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Competition Tribunal Tribunal de la concurrence o CT-1994/001 Document n 118 No. Document du greffe : 171

AFFAIRE CONCERNANT une demande présentée par le Directeur des enquêtes et de recherches en vertu de l’article 79 de la Loi sur la concurrence, LRC 1985, c C-34;

ET AFFAIRE CONCERNANT certaines pratiques de The D & B Companies of Canada Ltd.

ENTRE : Le Directeur des enquêtes et de recherches Demandeur et

The D & B Companies of Canada Ltd Défenderesse et

Information Resources Inc Conseil canadien des distributeurs en alimentation Intervenants

MOTIFS DE L’ORDONNANCE AUTORISANT LA MODIFICATION DE LA DEMANDE ───────────────────────────────────────────────────────

Date de l’audience : Le 31 octobre 1994 Membre judiciaire présidant l’audience : Monsieur le juge William P. McKeown Autres membres : r Le D Frank Roseman M. Victor L. Clarke

Avocats du demandeur : Le Directeur des enquêtes et de recherches Donald B. Houston Bruce C. Caughill

Avocats de la défenderesse : The D & B Companies of Canada Ltd John F. Rook, c r Randal T. Hughes Lawrence E. Ritchie Karen B. Groulx

Avocats des intervenants : Information Resources Inc Gavin MacKenzie Geoffrey P. Cornish

Conseil canadien des distributeurs en alimentation Paul Martin

TRIBUNAL DE LA CONCURRENCE MOTIFS DE L’ORDONNANCE AUTORISANT LA MODIFICATION DE LA DEMANDE ──────────────────────────────────────────────────────

Le Directeur des enquêtes et de recherches c The D & B Companies of Canada Ltd

Introduction Le Directeur des enquêtes et de recherches (le « directeur ») présente une requête en modification de la demande de recours énoncée dans l’avis de demande. La mesure corrective demandée est énoncée aux pages 1 à 3 et encore une fois aux pages 22 et 23 de l’avis de demande. Les modifications particulières demandées par le directeur sont énoncées dans l’avis de requête déposé le 28 octobre 1994. Par exemple, les modifications suivantes (indiquées par le soulignement) sont demandées dans le sous-paragraphe du recours demandé :

[Le directeur cherche à obtenir] a) une ordonnance, conformément au paragraphe 79(1) de la Loi, interdisant à la demanderesse, à ses sociétés affiliées, à ses dirigeants ou à ses mandataires de :

(i) conclure tout contrat qui empêche ou qui, de quelque façon, restreignent un fournisseur de données prélevées par balayage électronique de fournir à autrui l’accès à des données prélevées par balayage électronique ou d’autres données nécessaires à la prestation de services de suivi du marché fondé sur les données prélevées par balayage électronique;

Le directeur demande que les sous-paragraphes (ii) et (iii) et que le paragraphe b) soient modifiés de la même façon.

Les modifications demandées ont pour but de répondre à la question concernant ce qui a été mentionné dans le cadre de la présente procédure en tant que « données causales ». L’information sur les données causales concernant, par exemple, les promotions, les expositions et les publicités qui peuvent être utilisées pour tirer des conclusions sur la « cause » de

fluctuations observées dans la vente d’un produit. Dans son libellé actuel, la demande de recours du directeur ne concerne que les clauses contractuelles régissant la fourniture de données prélevées par balayage électronique.

Des deux intervenants, Information Resources Inc IRI ») soutient la position du directeur, tandis que le Conseil canadien des distributeurs en alimentation CCDA ») soutient la position de Nielsen.

Il n’est pas contesté que la règle applicable est la règle 420 des Règles des Cours fédérales. Les Règles du Tribunal de la concurrence ne contiennent aucune disposition particulièrement relative aux modifications apportées aux actes de procédure et, par conséquent, il faut recourir aux Règles des Cours fédérales par la « règle des lacunes » (paragraphe 72(1)). La règle 420 prévoit ce qui suit :

(1) La Cour pourra, aux conditions qui semblent justes le cas échéant à tout stade d’une action, permettre à une partie d’amender ses plaidoiries, et tous les amendements nécessaires seront faits aux fins de déterminer la ou les véritables questions en litige entre les parties.

