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Tribunal de la concurrence

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Competition Tribunal

VERSION PUBLIQUE
TRADUCTION OFFICIELLE

Référence : Canada (Commissaire de la concurrence) c Secure Energy Services Inc , 20 23 Trib conc 02

No de dossier : CT-2021-002

No de document du greffe : 349

DANS L’AFFAIRE DE l’acquisition de Tervita Corporation par SECURE Energy Services Inc ;

ET DANS L’AFFAIRE d’une demande présentée par le commissaire de la concurrence en vue d’obtenir une ordonnance au titre de l’article 92 de la Loi sur la concurrence ;

ENTRE :

Le commissaire de la concurrence

(demandeur)

et

SECURE Energy Services Inc

(défenderesse)

 

sceau du Tribunal de la concurrence

Dates de l’audience : du 9 au 12, du 16 au 19 et du 24 au 27 mai 2022, du 30 mai au 2 juin 2022, et du 15 au 17 juin 2022

En présence de : monsieur le juge en chef P. Crampton, monsieur le juge D. Gascon, et monsieur T. Horbulyk

Date de l’ordonnance : le 3 mars 2023

MOTIFS DE L’ORDONNANCE ET ORDONNANCE


Table des matières

 

 

I. Introduction 4

II. Les parties 7

III. Le fusionnement 7

IV. ITRE, lieux d’enfouissement et PDEA 8

V. Contexte et résumé des allégations du commissaire 8

VI. Résumé de la réponse de Secure 11

VII. Dispositions législatives pertinentes 13

VIII. Les questions en litige 14

IX. Les témoins 14

A. Les témoins experts 14

B. Les témoins ordinaires 17

(1) Le commissaire 17

(2) Secure 19

X. Objections à l’égard de la preuve 21

A. Le recours par le commissaire à l’article 69 21

B. La demande du commissaire visant la réouverture de sa preuve 24

XI. Les marchés pertinents 28

A. Marchés du produit 28

B. Marchés géographiques 30

C. Les marchés « pertinents » aux fins de l’analyse de la DSC et de l’analyse des dessaisissements 33

XII. Parts de marché 34

XIII. Question 1 – Le fusionnement aura-t-il vraisemblablement pour effet de diminuer sensiblement la concurrence? 36

A. Principes juridiques applicables 36

B. Les positions des parties 38

(1) Le commissaire 38

(2) Secure 39

C. L’appréciation faite par le Tribunal 40

(1) Ratios de détournement, marges et effets prévus sur les prix 40

(2) Disparition d’un concurrent dynamique et efficace (alinéa 93f)) 48

(3) Concurrence réelle restante (alinéa 93e)) 51

(4) Disponibilité de produits pouvant servir de substituts acceptables (alinéa 93c)) 65

(5) Entraves à l’accès (alinéa 93d)) 67

(6) Autres facteurs pertinents (alinéa 93h)) 74

(7) Conclusion au regard de la DSC 79

XIV. Question 2 – Quelle est la mesure corrective appropriée? 80

A. Introduction 80

B. La demande de Secure visant la tenue d’une audience distincte sur les mesures correctives 81

C. Les arguments de fond avancés par Secure et l’appréciation faite par le Tribunal 83

D. Les dessaisissements requis 86

(1) Introduction 86

(2) Lieux d’enfouissement 87

(3) ITRE 90

(4) PDEA 100

(5) Conclusion au regard des dessaisissements 104

XV. Question 3 – Les conditions d'application de la défense fondée sur les gains en efficience ont-elles été remplies? 106

A. Principes juridiques 106

(1) Introduction 106

(2) Gains en efficience admissibles 107

(3) Effets anticoncurrentiels admissibles 112

(4) L’analyse comparative prévue à l’article 96 119

B. L’appréciation faite par le Tribunal 119

(1) Gains en efficience allégués par Secure 119

(2) Les effets anticoncurrentiels allégués par le commissaire 144

(3) Analyse comparative 164

XVI. Conclusion 166

XVII. Dépens 166

XVIII. Ordonnance 168

ANNEXE 1 – Dispositions législatives pertinentes 170

ANNEXE 2 – Liste des marchés pertinents 174

ANNEXE 3 – Conclusions relativement à la DSC, par marché 182

ANNEXE 4 – Résumé des conclusions du Tribunal relativement aux dessaisissements 187

ANNEXE 5 – Dates de fermeture des installations 191

ANNEXE 6 – Ordonnance 194

 


I. Introduction

[1] Dans la présente demande, le commissaire de la concurrence (le « commissaire ») allègue que l’acquisition de Tervita Corporation (« Tervita ») par SECURE Energy Services Inc. (« Secure ») en juillet 2021 a diminué sensiblement la concurrence dans environ 143 marchés distincts dans l’Ouest canadien. Pour remédier à cette situation, le commissaire demande le dessaisissement de 41 installations qui appartenaient auparavant à Tervita.

[2] La demande porte essentiellement sur deux questions soulevées par Secure dans le contexte du moyen de défense fondé sur les gains en efficience que prévoit l’article 96 de la Loi sur la concurrence, LRC 1985, c C-34 (la « Loi »). La première question consiste à déterminer si certains types d’effets anticoncurrentiels allégués qui ne sont pas liés aux prix (les « effets hors prix ») peuvent être pris en considération dans l’évaluation de la perte sèche pour l’économie canadienne qui résulterait vraisemblablement de l’acquisition. La deuxième question consiste à déterminer si le commissaire est parvenu à démontrer ces effets, à tout le moins dans la mesure requise pour que la demande soit accueillie.

[3] Les effets hors prix concernent 25 installations (les « installations visées par une fermeture ») qui ont été ou seront complètement ou partiellement fermées par Secure[1]. Ces installations gèrent différents types de déchets que génèrent les producteurs de pétrole et de gaz sur leurs sites de production. Environ les deux tiers des installations visées par une fermeture appartenaient auparavant à Tervita.

[4] Le commissaire allègue qu’au nombre des effets hors prix figure la hausse des frais de transport que devront assumer les clients des installations visées par une fermeture, puisqu’ils auront désormais à parcourir de plus grandes distances pour se rendre aux installations de Secure (les « installations absorbantes »). Le commissaire soutient également que les effets hors prix se traduiront par une augmentation du temps d’attente pour les clients qui doivent livrer leurs déchets aux installations absorbantes, par des contraintes en matière de capacité, par un effritement de la qualité des services et des relations, et par une diminution de la valeur accordée à la réputation de l’exploitant des installations absorbantes par rapport à celle de l’exploitant des installations visées par une fermeture. Il est entendu que les effets hors prix allégués s’ajoutent aux effets anticoncurrentiels allégués sous forme de hausses de prix et de reculs de la production (les « effets sur les prix et sur la production »).

[5] Le Tribunal[2] est d’accord avec le commissaire pour dire que l’acquisition de Tervita par Secure (le « fusionnement ») a diminué sensiblement la concurrence dans 136 des 143 marchés visés par cette allégation. Dans la mesure où ces marchés représentent près de la moitié des 271 régions de chevauchement concurrentiel entre Secure et Tervita (collectivement les « parties au fusionnement ») désignées par le commissaire, il est difficile de concevoir un fusionnement plus anticoncurrentiel.

[6] Le Tribunal conclut que 29 des 41 dessaisissements demandés par le commissaire suffiraient à rétablir la concurrence au niveau requis, sous réserve de la conclusion concernant le moyen de défense fondé sur les gains en efficience invoqué par Secure.

[7] Eu égard à l’évaluation de la perte sèche qui résulterait vraisemblablement du fusionnement, le Tribunal est d’accord avec le commissaire pour dire que les effets hors prix peuvent être pris en considération dans la mesure de la perte sèche qui découlerait vraisemblablement du fusionnement, pourvu que ces effets satisfassent aux exigences énoncées à l’article 96 et que la démonstration de ces effets soit faite selon la prépondérance des probabilités. Il s’ensuit que le Tribunal rejette la position de Secure selon laquelle les effets hors prix ne sont pas admissibles aux fins de l’application de l’article 96.

[8] Le Tribunal est également du même avis que le commissaire lorsque ce dernier affirme que les effets hors prix peuvent être pris en considération dans toutes les régions où il y avait auparavant un chevauchement concurrentiel entre Secure et Tervita, soit dans 271 régions géographiques distinctes définies selon l’emplacement de la clientèle. En d’autres termes, le Tribunal convient avec le commissaire que les effets anticoncurrentiels admissibles au titre de l’article 96 ne se limitent pas au plus petit nombre de marchés au sein desquels il a été déterminé par le Tribunal que le fusionnement avait eu pour effet, ou aura vraisemblablement pour effet, d’entraîner une diminution sensible de la concurrence (« DSC »). Il en est ainsi parce que l’article 96 prévoit une évaluation de tous les « [...] effets de l’empêchement ou de la diminution de la concurrence [...] ».

[9] Toutefois, étant donné que les effets hors prix observés à l’extérieur des limites des 271 régions de chevauchement concurrentiel ne découlent pas de l’empêchement ou de la diminution de la concurrence, ils n’entrent pas dans le champ d’application de l’article 96. Il est entendu que le commissaire n’a pas fait mention dans ses allégations d’un « empêchement » de la concurrence au-delà des 271 régions où il y avait un chevauchement concurrentiel entre Secure et Tervita avant le fusionnement.

[10] Le commissaire a d’abord fait valoir que la perte sèche associée aux effets hors prix totaliserait vraisemblablement 78 millions de dollars par année environ. Lorsqu’on restreint l’analyse aux clients des parties au fusionnement qui proviennent des 271 régions de collecte se chevauchant, l’estimation est revue à la baisse et se situe alors dans une fourchette allant de 40 millions de dollars à 55 millions de dollars, selon l’approche adoptée parmi deux possibilités[3]. Le commissaire a par la suite apporté d’autres modifications à ses calculs, ce qui a eu pour effet de ramener son estimation à environ 50 millions de dollars pour l’ensemble des clients de Secure et de Tervita, et à une valeur se situant entre 15,9 millions de dollars et 32,6 millions de dollars dans le cas des clients se trouvant dans les régions de chevauchement concurrentiel.

[11] S’agissant des effets sur les prix et sur la production, le commissaire a d’abord allégué que la perte sèche annuelle attribuable à ces effets se situerait vraisemblablement entre 1 million de dollars et 4,4 millions de dollars, selon l’estimation de l’élasticité de la demande du marché admise par le Tribunal. Le commissaire a par la suite rehaussé la limite supérieure de la fourchette d’estimation, à [traduction] « environ 6 millions de dollars ».

