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CT - 88 / 1 DANS L'AFFAIRE d'une demande du directeur des enquêtes et recherches conformément au paragraphe 64(1) de la Loi sur la concurrence, S.R.C. 1970, c. C-23;

ET DANS L'AFFAIRE d'une société en commandite créée en vue de permettre le fusionnement des systèmes informatisés de réservation Reservec et Pegasus;

ET DANS L'AFFAIRE de The Gemini Group Automated Distribution Systems Inc.; ET DANS L'AFFAIRE d'une demande présentée par le directeur des enquêtes et recherches en vertu de l'article 106 de la Loi sur la concurrence, L.R.C. 1985, c. C-34,en vue de modifier l'ordonnance par consentement du Tribunal en date du 7 juillet 1989.

E N T R E : Le directeur des enquêtes et recherches Demandeur - et -Air Canada PWA Corporation Lignes aériennes Canadien International The Gemini Group Limited Partnership The Gemini Group Automated Distribution Systems Inc. Covia Canada Corp. Covia Canada Partnership Corp.

Défenderesses - et -Association des consommateurs du Canada American Airlines, Inc. Procureur général du Manitoba Alliance canadienne des associations touristiques Bios Computing Corporation IBM Canada Limitée VIA Rail Canada Inc. Unisys Canada Inc. Council of Canadian Airlines Employees Procureur général de l'Alberta

Intervenants

MOTIFS DE L'ORDONNANCE MODIFIANT L'ORDONNANCE PAR CONSENTEMENT DU 7 JUILLET 1989

- 2 -Date de l'audience : Les 15-19 novembre 1993 Président de l'audience : L'honorable juge Barry L. Strayer Autres membres : M. Frank Roseman M. L. Jack Smith

Avocats pour le demandeur : Le directeur des enquêtes et recherches Donald B. Houston Jean G. Bertrand

Avocats pour les défenderesses : Air Canada J. William Rowley, c.r. William V. Sasso David W. Kent Melanie A. Yach

Lignes aériennes Canadien International et PWA Corporation Clifton D. O'Brien, c.r. Robert W. Thompson Richard Low Jo'Anne Strekaf

- 3 -The Gemini Group Limited Partnership et The Gemini Group Automated Distribution Systems Inc.

Michael L. Phelan Patricia J. Wilson Martha A. Healey

Covia Canada Corp. et Covia Canada Partnership Corp. Robert M. Nelson William L. Vanveen Todd J. Burke

Avocats pour les intervenants : Association des consommateurs du Canada Rosalie Daly-Todd American Airlines, Inc. Colin L. Campbell, c.r. Lisa Clarkson

Procureur général du Manitoba Neville D. Shende, c.r. Alliance canadienne des associations touristiques Douglas Crozier IBM Canada Limitée Donald S. Affleck, c.r. Unisys Canada Inc. Frank P. Monteleone Peter F. Wilson

- 4 -Council of Canadian Airlines Employees Bruce M. Graham Procureur général de l'Alberta James W. McFadzen

- 5 -TRIBUNAL DE LA CONCURRENCE MOTIFS DE L'ORDONNANCE MODIFIANT L'ORDONNANCE PAR CONSENTEMENT DU 7 JUILLET 1989

Le directeur des enquêtes et recherches c. Air Canada et les autres

I. INTRODUCTION Le Tribunal a rendu son ordonnance dans la présente affaire le 24 novembre 1993. Dans cette ordonnance, nous avons mentionné que les motifs suivraient sous peu. Les voici donc.

Nous n'avons pas l'intention, dans les présents motifs, de répéter les renseignements de base et les conclusions de fait exposés dans nos motifs et dans notre ordonnance en date du 22 avril 1993 1 . Bien que cette décision ait été renversée en appel par la Cour d'appel fédérale en ce qui concerne la question de la compétence du Tribunal prévue à l'article 106 de la Loi sur la concurrence (la « Loi ») 2 , un appel incident connexe concernant les conclusions de fait « subsidiaires » du Tribunal a aussi 1 CT8801/800, Motifs et ordonnance, [1993] D.T.C.C. n o 10 (QL). Version anglaise publiée dans (1993), 49 C.P.R. (3 e ) 7. 2 L.R.C. 1985, c. C-34.

- 6 ­été rejeté. La Cour d'appel a infirmé la décision et a renvoyé l'affaire au Tribunal [TRADUCTION] « pour nouvelle décision par ce motif que la condition préalable de l'exercice de son pouvoir d'annuler ou de modifier a été remplie, mais que ce pouvoir ne peut s'exercer que conformément à l'article 92 de la Loi sur la concurrence » 3 . Dans une ordonnance subséquente datée du 29 septembre 1993, le Tribunal a exposé son interprétation des questions à trancher dans sa nouvelle décision conformément aux directives de la Cour d'appel 4 . Le Tribunal a conclu que la portée de l'audience tenue afin de rendre une nouvelle décision devrait être limitée à deux questions : celle de savoir si le fusionnement, selon la formule modifiée aux termes de l'ordonnance par consentement du 7 juillet 1989 5 , aura vraisemblablement pour effet d'empêcher ou de diminuer sensiblement la concurrence dans l'industrie du transport aérien au Canada (désignée comme la question de la « causalité ») ainsi que celle du choix et des conditions de toute mesure de redressement (la question des « mesures de redressement »). À l'issue de l'appel concernant cette ordonnance, la Cour d'appel a confirmé que le Tribunal avait eu raison de délimiter ainsi la portée du nouvel examen 6 . 3 Directeur des enquêtes et recherches c. Air Canada (30 juillet 1993), A-302-93 aux pp. 1-2 (Jugement), demande en autorisation d'appel rejetée (sub nom. The Gemini Group Limited Partnership c. Directeur des enquêtes et recherches) (14 octobre 1993) 23709 (C.S.C.).