(2) L’autorisation visée à la présente règle ne peut être accordée […] b) pendant ou après l’instruction, sauf [...] à condition qu’il y ait une nouvelle instruction, ou que les autres parties obtiennent par ailleurs la possibilité de communication, d’interrogatoire préalable et de préparation de l’instruction qui peuvent leur être nécessaires pour répondre aux allégations nouvelles ou amendées.

Les membres du tribunal diffèrent sur l’application de la règle à l’affaire dont nous sommes r saisis. La majorité des membres du Tribunal, composé de deux autres membres, le D Roseman et M. Clarke, se sont prononcés en faveur de la requête du directeur. Le membre judiciaire, le juge McKeown, est dissident. L’ordonnance du Tribunal a été rendue oralement à l’audience le 31 octobre 1994. Le texte de l’ordonnance est énoncé à la fin des présents motifs à titre d’information seulement.

r Motifs majoritaires (D Roseman et M. Clarke) Les avocats du Directeur font valoir que, puisque certains des contrats de la défenderesse (aussi appelée « Nielsen ») avec les détaillants contiennent des clauses qui pourraient être interprétées de manière à exiger un accès exclusif par la demanderesse à des données causales, l’annulation de l’exclusivité des données prélevées par balayage électronique ne serait pas suffisante, si le Tribunal se prononce en faveur du directeur. Il soutient que la modification n’est pas une nouvelle allégation, mais simplement un ajout mineur aux mesures correctives demandées afin de s’assurer qu’une ordonnance, le cas échéant, serait efficace afin d’atteindre ce qui est visé. Il fait remarquer que la modification pourrait refléter l’interprétation de Nielsen de ses contrats en ce qui concerne les données causales.

Les avocats de la défenderesse contestent l’octroi d’une modification à cette étape de la procédure. Il soutient que le moment choisi de la demande cause préjudice à Nielsen comme il a été soulevé après le témoignage des témoins et des experts du directeur. Il soutient que la question concernant les données causales n’a pas été déjà soulevée par l’avis de demande ou lors l’interrogatoire préalable et qu’elle a seulement été soulevée pendant le témoignage des témoins du directeur. Il souligne également qu’il n’y a eu aucun élément de preuve à ce jour selon lequel Nielsen restreint l’accès aux données causales indépendamment des contrats, si effectivement les clauses pertinentes dans les divers contrats devaient être interprétées comme soutenant une telle restriction.

Le statut des clauses contractuelles qui soutiennent ou qui ne soutiennent pas l’exclusivité des données causales, ainsi que des données prélevées par balayage électronique n’a pas été déterminé. Il se peut qu’il ne soit jamais déterminé de façon définitive dans l’espèce si la demande du directeur n’est pas accueillie. Si la demande du directeur est accueillie, il n’y a que deux possibilités. Soit les clauses en cause fournissent à Nielsen l’accès exclusif aux données causales ainsi qu’aux données prélevées par balayage électronique, soit elles ne le font pas.

D’abord, supposons que le Tribunal conclût finalement que les contrats donnent ou, même s’ils ne sont pas actuellement appliqués, pourraient donner un accès exclusif aux données causales. Si les éléments de preuve soutiennent également une conclusion selon laquelle l’accès aux données causales est essentiel à une concurrence efficace pour des services de suivi du marché fondé sur des données prélevées par balayage électronique et si le Tribunal décide que les

données prélevées par balayage électronique ne devraient plus être assujetties à des contrats d’exclusivité, il est donc logique que la même ordonnance s’applique aux données causales. Dans ces circonstances, toute ordonnance du Tribunal qui interdisait simplement l’accès exclusif aux données prélevées par balayage électronique serait totalement inefficace ou gravement viciée. Toute la procédure aurait été menée pour rien, puisqu’un facteur important aurait été laissé de côté. Cela me semble inutile et coûteux. Il est certainement préférable de répondre à toutes les questions en litige entre les parties pour se prononcer sur la demande.

Subsidiairement, si le Tribunal conclut que les contrats ne donnent pas à Nielsen l’accès exclusif aux données causales, il se peut donc que la modification ait été effectuée par surcroît de prudence. Nielsen aura certainement la possibilité de soutenir que le Tribunal ne devrait pas accorder cette partie de la mesure corrective demandée.

Nous avons également examiné la question de savoir si le fait d’accorder la modification demandée causerait un préjudice ou une injustice à la défenderesse. On a fait grand cas du moment de la demande, surtout après que le directeur a fini de défendre sa cause. Nous reconnaissons qu’il aurait été préférable d’avoir présenté la modification à une étape antérieure de la procédure.