[12] Après avoir examiné l’ensemble des éléments de preuve, le Tribunal conclut que le commissaire est uniquement parvenu à démontrer une perte sèche annuelle attribuable aux effets hors prix totalisant environ 2 808 132 $[4] et une perte sèche annuelle associée aux effets sur les prix et sur la production se situant entre 500 000 $ et 1 500 000 $ au minimum, pour la période allant de 2023 à 2033[5]. La somme de ces deux montants annuels se situera approximativement entre 3 308 132 $ et 4 308 132 $ au minimum. Si on tient compte de la perte sèche accumulée depuis la date du fusionnement, la limite inférieure de la fourchette de la perte sèche s’établit alors à environ 4 333 591 $ et la limite supérieure, à 5 643 572 $ au minimum, pour la période de dix ans allant de 2023 à 2033. Selon la méthode de la valeur actualisée nette (la « VAN »), la limite inférieure de la fourchette correspond à environ 30 219 522 $ et la limite supérieure, à 39 354 443 $ au minimum.

[13] Le Tribunal fait observer que l’écart marqué entre les effets hors prix démontrés et les valeurs alléguées par le commissaire s’explique en partie par la difficulté associée au fait de quantifier ces effets selon la prépondérance des probabilités. Finalement, la majorité des membres de la formation a conclu que les estimations suivant une approche « descendante » issues des modèles économiques appliqués par le commissaire n’allaient pas dans le sens de la prépondérance de la preuve versée au dossier. Par conséquent, il ne restait au commissaire que son estimation des effets hors prix fondée sur une approche « ascendante », à savoir la hausse estimée des frais de transport qui résulterait vraisemblablement du fusionnement. La majorité des membres de la formation conclut que le commissaire ne s’est pas acquitté de son fardeau de quantifier tout autre effet hors prix selon la prépondérance des probabilités et au moyen d’une preuve claire et convaincante. Un des membres de la formation est d’avis que les modèles économiques employés par le commissaire étaient suffisants pour démontrer, selon la prépondérance des probabilités, l’existence d’effets hors prix correspondant à un montant plus élevé.

[14] Dans sa défense reposant sur les gains en efficience, Secure alléguait que le fusionnement aurait vraisemblablement pour effet d’entraîner des gains en efficience admissibles qui surpasseraient et neutraliseraient les effets de la diminution de la concurrence alléguée par le commissaire.

[15] Le Tribunal a examiné l’ensemble des éléments de preuve, et il ne partage pas l’avis de Secure. En bref, Secure est uniquement parvenue à démontrer des gains en efficience admissibles totalisant environ 32 205 813 $ (VAN) pour la période allant de 2023 à 2033. Le montant annualisé équivalent se chiffre approximativement à 4 618 433 $. Ces montants correspondent aux gains en efficience qui ne seraient vraisemblablement pas réalisés si l’ordonnance du Tribunal était rendue (les « gains en efficience autrement non réalisés »), ainsi que le prévoit l’article 96.

[16] Ces gains en efficience sont largement inférieurs aux gains en efficience totaux allégués par Secure, et ce, principalement pour deux raisons. Dans un premier temps, Secure ne s’est pas acquittée du fardeau qui lui incombait de prouver les économies de coûts qu’elle réaliserait par suite de la rationalisation des installations. Dans un deuxième temps, Secure n’a pas démontré que certaines de ses allégations d’[traduction]« économies de coûts organisationnels » répondaient aux exigences du moyen de défense fondé sur les gains en efficience prévu à l’article 96 de la Loi.

[17] Étant donné que les gains en efficience autrement non réalisés admissibles qui résulteraient vraisemblablement du fusionnement (4 618 433 $ annuellement et 32 205 813 $ suivant la VAN) ne surpassent pas, et ne neutralisent pas, la perte sèche qui découlerait vraisemblablement du fusionnement (de 4 333 591 $ à 5 643 572 $ au minimum annuellement, et de 30 219 522 $ à 39 354 443 $ au minimum suivant la VAN), le moyen de défense fondé sur les gains en efficience invoqué par Secure ne peut être accueilli.

II. Les parties

[18] Le commissaire, nommé en vertu de l’article 7 de la Loi, est chargé d’assurer et de contrôler l’application de la Loi.

[19] Secure est une société cotée en bourse dont le siège social est situé à Calgary (Alberta), et elle est inscrite à la Bourse de Toronto. Au moment du fusionnement, Secure possédait et exploitait un réseau d’installations offrant divers services d’élimination des déchets dans le bassin sédimentaire de l’Ouest canadien (le « BSOC »), dont 18 installations de traitement, de récupération et d’élimination (« ITRE »), ou terminaux à services complets (« TSC »), sept lieux d’enfouissement industriels (« lieux d’enfouissement »), et 15 puits de déversement d’eau autonomes PDEA »).

[20] Secure offrait également, et fournit encore aujourd’hui, un large éventail de services additionnels qui ne sont pas en litige en l’espèce, notamment divers services environnementaux associés aux activités de forage pétrolier et gazier, comme la vente de fluides de forage, de substances chimiques utilisées dans le cadre de la production ainsi que de services relatifs à l’eau, de même que la démolition, la mise hors service, la remise en état et la réhabilitation de puits de gaz et de pétrole.

[21] Avant le fusionnement, Tervita était une société cotée en bourse qui offrait des services de gestion des déchets, et son siège social était situé à Calgary (Alberta). Elle possédait et exploitait un réseau constitué de 44 ITRE, de 22 lieux d’enfouissement, de 8 PDEA et de 3 installations de stockage en caverne (« cavernes ») dans le BSOC. Tervita fournissait également une gamme de services additionnels qui ne sont pas en litige en l’espèce, notamment des services de démolition, de mise hors service, de remise en état et de réhabilitation de puits de gaz et de pétrole.

III. Le fusionnement

[22] Suivant une convention d’arrangement conclue le 8 mars 2021, Secure a acquis toutes les actions émises et en circulation de Tervita. Les deux sociétés ont ensuite fusionné le 2 juillet 2021. Dans le cadre du fusionnement, les anciens actionnaires de Secure et de Tervita ont acquis respectivement environ 52 % et 48 % de l’entité fusionnée.

[23] À la suite du fusionnement, Secure a mis en œuvre un plan d’intégration sur six ans.

IV. ITRE, lieux d’enfouissement et PDEA

[24] De façon générale, la production de pétrole et de gaz génère de grandes quantités de déchets sous forme liquide ou solide, entre autres ce qu’on appelle l’« eau produite » de même que des eaux usées, des boues, des déblais de forage, des sols contaminés et des substances chimiques. Les producteurs qui préfèrent confier à un tiers l’élimination de leurs déchets vont habituellement se tourner vers les ITRE, les lieux d’enfouissement ou les PDEA[6].

[25] Les ITRE traitent les émulsions et les boues contaminées qui contiennent un mélange de pétrole, d’eau, de gaz et d’autres substances. À l’ITRE, la centrifugation et des procédés thermiques permettent de séparer les principaux constituants des mélanges. Si l’ITRE comporte un terminal relié à un pipeline, le pétrole extrait des déchets est acheminé par les canalisations jusqu’à une usine de traitement des hydrocarbures. Dans le cas contraire, le pétrole est transporté par camion jusqu’à une installation dotée d’un terminal. Les eaux usées sont évacuées au moyen d’un puits de déversement, lequel est souvent situé au même endroit que l’ITRE, tandis que les matières solides sont envoyées dans un lieu d’enfouissement.

[26] Les lieux d’enfouissement sont des sites aménagés aux fins de l’élimination des déchets solides. En plus de recueillir les déchets solides en provenance des ITRE, les exploitants de sites d’enfouissement traitent les déchets solides provenant directement des producteurs de pétrole et de gaz, comme les sols contaminés et les déblais de forage. En Alberta et en Saskatchewan, les lieux d’enfouissement qui reçoivent les flux de déchets des champs pétrolifères sont répartis en deux catégories : les lieux d’enfouissement de catégorie I (déchets dangereux des champs pétrolifères) et les lieux d’enfouissement de catégorie II (déchets non dangereux des champs pétrolifères). En Alberta et en Saskatchewan, la plupart des déchets pétroliers et gaziers sous forme solide ne sont pas dangereux, et ils peuvent donc être envoyés dans les lieux d’enfouissement de catégorie II. En Colombie-Britannique, les déchets solides provenant des champs pétrolifères, tant ceux qui sont dangereux que ceux qui ne le sont pas, sont acheminés vers ce qu’on appelle des lieux d’enfouissement « sécuritaires ».

[27] Les PDEA servent à l’élimination de l’eau produite ou des eaux usées[7].

V. Contexte et résumé des allégations du commissaire

[28] Le commissaire a déposé la présente demande le 29 juin 2021, peu de temps après avoir été informé que Secure et Tervita avaient l’intention de conclure le fusionnement le 2 juillet 2021, à 0 h 01.

[29] Le commissaire a déposé simultanément une deuxième demande au titre de l’article 104 de la Loi (la « demande au titre de l’article 104 »), dans laquelle il sollicitait une ordonnance provisoire enjoignant aux parties au fusionnement de ne pas procéder à la transaction tant qu’une décision finale n’ait pas été rendue sur la présente demande.

[30] Le lendemain, le commissaire a déposé une nouvelle demande en vue d’obtenir une ordonnance « provisoire provisoire » empêchant l’exécution du fusionnement jusqu’à l’instruction de la demande au titre de l’article 104. En fin de compte, le Tribunal a rejeté les deux demandes (Canada (Commissaire de la concurrence) c Secure Energy Services Inc et Tervita Corporation, 2021 Trib conc 4 (la « décision visant la demande d’ordonnance provisoire provisoire »); Canada (Commissaire de la concurrence) c Secure Energy Services Inc, 2021 Trib conc 7).

[31] Le commissaire a interjeté appel de la décision visant la demande d’ordonnance provisoire provisoire. Bien que l’appel du commissaire ait été accueilli à l’égard d’un des aspects de cette décision, la décision de la Cour d’appel fédérale (la « CAF ») n’a aucune incidence sur la présente demande (Canada (Commissaire de la concurrence) c Secure Energy Services Inc et Tervita Corporation, 2022 CAF 25).

[32] Compte tenu du fait que le fusionnement a été conclu, la réparation demandée dans le contexte de la présente demande a été modifiée. Aux fins des présentes, il suffit de mentionner que, dans son avis de demande modifié (la « demande modifiée »), le commissaire sollicitait une ordonnance enjoignant à Secure de se départir des éléments d’actifs [traduction] « permettant d’assurer une réparation efficace », sans donner plus de détails.

[33] Le Tribunal fait remarquer au passage que, dans l’avenir, il pourrait refuser le dépôt d’une demande du commissaire si celle-ci ne satisfait pas aux exigences énoncées à l’article 36 des Règles du Tribunal de la concurrence, DORS/2008-141 (les « Règles »), notamment l’exigence selon laquelle le demandeur doit préciser « les détails de l’ordonnance demandée » (alinéa 36(2)e) des Règles).

[34] Selon la description faite par le commissaire dans sa demande modifiée, Secure et Tervita se livraient une concurrence féroce, et leurs installations concurrentes étaient établies à proximité les unes des autres. Le commissaire ajoute que, pour un nombre important de clients, Secure et Tervita représentaient soit les seules options disponibles en matière d’élimination de déchets, soit les deux options offrant la plus grande proximité géographique. De l’avis du commissaire, cette proximité géographique constitue un facteur déterminant pour les producteurs de pétrole et de gaz en raison des coûts élevés associés au transport des déchets de champs pétrolifères.