4 Director of Investigation and Research v. Air Canada (29 septembre 1993), CT8801/838, [1993] C.C.T.D. n (QL).

5 Directeur des enquêtes et recherches c. Air Canada (7 juillet 1989), CT8801/577, Ordonnance par consentement, [1989] D.T.C.C. n o 30 (QL) (Trib. conc.). Version anglaise publiée avec les motifs dans (1989), 27 C.P.R. (3 e ) 476. 6 Air Canada v. Director of Investigation and Research (9 novembre 1993), A-576-93 (C.A.F.).

o 17

- 7 -II. LIEN DE CAUSALITÉ : LE FUSIONNEMENT AURA-T-IL VRAISEMBLABLEMENT POUR EFFET DE DIMINUER LA CONCURRENCE DANS LE DOMAINE DU TRANSPORT AÉRIEN?

Dans son ordonnance du 29 septembre 1993, le Tribunal a déclaré que cette question devrait faire l'objet d'un autre examen au cours de la nouvelle audience, sans décider si ladite question avait déjà été tranchée, de façon explicite ou implicite, par lui-même ou par la Cour d'appel fédérale.

Cette question comporte deux volets : le contrat de prestation de services daté du 30 juin 1989 7 obligeant les Lignes aériennes Canadien International Canadien ») à acheter des services de réservation de Gemini 8 jusqu'en 1999 au moins, constitue-t-il une partie du « fusionnement » rendant ainsi applicable l'article 92 de la Loi ? Et, dans l'affirmative, est-ce cet aspect du fusionnement qui diminue, ou diminuera vraisemblablement, la concurrence dans le domaine du transport aérien ou bien cette conséquence doit-elle être attribuée à d'autres facteurs? Le directeur s'appuie sur ce contrat de prestation de services en tant que partie d'un fusionnement et en tant que source pertinente de diminution de la concurrence dans le domaine du transport aérien qui, d'après ce que le Tribunal a affirmé, découlerait de la déconfiture de Canadien.

7 Pièce A-I-43. 8 Dans les présents motifs, le terme « Gemini » renvoit collectivement à la société en commandite (The Gemini Group Partnership) et au commandité (The Gemini Group Automated Distribution Systems Inc.). Si, dans le contexte, il est nécessaire de renvoyer à l'un ou à l'autre, l'expression « société en commandite » ou « commandité » est alors utilisée.

- 8 -Au cours de la nouvelle audience tenue par le Tribunal, la question de savoir s'il avait déjà été décidé que le contrat de prestation de services faisait partie du fusionnement a été débattue. Dans la décision du Tribunal du 22 avril 1993, la divergence d'opinions au sein de la formation concernait la question de savoir si les objectifs de l'ordonnance par consentement de 1989 incluaient la protection d'un duopole dans le domaine du transport aérien et si le danger pour ce duopole pouvait justifier l'exercice du pouvoir conféré par l'article 106 de la Loi de modifier une ordonnance antérieure. Toutefois, au sujet de la question de la prestation de services, la majorité a observé que l'ordonnance par consentement « permettait ..., sans l'exiger, ... le maintien des liens de prestation de services entre les deux transporteurs aériens et Gemini jusqu'en 1999 » 9 . La majorité a ainsi reconnu que, même s'il n'était pas expressément question du contrat de prestation de services dans l'ordonnance par consentement, ce contrat faisait partie d'ententes de nature commerciale s'inscrivant dans le fusionnement qui avaient été implicitement autorisées par cette ordonnance. Quant à M. Roseman, dans ses motifs dissidents relatifs à l'application de l'article 106, il considérait la prestation de services comme une partie intégrante d'une intégration tant verticale qu'horizontale s'inscrivant dans le fusionnement 10 . À la Cour d'appel fédérale, le juge MacGuigan a conclu expressément que la prestation de services faisait partie intégrante du fusionnement 11 . On ne sait pas exactement si les deux autres juges de la Cour ont souscrit à cette conclusion, mais ils n'ont clairement pas affirmé le contraire. Il est inutile d'examiner plus à fond ces décisions antérieures.

9 Supra note 1 à la p. 35. 10 Ibid. aux pp. 50-51. 11 Supra note 3 à la p. 17 (motifs du juge MacGuigan).

- 9 -Le fait que la combinaison des systèmes internes de réservation des deux transporteurs aériens en une entité appelée Gemini constituait un fusionnement, au sens de l'article 91 de la Loi, n'a pas été contesté. D'après la documentation relative au fusionnement, il semble que la prestation de services faisait partie intégrante de l'entente commerciale globale. Aux termes du protocole d'entente entre Air Canada et PWA Corporation PWA ») intervenu en avril 1987, les transporteurs aériens devaient chacun céder leur système de réservation à Gemini et contracter des [TRADUCTION] « services de réservation exclusifs » auprès de Gemini 12 . D'après le contrat de société conclu le 1 er juin 1987, Air Canada et Canadien devaient obtenir des [TRADUCTION] « services de réservation exclusifs en matière de transport aérien » de la société en commandite 13 . Cet engagement a été réitéré dans leur contrat relatif aux systèmes informatisés de réservation établi à la même date 14 . Après le prononcé de l'ordonnance par consentement le 7 juillet 1989, et après l'arrivée de Covia Canada Partnership Corp. et de Covia Canada Corp. (collectivement « Covia ») dans la société en commandite, un nouveau contrat de prestation de services a été signé par Gemini, Air Canada et Canadien, dans lequel les deux transporteurs aériens ont maintenu leur engagement d'accorder à Gemini des droits exclusifs relativement à la prestation de services 15 . Le Tribunal conclut donc que la prestation de services par Gemini faisait dès le départ partie intégrante du fusionnement des systèmes Reservec et Pegasus des deux transporteurs aériens. Le contrat de prestation de services

12 Pièce R-IA-1 à la p. 1. 13 Pièce R-IA-2 à l'art. 2.02. 14 Pièce A-V-105 à la p. 2. 15 Supra note 7 à l'art. 2.2.

- 10 ­de 1989 n'est qu'un prolongement et une confirmation de cette relation et doit être également considéré comme une partie du fusionnement des deux systèmes, le fait que des engagements à long terme soient monnaie courante dans des ententes de prestation de services n'étant pas contesté.

