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Competition Tribunal Tribunal de la concurrence o CT - 1994 / 003 Document n 127 No. Document du greffe : 213

AFFAIRE CONCERNANT une demande présentée par le directeur des enquêtes et recherches en vertu des articles 77 et 79 de la Loi sur la concurrence, LRC 1985, c C-34.

ENTRE : Le directeur des enquêtes et recherches Demandeur - et - Télé-Direct (Publications) Inc Télé-Direct (Services) Inc

Défenderesses - et - Compagnie de téléphone anglo-canadienne NDAP-TMP Worldwide Ltd et Directory Advertising Consultants Limited Thunder Bay Telephone

Intervenantes MOTIFS ET ORDONNANCE CONCERNANT L’ACCÈS PAR LES INTERVENANTES AUX DOCUMENTS VISÉS PAR UNE ALLÉGATION DE PRIVILÈGE ╶─────────────────────────────────────────────────

- 2 - Date de l’audience : Le 27 juillet 1995 Membre judiciaire : L’honorable juge William P. McKeown (président ) Avocat du demandeur : Directeur des enquêtes et recherches James W. Leising Avocats des défenderesses : Télé-Direct (Publications) Inc Télé-Direct (Services) Inc

Mark J. Nicholson Diane M. Rodgers

Avocat des intervenantes : NDAP-TMP Worldwide Ltd et Directory Advertising Consultants Limited John M. Hovland

- 3 - TRIBUNAL DE LA CONCURRENCE MOTIFS ET ORDONNANCE CONCERNANT L’ACCÈS PAR LES INTERVENANTES AUX DOCUMENTS VISÉS PAR UNE ALLÉGATION DE PRIVILÈGE ╶────────────────────────────────────────────

Le directeur des enquêtes et recherches c Télé-Direct (Publications) Inc et al

Les intervenantes NDAP-TMP Worldwide Ltd NDAP ») et Directory Advertising Consultants DAC ») ont présenté une requête en vue d’obtenir l’accès à des documents scellés déposés auprès du Tribunal en ce qui concerne une autre requête qui sera entendue le er er 1 août 1995. La requête fixée au 1 août 1995 est présentée par le directeur des enquêtes et recherches (le « directeur ») afin d’exiger la production de documents par les défenderesses et la comparution de leurs représentants à un interrogatoire préalable pour répondre aux questions visant les documents. Les défenderesses ne veulent pas produire les documents ni répondre aux questions parce qu’elles invoquent un privilège. Elles revendiquent le secret professionnel liant l’avocat à son client, le privilège relatif au litige et le privilège à l’égard de la négociation d’un règlement pour les divers documents.

À l’appui et à l’encontre de la requête, le directeur et les défenderesses ont respectivement déposé des affidavits auxquels les documents scellés en question sont joints à titre de pièce. Les documents scellés sont composés des pièces C, E, F et J de l’affidavit de Brian Linseman, établi sous serment le 20 juin 1995, des pièces A à L de l’affidavit de Warren Grover, établi sous serment le 23 juin 1995 et des pièces A à L à l’affidavit de Brian McLeod Rogers, établi sous serment le 23 juin 1995. Les défenderesses revendiquent le privilège à l’égard de la négociation d’un règlement pour les documents scellés. Le directeur ne prend pas position à l’égard de cette allégation; il ne s’y oppose pas l’exception de la prétendue « lettre de M. Bourke » qui est l’un des documents visés par sa requête et qui est jointe à l’affidavit de M. Linseman). Les documents scellés peuvent être décrits, de façon générale, comme des lettres échangées entre les défenderesses ou leurs avocats et le directeur ou son avocat. Les parties invoquent les documents scellés pour prouver ou réfuter des négociations en vue d’un règlement, qui peuvent être pertinentes à la question de savoir si les documents demandés par le directeur dans la requête qui er sera entendue le 1 août 1995 doivent être produits par les défenderesses ou si les allégations de privilège de ces dernières à l’égard de ces documents peuvent être étayées.

La requête déposée par le directeur fait partie intégrante du processus de communication préalable. Le directeur demande la production d’autres documents et les défenderesses s’y refusent en invoquant le privilège. Dans les Motifs et ordonnance faisant droit aux demandes er d’autorisation d’intervenir, datés du 1 mars 1995, le Tribunal a refusé de permettre à NDAP et à 1 DAC de procéder à l’interrogatoire préalable des parties . Ces dernières se sont vu accorder l’accès

- 4 - aux documents et aux transcriptions faisant l’objet d’une communication préalable, d’un point de

vue pratique, pour leur permettre d’exercer leurs droits pour préparer le témoignage d’expert et probablement la preuve factuelle et le contre-interrogatoire des témoins à l’audience. Les principaux intervenants dans la détermination des documents produits dans le cadre de la communication préalable sont les parties.

1 Directeur des enquêtes et de recherche c Tele-Direct (Publications) Inc, CT9403/52, [1995] CCTD No 4 (QL).

- 5 - L’avocat de NDAP et de DAC s’est fortement appuyé sur les Règles du Tribunal de la 2 concurrence en affirmant qu’elles confèrent le « droit » de formuler des arguments à l’égard de la requête et d’obtenir l’accès à tous les documents à disposition des parties pour y parvenir. Il a invoqué le paragraphe 32(1), l’alinéa 31b) et le sous-alinéa 38(4)a) dans sa plaidoirie. À mon avis, aucune de ces dispositions ne permet, en soi, de trancher la question de savoir si l’intervenante devrait obtenir l’accès aux documents scellés en l’espèce. Les dispositions citées des Règles doivent être placées dans leur contexte, en tenant compte d’autres dispositions, du décret régissant l’octroi du statut d’intervenant et des circonstances de l’espèce.

