Documentation

Informations sur la décision

Contenu de la décision

NOTE D’INFORMATION

Le 31 octobre 2022, le Tribunal de la concurrence a rendu sa décision dans l’affaire Canada (Commissaire de la concurrence) c Parrish & Heimbecker, Limited (CT-2019-005).

Le Tribunal a rejeté la demande du commissaire. Le Tribunal a conclu que le commissaire n’avait pas prouvé que l’acquisition d’un silo-élévateur à grains situé près de Virden (Manitoba) diminuerait sensiblement la concurrence dans les marchés relatifs à l’achat de blé et de canola dans les environs du silo-élévateur.

Résumé technique

Le Tribunal a rejeté la demande présentée par le commissaire de la concurrence (« commissaire ») contre Parrish & Heimbecker, Limited (« P&H ») en vertu de l’article 92 de la Loi sur la concurrence, LRC 1985, c C‑34 (« Loi »).

 

La demande du commissaire faisait suite à l’acquisition par P&H de dix silos-élévateurs à grains primaires (« silos-élévateurs ») situés dans l’Ouest canadien (« transaction »). Avant la transaction, Louis Dreyfus Company Canada ULC (« LDC »), un des concurrents de P&H dans l’industrie des grains, possédait et exploitait ces dix silos-élévateurs. Dans sa demande, le commissaire a contesté l’acquisition par P&H de l’un de ces silos-élévateurs, à savoir le silo-élévateur de LDC situé sur la route transcanadienne à Virden (Manitoba) (« silo-élévateur de Virden »), près de la frontière entre le Manitoba et la Saskatchewan.

En bref, le commissaire a soutenu qu’en acquérant le silo-élévateur de Virden (« acquisition”), P&H causait ou causerait vraisemblablement une diminution sensible de la concurrence dans le marché de la prestation de services de manutention des grains (« SMG ») de blé et de canola pour les fermes qui bénéficiaient de la concurrence entre le silo-élévateur de Virden et le silo-élévateur voisin appartenant à P&H et situé à Moosomin (Saskatchewan) (« silo-élévateur de Moosomin »). Le commissaire a fait valoir qu’à la suite de l’acquisition, les fermes qui avaient auparavant bénéficié de la concurrence entre P&H et LDC paieraient vraisemblablement plus cher pour obtenir des SMG des silos-élévateurs de Moosomin et de Virden, et recevraient donc moins d’argent pour leur blé et leur canola. Dans sa demande, le commissaire a sollicité une ordonnance obligeant P&H à se départir soit du silo-élévateur de Virden, soit du silo-élévateur de Moosomin, de même qu’une ordonnance interdisant à P&H d’acquérir un silo-élévateur dans les marchés pertinents pendant une certaine période.

Le Tribunal a d’abord conclu que, dans les circonstances de l’espèce, le produit pertinent était non pas la vente de SMG aux fermes, comme l’affirmait le commissaire, mais l’achat de blé et de canola par P&H. La définition du marché du produit pertinent a constitué un point de désaccord fondamental entre les parties, et a considérablement influé sur de nombreux éléments de l’analyse globale du Tribunal. Le Tribunal a conclu que le marché du produit proposé par le commissaire (c.‑à‑d. la vente de SMG) n’était pas fondé sur la réalité commerciale et sur la preuve. De plus, en l’espèce, l’approche de la « valeur ajoutée » préconisée par le commissaire à l’égard de la définition du marché du produit a échoué sur les faits, d’un point de vue jurisprudentiel et juridique, et sur le plan conceptuel et économique.

Se penchant ensuite sur le marché géographique, le Tribunal a conclu que, selon la prépondérance des probabilités, le marché géographique pertinent pour l’achat de blé comprenait au moins sept silos-élévateurs, y compris les silos-élévateurs de Virden et de Moosomin. Quant au marché géographique pertinent pour l’achat de canola, il comprenait au moins dix silos-élévateurs ainsi que quatre usines de trituration.

Le Tribunal a ensuite conclu que le commissaire n’avait pas établi que l’acquisition diminuait sensiblement la concurrence dans l’un ou l’autre des marchés pertinents, ou le ferait vraisemblablement à l’avenir. Le Tribunal a tiré cette conclusion après avoir examiné une abondante preuve économique et factuelle, comme le prévoient les articles 92 et 93 de la Loi.

Le Tribunal a conclu que l’acquisition du silo-élévateur de Virden ne diminuait pas de façon sensible, et ne diminuerait vraisemblablement pas de façon sensible, le degré de concurrence sur les prix ou sur des dimensions autres que les prix dans l’achat de blé et de canola dans les marchés géographiques pertinents, par rapport au degré de concurrence qui aurait vraisemblablement prévalu en l’absence du fusionnement. Plus précisément, la preuve démontrait que les effets de l’acquisition sur les prix n’étaient pas matériels, que plusieurs concurrents réels demeuraient après l’acquisition et que les parts de marché postérieures au fusionnement étaient en deçà du seuil de 35 %. Le Tribunal a conclu que l’acquisition causait une certaine diminution de la concurrence dans l’achat de blé, mais la preuve ne lui permettait pas de conclure que cette diminution atteignait le seuil de sensibilité exigé par l’article 92.

Vu ces conclusions, le Tribunal n’était pas tenu de trancher la question relative aux gains en efficience allégués par P&H au titre de l’article 96 de la Loi. Cependant, compte tenu des observations détaillées présentées par les parties sur les gains en efficience et de la nature des questions soulevées, le Tribunal s’est penché sur la question. Le Tribunal a conclu que P&H n’avait pas démontré de façon claire et convaincante que l’acquisition de Virden entrainerait vraisemblablement des gains en efficience. P&H ne se serait donc pas acquittée de son fardeau de démontrer, selon la prépondérance des probabilités, que ses prétendus gains en efficience surpasseraient et neutraliseraient les effets anticoncurrentiels de la diminution de la concurrence résultant de l’acquisition.

La demande du commissaire a donc été rejetée avec dépens.

Confidentialité et membres de la formation

Les motifs du Tribunal sont pour l’instant confidentiels afin de protéger les éléments de preuve visés par une ordonnance de confidentialité. Le Tribunal publiera une version publique de la décision une fois qu’il aura entendu les parties concernant les renseignements contenus dans les motifs qui doivent demeurer confidentiels.

Le Tribunal était formé de M. le juge Denis Gascon (membre judiciaire et ancien président du Tribunal), de M. le juge Andrew D. Little (membre judiciaire et actuel président du Tribunal) et de Mme Ramaz Samrout (membre non-judiciaire du Tribunal).

 

Traduction certifiée conforme

Diane Provencher

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.