Il reste donc à déterminer si le fusionnement réalisé par ce contrat « empêche ou diminue sensiblement la concurrence, ou aura vraisemblablement cet effet », comme il faut le faire avant qu'une ordonnance puisse être rendue en vertu de l'article 92, qui est le seul fondement (selon la Cour d'appel) de notre pouvoir de modifier l'ordonnance par consentement de 1989.

On nous a demandé d'appliquer à l'article 92 des théories de causalité qui sont, pour la plupart, tirées du droit de la responsabilité délictuelle. Eu égard à la décision de la Cour d'appel pour ce qui est de l'interprétation de l'article 106, il semblerait insensé et inutile d'essayer de définir la signification de l'article 92 en allant au-delà des besoins de la présente affaire. Qu'il nous suffise de dire que nous n'appliquerons pas les notions du droit de la responsabilité délictuelle en l'espèce. Les critères de causalité dans ce domaine du droit comportent en fin de compte une conclusion quant à la faute : un acte, pour être pertinent eu égard à la responsabilité, doit d'une certaine façon avoir été fautif en tant qu'un acte qui a été omis (lorsqu'il y avait une obligation d'agir) ou en tant qu'un acte qui a été commis. Dans l'article 92, il n'est nullement question de l'intention ou du degré de diligence dont doit faire preuve une personne qui peut faire l'objet d'une ordonnance de dissolution ou de dessaisissement. L'article semble viser seulement les conséquences factuelles d'un fusionnement sur

- 11 ­la concurrence. L'article n'exige pas non plus que le fusionnement soit le seul facteur qui contribue à une diminution de la concurrence.

En l'espèce, nous sommes convaincus que le contrat de prestation de services aura vraisemblablement pour effet de diminuer sensiblement la concurrence dans l'industrie du transport aérien en augmentant la puissance commerciale d'Air Canada. Dans notre décision antérieure, nous avons déjà conclu que AMR Corporation ne mènera pas à terme la transaction prévue - qui consiste à injecter des capitaux dans Canadien - tant que le système interne de réservation n'aura pas été transféré à Sabre, qu'une telle injection de capitaux est, d'un point de vue concret, la seule transaction qui puisse sauver Canadien, et que l'échec de Canadien entraînera « indubitablement » une diminution sensible de la concurrence sur la plupart, sinon la totalité des marchés du transport aérien de passagers sur les circuits du sud au Canada 16 . Il n'est pas nécessaire que nous déterminions si, par le passé, d'autres facteurs ont aussi contribué à l'état actuel des choses, ou si quelqu'un est à blâmer. Bien que nous ne puissions dire de façon certaine que le désengagement de Canadien de son contrat de prestation de services actuel garantira le succès de cette société, nous sommes parvenus à la conclusion que, si Canadien doit rester liée à Gemini pour la prestation de services, la société connaîtra probablement un échec et que, si Canadien peut se désengager, elle arrivera probablement à retrouver sa stabilité financière. Nous nous fondons sur la prépondérance des probabilités pour ce qui est de ces résultats et nous ne spéculerons pas davantage sur des questions de causalité.

16 Supra note 1 aux pp. 71, 94.

- 12 -III. MESURES DE REDRESSEMENT A. Exercice du pouvoir discrétionnaire Aux termes du paragraphe 92(1), lorsque le Tribunal conclut qu'un fusionnement diminue sensiblement la concurrence, celui-ci « peut » ordonner une dissolution ou un dessaisissement. On nous a donc exhortés, en particulier Air Canada et Gemini, même si les conditions préalables relatives au prononcé d'une ordonnance en vertu de l'article 92 sont réunies, de ne pas le faire. Cet argument semble être fondé en partie sur des critères d'équité et de justice à l'égard de parties à qui une telle ordonnance pourrait nuire et en partie sur la crainte des répercussions que pourrait avoir une ordonnance sur la concurrence au sein des services liés aux systèmes informatisés de réservation SIR »).

Pour ce qui est du premier point, nous estimons que notre principale préoccupation, lorsqu'il nous faut décider si une ordonnance doit être rendue en vertu de l'article 92, doit être la protection de l'intérêt public en matière de concurrence et non la préservation de droits contractuels privés. Ainsi, le tort qui risque d'être causé aux parties à un fusionnement par une ordonnance n'entre pas tellement en ligne de compte lorsqu'il faut déterminer si une ordonnance doit être rendue 17 . Toutefois, comme nous l'avons fait observer dans la décision que nous avons rendue antérieurement

17 Se reporter à Directeur des enquêtes et recherches c. Southam Inc. (10 décembre 1992), CT9001/277, Motifs et décision concernant la mesure de redressement à la p. 15, [1992] D.T.C.C. n o 14 (QL) (Trib. conc.). Version anglaise publiée dans (1992), 47 C.P.R. (3 e ) 240 à la p. 246.

- 13 ­dans la présente affaire, nous estimons raisonnable de rendre une ordonnance suivant des modalités qui sont le moins préjudiciables possible à l'ensemble des parties, tout en protégeant l'intérêt public en matière de concurrence.