Le paragraphe 32(1) des Règles prévoit que l’intervenant, sauf ordonnance contraire du Tribunal, « ne peut qu’assister à l’audition » des requêtes, aux conférences préparatoires et à l’audience, et y présenter des exposés. L’ordonnance relative à l’intervention établit un scénario dans lequel les intervenantes ne jouent pas un rôle actif dans le cadre de la communication préalable. L’accès aux documents privilégiés et l’examen des copies de ces documents en vue de présenter des arguments ce qui concerne d’autres documents à l’égard desquels le privilège est invoqué représentent une part plutôt active du processus de la communication préalable. Il s’agit en fait exactement du rôle que le directeur jouera à l’égard de la requête. Les articles 13 et 14 des Règles eux-mêmes reconnaissent également que les contestations des allégations de privilège ont lieu en général pendant la communication préalable de documents entre les parties.

Les alinéas 31b) et 38(4)a) des Règles prévoient la signification de documents à un intervenant, y compris les documents de requête, déposés par les parties (et d’autres intervenants) lorsque l’intervention est autorisée. Je ne crois pas que ces dispositions avaient pour but

2 DORS/94-290.

- 7 - d’empêcher la possibilité qu’une partie puisse présenter un document scellé au Tribunal pour son examen dans le cadre d’un litige portant sur un privilège sans le fournir aux autres parties. L’article 14 prévoit que les documents controversés peuvent être examinés par le Tribunal, qui se prononcera sur une allégation de privilège. En l’espèce, le fait que le directeur est déjà en possession des documents scellés en raison de la nature du privilège invoqué (négociation d’un règlement) n’empêche certainement pas les défenderesses de refuser que les documents soient communiqués à toute autre personne, à l’exception du Tribunal.

Je n’irais pas aussi loin que les avocats des défenderesses et je n’empêcherai pas les intervenantes de comparaître et de formuler des arguments à l’égard de la requête du er 1 mai 1995. Les intervenantes ont le droit d’aborder des questions juridiques de leurs points de vue, dans la mesure elles ne reprennent pas les arguments des parties et, après avis aux parties, elles peuvent déposer tout renseignement pertinent qu’elles peuvent avoir. Toutefois, je ne vois aucune raison pour que les documents privilégiés liés aux négociations entre les parties soient remis à ces intervenantes afin qu’elles puissent avoir une participation plus générale.

On a demandé si, en renvoyant aux documents privilégiés dans les affidavits, les défenderesses avaient renoncé à leur privilège. Comme le directeur n’a pas contesté l’allégation de privilège des défenderesses à l’égard des documents, je suis d’avis que, pour l’instant du moins, les intervenantes doivent accepter leur statut privilégié. Les contestations croissantes des documents privilégiés acceptés par les parties dans le but de formuler des arguments à l’égard d’une requête visant d’autres allégations de privilège me semblent relever du domaine de la communication préalable. Dans ce contexte, je ne suis pas convaincu que les affaires portant sur la renonciation au secret professionnel liant l’avocat à son client, qui établissent que la divulgation d’une partie d’un document privilégie peut nécessiter la divulgation de tout le document, soient pertinentes. Dans la mesure ces décisions sont fondées sur une préoccupation selon laquelle l’utilisation d’une portion de documents privilégiés seulement pourrait être injuste ou trompeuse parce que seule la partie qui invoque le privilège aurait accès à tout le document et que l’autre partie ne pourrait même pas présenter d’argument sur le point, ce raisonnement ne s’applique pas aux faits dont je suis saisi. Les deux parties ont accès à l’intégralité des documents scellés pour présenter des er arguments sur la requête le 1 août 1995. Il se peut que d’autres circonstances surviennent plus tard, peut-être à l’audience, qui permettront de formuler la question de la renonciation possible d’une autre façon.

Enfin, je garde à l’esprit la mise en garde indiquée dans l’affaire Risi Stone Ltd c Groupe Permacon Inc, pour ce qui est des documents privilégiés ou prétendument privilégiés. La Cour a formulé les commentaires suivants :

- 7 - Quant à la procédure relative aux revendications du privilège du secret professionnel, je ferai d’abord remarquer qu’il est dans mes habitudes de ne pas permettre la divulgation d’un document protégé par un privilège à l’avocat de l’autre partie aux fins de la plaidoirie en ce qui concerne le statut du document. […] Cela entrave effectivement le travail de l’avocat qui s’oppose à la revendication du privilège du secret professionnel, dans l’élaboration de sa plaidoirie. Toutefois, en général le juge se prononce sur les revendications de ce genre sans plaidoirie approfondie là-dessus, et la divulgation à l’avocat, même aux fins de la plaidoirie seulement, peut rendre théorique toute conclusion subséquente selon laquelle le document 3 est protégé par le secret professionnel . Dans les circonstances qui me sont présentées aujourd’hui, je ne peux même pas dire que le statut privilégié des documents auxquels on demande l’accès est en litige. Il ne l’est pas.

re 3 [1990] / FC 10, à la p 13 (1 inst.).

POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL ORDONNE QUE la requête de NDAP et de DAC soit rejetée. Si NDAP et DAC souhaitent présenter des arguments à l’audition de la requête le er 1 août 1995, elles signifieront et déposeront un mémoire des arguments d’ici 15 h le vendredi 28 juillet 1995.

e FAIT à Ottawa, ce 27 jour de juillet 1995. SIGNÉ au nom du Tribunal par le président.

(s) W.P. McKeown W.P. McKeown

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