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Competition Tribunal Tribunal de la concurrence Référence : Commissaire de la concurrence c Fabutan Corporation, 2005 Trib conc 45 o N de dossier : CT-2005-003 o N de document du greffe : 38 AFFAIRE CONCERNANT la Loi sur la concurrence, LRC 1985, c C-34; ET AFFAIRE CONCERNANT une enquête menée aux termes du sous-alinéa 10(1)b)(ii) de la Loi sur la concurrence relative aux pratiques commerciales de Dosco Group Inc, Fabutan Corporation, Fabutan Studios et Douglas Scott McNabb, président, faisant affaire sous le nom de Fabutan Sun Tan Studios;

ET AFFAIRE CONCERNANT une demande d’ordonnance présentée par la commissaire de la concurrence en vertu de l’article 74.01 de la Loi sur la concurrence.

ENTRE : La commissaire de la concurrence (demanderesse)

et Dosco Group Inc, Fabutan Corporation, Fabutan Studios et Douglas Scott McNabb, président, faisant affaire sous le nom de Fabutan Sun Tan Studios (défendeurs)

Date de l’audience : Le 25 novembre 2005 Devant la membre judiciaire présidant l’audience : Madame la juge Dawson Date des motifs : Le 2 décembre 2005 Motifs signés par : Madame la juge Eleanor Dawson

MOTIFS DE L’ORDONNANCE REJETANT LA REQUÊTE EN AUTORISATION D’ÊTRE REPRÉSENTÉES PAR UN DIRIGEANT

[1] Le vendredi 25 novembre 2005, le Tribunal de la concurrence (le « Tribunal ») a entendu les arguments relatifs à la requête présentée au nom des défenderesses autres que monsieur McNabb (les « personnes morales défenderesses ») sollicitant l’autorisation d’être représentées par leur dirigeant, à savoir monsieur McNabb, plutôt que par un avocat. Plus tard ce jour-là, le Tribunal a rendu une ordonnance, pour les motifs présentés ci-après, rejetant la requête. Voici les motifs de cette ordonnance.

LES FAITS [2] Les défendeurs ont été représentés par des avocats jusqu’au 4 novembre 2005, date à laquelle ils ont voulu déposer un avis d’intention d’agir en leur propre nom. En réponse, le Tribunal a attiré l’attention des parties sur la règle 72(1) des Règles du Tribunal de la concurrence, DORS/94-290 et sur la règle 120 des Règles des Cours fédérales, DORS/2004-283. La règle 72(1) des Règles du Tribunal de la concurrence prévoit que, lorsque la question se pose de savoir quelle pratique ou quelle procédure suivre dans les cas qui ne sont pas expressément prévus dans ces règles, la pratique et la procédure prévues dans les Règles des Cours fédérales doivent être suivies, tout en y apportant les ajustements nécessaires. La règle 120 des Règles des Cours fédérales prévoit ce qui suit :

120. Une personne morale, une société de personnes ou une association sans personnalité morale se fait représenter par un avocat dans toute instance, à moins que la Cour, à cause de circonstances particulières, ne l’autorise à se faire représenter par un de ses dirigeants, associés ou membres, selon le cas.

[3] En réponse à cette directive, les personnes morales défenderesses ont déposé une requête sollicitant l’autorisation nécessaire, appuyée par l’affidavit de Douglas Scott McNabb. La commissaire de la concurrence (la « commissaire ») s’est opposée à cette requête.

LA PREUVE PAR AFFIDAVIT [4] Dans son affidavit, monsieur McNabb a déclaré ce qui suit : 1. Il est l’unique administrateur des personnes morales défenderesses (l’appellation correcte de la défenderesse Fabutan Studios étant apparemment Fabutan Studios Inc).

2. Il est le propriétaire de trois autres personnes morales qui gèrent les activités des franchises de Fabutan et qui font affaire sous le nom de Fabutan Sun Tan Studios.

3. Les personnes morales défenderesses l’ont autorisé à agir en leur nom dans le cadre de la présente demande.

120. A corporation, partnership or unincorporated association shall be represented by a solicitor in all proceedings, unless the Court in special circumstances grants leave to it to be represented by an officer, partner or member, as the case may be.

4. Son affidavit est accompagné des états financiers non vérifiés pour la période se terminant le 30 septembre 2004 relatifs aux personnes morales défenderesse et aux trois autres personnes morales. En ce qui concerne les personnes morales défenderesses, les renseignements pertinents sont les suivants :

RENSEIGNEMENTS FINANCIERS TERMINANT LE 30 SEPTEMBRE 2004 (NON VÉRIFIÉS)

PERSONNE MORALE Revenu net ($) Dosco Group Inc Fabutan Corporation 20 830 Fabutan Studios Inc 5. Il a donné tous ses biens personnels en garantie à l’égard d’achats d’immobilisations et des besoins opérationnels financiers des personnes morales défenderesses.

6. À ce jour, les défenderesses ont engagé des frais juridiques dépassant les 55 000 $ et leurs avocats leur ont donné une estimation des frais requis pour mener à terme la demande. Cette estimation s’élevait à plus de 150 000 $.

7. Les défenderesses pourraient être tenues de payer ces frais si elles n’obtenaient pas gain de cause dans la présente instance, et tout recours envisagé ne pourrait être exercé si monsieur McNabb n’était pas en mesure de représenter les personnes morales défenderesses.

8. Il n’est pas avocat. 9. Il sera un témoin, mais son « […] rôle en tant que témoin sera limité à celui d’un soutien d’ordre logistique et factuel » [TRADUCTION].

10. Il a préparé les affidavits des témoins experts et est capable de traiter de façon appropriée les questions dont le Tribunal est saisi.