Pour ce qui est du deuxième point, nous avons conclu, dans notre décision du 22 avril 1993, que la concurrence au sein des services liés aux SIR serait tout probablement maintenue si Canadien n'était plus liée à Gemini pour la prestation de services. Nous étions d'avis que Gemini pourrait survivre avec succès à ce changement et que, dans l'effet contraire, les conditions sur le marché soutiendraient une organisation qui prendrait la relève. Bien que les autres témoignages que nous avons entendus au cours de la nouvelle audience aient soulevé plus de doutes quant à la volonté des associées qui restent de préserver Gemini, nous sommes toujours d'avis que, selon toutes probabilités, une nouvelle entité pouvant livrer concurrence avec succès à Sabre peut et sera établie. Ayant reconnu le fait qu'une décision de rendre une ordonnance en vertu de l'article 92 doit tenir compte des répercussions sur la concurrence dans d'autres secteurs 18 , nous ne voyons aucune raison d'hésiter à rendre l'ordonnance en vue d'empêcher une diminution de la concurrence dans le domaine du transport aérien.

B. Mesures de redressement proposées par le directeur 18 Comme nous l'avons reconnu dans notre décision du 22 avril 1993, supra note 1 aux pp. 95-96.

- 14 -Le directeur a proposé quatre options relativement aux mesures de redressement, satisfaisant toutes à son objectif fondamental qui consiste à transférer de Gemini à Sabre la base de données de Canadien utilisée pour la prestation de services et à supprimer ou à éteindre toute obligation subséquente que Canadien pourrait avoir à l'égard de Gemini pour ce qui est de la prestation de services. Selon un autre élément commun aux propositions, Canadien devrait transférer sa part dans Gemini à Covia et à Air Canada. Le directeur n'a pas laissé entendre que cet élément était lié à des préoccupations relatives à la concurrence. Apparemment, il découle d'une offre faite par PWA de transférer sa part à ses associées pour la somme d'un dollar, offre faite à la conclusion des audiences tenues en mars 1993 que PWA concevait manifestement comme une offre de dédommagement à ses associées dans Gemini.

La première mesure de redressement proposée par le directeur mesure de redressement n o 1 ») consiste à dissoudre le fusionnement des activités relatives aux SIR d'Air Canada et de PWA (toutefois, pas la société en commandite) en exigeant que PWA transfère sa part dans Gemini à Air Canada et à Covia, que le système interne de réservation de Canadien soit transféré suivant les indications de Canadien et que les obligations de PWA et de Canadien prévues dans le contrat de prestation de services soient annulées. Selon ce scénario, Gemini est maintenue, sans la participation de PWA et de Canadien.

La quatrième mesure de redressement proposée par le directeur mesure de redressement n o 4 ») a à peu près les mêmes effets. La principale différence entre les deux propositions réside dans

- 15 ­la façon dont est décrit le transfert du système interne de réservation et de la part de PWA. Suivant la mesure de redressement n o 4, ces transferts sont assimilés à une cession ou à un dessaisissement d'actions (la part de PWA dans Gemini) et d'éléments d'actif (les éléments d'actif de Gemini nécessaires à la prestation de services à Canadien). Gemini est tenue de se départir des éléments d'actif associés à la prestation de services à Canadien ainsi que de ses droits et de sa participation dans le contrat de prestation de services, selon les directives de Canadien. PWA est tenue de se départir de l'ensemble de sa participation dans Gemini. Comme le prévoit la mesure de redressement n o 1, Gemini continue à fonctionner sans PWA et Canadien. Selon les deux autres propositions mesures de redressement n os 2 et 3 »), la société en commandite est dissoute au moment du transfert du système interne de réservation de Canadien et est finalement liquidée. D'après la mesure de redressement n o 2, la liquidation de la société en commandite doit se faire d'ici la fin de 1995. Une disposition prévoit expressément l'annulation des obligations concernant la prestation de services à Canadien à la suite de son désengagement de Gemini en novembre 1994; on retrouve cette disposition dans les autres propositions qui n'exigent pas la dissolution de la société en commandite. Aux termes de la mesure de redressement n o 3, la société en commandite serait liquidée d'ici la fin de 1994, à peu près au même moment que sa dissolution et que le transfert du système interne de réservation; il n'est donc pas nécessaire d'annuler séparément toute obligation subséquente de Canadien à l'égard de Gemini. Les mesures de redressement n os 2 et 3 prévoient toutes deux qu'Air Canada et Covia liquideraient la société en commandite sans la participation de PWA.

- 16 -Certaines dispositions sont communes aux quatre mesures de redressement. Le transfert de la responsabilité relative à la prestation de services de Gemini à Sabre se ferait entre le 1 er novembre et le 15 novembre 1994; Air Canada, Covia et le commandité seraient tenus de collaborer au transfert; et PWA ainsi que Canadien auraient à assumer tous les frais directs encourus par Air Canada, Covia et le commandité aux fins du transfert.

Le directeur est d'avis que les quatre mesures de redressement s'inscrivent dans les pouvoirs du Tribunal prévus à l'article 92, comme l'exige la décision de la Cour d'appel fédérale. Aucune des défenderesses n'a contesté cet avis. D'après la position adoptée par le directeur, chacune de ces quatre mesures de redressement pourrait empêcher le fusionnement de donner lieu à une diminution vraisemblablement sensible de la concurrence sur le marché du transport aérien, et le Tribunal devrait choisir l'option la moins préjudiciable, soit la mesure de redressement n o 4 selon ses observations.