Cependant, nous ne considérons pas que seul le moment choisi cause préjudice à la défenderesse. La modification demandée n’implique pas une nouvelle allégation. La question des données causales fait partie de la question plus vaste de l’entrée aux services de suivi du marché fondé sur les données prélevées par balayage électronique. Les questions entourant l’utilisation et l’offre de données causales ont été déjà soulevées dans les éléments de preuve, y compris les affidavits d’experts. Étant donné qu’il ne s’agit pas d’une nouvelle allégation, la modification n’exige pas une preuve factuelle abondante et la mise en essai de celle-ci au contre-interrogatoire. Cependant, comme l’exige la règle 420, nous permettrons à la défenderesse de réaliser des interrogatoires préalables concernant les questions soulevées par la modification et de rappeler les témoins du directeur comme bon lui semblera. La défenderesse n’a pas encore commencé à présenter ses propres arguments. La défenderesse n’a pas adopté elle-même une position ou ligne de conduite inchangeable, si une modification devait être exigée à la lumière de la modification telle qu’accordée. Nous sommes donc d’avis qu’aucun préjudice à la défenderesse dans la ligne de conduite de la présente affaire ne sera soulevé.

En ce qui concerne l’intervenant CCDA, selon les termes de sa demande d’intervention, il ne participe pas à la partie de la procédure concernant la présentation de la preuve. Il présentera des arguments uniquement à l’égard des mesures correctives. Il est difficile de voir la façon dont son besoin d’aborder les mesure corrective proposées dans leur version modifiée crée une possibilité de préjudice à son égard.

Nous avons en outre tenu compte de l’effet d’accorder la modification sur la durée de la procédure dans son ensemble. Un grand nombre des témoins ont présenté des éléments de preuve relatifs aux données causales. Les éléments de preuve, sauf ceux de Terry Rawlings d’ISL International Surveys Ltd ISL »), liaient les services de suivi du marché fondé sur les

données prélevées par balayage électronique, le marché allégué, à la relation des données causales. Certains éléments de preuve de M. Rawling pourraient être interprétés de manière à avoir une incidence sur l’application ou, peut-être, sur l’interprétation des clauses dans les contrats de Nielsen avec les détaillants relatives aux données causales. Un autre témoin qui pourrait présenter un intérêt pour la défenderesse au sujet de la version révisée de la mesure corrective demandée par le directeur est Ralph Winter, l’expert appelé par le directeur. La défenderesse pourrait vouloir l’interroger sur la version révisée de la mesure corrective proposée. Ce qui précède ne vise pas à empêcher la défenderesse de rappeler d’autres témoins, mais les questions qui pourraient être posées aux témoins doivent être limitées à la modification, une portée très limitée, et elles ne devraient pas prendre beaucoup de temps. Même d’un point de vue pessimiste, le temps consacré au rappel de témoins est moindre par rapport au temps consacré à l’audition du reste de la preuve et il est, bien entendu, d’un ordre de grandeur beaucoup plus petit par rapport à l’ensemble de la procédure.

Motifs dissidents (le juge McKeown) La question dont nous sommes saisis se rapporte à l’application du paragraphe 420(2) des Règles des Cours fédérales. La majorité est d’avis que le préjudice ou la question de savoir s’il est juste d’accorder une modification ne sont pas liés au moment de la modification. À mon avis, le retard qu’a engendré le directeur en demandant la modification cause un préjudice réel à la défenderesse et il s’agit d’un retard qui ne peut pas être justifié, puisqu’aucune preuve n’a été soulevée au cours durant la cause du directeur pouvant justifier la modification. Les éléments de preuve relatifs à la restriction possible de la circulation des données causales ont été entre les mains du directeur pendant cinq mois. La défenderesse a le droit de connaître la mesure corrective demandée par le directeur avant le début de l’audience, afin d’être en mesure de répondre aux arguments. Il peut y avoir des cas le directeur cherchera à obtenir le consentement des parties et du Tribunal afin d’aborder la question du recours jusqu’à ce que le Tribunal ait rendu une décision sur le fond, mais cette manière de procéder n’a pas été demandée en l’espèce.