[35] Le commissaire allègue que l’élimination de la concurrence que Tervita livrait à Secure confère à cette dernière une puissance commerciale nettement accrue, qui ne sera probablement pas restreinte. Par conséquent, le commissaire fait valoir que [traduction] « les producteurs de pétrole et de gaz paieront vraisemblablement des prix nettement supérieurs et subiront une dégradation de la qualité des services d’élimination de déchets, et ce, à un moment où l’industrie pétrolière et gazière, un important secteur de l’économie canadienne, est en difficulté ».

[36] Plus précisément, le commissaire soutient, au moyen d’une preuve d’expert et dans ses observations finales, que Secure et Tervita étaient chacune la principale concurrente de l’autre. Il affirme que, du fait de l’élimination de la rivalité qui existait entre Secure et Tervita, la concurrence se trouve sensiblement réduite dans 143 marchés géographiques locaux situés en Saskatchewan, en Alberta et dans le nord-est de la Colombie-Britannique pour ce qui concerne : i) la transformation et le traitement des déchets dans les ITRE; ii) l’élimination des déchets solides de pétrole et de gaz dans les lieux d’enfouissement; iii) l’élimination de l’eau produite et des eaux usées dans les PDEA appartenant à des tiers fournisseurs de services de gestion des déchets. Ces marchés (les « marchés pertinents ») sont issus d’un groupe plus vaste composé de 271 « marchés » qui, selon le commissaire, constituent des régions de chevauchement concurrentiel entre les parties au fusionnement. Les marchés pertinents se distinguent des autres sur la base de deux critères : i) une part de marché d’au moins 35 % par suite du fusionnement; ii) une hausse des prix de 5 %.

[37] Le commissaire allègue que, dans environ 17 des 143 marchés pertinents, le fusionnement a fait passer le nombre de concurrents de 2 à 1, ce qui donne lieu à une situation de monopole. Le commissaire soutient également que, dans 30 autres de ces marchés pertinents, le nombre de concurrents est passé de 3 à 2 à l’issue du fusionnement et que le seul concurrent restant ne peut exercer une réelle concurrence compte tenu de sa taille beaucoup plus petite. Il fait par ailleurs valoir la même position relativement aux 96 marchés pertinents restants, au sein desquels le nombre de concurrents a été ramené à 3 ou à un nombre plus élevé. De façon plus générale, le commissaire affirme que le fusionnement a fait en sorte que Secure possède désormais la vaste majorité des ITRE, des lieux d’enfouissement et des PDEA tiers dans le BSOC. Il ajoute que Secure surpasse désormais de loin tous les autres concurrents au plan de l’étendue géographique et de l’éventail d’installations. Le tableau 1 présente une synthèse des changements observés dans la structure des 143 marchés pertinents.

Tableau 1 – Évolution de la structure des marchés pertinents[8]

De 2 à 1 (monopole)

17

De 3 à 2 (concurrent ayant peu de pouvoir concurrentiel)

30

De 4 à 3+ (concurrents ayant peu de pouvoir concurrentiel)

96

Total

143

[38] Le commissaire soutient par ailleurs que le fusionnement a entraîné une DSC dans la branche de l’élimination des matières radioactives naturelles (« MRN »). Il n’a toutefois pas abordé précisément cette allégation au cours de l’instance. Interrogés à ce propos à l’étape des observations finales, les avocats ont expliqué que le point n’était pas pertinent parce que le dessaisissement de l’un des lieux d’enfouissement qui était demandé répondrait aux préoccupations du commissaire liées aux MRN[9]. Ainsi, les allégations du commissaire concernant les MRN ne seront pas traitées davantage dans les présents motifs.

[39] Peu avant l’audience relative à la présente demande, qui s’est amorcée le 9 mai 2022, le commissaire a fourni les détails des dessaisissements demandés. Pour ce faire, il a déposé une présentation de diapositives faisant état de ses observations préliminaires. Dans la version modifiée de sa présentation, le commissaire affirmait solliciter une ordonnance enjoignant à Secure de se dessaisir de 41 installations précisément nommées, soit 26 ITRE, cinq PDEA, huit lieux d’enfouissement et deux cavernes.

[40] Une de ces ITRE (l’installation Willesden Green) ne figurait toutefois pas dans la liste des dessaisissements jointe à l’appendice A du projet d’ordonnance faisant partie de l’annexe C des observations finales du commissaire. L’installation n’était pas non plus mentionnée dans une liste identique figurant à l’annexe A de ces observations. Cependant, compte tenu du fait qu’un des marchés pertinents (le marché no 10) desservis par l’installation Willesden Green est un marché « de 2 à 1 », et compte tenu aussi du fait qu’il est question de cette ITRE à l’annexe B des observations finales du commissaire, le Tribunal en a déduit que l’omission de l’installation dans le projet d’ordonnance susmentionné et à l’annexe A n’était en fait qu’un simple oubli.

[41] Précisons que le commissaire a confirmé durant la conférence de gestion d’instance préalable à l’audience tenue le 2 mai 2022 que ses allégations de DSC ne visaient aucun des autres services mentionnés aux paragraphes 20 et 21 ci-dessus et au paragraphe 5 de la demande modifiée.

[42] S’agissant du moyen de défense fondé sur les gains en efficience invoqué par Secure et dont il sera question plus loin, le commissaire soutient que la perte sèche annuelle associée aux effets hors prix totalise environ 50 millions de dollars pour l’ensemble des clients des parties au fusionnement, et qu’elle se situe entre 15,9 millions de dollars et 36,2 millions de dollars dans le cas des clients se trouvant dans les régions de chevauchement concurrentiel. Ces estimations s’ajoutent à l’estimation des effets allégués sur les prix et sur la production, dont la valeur annuelle se situe approximativement entre 1 million et 6 millions de dollars.

VI. Résumé de la réponse de Secure

[43] Secure fait valoir que le fusionnement est essentiel dans le contexte des efforts qu’elle déploie pour soutenir les clients tandis que l’industrie traverse une période de profond changement caractérisée, entre autres, par une volatilité importante, par l’incertitude des investisseurs, et par une surcapacité endémique, lesquelles tirent leur origine de l’effondrement des prix du pétrole et du gaz à l’échelle mondiale. Le recul marqué des prix a provoqué une fuite de capitaux dans le BSOC. Plus récemment, la guerre de prix qui a éclaté en 2020 entre la Russie et l’Arabie saoudite, la pandémie de COVID-19, l’incertitude entourant l’accès aux pipelines, ainsi que l’engagement des gouvernements, des investisseurs et des exploitants à réduire les émissions de carbone ont contribué à aggraver la situation.

[44] C’est dans ce contexte que les parties au fusionnement ont inscrit des pertes nettes combinées de 481 millions de dollars depuis 2016, selon ce qu’affirme Secure. Elle ajoute que Tervita éprouvait des difficultés financières et faisait des pieds et des mains pour tenter de trouver des liquidités à court terme. Secure n’a toutefois pas fait valoir que Tervita était vraisemblablement en situation de déconfiture n’eût été le fusionnement, ou qu’il n’existait aucun autre acheteur préférable au plan de la concurrence. Les clients étaient néanmoins apparemment préoccupés par la situation, parce que ceux-ci veulent, semble-t-il, pouvoir compter sur des partenaires solides, bien pourvus en capitaux, pour assurer la gestion à long terme de leurs déchets, en particulier dans le contexte où on s’attend de l’industrie qu’elle s’adapte pour être en mesure de répondre aux préoccupations environnementales, sociales et de gouvernance soulevées par divers intervenants. Secure soutient qu’il s’agit là de la raison pour laquelle bon nombre de ses clients appuient le fusionnement.

[45] Quant aux allégations du commissaire, Secure affirme que le fusionnement n’a pas donné lieu à une DSC, et qu’il n’aura vraisemblablement pas cet effet dans l’avenir.

[46] Contrairement à ce qu’allègue le commissaire, Secure prétend qu’elle continue de faire face à une concurrence réelle importante en provenance des autres entreprises d’élimination de déchets. Elle soutient également qu’il n’existe aucune entrave significative à l’accès ou à l’expansion dans les marchés pertinents. Elle ajoute que la majorité de ses clients sont de grandes sociétés pétrolières et gazières sophistiquées qui jouissent d’un important pouvoir d’achat compensateur et qui ont une capacité de s’approvisionner de manière autonome eu égard aux services pertinents.

[47] S’agissant de la question du pouvoir compensateur, Secure affirme que ses clients exercent des activités dans plusieurs régions géographiques ou encore qu’ils font appel à Secure pour obtenir plus d’un service. Par conséquent, Secure soutient que ses clients peuvent en toute crédibilité la menacer de riposter à une hausse de prix qu’elle tenterait d’imposer dans une région géographique donnée ou pour une gamme de services particulière en déplaçant leurs activités dans d’autres régions ou en se tournant vers des fournisseurs de services concurrents. Secure prétend par ailleurs que le pouvoir compensateur de ces clients est renforcé par le fait qu’elle a conclu avec eux des contrats pour l’achat et la revente de pétrole brut.

[48] S’agissant de la question de l’approvisionnement autonome, Secure soutient que les producteurs de pétrole et de gaz gèrent déjà à l’interne l’élimination de la vaste majorité des eaux usées qu’ils génèrent, et que les volumes d’eau qu’on lui confie pour élimination ont diminué de façon importante au cours des dernières années parce que les clients s’en occupent désormais eux-mêmes. Secure ajoute que plusieurs producteurs exploitent des lieux d’enfouissement qui acceptent des déchets solides de champs pétrolifères provenant de tiers et qu’on dénombre plus de 7 000 installations pétrolières appartenant aux producteurs où on exécute sur place le traitement des émulsions ou les fonctions de terminal qu’offrent les ITRE.

[49] Au-delà de tout ce qui vient d’être mentionné, Secure fait valoir que le fusionnement aura vraisemblablement pour effet d’entraîner des gains en efficience qui surpasseront et neutraliseront les effets de toute DSC qui résultera vraisemblablement du fusionnement, ainsi que le prévoit la défense fondée sur les gains en efficience à l’article 96 de la Loi. En rapport avec ce qui précède, Secure affirme que le fusionnement entraînera des gains en efficience annualisés de 52,8 millions de dollars, ou des gains en efficience actualisés de 328,4 millions de dollars sur une période de 10 ans, après déduction d’une somme d’environ 4 millions de dollars correspondant à l’inefficience associée à la hausse des frais de transport assumés par les clients à la suite de la fermeture d’installations. Secure ajoute que les exigences énoncées à l’article 96 seraient respectées même si les gains en efficience admissibles étaient restreints à ceux qui ne seraient vraisemblablement pas réalisés si l’ordonnance de dessaisissement demandée par le commissaire était rendue par le Tribunal. Secure affirme que, dans ce cas, les gains en efficience qui risquaient de ne pas être réalisés se chiffreraient à 19,9 millions de dollars annuellement ou, sur une base actualisée, à 138,5 millions de dollars sur dix ans.