C. Positions des autres parties PWA et Canadien favorisent les deux propositions qui préservent Gemini (les mesures de redressement n os 4 et 1, dans cet ordre de préférence), mais conviennent que chacune des quatre mesures permettra d'atteindre l'objectif fondamental qui consiste à permettre à Canadien de transférer son système interne de réservation à Sabre. Si la mesure de redressement n o 4 ou n o 1 devait être adoptée par le Tribunal, PWA appuierait un certain nombre de conditions supplémentaires l'obligeant

- 17 ­à payer plusieurs millions de dollars en vue de couvrir les frais du transfert ainsi que les frais de caisse actuellement engagés par Gemini pour assurer la prestation de services à Canadien; ces frais ne pourraient être éliminés par Gemini qu'après un certain temps si cette dernière devait être maintenue après le transfert du système interne de réservation de Canadien 19 . Si Gemini est maintenue, PWA appuie également l'exigence voulant qu'elle cède sa part à ses associées et confirme l'engagement qu'elle a pris de céder volontairement sa participation si le Tribunal devait se montrer réticent à inclure une telle condition dans son ordonnance ou s'il ne devait pas pouvoir le faire 20 . L'offre de PWA de transférer sa part n'est toutefois plus valable si Gemini est dissoute.

Gemini, dans son argumentation finale, n'a pas pris position en ce qui concerne les mesures de redressement. Air Canada et Covia s'opposent à toute mesure de redressement, mais toutes deux, pour des raisons différentes, préféreraient que la société en commandite soit liquidée si Canadien devait être autorisée à transférer son système interne de réservation à Sabre. Selon Air Canada, un tel transfert ferait que Gemini lui coûterait extrêmement cher en tant que dernière associée à bénéficier de la prestation de services et, finalement, ferait que Gemini ne serait plus viable. Air Canada propose que PWA (et/ou American Airlines Inc. American »)) soit tenue de «

19 Dans leur argumentation, les avocats de PWA ont parlé de frais de compression ponctuels et de frais de caisse superflus engagés sur une période de six mois après la dissolution, plus un paiement forfaitaire final au titre des coûts permanents.

20 D'après le témoignage de Wayne B. Rudson, un expert qui a comparu pour le compte de Gemini, la valeur de cette part dépend de la façon dont est évalué le principal élément d'actif de Gemini, soit ses contrats avec ses abonnés. Ces contrats ont une très grande valeur pour Sabre et Covia. S'il n'était pas permis à Sabre de déposer une soumission afin de l'empêcher ainsi d'acquérir une position trop forte, l'absence de concurrence valable dans les soumissions pourrait permettre à Covia d'obtenir les contrats pour peut-être le dixième du montant qu'elle aurait sinon payer.

- 18 ­dédommager intégralement » les autres associées du préjudice causé par le transfert du système interne de réservation de Canadien. Air Canada soutient que PWA devrait être tenue de rembourser les autres associées de leur investissement actuel dans Gemini, des frais liés à la dissolution ainsi que de tout manque à gagner à la suite de la cession des éléments d'actif de Gemini, y compris les paiements aux employés, aux fournisseurs et aux associées (pour les prêts consentis à Gemini), ainsi que des frais engagés par Air Canada pour mettre au point une nouvelle entente de prestation de services. Air Canada propose que le Tribunal rende une ordonnance seulement à la condition que PWA et/ou American s'engage à accorder les dédommagements décrits ci-dessus.

Covia propose également que la société en commandite soit liquidée et demande que la liquidation se fasse selon les modalités prévues dans le contrat de société, la responsabilité à cet égard incombant ainsi au commandité. Aux termes de cette proposition, Canadien rembourserait les frais engagés pour transférer son système interne de réservation ainsi que tous les frais liés à la dissolution et demeurerait une associée jusqu'à ce que la liquidation soit terminée. Tout manque à gagner ou excédent serait alors réparti également entre les associées, comme le prévoit leur contrat de société.

L'élément fondamental de la position de Covia est qu'elle représente le meilleur, et probablement le seul, espoir d'un maintien de la concurrence dans l'industrie des SIR au Canada et que, à son avis, c'est elle qui pourra livrer le mieux cette concurrence si la société en commandite est dissoute, suivant certaines conditions supplémentaires. Étant donné que la dissolution de la

- 19 ­société en commandite serait connue presque un an avant sa date d'entrée en vigueur, Covia prétend qu'il est essentiel, afin d'assurer la présence continue d'une entité forte capable de livrer concurrence à Sabre, que des mesures soient prises presque immédiatement en vue d'établir et d'amorcer la transition à une organisation et à un SIR qui prendront la relève. À cette fin, Covia demande que le Tribunal déroge au contrat de société et qu'ainsi le commandité soit habilité à attribuer les contrats conclus entre Gemini et ses agents de voyages abonnés à une entité qui prendra la relève et qui sera liée à Covia et que Covia soit libérée de la clause de non-concurrence qui l'empêcherait sinon de faire concurrence aux activités de la société en commandite.

Covia propose également que Canadien soit tenue d'établir un lien direct entre Canadien et l'entité qui prendra la relève et d'en assumer le coût, qu'un accès réciproque soit établi entre les « systèmes administratifs » servant à la gestion des agences de voyages de façon que les abonnés de Sabre ainsi que les abonnés du SIR de l'entité qui prendra la relève ne soient pas limités dans leur choix d'un système administratif en fonction du SIR utilisé et qu'il soit interdit à Canadien de commercialiser Sabre. Canadien et American sont toutes deux en faveur d'une ordonnance interdisant à Canadien et à Air Canada de commercialiser le SIR avec lequel chacune d'entre elles est associée. Les avocats d'Air Canada n'ont pas eu de directives quant à la question de savoir si Air Canada serait prête à prendre l'engagement de ne pas commercialiser les services liés au SIR si Canadien devait s'engager à renoncer à cette activité.

