du présent article : a) soit que le fusionnement proposé, en toute raison, aura vraisemblablement pour effet d’empêcher ou de diminuer sensiblement la concurrence et que, à son avis, en l’absence d’une ordonnance provisoire une personne, partie ou non au fusionnement proposé, posera vraisemblablement des gestes qui, parce qu’ils seraient alors difficiles à contrer, auraient pour effet de réduire sensiblement l’aptitude du Tribunal à remédier à

respect of the proposed merger, the Tribunal may issue an interim order forbidding any person named in the application from doing any act or thing that it appears to the Tribunal may constitute or be directed toward the completion or implementation of the proposed merger.

(2) Subject to subsection (3), at least forty-eight hours notice of an application for an interim order under subsection (1) shall be given by or on behalf of the Director to each person against whom the order is sought.

(3) Where the Tribunal is satisfied, in respect of an application made under subsection (1), that (a) subsection (2) cannot reasonably be complied with, or (b) the urgency of the situation is such that service of notice in accordance with subsection (2) would not be in the public interest, it may proceed with the application ex parte. (4) An interim order issued under subsection (1) (a) shall be on such terms as the Tribunal considers necessary and sufficient to meet the circumstances of the case; and (b) subject to subsection (5), shall have effect for such period of time as is specified therein. (5) An interim order issued under subsection (1) in respect of a proposed merger shall cease to have effect (a) in the case of an interim order issued on ex parte application, not later than ten days, or (b) in any other case, not later than twenty-one days, after the interim order comes into effect or, in the circumstances referred to in paragraph (1)(b), after section 114 is complied with.

(6) Where an interim order is issued under paragraph (1)(a), the Director shall proceed as expeditiously as possible to commence and complete proceedings under section 92 in respect of the proposed merger.

si celui-ci devait éventuellement appliquer l’article 92 à l’égard du fusionnement proposé ; b) soit qu’il y a eu manquement à l’article 114 à l’égard du fusionnement proposé, le Tribunal peut rendre une ordonnance provisoire interdisant à toute personne nommée dans la demande de poser tout geste qui, de l’avis du Tribunal, constituerait ou tendrait à la réalisation du fusionnement proposé ou à sa mise en œuvre.

(2) Sous réserve du paragraphe (3), le directeur, ou une personne agissant au nom de celui-ci, donne à chaque personne à l’égard de laquelle il entend demander une ordonnance provisoire aux termes du paragraphe (1) un avis d’au moins quarante-huit heures relativement à cette demande.

(3) Si, lors d’une demande présentée en vertu du paragraphe (1), le Tribunal est convaincu : a) qu’en toute raison, le paragraphe (2) ne peut pas être observé; b) que la situation est à ce point urgente que la signification de l’avis aux termes du paragraphe (2) ne servirait pas l’intérêt public, il peut entendre la demande ex parte. (4) Une ordonnance provisoire rendue aux termes du paragraphe (1) : a) prévoit ce qui, de l’avis du Tribunal, est nécessaire et suffisant pour parer aux circonstances de l’affaire ; b) sous réserve du paragraphe (5), a effet pour la période qui y est spécifiée. (5) Une ordonnance provisoire rendue en application du paragraphe (1) à l’égard d’un fusionnement proposé cesse d’avoir effet : a) dans le cas d’une ordonnance provisoire rendue dans le cadre d’une demande ex parte, au plus tard dix jours ; b) dans les autres cas, au plus tard vingt et un jours, après la prise d’effet de l’ordonnance provisoire ou dans les circonstances prévues à l’alinéa (1) b), à compter du moment les exigences de l’article 114 ont été rencontrées.

(6) Lorsqu’une ordonnance provisoire est rendue en vertu de l’alinéa (1) a), le directeur doit, avec toute la diligence possible, intenter et mener à terme les procédures visées à l’article 92 à l’égard du fusionnement proposé.

AVOCATS Pour la demanderesse : La commissaire de la concurrence : Finlay, Bryan Miller, William J. latrou, Nikiforos Levine, Robert Vermette, Marie-Andrée

Pour les défenderesses : La Brasserie Labatt Limitée : Finkelstein, Neil R Facey, Brian A. Beagan Flood, Catherine Wood, Micah V.

Lakeport Brewing Income Fund, Lakeport Brewing Limited Partnership, Teresa Cascioli et Roseto Inc.:

Kay, Katherine L. Neylan, Shawn C.D. Kilby, Michael D.

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