[50] Secure fait valoir que ces gains en efficience répondraient aux exigences de l’article 96, en partie parce que les effets hors prix allégués par le commissaire ne constituent pas des effets d’une diminution de la concurrence aux fins de l’analyse comparative qu’appelle cette disposition. Secure soutient par ailleurs que le commissaire ne s’est pas acquitté de son fardeau d’établir l’existence de ces effets ou encore des effets allégués sur les prix et sur la production.

VII. Dispositions législatives pertinentes

[51] L’article 92 de la Loi confère au Tribunal le pouvoir de rendre divers types d’ordonnances, à la demande du commissaire, dans le cas où il conclut qu’un fusionnement empêche ou diminue sensiblement la concurrence, ou aura vraisemblablement cet effet[10]. Dans le cas d’un fusionnement réalisé, le Tribunal a notamment le pouvoir, aux termes du sous-alinéa 92(1)e)(ii) de la Loi, de rendre une ordonnance enjoignant à toute personne de se départir, selon les modalités qu’il indique, des éléments d’actif et des actions qu’il indique.

[52] L’article 96, aussi appelé « moyen de défense fondé sur les gains en efficience », empêche le Tribunal de rendre l’ordonnance prévue à l’article 92 dans les cas où il conclut que le fusionnement en question « a eu pour effet ou aura vraisemblablement pour effet d’entraîner des gains en efficience, que ces gains surpasseront et neutraliseront les effets de l’empêchement ou de la diminution de la concurrence qui résulteront ou résulteront vraisemblablement du fusionnement réalisé [...] et que ces gains ne seraient vraisemblablement pas réalisés si l’ordonnance était rendue ». Ainsi, lorsque ce moyen de défense est invoqué, le Tribunal est d’abord appelé à déterminer si la transaction a pour effet, ou aura vraisemblablement pour effet, d’empêcher ou de diminuer sensiblement la concurrence. Si le Tribunal conclut en ce sens, il doit déterminer, à la deuxième étape de l’analyse, la mesure corrective qui permettrait de rétablir la concurrence de manière à éliminer le caractère sensible de l’empêchement ou de la diminution de la concurrence. À la troisième étape de l’analyse, le Tribunal évalue si les exigences du moyen de défense fondé sur les gains en efficience ont été remplies.

[53] Le libellé complet des alinéas 92(1)a) à 92(1)e) et de l’article 96 de la Loi est reproduit à l’annexe 1 des présents motifs.


VIII. Les questions en litige

[54] La présente demande soulève trois grandes questions, à savoir :

1. Le fusionnement a-t-il eu pour effet, ou aura-t-il vraisemblablement pour effet, de diminuer sensiblement la concurrence?

2. Dans l’affirmative, quelle est la mesure corrective appropriée?

3. Les conditions d’application de la défense fondée sur les gains en efficience ont-elles été remplies?

[55] Chacune de ces grandes questions fait intervenir de multiples sous-questions sur lesquelles le Tribunal doit se pencher. Celles-ci feront l’objet d’une analyse aux parties XIII à XV ci-dessous.

IX. Les témoins

[56] Aux paragraphes ci-dessous, le Tribunal présente une synthèse des questions abordées par les témoins qui ont témoigné dans le cadre de la présente procédure et il donne ses impressions par rapport à ces témoignages.

[57] En plus des témoins appelés à témoigner à l’audience, le commissaire a déposé les déclarations d’environ 40 témoins additionnels, à savoir des producteurs de pétrole et de gaz, des concurrents réels ou allégués des parties au fusionnement, et d’autres participants de l’industrie. La plupart de ces participants ont simplement préparé une déclaration de témoin très courte visant à fournir des renseignements en réponse à une ordonnance rendue par la Cour fédérale en vertu de l’article 11 de la Loi. Il n’en sera pas question plus longuement dans cette partie des présents motifs.

A. Les témoins experts

[58] Six témoins experts ont témoigné dans le cadre de la présente procédure, trois au nom du commissaire et trois au nom de Secure. Pour aider le Tribunal, la plupart de ces témoins experts ont préparé des diapositives utiles présentant une synthèse de leur témoignage d’opinion.

[59] M. Nathan Miller était le principal témoin expert du commissaire. M. Miller enseigne à l’Université de Georgetown aux étudiants de divers programmes, notamment aux doctorants en économie, et il a reçu une distinction du doyen pour son travail à titre de professeur agrégé. Il a été reconnu à titre d’expert dans le domaine de l’organisation industrielle et de l’économie du droit de la concurrence.

[60] Le témoignage de M. Miller portait sur son rapport d’expert du 25 février 2022 (le « rapport initial de M. Miller ») de même que sur son rapport d’expert en réplique déposé le 11 avril 2022 (le « rapport en réplique de M. Miller »). Dans ces rapports, M. Miller a défini les marchés du produit et les marchés géographiques pertinents en l’espèce, il a calculé les parts de marché dans chacune des 271 régions de chevauchement géographique entre les parties au fusionnement, et il a estimé les effets du fusionnement sur les prix au sein de ces marchés, la perte sèche correspondante et la perte sèche associée à la fermeture des installations visées[11]. Dans son rapport en réplique, M. Miller a répondu aux critiques de Mme Renée Duplantis, un des témoins experts de Secure, concernant son rapport initial, ce qui l’a amené à modifier certaines de ses estimations antérieures.

[61] De façon générale, les membres de la formation ont jugé que M. Miller était un témoin bien informé, franc et coopératif, et qu’il avait livré un témoignage utile, bien qu’il ait parfois adopté une attitude défensive pendant le contre-interrogatoire. Il a admis d’emblée certaines des limites que présentaient ses modèles et ses estimations. Il semblait avoir réellement à cœur d’aider le Tribunal à prendre les bonnes décisions.

[62] Le deuxième témoin expert du commissaire était M. James Gregory Eastman. M. Eastman occupe le poste de vice-président principal au sein de Cornerstone Research, Inc., et il se spécialise dans l’analyse économique et la comptabilité appliquées à divers domaines, dont la législation antitrust et le droit de la concurrence. Il a été reconnu à titre d’expert dans le domaine des gains en efficience découlant des fusionnements.

[63] Le témoignage de M. Eastman portait sur son rapport du 11 avril 2022 (le « rapport de M. Eastman »), dans lequel il aborde l’évaluation des gains en efficience qui résulteraient vraisemblablement du fusionnement effectuée par M. Andrew Harington, un des témoins experts de Secure. M. Eastman a également témoigné au sujet de la réplique de M. Harington à son rapport.

[64] Le Tribunal a jugé que le témoignage livré par M. Eastman était moins utile, moins succinct et moins spontané que ceux des autres témoins experts appelés à intervenir dans le cadre de la présente procédure. Son témoignage était souvent axé sur les possibilités plutôt que sur les probabilités. À certains moments, il s’est montré quelque peu évasif et ne semblait pas connaître aussi bien l’industrie de l’élimination des déchets que les autres témoins experts qui ont été entendus.

[65] Le troisième témoin expert du commissaire était M. Rory Johnston. M. Johnston est l’auteur du bulletin intitulé Commodity Context et il travaille actuellement pour l’entreprise Melancthon Capital, exploitée sous le nom Price Street. Il a présenté des éléments de preuve au sujet du niveau estimé de la production pétrolière dans le BSOC à différents moments dans l’avenir. De l’avis du Tribunal, M. Johnston était un témoin bien informé qui s’exprimait sans hésitation, de façon claire, succincte et franche, et il a livré un témoignage utile.

[66] M. Adonis Yatchew était le premier témoin expert de Secure. M. Yatchew, professeur d’économie à l’Université de Toronto, enseigne l’économétrie à des étudiants de doctorat. Il est également rédacteur en chef de la revue The Energy Journal, dans laquelle sont publiés des articles de nature théorique, empirique et stratégique portant sur l’économie de l’énergie. M. Yatchew a été reconnu à titre d’expert dans les domaines de l’économie de l’énergie et de l’économétrie.

[67] Le témoignage de M. Yatchew portait sur son rapport d’expert du 24 mars 2022 (le « rapport de M. Yatchew »), dans lequel il avait estimé l’élasticité-prix de la demande visant les services des ITRE, des lieux d’enfouissement et des PDEA, de même que l’élasticité-prix de la demande globale de services d’élimination de déchets. Il n’a pas été contre-interrogé par le commissaire.

[68] De façon générale, le Tribunal a jugé que M. Yatchew était bien informé, qu’il s’exprimait de façon spontanée et qu’il avait offert un témoignage utile, bien qu’il n’ait pas répondu avec clarté à certaines des questions de la formation. À d’autres occasions, il a volontiers concédé certaines lacunes dans l’analyse à l’appui de ses opinions.

[69] Le deuxième témoin expert de Secure était Mme Renée Duplantis. Mme Duplantis travaille à titre de directrice au bureau de Toronto du Brattle Group (« Brattle »), une multinationale qui offre des conseils dans les domaines de l’économie, de la réglementation et des finances. Au sein de Brattle, elle est responsable des activités touchant la législation antitrust et la concurrence au Canada.

[70] Mme Duplantis est titulaire d’un doctorat en économie de l’Université Northeastern avec une spécialisation en organisation industrielle et en économie appliquée. Elle a été reconnue à titre d’experte dans ces deux domaines.

[71] Le témoignage de Mme Duplantis avait trait à son rapport d’expert du 25 mars 2022 (le « rapport initial de Mme Duplantis ») et à une version ultérieure de ce même rapport portant la date du 20 mai 2022 (le « rapport révisé de Mme Duplantis »), dans laquelle elle a revu son analyse de manière à traiter précisément des dessaisissements dont il était question dans les diapositives présentées par le commissaire à l’étape des observations préliminaires. Dans ces deux rapports, Mme Duplantis a examiné et critiqué les opinions formulées par M. Miller et a offert des opinions différentes au sujet des effets vraisemblables du fusionnement sur la concurrence, en calculant notamment la perte sèche. Dans le cadre de son témoignage, Mme Duplantis a également parlé du rapport en réplique de M. Miller.

[72] Le Tribunal a eu l’impression que Mme Duplantis, qui a répondu de façon succincte aux questions de la formation, souhaitait livrer un témoignage utile. Les concessions qu’elle a faites par rapport à la définition des marchés pertinents, aux parts de marché, aux marges et aux ratios de détournement ont grandement aidé le Tribunal dans son analyse des principales questions en litige. Mme Duplantis a néanmoins adopté une attitude défensive au moment du contre-interrogatoire, et elle a donné des réponses moins franches. En outre, Mme Duplantis s’est montrée sélective en ce qui a trait à certains aspects de l’analyse exposée dans ses rapports et dans son témoignage, en particulier pour ce qui est des éléments de preuve qui allaient à l’encontre de ses opinions. Le Tribunal a jugé que M. Miller était plus coopératif, impartial et franc que Mme Duplantis, et c’est pourquoi, à plusieurs égards (mais pas sur l’ensemble des points), il a privilégié le témoignage de M. Miller lorsqu’il divergeait de celui de Mme Duplantis[12].