D. Positions des intervenants

- 20 -Les intervenants qui ont appuyé la position du directeur et qui ont présenté une argumentation finale sur les mesures de redressement ont dit préféré le dessaisissement des éléments d'actif plutôt que la dissolution de la société en commandite. Le procureur général de l'Alberta, American et l'Alliance canadienne des associations touristiques ACAT ») estiment qu'il s'agit de la mesure de redressement la moins préjudiciable. L'ACAT a dit redouter grandement qu'une ordonnance de dissolution fasse perdre à l'entité qui prendra la relève de Gemini une part de marché importante, comparativement à la position que Gemini occupe actuellement. Une autre raison invoquée par l'ACAT était que, même si un dessaisissement d'éléments d'actif ne changeait rien quant aux règles régissant les SIR, celles-ci n'auraient aucun effet au moment de la dissolution. Le Council of Canadian Airlines Employees souscrit à la position de PWA et de Canadien sans autres observations.

Les intervenants IBM Canada Ltd. IBM ») et Unisys Canada Inc.Unisys ») ont appuyé les défenderesses dans leur opposition à toute forme de mesure de redressement. Pour ce qui est du choix de la mesure de redressement, Unisys préfère le dessaisissement à la dissolution afin que les tiers ayant des contrats avec Gemini soient mieux protégés, tandis qu'IBM favorise une mesure de redressement (indéfinie) qui garantirait le « transfert méthodique des affaires de Gemini ».

L'Association des consommateurs du Canada, VIA Rail Canada Inc. et le procureur général du Manitoba n'ont pas participé à l'argumentation lors de la nouvelle audience.

- 21 -E. Mesure de redressement choisie par le Tribunal Comme le Tribunal a conclu que le contrat de prestation de services de Canadien entraînera vraisemblablement une diminution sensible de la concurrence dans le domaine du transport aérien, notre décision quant au choix de la mesure de redressement tient à la question de savoir s'il faut ordonner une cession des actions et des éléments d'actif de la société en commandite (mesure de redressement n o 1 ou n o 4) ou ordonner la dissolution de cette société (mesure de redressement n o 2 ou n o 3). En raison des directives données par la Cour d'appel fédérale, notre choix se limite aux mesures de redressement à l'égard desquelles il n'est pas nécessaire d'obtenir un consentement conformément à l'article 92. Dans notre décision datée du 22 avril 1993, nous avons mentionné que nous ne croyions pas être habilités à accorder un dédommagement pour la perte d'avantages futurs qui auraient été obtenus grâce au contrat de prestation de services 21 . La Cour d'appel fédérale ne nous a pas donné tort à cet égard; en fait, les juges Hugessen et MacGuigan nous ont explicitement donné raison 22 . Dans notre recherche d'une mesure de redressement, nous avons tenu compte de telles restrictions concernant nos pouvoirs.

21 Supra note 1 à la p. 130. 22 Supra note 3 à la p. 13 (motifs du juge Hugessen), à la p. 27 (motifs du juge MacGuigan). Le juge Hugessen a semblé considérer le champ de nos pouvoirs d'une façon encore plus restrictive, indiquant que nous ne pouvions ordonner une indemnisation à titre de « réparation du préjudice » causé par une modification de l'ordonnance par consentement, un concept probablement assez large pour empêcher l'émission d'une ordonnance concernant une « compression » ou des frais « inévitables », termes qui sont expliqués à la note 23 infra.

- 22 -Covia et Air Canada ont toutes deux fait observer clairement, dans leur argumentation et dans le témoignage d'un vice-président principal de la société mère de Covia, Galileo International, Michael Foliot, et dans le témoignage du directeur principal des services d'information chez Air Canada, David Burden, que, si le Tribunal autorise le désengagement de Canadien, elles ne sont pas disposées à rester associées à Gemini et veulent la dissolution de la société en commandite. Comme on l'a vu précédemment, Covia a signalé qu'elle-même, ou une société apparentée, serait intéressée à obtenir la clientèle de Gemini en vue d'exploiter des activités relatives aux SIR plus efficientes et plus économiques au Canada.

Comme nous l'avons mentionné dans notre ordonnance du 24 novembre 1993, le Tribunal a décidé d'exiger la dissolution de la société en commandite. Cette ordonnance est semblable, quoique pas tout à fait identique, à la mesure de redressement n o 2 proposée par le directeur. Nous sommes certes conscients que la dissolution pourrait être considérée comme l'option la plus préjudiciable et la plus perturbatrice, mais nous avons retenu cette option parce qu'aucune de ses trois associées n'a appuyé le maintien de Gemini. Le Tribunal est réticent à obliger les associées à demeurer liées aux termes d'une entente commerciale qui, selon elles, ne leur sera plus profitable ni utile lorsque Canadien se retirera de Gemini. À notre avis, il nous faut accorder une importance considérable à la préférence de l'associée qui a exprimé son intention de poursuivre l'exploitation des activités relatives aux SIR. Nous nous rangeons à l'avis de Covia selon lequel le maintien de sa présence dans les activités liées aux SIR au Canada sera facilité si Gemini n'existe plus.

- 23 -Les sociétés (autres que les associées) qui sont servies par Gemini sont un groupe de tiers qui sera affecté si Gemini devait être démantelée. Parmi ces tiers, mentionnons principalement VIA Rail Inc. VIA »). Compte tenu du témoignage de M. Burden d'Air Canada selon lequel un certain nombre d'autres fournisseurs sont capables d'assurer la prestation de services pour le compte d'Air Canada, nous n'avons pas de raison de croire que d'autres sociétés de transport, ayant des besoins beaucoup plus limités, auraient du mal à trouver un autre fournisseur. Bien que VIA ait le statut d'intervenant dans la présente instance, elle n'a pas participé à l'audience tenue en novembre.