[5] Parmi ces éléments, il manque une preuve quelconque sur la manière dont les personnes morales sont liées entre elles. Je souligne le fait que Dosco Group Inc est décrit comme une « société de portefeuille » et que son bilan fait état d’« avances des actionnaires » (Guillemets ajoutés). Il n’y a pas de preuve quant à la situation financière de tout actionnaire majoritaire autre que monsieur McNabb, et les éléments de preuve relatifs aux actions qu’il détient dans les personnes morales défenderesses sont ambigus.

POUR L’EXERCICE SE

Bénéfices non répartis ($) 2 902 348 459 208 655 108 433 319 336

[6] Il manque également tout renseignement relatif à la relation qui existe entre les personnes morales défenderesses et les 126 franchises mentionnées dans les états financiers de Fabutan Corporation qui n’appartiennent pas en tout ou en partie à ce qui est décrit comme la « société mère » ou au président de la société mère ou aux membres de la famille du président.

PRINCIPES JURIDIQUES APPLICABLES [7] En tenant compte de la règle 120, la jurisprudence des Cours fédérales établit ce qui suit :

1. Les ordonnances fondées sur la règle 120 ne sont pas automatiquement accordées. Voir Source Services Corp c Source personnel Inc, 1996, 105 FTR 42.

2. Les facteurs pertinents permettant de décider s’il existe des circonstances particulières sont les suivants : la capacité de la société à payer les services d’un avocat, la complexité des questions de droit, la capacité du représentant proposé à traiter la question avec célérité et la question de savoir si les représentants proposés comparaîtront aussi bien à titre d’avocats que de témoins. Voir Kobetek re Systems Ltd c Canada, [1998] 1 CTC 308 (1 inst); Gunner Industries Ltd c Canada, [2002] 4 CTC 190 (CAF); SAR Group Relocation Inc c Canada (Procureur général), 2002, 289 NR 163 (CAF).

3. En ce qui concerne l’impécuniosité, la Cour doit être convaincue que la personne morale n’est vraiment pas en mesure de payer les services d’un avocat. Cette impécuniosité doit s’étendre à l’actionnaire majoritaire ou aux actionnaires majoritaires de la société. Voir Source services et SAR Group Relocation, mentionnées plus haut.

APPLICATION DES PRINCIPES JURIDIQUES À LA PREUVE [8] À mon avis, selon les éléments de preuve présentés au Tribunal, les deux critères les plus importants sont la situation financière des personnes morales défenderesses et le statut du représentant qu’elles ont proposé comme témoin.

[9] En ce qui concerne la situation financière des personnes morales défenderesses, la preuve n’a pas permis de démontrer que les personnes morales défenderesses sont véritablement incapables de payer les services d’un avocat. Chaque société fait état d’importants bénéfices non répartis, chacune présentant un montant supérieur à l’estimation des frais juridiques à venir. Fabutan Studios Inc a fait état d’un revenu net de 108 433 $ au cours de son dernier exercice financier. Cela mis à part, les éléments de preuve ne mentionnent pas la capacité des personnes morales défenderesses à recueillir les fonds nécessaires.

[10] Dans son argumentation orale, monsieur McNabb a soutenu que les personnes morales défenderesses n’ont pas la capacité de payer les services d’un avocat à partir de leurs flux de trésorerie actuels, et qu’il leur faudrait 12 à 24 mois pour payer les frais juridiques de cette manière. Même si c’était vrai, cela ne constitue pas une preuve suffisante pour établir l’impécuniosité au sens de la règle 120.

[11] En ce qui concerne le deuxième critère, il est convenu que monsieur McNabb sera un témoin dans l’instance. Bien que ce dernier ait déclaré sous serment que sa participation s’apparenterait davantage à « un soutien d’ordre logistique et factuel », la commissaire soutient que la déclaration des défenderesses indique que monsieur McNabb est censé témoigner au sujet d’un certain nombre de questions, notamment :

· La relation entre les personnes morales défenderesses; · La nature du rayonnement ultraviolet et le processus de bronzage; · La nature de l’industrie du bronzage; · Le matériel, les normes et les pratiques de Fabutan; · Les risques et les avantages du bronzage.

[12] Une grande partie de ces éléments de preuve, en particulier le dernier élément sur la liste, sont au cœur des questions en litige entre les parties. Même si le fait que le représentant sera un témoin ne constitue pas nécessairement un obstacle absolu au prononcé d’une ordonnance en vertu de la règle 120, le fait que monsieur McNabb témoignera sur les questions en litige représente un facteur qui compromet la délivrance de l’ordonnance demandée.

[13] En ce qui concerne les deux autres critères, la commissaire a reconnu que les questions juridiques en l’espèce ne sont pas complexes. L’affaire portera sur des questions de fait ainsi que sur des avis scientifiques et médicaux. Le fait que monsieur McNabb s’estime capable de faire des recherches sur les règles et les procédures pertinentes afin de s’assurer que l’audience du Tribunal sera menée de manière sérieuse et avec célérité ne signifie pas, en toute déférence, qu’il en est nécessairement ainsi.

CONCLUSION [14] En tenant principalement compte de la situation financière des personnes morales défenderesses, mais aussi du fait que monsieur McNabb témoignera au sujet des questions en litige, la requête a été rejetée.

e FAIT à Ottawa, ce 2 jour de décembre 2005. SIGNÉ au nom du Tribunal par la membre judiciaire présidant à l’audience. (s) Eleanor R. Dawson

COMPARUTIONS Pour la demanderesse : La commissaire de la concurrence Sanderson Graham Pour les défenderesses : Dosco Group Inc Fabutan Corporation Fabutan Studios

Douglas McNabb

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