J’examinerai d’abord le droit applicable. Dans l’affaire Francoeur c R, on soutient la proposition selon laquelle une modification devrait être autorisée en tant que règle générale « à fin de trancher les véritables questions en litige entre les parties », pourvu que l’autorisation d’une telle modification « ne cause pas 1 d’injustice à l’autre partie que des dépens ne pourraient réparer ». 1 1 [1992] 2 CF 333, pages 337 à 338 (CA), citant Baker (G L) Ltd c Medway Building and Supplies Ltd, [1958] 1 WLR 1216 (Ch D)

L’affaire Francoeur, précitée, traitait de la situation d’une requête interlocutoire visant à modifier la déclaration faite par une des parties et non d’une requête en modification d’une déclaration durant le procès ou après le procès. Bien que la tenue générale de cette affaire en ce qui concerne le paragraphe 420(1) des Règles des Cours fédérales soit valable, elle ne s’applique pas à la situation où, comme en l’espèce, l’affaire a déjà fait l’objet d’un procès et l’une des parties a présenté sa preuve principale.

En Ontario, à moins que la partie adverse ne puisse démontrer un préjudice, une modification doit être accueillie. La règle 26.01 des Règles de procédure civile de l’Ontario se lit comme suit : « À moins qu’il n’en résulte un préjudice qui ne saurait être réparé par les dépens ou par un ajournement, le tribunal, sur motion présentée à toute étape d’une action, accorde l’autorisation de modifier un acte de procédure à des conditions justes ».

Le fardeau de démontrer un préjudice incombe à la partie qui s’oppose à la modification. Par conséquent, selon la règle générale en Ontario, le proposant doit être autorisé par un juge à apporter des modifications, à moins que la partie adverse ne puisse montrer que le préjudice s’accorde parfaitement avec l’exception et qu’il ne peut pas être compensé par l’adjudication de dépens ou par un ajournement.

Une approche un peu différente est prise au paragraphe 420(2). Sans aucun doute, il déplace le fardeau de la défenderesse vers le demandeur lorsque la modification est demandée pendant ou après le procès. En particulier, l’alinéa 420(2)b) dicte qu’une requête en modification présentée pendant ou après le procès ne devrait pas être accueillie, sauf à des conditions qui offrent à l’autre partie l’occasion de réaliser des interrogatoires préalables et des préparatifs au procès nécessaires afin de répondre aux allégations nouvelles ou modifiées. Contrairement au paragraphe 420(1) et à la règle de l’Ontario, en vertu du paragraphe 420(2), la défenderesse n’a pas besoin de démontrer un préjudice, mais le demandeur doit plutôt démontrer qu’il n’y a pas de préjudice ou d’injustice qui ne puisse pas être corrigé par des conditions.

L’intention claire de cette règle est de préserver l’intégrité du processus de litige en empêchant une partie de présenter de nouvelles causes d’action ou des demandes de recours à une étape qui serait préjudiciable. Le besoin de cette protection est souligné lorsque les questions ont été définies par les parties bien avant le procès, et qu’une des parties cherche à modifier sa revendication au cours de la procédure. Si des modifications étaient autorisées sans que la partie adverse ne se voie accorder le droit à des interrogatoires préalables, cela ne serait rien de moins qu’un procès par embuscade.

Les avocats du directeur font valoir que, puisque certains des contrats de Nielsen avec les détaillants contiennent des clauses qui pourraient être interprétées de manière à exiger un accès exclusif par la demanderesse à des données causales, le fait d’annuler l’exclusivité des données prélevées par balayage électronique, si le Tribunal se prononce en faveur du directeur, ne serait pas suffisant. Il soutient que la modification n’est pas une nouvelle allégation, mais simplement un ajout mineur aux mesures correctives demandées afin de s’assurer qu’une ordonnance, le cas échéant, peut atteindre efficacement l’objectif.

La défenderesse soutient que la demande du directeur est prématurée et entraînera un préjudice injuste sa demande de modification est autorisée. La défenderesse souligne le fait qu’il n’y a pas de nouveaux éléments de preuve se rapportant à la restriction des données causales sur lesquelles le directeur fonde la demande de recours supplémentaire. De plus, il est allégué que la preuve sur laquelle le directeur s’appuie est purement anticipée et découle de l’hypothèse selon laquelle certains des contrats de la défenderesse peuvent être interprétés de façon à limiter l’accès aux données causales. Par conséquent, la défenderesse soutient qu’il n’y a aucune justification pour autoriser la modification proposée à cette étape tardive de l’audience.