1) Participation à la dissolution Contrairement aux propositions du directeur, la mesure de redressement prévoyant une dissolution retenue par le Tribunal exige que PWA conserve sa part dans Gemini. La dissolution de la société en commandite se fera selon les modalités prévues par les associées dans leur contrat de société. Comme PWA conserve sa part, celle-ci se verra conférer aux fins de la dissolution les droits et les obligations déterminés par les associées elles-mêmes. En particulier, les trois associées partageront les coûts et les produits de la dissolution, conformément au contrat qui les lie. Cette disposition semble appropriée, étant donné qu'aucune des associées ne souhaite demeurer dans la société en commandite si le système interne de réservation de Canadien est transféré. Compte tenu de cette considération, il n'est pas nécessaire que nous déterminions si nous avions compétence pour ordonner un transfert de la part de PWA en l'absence de toute préoccupation d'ordre concurrentiel concernant la participation de PWA dans Gemini.

- 24 -Les contrats des abonnés sont le principal élément d'actif de Gemini. Covia a exigé que nous autorisions le commandité à lui céder ces contrats (apparemment, sans frais) afin d'assurer ainsi le maintien de la concurrence dans les services offerts par les SIR au Canada. Étant donné l'intérêt des associées, nous ne voyons pas la nécessité de cette mesure draconienne. Comme toutes les associées partagent les coûts et les produits de la dissolution conformément à leur contrat de société, elles ont un intérêt commun à liquider Gemini de la façon la moins onéreuse possible et en causant le moins de préjudice possible à son principal élément d'actif, sa clientèle. Si celle-ci est perdue en raison de conflits entre les associées et de retards dans la cession des contrats, alors les trois associées connaîtront des difficultés au cours du processus de liquidation. En outre, on peut difficilement établir laquelle des trois associées tirerait profit de telles actions. Il n'est pas dans l'intérêt des transporteurs aériens, en tant que principaux utilisateurs des SIR afin de vendre leur produit, de nuire à la concurrence entre les SIR au Canada. En obtenant la clientèle de Gemini, Covia pourrait bien accroître considérablement ses ventes à l'échelle mondiale et dégager des marges intéressantes.

2) Date du transfert du système interne de réservation D'après les témoignages et l'argumentation de PWA et de Canadien, le meilleur moment pour effectuer le transfert du système interne de réservation serait entre le 1 er novembre et le 15 novembre 1994, le 5 novembre 1994 étant la date cible idéale. Ces dates sont fondées sur l'état d'avancement des préparatifs de Sabre et sur la nécessité de pouvoir profiter d'une période creuse pendant laquelle les préposés aux billets de Canadien pourraient être libérés en vue de suivre une formation intensive

- 25 ­sur le nouveau système. Advenant que le Tribunal soit disposé à ordonner le transfert, les autres défenderesses n'ont donné aucune raison expliquant pourquoi une autre date raisonnable serait préférable pour elles ou leur occasionnerait moins d'ennuis.

3) Frais Dans notre décision du 22 avril 1993, nous avons conclu que, si nous avions eu le pouvoir de modifier le contrat de prestation de services de la façon dont l'avait alors demandé le directeur, ce qui comprenait le transfert du système interne de réservation de Canadien et le maintien de Gemini, nous aurions obligé Canadien à rembourser Gemini des frais encourus pour le transfert de Gemini à Sabre (frais de « transition »), des frais de « compression » et des frais « inévitables » 23 . Dans le scénario de dissolution actuel, nous avons ordonné à Canadien de rembourser uniquement les frais de « transition » ou les frais directs liés au transfert de la prestation de services. D'après le témoignage de M. Lupton de Canadien, les frais prévus s'élèveraient à 700 000 $, mais le montant exact à rembourser devra être déterminé par les parties. Comme la liquidation de Gemini débutera dès la dissolution, la question de la définition et de l'importance des frais que Gemini devra assumer à l'égard de la compression et du maintien des opérations sans la participation de Canadien devient

23 Supra note 1 aux pp. 131-33. Les frais de « compression » sont les frais ponctuels occasionnés par la réduction des opérations de Gemini, tandis que les frais « inévitables » sont les frais de caisse superflus qui ne peuvent être éliminés immédiatement et qui doivent être assumés pendant un certain temps par l'entreprise qui prend la relève.

- 26 ­hors de propos. Tous les frais qui seront absorbés par Gemini affecteront le solde net qui sera partagé par les trois associées une fois la liquidation terminée.

Des éléments de preuve comptables considérables ont été présentés au Tribunal en ce qui concerne les répercussions sur Gemini du transfert de la prestation de services à Canadien. Même si certains de ces éléments de preuve avaient davantage trait à la question du dédommagement pour perte d'avantages futurs, certains avaient trait à la question des frais de caisse liés à la compression et aux frais de caisse inévitables. Nous n'avons pas à examiner ces éléments de preuve plus à fond. Il n'a jamais été de notre ressort de trancher la première question, et la seconde est devenue discutable, comme on l'a expliqué précédemment, parce qu'Air Canada et Covia ont dit préférer la dissolution.