[73] Le troisième témoin expert de Secure était M. Andrew Harington. M. Harington est comptable professionnel agréé, analyste financier agréé et expert en évaluation d’entreprise. À l’instar de Mme Duplantis, il travaille à titre de directeur au bureau de Toronto de Brattle. Il a été reconnu comme expert dans le domaine de la quantification des gains en efficience aux termes de la Loi.

[74] Le témoignage de M. Harington avait trait à son rapport du 25 mars 2022, à une version révisée de ce même rapport portant la date du 20 mai 2022 (le « rapport révisé de M. Harington »), aux rapports de M. Miller et de M. Eastman, et à son rapport en réplique déposé le 26 avril 2022 (le « rapport en réplique de M. Harington »).

[75] Le Tribunal a jugé que M. Harington était bien informé, qu’il s’était montré coopératif dans l’ensemble et qu’il s’exprimait la plupart du temps de façon claire, franche et spontanée. Lorsque les preuves de M. Eastman et de M. Harington divergeaient, le Tribunal a privilégié la plupart du temps la preuve de ce dernier[13]. Le Tribunal a toutefois jugé que certains aspects de l’analyse effectuée par M. Harington n’étaient pas suffisamment étayés par la preuve. Par conséquent, certains des calculs de M. Harington se rapportant aux gains en efficience allégués par Secure ont dû être rajustés[14].

B. Les témoins ordinaires

[76] Seize témoins ordinaires ont témoigné dans le cadre de la présente instance, soit dix au nom du commissaire et six au nom de Secure.

(1) Le commissaire

[77] Le premier témoin ordinaire du commissaire était M. Cory Hall, président et directeur général d’Aqua Terra Water Management Inc. (« Aqua Terra »), un fournisseur de services de gestion de l’eau, de services d’évacuation des eaux et d’autres services connexes au Canada et aux États-Unis. Au Canada, Aqua Terra possède sept puits de déversement. Le témoignage de M. Hall portait essentiellement sur XXXXXXXXXXXXXXX XXXXXXXXXXXX XXXXXXXXXXX XXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXX. Le Tribunal a jugé que M. Hall avait répondu sans détour aux questions et qu’il s’était montré franc et réceptif, bien qu’il ait semblé faire preuve de retenue à certains moments pendant le contre-interrogatoire.

[78] Le deuxième témoin ordinaire du commissaire était M. Joshua Ryan McSween. M. McSween occupe le poste de gestionnaire de la production et de l’exploitation à DEL Canada GP Ltd. (« DEL Canada »), une entreprise de production pétrolière et gazière située en Alberta. Son témoignage portait sur les facteurs pris en compte par DEL Canada dans la sélection d’un fournisseur de services d’élimination de déchets, sur l’expérience de DEL Canada avec les parties au fusionnement, sur les différentes options qui s’offrent à DEL Canada en matière de services d’élimination des déchets, et sur des questions de fond, comme l’approvisionnement autonome et le pouvoir compensateur. De l’avis du Tribunal, M. McSween s’est montré quelque peu évasif et son point de vue était difficile à cerner.

[79] Le troisième témoin ordinaire du commissaire était M. Paul Dziuba. M. Dziuba occupe le poste de spécialiste de l’environnement au sein de Chevron Canada Resources (« Chevron »), un important producteur de pétrole et de gaz. Son témoignage portait sur l’expérience de Chevron avec les parties au fusionnement de même que sur des questions de fond, notamment sur les entraves à l’accès, sur les différentes options qui s’offrent à Chevron en matière de services d’élimination des déchets, sur l’approvisionnement autonome et sur le pouvoir compensateur. Le Tribunal a jugé que M. Dziuba était coopératif, réceptif et qu’il répondait avec franchise aux questions de la formation. Toutefois, il a fait preuve d’un peu moins de coopération, de réceptivité et de franchise au moment du contre-interrogatoire. Il semblait être moins bien préparé et plus circonspect que les autres témoins.

[80] Le quatrième témoin ordinaire du commissaire était M. Geoffrey Cain, président et directeur général de Halo Exploration Ltd. (« Halo »), un petit producteur de pétrole et de gaz. Son témoignage, qui portait sur bon nombre des questions abordées par MM. McSween et Dziuba, n’était pas aussi spontané, franc et utile que celui des autres témoins.

[81] Le cinquième témoin ordinaire du commissaire était M. James Taylor, chef de l’exploitation à Crew Energy Inc. (« Crew Energy »), qui produit du pétrole et du gaz. Dans son témoignage, M. Taylor a abordé bon nombre des questions traitées par les autres représentants de l’industrie pétrolière et gazière et dont il a été fait mention précédemment. Le Tribunal a jugé qu’il répondait aux questions lentement, avec hésitation et retenue, bien qu’il ait fait preuve de plus en plus d’ouverture au fur et à mesure qu’il progressait dans son témoignage et au moment de répondre aux questions de la formation.

[82] Le sixième témoin ordinaire du commissaire était M. Cameron McLean, vice-président de Clean Harbors Canada (« Clean Harbors »), entreprise qui fournit un éventail de services environnementaux et industriels en Amérique du Nord, dont des services d’enfouissement, de traitement des eaux usées et de transport des déchets. XXXXXXXXXXXXXXXXX, le témoignage de M. McLean portait pour l’essentiel sur l’intérêt potentiel de Clean Harbors à acquérir les éléments d’actif visés par les dessaisissements. Dans le cadre de ses échanges avec les membres de la formation, M. McLean a également témoigné au sujet de certaines des questions de fond en litige dans la présente instance. M. McLean, bien informé et réceptif, s’est exprimé avec franchise et cohérence tout au long de son témoignage. Il s’est efforcé d’aider la formation du mieux qu’il pouvait et, lorsqu’il ignorait la réponse à une question, il l’admettait d’emblée.

[83] Le septième témoin ordinaire du commissaire était M. Lars DePauw, directeur général de l’Orphan Well Association (« OWA »). L’Alberta Energy Regulator a confié à l’OWA le mandat de mettre hors service les puits de pétrole et de gaz, les installations pétrolières et gazières et les pipelines d’hydrocarbures qui ne sont pas associés à un propriétaire responsable et solvable, et de remettre en état ces sites. M. DePauw a essentiellement axé son témoignage sur les mêmes questions que celles abordées par les représentants de l’industrie de la production pétrolière et gazière. M. DePauw était un témoin bien informé, réceptif et coopératif, qui s’exprimait avec clarté, bien qu’il ait fait preuve de circonspection à l’occasion.

[84] Le huitième témoin ordinaire du commissaire était M. Carl Lammens, chef de l’équipe responsable des activités de mise hors service et de restauration à PETRONAS Energy Canada Ltd. (« PECL »). PECL est un producteur de pétrole et de gaz. Le témoignage de M. Lammens s’articulait principalement autour de bon nombre des questions abordées par les autres représentants de l’industrie de la production pétrolière et gazière, questions dont il a été fait mention précédemment. Selon le Tribunal, M. Lammens était un témoin bien informé, coopératif, franc et réceptif. Le fait qu’il apporte spontanément des précisions sur diverses questions s’est également avéré très utile.

[85] Le neuvième témoin du commissaire était Mme Melanie McRae. Mme McRae assume les fonctions de directrice générale, Chaîne d’approvisionnement canadienne, à ConocoPhillips Canada (« ConocoPhillips »), un producteur de pétrole et de gaz. Là encore, son témoignage était essentiellement axé sur les mêmes questions que celles abordées par les autres représentants de l’industrie de la production pétrolière et gazière, questions dont il a été fait mention précédemment. Son témoignage, succinct et livré avec franchise, allait à l’essentiel et s’est avéré généralement utile. Lorsqu’elle ne connaissait pas la réponse à une question, elle l’admettait d’emblée. Elle s’en tenait toutefois aux questions qu’on lui posait et son témoignage n’a pas été aussi utile que celui d’autres témoins dans la présente instance.

[86] Le dernier témoin ordinaire du commissaire était M. David Hart, chef des activités environnementales et des opérations sur le terrain à Canadian Natural Resources Limited (« CNRL »), un producteur de pétrole et de gaz qui possède également d’importants actifs dans le secteur intermédiaire. Le témoignage de M. Hart a essentiellement porté sur bon nombre des questions abordées par les autres producteurs de pétrole et de gaz et dont il a été fait mention précédemment. Le Tribunal a jugé que M. Hart faisait preuve de circonspection et était moins à l’aise de fournir de l’information. Ses réponses n’étaient toutefois pas évasives et il s’exprimait généralement avec clarté.

(2) Secure

[87] Six témoins ordinaires ont témoigné au nom de Secure, dont deux membres de l’équipe de direction de Secure.

[88] Le premier dirigeant de Secure qui a livré un témoignage est M. David Engel. À titre de vice-président principal, Solutions en matière d’enfouissement, M. Engel a fait partie du groupe de hauts dirigeants qui a procédé à l’évaluation et à la planification du fusionnement. Il a également contribué à superviser l’intégration des activités des parties au fusionnement. Avant de se joindre à Secure en 2007, il a occupé différents postes au sein de Tervita.

[89] La preuve présentée par M. Engel portait sur les activités de Secure, sur le fusionnement et le raisonnement sous-jacent, sur divers aspects du secteur intermédiaire de l’industrie pétrolière et gazière, sur la philosophie de Secure quant à l’établissement des prix, sur l’amélioration des services découlant du fusionnement, sur le fusionnement de Tervita et Newalta Corporation (« Newalta ») en 2018, et sur les acquéreurs stratégiques potentiels des éléments d’actif de Secure visés par les dessaisissements. Sa déclaration de témoin était accompagnée de cinq gros volumes d’information.

[90] La formation a jugé que M. Engel était bien informé et qu’il s’était montré coopératif. Or, son témoignage oral et son témoignage écrit comportaient des inexactitudes sur des questions importantes. À titre d’exemple, il a minimisé l’importance des délais d’attente et a surestimé l’importance de l’approvisionnement autonome et la capacité potentielle des clients à se tourner vers ce mode de fonctionnement pour répondre à leurs besoins en matière d’élimination de déchets. Par conséquent, la formation a jugé que sa preuve n’était pas toujours fiable.

[91] Le deuxième dirigeant qui a témoigné au nom de Secure était M. Keith Blundell, gestionnaire du développement de l’entreprise. Actuellement chargé de superviser l’exécution du plan d’intégration de Secure par suite du fusionnement, M. Blundell a principalement axé son témoignage sur cet aspect. De l’avis du Tribunal, M. Blundell était très bien informé, quoique réticent à entrer dans les détails et par moment, pas entièrement disposé à collaborer.