Dans R c Canderel Limited, la Cour canadienne de l’impôt a décidé qu’il était inapproprié d’autoriser la Couronne à modifier ses actes de procédure, puisque ces modifications n’avaient pas été demandées que le cinquième jour du procès. En concluant comme elle l’a fait, il a fait remarquer que la nature des modifications était telle qu’elle exigeait le rappel des témoins et des experts qui avaient déjà présenté leurs témoignages. Sur cette base, il a conclu qu’il y aurait une injustice pour le contribuable et que cela n’aiderait pas à résoudre les questions en litige établies avant le début du procès. En confirmant cette conclusion, la Cour d’appel fédérale a déclaré comme suit :

Pour ce qui est des intérêts de la justice, on peut dire que les tribunaux et les parties sont en droit de s’attendre à ce qu’un procès aboutisse, et les retards et la tension et les inquiétudes que suscite chez toutes les parties concernées une modification tardive soulevant une nouvelle question peuvent fort bien être considérés comme un obstacle aux fins de la justice. À notre sens, ces principes ont été le mieux résumés par lord Griffiths, s’exprimant pour la majorité, dans l’arrêt Ketteman v Hansel Properties Ltd :

Il ne s’agissait pas d’une affaire dans laquelle on avait demandé de faire une modification au cours des plaidoiries finales et la Cour n’étudiait pas la nature particulière d’une défense fondée sur la prescription. En outre, quelle que puisse avoir été la règle de conduite il y a cent ans, il n’est pas d’usage aujourd’hui d’autoriser invariablement qu’une défense entièrement différente de celle qui a été plaidée soit opposée au moyen de modifications au terme du procès, même à la condition qu’il y ait ajournement et que le défendeur paie tous les frais faits inutilement. Il existe une claire distinction entre les modifications ayant pour but de rendre plus claires les questions en litige, et celles qui permettent de soulever une défense différente 2 pour la première fois. 2 2 (1993), 93 D.T.C. 5357, page 5361 (CAF).

[Les notes en bas de page omises, souligné dans l’original.] Le raisonnement énoncé dans l’affaire Canderel, précitée, est pertinent à la résolution de la présente requête. En l’espèce, le directeur cherche à modifier les actes de procédure deux semaines après le début de l’audience. Sans aucun doute, l’effet de ces modifications sera de retarder inutilement les procédures et de créer de nouveaux obstacles à surmonter pour la défenderesse en ce qui concerne la preuve. Plus le procès ou l’audience progresse au moment de la requête, plus la possibilité de préjudice envers la partie adverse n’augmente. Les motifs de la majorité des membres ne retiennent pas le paragraphe 420(2).

La demande d’autorisation de modification du directeur est dilatoire, puisque tous ses témoins et témoins experts ont fini de présenter leurs témoignages de vive voix. Afin d’appliquer le paragraphe 420(2) il sera nécessaire de permettre à la défenderesse d’interroger les parties à l’égard desquelles elle juge prudent d’élaborer une défense appropriée pour le nouveau recours et de rappeler certains témoins ou, au plus haut point, d’ordonner un nouveau procès. Je conclus que cette option est incompatible étant donné les attentes légitimes de la défenderesse concernant le fait de connaître à l’avance de l’audience les mesures correctives demandées contre elle et de préparer une réponse en conséquence. L’effet d’autoriser des modifications à une étape aussi avancée de la procédure est suffisamment préjudiciable à la défenderesse pour qu’il soit « injuste ».

La question de savoir si une modification est juste ou si elle entraîne un préjudice n’est pas une question de fait à trancher sur le fond sans tenir compte du processus. La défenderesse est seulement tenue de contester tout recours demandé contre elle. Il lui est préjudiciable de devoir interroger de nouveau les témoins au sujet d’un recours dont elle n’avait aucune raison de croire qu’on le demanderait. Bien que la défenderesse ait été au courant du fait que des données causales étaient importantes, elle n’avait aucun avis indiquant que le directeur était préoccupé par le fait que la défenderesse limitait l’accès à cette information.

Le seul élément de preuve sur la disponibilité des données causales a été donné par le témoin du directeur, M. Rawlings, le président d’ISL, qui a fait remarquer qu’il avait reçu des détaillants des renseignements de points de vente et les dossiers de prix qui sont utilisés dans leurs propres systèmes, sur demande. Aucun témoignage n’a été présenté par M. Rawlings, par des experts ou par des témoins ordinaires pour indiquer qu’il n’y a jamais eu un problème pour obtenir les données causales des détaillants ou qu’une mesure corrective qui comprendrait l’accès à des données causales serait nécessaire. Ni la majorité ni les avocats du directeur n’allèguent que ce problème a été soulevé lors du procès. Ils s’appuient sur l’interprétation possible des contrats seulement.