4) Éléments d'actif devant être transférés Toutes les mesures de redressement proposées par le directeur prévoient un transfert de la « base de données de Canadien », telle qu'elle est définie dans le contrat de prestation de services, ainsi que de tous les autres éléments d'actif « nécessaires au transfert méthodique de la participation » de Canadien. PWA et Canadien n'ont pas formulé d'objection en ce qui concerne la formulation du directeur et ne nous en ont proposé aucune autre. Nous avons donc incorporé la formulation du directeur dans notre ordonnance. D'après la description qui en a été faite dans la preuve, la base de données est composée de dossiers des noms de passagers DNP »), pour les personnes ayant fait

- 27 ­des réservations pour voyager à bord des appareils de Canadien, de dossiers relatifs aux services de fret, pour les personnes qui utilisent les services de fret à bord des appareils de Canadien, ainsi que des bibliothèques de renseignements et des bibliothèques servant à la formation 24 . Au cours de l'argumentation, les avocats de PWA ont demandé expressément le transfert à Canadien d'un élément d'actif particulier, soit le système de câblage reliant les terminaux de ses agents situés dans les aéroports et les billetteries à des concentrateurs. Une description plus détaillée de cet élément d'actif, appelé « système de câblage de Pegasus », est fournie dans notre ordonnance. Canadien et Gemini sont en désaccord au sujet de la propriété du système de câblage. Compte tenu du témoignage non contredit de M. Lupton selon lequel le système de câblage n'a aucune valeur pour Gemini, tandis que le coût et les difficultés liées à la logistique que son remplacement représente pour Canadien sont très élevés, nous avons désigné de façon précise dans notre ordonnance le système de câblage comme faisant partie des éléments d'actif qui devront être transférés. Toutefois, nous n'avons pas ainsi l'intention de limiter à ce seul système la catégorie des « éléments d'actif nécessaires au transfert méthodique de la participation » de Canadien. 5) Collaboration Pour que notre ordonnance soit mise à exécution, il est évident que Canadien a besoin de la collaboration du commandité, d'Air Canada et de Covia afin d'assurer le transfert méthodique du système interne de réservation. Nous avons donc ordonné une telle collaboration.

24 Transcription, vol. 23 à la p. 4213 (15 novembre 1993).

- 28 -6) Le SIR qui prendra la relève Le directeur a demandé qu'Air Canada, Covia et le commandité, collectivement ou individuellement, ne soient pas empêchés de poursuivre l'exploitation de la société en commandite après la dissolution au moyen d'une nouvelle entité commerciale, et ce, sans la participation de Canadien. Covia est allée plus loin en demandant que la voie soit libre afin qu'elle puisse amorcer la transition à un système qui prendra la relève dès qu'elle le jugera approprié après le prononcé de notre ordonnance. Nous avons déjà exposé cette demande dans la section consacrée aux « positions des autres parties ». Nous avons reconnu l'importance de faciliter le maintien de la concurrence dans le domaine des SIR et, pour cette raison, avons inclus une condition dans l'ordonnance permettant également à Air Canada et au commandité d'exploiter une telle entreprise soit avant ou après la dissolution.

7) Autres questions Bon nombre des propositions supplémentaires soumises par Covia ne s'inscrivent pas de façon soutenable dans les mesures de redressement que le Tribunal peut envisager en vertu de l'article 92 en l'absence du consentement des parties. Les propositions de Covia concernant la commercialisation de Sabre par Canadien, l'accès réciproque entre les systèmes administratifs de Sabre et l'entité qui succédera à Gemini ainsi que l'établissement d'un lien d'accès direct entre Canadien et cette entité qui prendra la relève ont effectivement trait à des questions qui peuvent revêtir de l'importance pour ce qui est de la concurrence sur les marchés des SIR. Toutefois, le Tribunal n'a pas été convaincu que ces conditions étaient essentielles à une mesure de redressement

- 29 ­efficace en l'espèce, même s'il avait été démontré que nous aurions eu le pouvoir d'imposer de telles conditions.

Les règles régissant les SIR ont également été soulevées. On ne doute à peu près pas de l'avantage que représentent les règles régissant les SIR. Lorsque le Tribunal a émis des règles qui s'inscrivaient dans l'ordonnance par consentement de 1989, il prévoyait que Transports Canada établirait par la suite une série de règles qui viendraient rendre inutiles et remplacer les règles émises par lui. Selon le témoignage de la directrice de la Politique nationale de l'air à Transports Canada, Valérie Dufour, les choses n'ont pas progressé depuis la diffusion, en janvier 1991, d'un énoncé de principe provisoire à l'intention des participants de l'industrie, parce que le Ministère attendait qu'un certain nombre d'autres événements surviennent, notamment la révision des règles régissant les SIR aux États-Unis. Transports Canada est maintenant prêt à mettre fin à ce travail, et M me Dufour estime qu'un règlement renfermant les nouvelles règles pourrait être adopté d'ici un an 25 . Le Tribunal est rassuré par ce témoignage selon lequel la dissolution ne débouchera probablement pas sur une longue période pendant laquelle l'industrie des SIR ne sera pas régie par des règles, généralement jugées nécessaires à son bon fonctionnement.

8) Possibilité offerte aux parties de convenir d'autres modalités L'objectif principal que poursuit le Tribunal en vue de protéger la concurrence demeure le désengagement de Canadien du contrat de prestation de services. Bien que nous ayons choisi ce qui 25 Transcription, vol. 23 à la p. 4124 (15 novembre 1993).

- 30 ­nous semblait être, à la lumière de l'ensemble de la preuve et de l'argumentation, la formule qui répondait au plus grand nombre possible de préoccupations des parties, nous avons donné la possibilité aux parties de déterminer elles-mêmes une mesure de redressement différente, qui leur permettrait d'atteindre le même objectif. En fixant cet objectif, nous avons pensé ainsi permettre aux parties de définir les modalités d'une façon plus précise et plus réaliste. À notre avis, les parties ont déjà eu grandement le temps pour analyser leurs positions respectives en vue de parvenir à une entente d'ici le 8 décembre 1993. Si elles n'en viennent pas à un accord unanime, les modalités prévues par le Tribunal entreront en vigueur le 14 décembre 1993.

FAIT à Ottawa, ce 1 er jour de décembre 1993. SIGNÉ au nom du Tribunal par le juge présidant. (s) B.L. Strayer B.L. Strayer

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