[92] En plus de MM. Engel et Blundell, des représentants de quatre producteurs de pétrole et de gaz ont témoigné au nom de Secure. Tous étaient favorables au fusionnement. De façon générale, leurs témoignages avaient trait à l’importance de pouvoir compter sur un fournisseur de services de gestion de déchets présentant une situation financière stable, à l’importance relativement négligeable des coûts associés à l’élimination des déchets dans les décisions de production que sont appelés à prendre les producteurs de pétrole et de gaz, et à l’absence de préoccupations à l’égard d’une éventuelle hausse des prix que pourrait imposer Secure.

[93] Le premier représentant était M. Chris Hogue, vice-président principal au sein de l’International Petroleum Corp. (« IPC »). Il a entre autres mentionné, dans un premier temps, que l’IPC est parfaitement en mesure de gérer sur place l’élimination des déchets qu’elle génère et, dans un deuxième temps, que le fait qu’elle mène des activités dans d’autres régions géographiques lui confère un pouvoir accru dans ses négociations avec Secure. Selon M. Hogue, il s’agit là de facteurs dissuasifs pour Secure. Le Tribunal a jugé que M. Hogue était particulièrement circonspect et que son témoignage était moins convaincant et peu fiable, en partie parce qu’il ne connaissait pas bien les activités d’élimination des déchets.

[94] Le deuxième représentant qui a témoigné au nom de Secure était M. Darren Gee, chef de la direction de Peyto Exploration and Development (« Peyto »). M. Gee a expliqué que Peyto était peu préoccupée par les hausses de prix que pourrait imposer Secure après le fusionnement, et ce, pour les mêmes raisons essentiellement que celles mentionnées par M. Hogue. Il a ajouté qu’en raison d’un regroupement des activités en amont dans l’industrie pétrolière et gazière, les entreprises restantes disposent de moyens suffisamment importants pour être en mesure de gérer à l’interne l’élimination de leurs déchets. Il a par ailleurs expliqué que les producteurs vont habituellement permettre à d’autres producteurs d’utiliser leurs installations pour éliminer leurs déchets, et que les producteurs sont en mesure de soutenir l’arrivée d’un nouveau concurrent dans l’industrie. Enfin, il a laissé entendre que les récentes hausses de prix sont attribuables à l’inflation, et non pas à l’exercice d’une puissance commerciale par Secure. Si la formation a jugé que M. Gee s’était exprimé de façon directe et franche, son témoignage était cependant de nature assez générale. En outre, son témoignage n’était pas bien étayé par les éléments de preuve et ses explications étaient parfois évasives, par exemple en ce qui a trait à l’approvisionnement autonome et au levier de négociation que constitue l’emplacement géographique. Une importante contradiction sur ce point entre le témoignage de M. Gee et les documents publics de Peyto a par ailleurs eu pour effet de miner la crédibilité du témoin.

[95] Le troisième représentant qui a témoigné au nom de Secure était M. Rodney Gray, premier vice-président et dirigeant principal des finances à Baytex Energy Corporation (« Baytex »). Le témoignage livré par M. Gray était semblable à celui de M. Gee et, de la même façon, il était de nature très générale, n’était pas étayé par les éléments de preuve et n’était pas convaincant quant à certaines questions, à savoir le levier de négociation que constitue l’emplacement géographique, l’approvisionnement autonome et les nouvelles entrées sur le marché. À l’étape du contre-interrogatoire, M. Gray s’est montré laconique et peu coopératif. Comparativement aux autres témoins, il semblait être moins bien au fait des activités de son entreprise. Il a expliqué que Baytex n’était pas préoccupée par le fusionnement parce qu’avant la transaction, elle faisait uniquement affaire avec Secure ou Tervita, selon laquelle des deux entreprises était située la plus près de l’installation de Baytex concernée. Il a également fait valoir que Baytex disposait d’autres options pour l’élimination de ses déchets, bien que les éléments de preuve donnent à penser qu’il s’agit de participants de très faible importance dans l’industrie.

[96] Le dernier témoin ordinaire de Secure était M. Robert Broen, président et directeur général de l’Athabasca Oil Corporation (« Athabasca »). La formation a jugé que M. Broen gagnait de l’aisance, et que ses propos devenaient plus francs, plus clairs et plus utiles, au fur et à mesure qu’il progressait dans son témoignage. Cependant, à l’instar d’autres témoins de Secure, M. Broen était au fait des grandes lignes, mais il était peu en mesure d’entrer dans les détails. Le Tribunal souligne toutefois que, lorsque M. Broen ne connaissait pas la réponse à une question, il l’admettait d’emblée.

X. Objections à l’égard de la preuve

[97] Au cours de l’audience relative à la présente demande, Secure a soulevé deux objections : l’une a été mise en délibéré par le Tribunal et l’autre a été tranchée sur-le-champ par le Tribunal et est traitée dans les présents motifs. La première objection a trait au fait que le commissaire a invoqué l’article 69 de la Loi. La deuxième objection concerne le fait que le commissaire a tenté de modifier une partie de sa preuve après avoir fini de la présenter.

A. Le recours par le commissaire à l’article 69

[98] Pendant le contre-interrogatoire, les avocats du commissaire ont tenté de poser des questions à M. Blundell, témoin de Secure, à propos d’un courriel qui avait été intégré au livre conjoint de documents. Secure s’y est opposée au motif que M. Blundell avait affirmé qu’il ne connaissait pas l’identité de l’expéditeur du courriel et que rien ne justifiait donc qu’on lui présente ce document. Secure a fait valoir que le commissaire tentait de façon irrégulière de présenter une preuve par ouï‐dire pour établir la véracité du contenu du courriel et que cette preuve n’était ni nécessaire, ni fiable.

[99] Le commissaire a répondu en faisant appel à l’alinéa 69(2)c) de la Loi, dont le libellé est le suivant :

Preuve contre un participant

Evidence against a participant

69 (2) Dans toute procédure engagée devant le Tribunal ou dans toute poursuite ou procédure engagée devant un tribunal en vertu ou en application de la présente loi :

69 (2) In any proceedings before the Tribunal or in any prosecution or proceedings before a court under or pursuant to this Act,

[...]

[...]

c) s’il est prouvé qu’un document a été en la possession d’un participant, ou dans un lieu utilisé ou occupé par un participant, ou en la possession d’un agent d’un participant, il fait foi sans autre preuve et atteste :

(c) a record proved to have been in the possession of a participant or on premises used or occupied by a participant or in the possession of an agent of a participant shall be admitted in evidence without further proof thereof and is prima facie proof

(i) que le participant connaissait le document et son contenu,

(i) that the participant had knowledge of the record and its contents,

(ii) que toute chose inscrite dans le document ou par celui-ci enregistrée comme ayant été accomplie, dite ou convenue par un participant ou par l’agent d’un participant, l’a été ainsi que le document le mentionne, et, si une chose est inscrite dans le document ou par celui-ci enregistrée comme ayant été accomplie, dite ou convenue par l’agent d’un participant, qu’elle l’a été avec l’autorisation de ce participant,

(ii) that anything recorded in or by the record as having been done, said or agreed on by any participant or by an agent of a participant was done, said or agreed on as recorded and, where anything is recorded in or by the record as having been done, said or agreed on by an agent of a participant, that it was done, said or agreed on with the authority of that participant, and

(iii) que le document, s’il paraît avoir été écrit par un participant ou par l’agent d’un participant, l’a ainsi été, et, s’il paraît avoir été écrit par l’agent d’un participant, qu’il a été écrit avec l’autorisation de ce participant.

(iii) that the record, where it appears to have been written by any participant or by an agent of a participant, was so written and, where it appears to have been written by an agent of a participant, that it was written with the authority of that participant.

 

[100] À l’appui de cette thèse, le commissaire a fait remarquer que Secure avait reçu, le 25 février 2022, un avis conforme à l’article 72 des Règles. Cet avis, intitulé [traduction] « Documents qui font foi de leur contenu sans autre preuve – Article 69 de la Loi sur la concurrence » faisait mention de ce qui suit :

[traduction]
Par les présentes, le commissaire de la concurrence (le « commissaire ») s’appuie sur l’article 69 de la Loi sur la concurrence au regard des documents suivants :

[...]

[T]ous les documents produits par la défenderesse dans son affidavit de documents fait sous serment le 29 octobre 2021 et le 31 janvier 2022, et tout autre document qui pourrait être produit par la défenderesse après la date du présent avis.

[101] Le Commissaire a soutenu qu’il s’était ainsi dûment acquitté de ses obligations énoncées dans l’ordonnance d’établissement du calendrier rendue par le Tribunal et de ses obligations prévues à l’article 72 des Règles, dont le libellé est le suivant :

Documents qui font foi

Records to be admitted in evidence

72 Au moins quarante-cinq jours avant le début de l’audience, le commissaire fournit la liste des documents qui font foi de leur contenu sans autre preuve en vertu de l’article 69 de la Loi.

72 The Commissioner shall provide a list of the documents to be admitted in evidence without further proof in accordance with section 69 of the Act at least 45 days before the commencement of the hearing.

 

[102] Secure a répliqué que l’avis s’appliquait ainsi à tous les documents en version papier ou en version électronique qu’elle avait produits au cours de l’instance, soit des centaines de milliers de documents. Par conséquent, l’avis ne servait pas l’objectif visé à l’article 72 des Règles. De plus, Secure a affirmé que le commissaire avait déjà produit une liste comportant une centaine de documents sur lesquels il avait l’intention de s’appuyer en vertu de l’article 69, avant de clore sa preuve. Secure a fait valoir que le commissaire ne pouvait présenter ce document additionnel à M. Blundell puisqu’il avait déjà confirmé que sa preuve était close.

[103] Sur ce dernier point, Secure a invoqué la décision Eli Lilly c Apotex Inc, 2009 CF 991 (« Apotex »), dans laquelle la Cour affirme, au paragraphe 703, que les dispositions de l’article 69 « ne s’appliquent qu’aux éléments produits à l’étape de la preuve principale de la partie concernée ». La Cour fait observer qu’Apotex a refusé l’offre qui lui avait été faite de rouvrir sa preuve pour permettre le versement des documents concernés au dossier de la preuve, et elle conclut que lesdits documents ne sont pas admissibles, compte tenu de « la totalité de ces circonstances » (Apotex, au par. 705).

[104] En définitive, le courriel en litige n’est pas pertinent pour les fins qui nous occupent, et le document a été coté provisoirement. Il en va de même pour un deuxième courriel, lui aussi coté provisoirement. Même si ces documents avaient été inscrits comme pièces, ils n’auraient eu aucune incidence sur la décision du Tribunal quant aux principales questions à trancher en l’espèce. Toutefois, le Tribunal juge important de formuler de brèves observations sur les positions des parties.

[105] Le Tribunal n’est pas d’accord pour dire que l’article 69 s’applique uniquement à la preuve principale du commissaire. Le Tribunal estime, en toute déférence, que rien dans le libellé de cette disposition ou dans le contexte législatif ne permet d’étayer cette interprétation. Qui plus est, les circonstances de l’espèce se distinguent de celles de l’affaire Apotex, principalement du fait que le commissaire n’a pas eu la possibilité de rouvrir sa preuve, contrairement à Apotex.