Ce n’est pas pertinent pour décider si c’est juste ou s’il y a préjudice au regard du fait qu’un témoin expert en économie de la défenderesse déclare dans son rapport qu’il n’y a rien qui empêche IRI d’obtenir l’accès aux données causales. À mon avis, ce n’est pas une preuve de l’opinion de Nielsen. Le témoin expert déclarait tout simplement sa compréhension des éléments de preuve dont elle disposait. Puisqu’il n’y a rien dans les documents appuyant une conclusion contraire, sauf une interprétation possible de certains des plus récents contrats de

Nielsen avec des détaillants, je ne vois pas la façon dont cela peut être présenté comme l’opinion de Nielsen.

La possibilité d’affirmer, au bout du compte, après la présentation des éléments de preuve, qu’une mesure corrective supplémentaire a été demandée sans rapport avec les éléments de preuve présentés, obligeant à reprendre un procès ou à rappeler un certain nombre de témoins, serait contraire aux principes juridiques reconnus. Il est de la responsabilité de l’avocat de demander la mesure corrective nécessaire avant le début de l’audience, sauf si de nouveaux éléments de preuve de nature critique sont divulgués au cours de la procédure, qui n’étaient pas en possession de cette partie. Cette exception ne s’applique pas en l’espèce, puisqu’il n’y a pas de nouveaux éléments de preuve relatifs aux restrictions sur l’accès aux données causales.

L’injustice envers la défenderesse en raison de la modification est évidente après avoir examiné la déclaration du directeur. Il décide maintenant, cinq mois après avoir reçu les contrats de Nielsen, que les contrats peuvent être potentiellement interprétés de manière à indiquer que les données causales sont incluses dans les dispositions d’exclusivité des contrats, et décide qu’une modification est nécessaire pour qu’il y ait une mesure corrective efficace. À mon avis, la cause du directeur ne peut être jamais conclue s’il est autorisé à modifier ses actes de procédure à cette étape, sans aucun nouvel élément de preuve pour justifier cela. En plus de l’injustice infligée à la demanderesse par l’accord d’une telle modification à cette étape, il y a également injustice envers l’intervenant, CCDA. Puisqu’ils préparaient leur réponse à la mesure corrective demandée par le directeur avant la tenue de l’audience, l’intervenant devra payer injustement des dépens supplémentaires pour répondre à ce nouveau recours. Je souligne également qu’il est impossible pour le Tribunal d’accorder des dépens à la défenderesse et à l’intervenant CCDA à titre de compensation. Toutefois, je n’ai pas besoin de m’appuyer sur ce point à la lumière de ce qui précède.

La recherche d’une mesure corrective parfaite ne peut pas l’emporter sur l’obligation d’équité envers les parties. Le directeur souligne que la modification peut refléter l’interprétation de Nielsen de son contrat en ce qui concerne les données causales. Même si cela était vrai, il ne se soustrait pas à l’exigence qu’un défendeur a le droit de connaître les mesures correctives demandées et d’avoir l’occasion de présenter une défense pleine et entière.

Une audience doit avoir un caractère définitif et, seulement dans des circonstances exceptionnelles, une modification devrait être autorisée après que le demandeur a terminé de défendre sa cause. Le directeur ne s’est pas acquitté du fardeau de démontrer qu’il serait juste d’accueillir la modification dans la présente affaire. Par conséquent, je refuse d’exercer mon pouvoir discrétionnaire judiciaire en accordant l’autorisation de modifier les actes de procédure du directeur.

Ordonnance (rendue le 31 octobre 1994) Le directeur est autorisé à modifier l’avis de demande comme prévu dans son avis de requête.

La défenderesse se voit accorder de tels interrogatoires préalables et rappels de témoins, au besoin. Les interrogatoires doivent avoir lieu avant la reprise de l’audience en décembre; les témoins doivent être rappelés à la reprise de l’audience en décembre.

e FAIT à Ottawa, ce 4 jour de novembre 1994. SIGNÉ au nom du Tribunal par le membre judiciaire présidant l’audience.

(s) W. P. McKeown W. P. McKeown

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