[106] Néanmoins, le Tribunal adhère à la thèse de Secure selon laquelle la façon de faire du commissaire a privé Secure de l’avis utile prévu à l’article 72 des Règles, et ce, malgré le fait que les documents en cause avaient été inclus dans le livre conjoint de documents.

[107] Compte tenu du fait que le commissaire a jusqu’à 45 jours avant le début de l’audience pour envoyer l’avis prévu à l’article 72 des Règles, le Tribunal estime qu’il a normalement assez de temps pour cerner, parmi les centaines de milliers de documents que pourrait produire la défenderesse, lesquels pourraient de façon réaliste être présentés à titre de pièces au cours de l’audience. L’avis prévu à l’article 72 des Règles devrait se limiter à ces documents, d’autant plus que les documents visés à l’article 69 sont présentés pour établir la véracité de leur contenu (Le commissaire de la concurrence c Le Toronto Real Estate Board, CT-2011-003, transcription de l’audience, 10 septembre 2012, aux p. 122 et 123).

[108] Le Tribunal fait observer au passage qu’à la lumière de sa conclusion énoncée au paragraphe 104 des présents motifs, il n’apparaît pas nécessaire d’examiner la question de la nécessité et de la fiabilité des courriels en litige aux fins de l’exception prévue par la common law à la règle du ouï-dire. Il n’est pas non plus nécessaire de statuer sur la question de savoir si ces documents constituent des pièces commerciales au sens de la Loi sur la preuve au Canada, LRC 1985, c C-5, et s’ils peuvent donc être admis en preuve suivant cette voie législative. Il convient de souligner que, si le commissaire souhaite invoquer l’exception à la règle du ouï-dire pour les pièces commerciales, il doit se conformer aux exigences prévues au paragraphe 30(7) de la Loi sur la preuve au Canada.

B. La demande du commissaire visant la réouverture de sa preuve

[109] Dans la soirée du 14 juin 2022, alors que les observations finales devaient être présentées le lendemain matin et que presque deux semaines s’étaient écoulées depuis l’étape de l’audience consacrée à la présentation de la preuve, le commissaire a demandé au Tribunal de lui accorder la possibilité de rouvrir sa preuve. L’avocat du commissaire a alors expliqué qu’il avait été porté à l’attention de l’équipe chargée du dossier que les calculs de la perte sèche effectués par M. Miller étaient inexacts du fait qu’il avait omis de prendre en considération les plans d’intégration révisés de Secure. Dans ces nouveaux plans, Secure avait retiré six installations de la liste des installations qu’elle prévoyait fermer[15]. L’équipe du commissaire s’est rendu compte de cette modification seulement au moment où elle a pris connaissance des observations finales de Secure, déposées le vendredi 10 juin 2022. L’avocat a reconnu que : i) M. Harington avait fait mention des plans d’intégration révisés dans son rapport initial du 25 mars 2022; ii) Mme Duplantis avait mis à jour les données de M. Miller de façon à tenir compte des plans révisés dans son rapport; iii) les rapports de M. Harington et de Mme Duplantis avaient été déposés avant le rapport en réplique de M. Miller. L’avocat a par ailleurs admis que M. Harington avait aussi abordé un aspect des calculs inexacts de M. Miller dans son rapport en réplique.

[110] En dépit de ce qui précède, l’avocat a demandé au Tribunal d’accorder au commissaire la possibilité de rappeler M. Miller afin que ce dernier puisse témoigner précisément sur la question de l’incidence des plans d’intégration révisés sur ses estimations de la perte sèche. L’avocat a souligné que cette question n’avait pas été soulevée au cours du contre-interrogatoire de M. Miller et que si ce dernier n’était pas autorisé à mettre à jour ses calculs, le Tribunal serait alors privé d’une preuve qui pourrait s’avérer essentielle à l’application en due forme du critère de pondération fondé sur l’article 96 aux faits de l’espèce. L’avocat a insisté sur le fait que cela entraînerait une iniquité en plus de porter atteinte à l’intérêt public et que l’octroi de l’autorisation n’entraînerait aucun préjudice pour Secure que des dépens ne sauraient réparer ultérieurement.

[111] L’avocat du commissaire a également affirmé que M. Miller ne produirait aucun nouvel élément de preuve, mais qu’il exécuterait plutôt son modèle à nouveau en fonction des faits déjà mis en preuve. Il a ajouté que les calculs révisés de M. Miller avaient été transmis à Secure, et que ceux-ci étaient favorables à Secure puisqu’ils font état d’une perte sèche inférieure à ce qui avait été estimé initialement par M. Miller (mais tout de même suffisante pour permettre au commissaire d’obtenir gain de cause dans le contexte du moyen de défense fondé sur les gains en efficience invoqué par Secure).

[112] Compte tenu de tout ce qui précède, l’avocat a fait valoir que le fait d’autoriser le contre-interrogatoire de M. Miller plus tard dans la semaine, ou la semaine suivante, servirait au mieux les intérêts de la justice. Il a ajouté que l’octroi de cette autorisation n’obligerait pas nécessairement le Tribunal à reporter la présentation des observations finales.

[113] Le Tribunal a rejeté la demande du commissaire visant la réouverture de sa preuve, et il en explique les raisons dans les présents motifs. Essentiellement, le Tribunal a adhéré à la thèse de Secure, ainsi qu’il l’a fait savoir au début de l’audience le 15 juin 2022.

[114] Les parties s’entendent pour dire que le critère applicable dans le cas d’une demande visant la réouverture de la preuve est celui qui a été confirmé dans l’arrêt 671122 Ontario Ltd c Sagaz Industries Canada Inc, 2001 CSC 59 (« Sagaz »), aux par. 59 à 65. Dans cette affaire, la Cour suprême du Canada (« CSC ») confirme le critère conjonctif à deux volets appliqué par le juge de première instance, selon lequel il doit être déterminé i) que l’issue du procès aurait vraisemblablement été différente si l’élément de preuve avait été présenté, et ii) qu’il n’aurait pas été possible d’obtenir l’élément de preuve avant le procès en faisant preuve de diligence raisonnable. La CSC ajoute que le pouvoir discrétionnaire de rouvrir le procès doit être exercé « avec modération et la plus grande prudence » (Sagaz, au par. 61).

[115] La CSC s’est de nouveau penchée sur ces questions récemment, dans l’arrêt Barendregt c Grebliunas, 2022 CSC 22 (« Barendregt »), où elle a été appelée à examiner le critère à quatre volets applicable à l’admission d’une preuve supplémentaire en appel. Un de ces volets a trait à la diligence raisonnable. Dans son analyse de ce facteur, la CSC fait observer que l’« examen de la diligence raisonnable devrait être axé sur la conduite de la partie qui cherche à présenter la preuve en question et non sur la preuve elle‐même » [en italique dans l’original] (Barendregt, au par. 59). Elle ajoute ce qui suit : « Une partie ne peut tirer profit de sa propre inaction lorsque l’existence de faits dépend en tout ou en partie d’elle » (Barendregt, au par. 60). La CSC souligne ensuite que, dans de rares cas, il sera possible d’outrepasser le défaut de diligence raisonnable dans l’intérêt de la justice (Barendregt, au par. 70).

[116] De l’avis du Tribunal, les observations de la CSC concernant la diligence raisonnable sont particulièrement pertinentes en l’espèce. Après le dépôt du rapport de M. Harington qui traitait des plans d’intégration révisés de Secure le 25 mars 2022, le commissaire avait tout le loisir de se pencher sur les calculs inexacts de M. Miller. Il ne l’a pourtant pas fait, et ce, même après que ces plans révisés eurent été examinés de nouveau dans le rapport initial de Mme Duplantis puis dans le rapport en réplique de M. Harington. Par conséquent, il n’a pas été satisfait au volet de la diligence raisonnable du critère en deux étapes.

[117] Ayant tiré cette conclusion, le Tribunal n’a pas à s’attarder au deuxième volet du critère applicable dans le cas d’une demande visant la réouverture de la preuve une fois celle-ci déclarée close. Le Tribunal fera simplement observer que l’avocat du commissaire a soutenu que les calculs révisés dont on demandait l’admission en preuve font tout de même état d’une perte sèche supérieure au montant global des gains en efficience allégués par Secure (transcription publique, à la p. 2846). En réponse aux préoccupations exprimées par Secure, l’avocat a assuré au Tribunal que le commissaire ne tirerait pas parti de la majoration des effets sur les prix dans un certain nombre de marchés, pas plus qu’il ne comptait apporter de modification à la mesure corrective demandée (transcription publique, à la p. 2878). Au vu de ces observations, il serait difficile pour le Tribunal de conclure que l’issue serait « vraisemblablement » différente en l’espèce si les calculs révisés étaient admis. Au moment où le Tribunal a fait connaître sa décision concernant la demande du commissaire, il n’était pas en mesure de donner raison au commissaire sur ce volet du critère.

[118] En dépit de ce qui précède, le commissaire a fait valoir que le Tribunal devrait néanmoins exercer son pouvoir discrétionnaire et l’autoriser à rouvrir sa preuve. Le Tribunal n’est pas d’accord avec lui. Le commissaire a eu la possibilité à plusieurs reprises de prendre acte de l’erreur commise par M. Miller et de faire le nécessaire pour la corriger. La période pendant laquelle il a eu la possibilité de le faire était par ailleurs très longue : essentiellement du 25 mars au 16 mai 2022, date du dépôt de la preuve principale de M. Miller. De l’avis du Tribunal, il ne s’agit pas de l’un de ces cas où il s’avère justifié pour le Tribunal d’exercer son pouvoir discrétionnaire « avec modération et la plus grande prudence » (Sagaz, au par. 61). Puisqu’il est parvenu à cette conclusion, le Tribunal n’a pas besoin de trancher la question de savoir si le critère plus strict relatif à l’admission d’une nouvelle preuve en appel, à savoir la démonstration de l’existence de circonstances « rares » ou exceptionnelles, s’applique à une partie qui cherche à rouvrir sa preuve au procès. Le Tribunal se permet de formuler cette dernière observation pour la simple raison que Secure et le commissaire ont tous deux formulé des observations sur la question de savoir si on était en présence de l’un de ces « rares » cas où le Tribunal devrait exercer son pouvoir discrétionnaire et autoriser la réouverture de la preuve.

[119] Le Tribunal ne partage pas non plus l’avis du commissaire selon lequel les considérations relatives à l’équité, aux intérêts de la justice ou à l’intérêt du public militent en faveur de l’exercice du pouvoir discrétionnaire dont jouit le Tribunal pour autoriser la réouverture de la preuve. En fait, le Tribunal estime qu’autoriser le commissaire à rouvrir sa preuve dans de telles circonstances serait injuste pour Secure et contraire à l’intérêt de la justice.

[120] À cet égard, le Tribunal fait observer que, dans l’arrêt Tervita CSC, la CSC s’est exprimée sur l’iniquité subie par Tervita du fait que le Tribunal avait autorisé la commissaire à produire, environ deux semaines avant le début de l’audience, un rapport d’expert en réplique dans le but de corriger des éléments de sa preuve. La CSC ajoute qu’« en raison des lacunes en matière procédurale, Tervita ne pouvait préparer une réponse en bonne et due forme à la preuve présentée par la commissaire », et elle poursuit en imposant une conséquence sévère, soit celle d’accorder une valeur nulle aux effets anticoncurrentiels pour les besoins du moyen de défense fondé sur les gains en efficience invoqué par Tervita (Tervita CSC, aux par. 135 à 137). En bref, l’intérêt public en matière de concurrence ne l’a pas emporté sur les considérations liées à l’équité procédurale et à l’intérêt de la justice, et ce, en dépit du fait que le fusionnement en question préservait une structure de marché monopolistique et qu’il était donc particulièrement anticoncurrentiel.

[121] En l’espèce, l’iniquité subie par Secure est exacerbée par le fait que le commissaire a attendu jusqu’au soir précédant le début de la présentation des observations finales pour faire savoir à Secure qu’il demandait la réouverture de sa preuve. Parallèlement, l’avocat du commissaire a précisé que le commissaire ne demandait pas l’ajournement de l’audience. Ce dernier souhaitait simplement que les calculs révisés de M. Miller soient admis en preuve, de façon à en faire bénéficier le Tribunal (transcription publique, à la p. 2877). La situation a d’autant plus porté atteinte à la position de Secure du fait que ses experts ne sont pas parvenus à accéder aux fichiers de sauvegarde qui leur avaient été envoyés en soirée la veille parce que ceux-ci étaient protégés par un mot de passe. Apparemment, ces fichiers contenaient entre autres les calculs révisés de la perte sèche pour les 271 régions de chevauchement concurrentiel désignées par M. Miller (transcription publique, à la p. 2864)[16].

[122] À l’appui de sa demande visant la réouverture de sa preuve, le commissaire a invoqué la décision Rovi Guides, Inc c Videotron Ltd, 2021 CF 19 (« Rovi »), dans laquelle la Cour fédérale a fait droit à la demande de la défenderesse de reprendre la présentation de la preuve dans le cadre du procès pour contrefaçon de brevet afin de permettre aux parties de produire une preuve d’expert supplémentaire concernant la réparation recherchée par la demanderesse, soit la restitution des profits. Cette décision se distingue toutefois de l’espèce, puisqu’elle repose sur un changement dans le droit provoqué par une décision de la CAF rendue après que la défenderesse eut terminé sa preuve, mais avant la présentation des observations finales. En outre, la Cour a adhéré à la thèse de la défenderesse selon laquelle on n’aurait pas pu raisonnablement s’attendre à ce que cette dernière présente plus tôt la preuve qu’elle proposait de produire dans sa requête en réouverture de sa preuve, compte tenu du droit applicable au moment où elle a présenté sa preuve (Rovi, au par. 26). Par ailleurs, la Cour a conclu que le premier volet du critère applicable à la réouverture du dossier de preuve avait été rempli (Rovi, au par. 23). Le Tribunal reconnaît que la Cour fédérale a souligné qu’elle considérait qu’il était dans l’intérêt de la justice d’accueillir la requête quoi qu’il en soit. Toutefois, sa décision à cet égard était clairement motivée par la décision rendue par la CAF dans l’intervalle.

[123] Le commissaire a par ailleurs invoqué la décision Apotex Inc c Takeda Canada Inc, 2013 CF 1237 (« Takeda »), dans laquelle la Cour fédérale, au paragraphe 118, a autorisé l’expert de la défenderesse à refaire son analyse et à corriger certaines erreurs, de sorte que la Cour et les parties puissent bénéficier de ses calculs révisés. Or, là encore, cette affaire se distingue de l’espèce du fait que la proposition d’autoriser l’expert de la défenderesse à revoir ses calculs émanait de la demanderesse. De plus, il ne semble pas y avoir eu de litige à propos de la question de savoir si ces erreurs de calcul auraient dû être relevées en exerçant une diligence raisonnable. Qui plus est, il n’était pas demandé à la Cour fédérale, à ce stade, d’en arriver à une conclusion définitive sur la principale question en cause (à savoir, celle des dommages-intérêts), mais plutôt de « trancher certaines questions en litige » de façon à ce que les parties puissent par la suite présenter leurs calculs et leurs arguments respectifs (Takeda, au par. 3).

[124] En somme, pour les motifs exposés ci-dessus, le Tribunal a rejeté la demande du commissaire visant la réouverture de sa preuve et l’admission des calculs révisés de M. Miller. Les conséquences de cette décision n’ont toutefois pas été aussi sévères qu’elles auraient pu l’être dans un autre contexte, parce que le commissaire a été en mesure de s’appuyer sur le dossier factuel pour présenter des observations sur les rajustements qui devraient être faits aux calculs de M. Miller à la lumière des plans d’intégrations révisés de Secure. Secure ne s’est pas opposée à ces observations. De plus, le commissaire a convaincu le Tribunal que ses estimations de la perte sèche avaient déjà été réduites pour tenir compte de la fermeture partielle d’une des six installations qui avaient été retirées de la liste des installations que Secure prévoyait fermer (XXXXXXXXXXXXXXX). Il a également convaincu le Tribunal que le fait qu’il ait omis de tenir compte de la fermeture temporaire du lieu d’enfouissement XXXXXXXXXX de Tervita avait peu d’incidence parce que XXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXX XXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXX (transcription confidentielle B, aux p. 3137 et 3138).

XI. Les marchés pertinents

A. Marchés du produit

[125] Comme il est souligné au paragraphe 36 des présents motifs, le commissaire allègue qu’il existe trois marchés de produit distincts, à savoir : i) la transformation et le traitement des déchets dans les ITRE; ii) l’élimination des déchets solides de pétrole et de gaz dans les lieux d’enfouissement; iii) l’élimination de l’eau produite et des eaux usées dans les PDEA appartenant à des tiers fournisseurs de services de gestion des déchets.

[126] Dans sa réponse à la demande modifiée du commissaire (la « réponse modifiée »), Secure a fait valoir que ces définitions étaient lacunaires principalement pour deux raisons. Dans un premier temps, Secure a soutenu que les marchés de produit pertinents devaient englober les sites d’évacuation de l’eau produite et des eaux usées et les autres sites d’élimination des déchets qui appartiennent à ses clients (les « sites des fournisseurs de premier niveau »). Dans un deuxième temps, Secure a allégué que le marché des lieux d’enfouissement devait être élargi afin que les décharges municipales de déchets solides et les sites de biorestauration en fassent partie.

[127] Toutefois, pendant le contre-interrogatoire de M. Miller, l’avocat principal de Secure a reconnu que les parties s’entendaient généralement sur la définition des marchés de produit pertinents (transcription publique, à la p. 879). À la fin de l’audience, les avocats des deux parties ont confirmé que les experts de part et d’autre (c.-à-d. M. Miller et Mme Duplantis) étaient d’accord sur ce point (transcription publique, aux p. 2900 et 3215).

[128] Secure a continué de faire valoir que les sites des fournisseurs de premier niveau devraient être pris en considération dans l’évaluation de la puissance commerciale que pourrait exercer Secure après le fusionnement. Toutefois, le Tribunal a compris que Secure reconnaissait que cela devait être fait à une étape ultérieure de l’analyse plutôt qu’au moment de définir le marché, et qu’elle acceptait de procéder ainsi.

[129] S’agissant des décharges municipales, Secure a reconnu qu’elles n’acceptaient pas toujours les mêmes types de déchets que les lieux d’enfouissement (transcription publique, à la p. 884). Selon le Tribunal, la preuve présentée en l’espèce démontre que l’affirmation de Secure constitue une sous-estimation de la réalité. En résumé, il ressort de la preuve que les décharges municipales n’acceptent habituellement pas certains des principaux types de déchets solides que les producteurs cherchent à éliminer, sauf peut-être pour recouvrir le site à la fin de sa vie utile. Dans ces circonstances, le Tribunal estime qu’il est préférable d’examiner à une étape ultérieure de l’analyse, plutôt qu’au moment de définir le marché, l’influence contraignante potentielle des décharges municipales sur la capacité alléguée de Secure à exercer une puissance commerciale.

[130] Il est entendu que le Tribunal est convaincu que la présence d’une ou de plusieurs décharges municipales dans une région donnée n’empêcherait vraisemblablement pas un monopoleur hypothétique dans ladite région d’être en mesure d’imposer et de maintenir une augmentation modeste, mais significative et non transitoire, du prix des services au lieu d’enfouissement par rapport aux prix qui seraient vraisemblablement pratiqués en l’absence du fusionnement. Cette conclusion est conforme à la conclusion rendue antérieurement par le Tribunal sur cette question (La commissaire de la concurrence c CCS Corporation et autres, 2012 Trib conc 14 (« Tervita TC »), au par. 58).

[131] S’agissant des installations de biorestauration, Secure n’a présenté aucun élément de preuve déterminant à l’appui de sa thèse. Plusieurs témoins ont toutefois affirmé que la biorestauration n’est pas un bon substitut des services offerts aux lieux d’enfouissement[17], d’une part parce que cette technique ne permet pas de décomposer les sels qui contaminent l’eau produite ou encore les métaux qui contaminent les sols et, d’autre part, parce que certains types d’hydrocarbures, entre autres les hydrocarbures lourds, engendrent des coûts d’assainissement importants. Dans le cadre de l’interrogatoire préalable à l’audience, M. Engel, témoin de Secure, a reconnu que la biorestauration [traduction] « ne peut pas normalement » être employée pour traiter efficacement les déchets solides contaminés par des métaux lourds, qu’elle ne peut être utilisée « la plupart du temps » pour traiter efficacement les matières solides contaminées par des sels, et qu’elle ne peut « généralement » pas servir au traitement efficace des matières solides contaminées par des hydrocarbures lourds. Cette affirmation est conforme aux éléments de preuve dont il est question aux paragraphes 89 à 91 de Tervita TC. Saisie de l’appel de cette décision du TC, la CAF fait observer que « le Tribunal a reçu une preuve abondante montrant que la biorestauration n’était pas une solution réaliste pour remplacer un site d’enfouissement sécuritaire » (Tervita Corporation c Commissaire de la concurrence, 2013 CAF 28 (« Tervita CAF »), au par. 110). Compte tenu de tout ce qui précède, le Tribunal est convaincu que le marché pertinent des lieux d’enfouissement exclut la biorestauration.

[132] En résumé, les marchés de produit pertinents en l’espèce sont les suivants : i) la transformation et le traitement des déchets dans les ITRE; ii) l’élimination des déchets solides de pétrole et de gaz dans les lieux d’enfouissement; iii) l’élimination de l’eau produite et des eaux usées dans les PDEA appartenant à des tiers fournisseurs de services de gestion des déchets.

B. Marchés géographiques

[133] Dans sa demande modifiée, le commissaire semble avoir défini un marché pertinent unique pour l’ensemble des clients qui bénéficiaient auparavant de la concurrence entre Secure et Tervita dans le domaine des services d’élimination des déchets de pétrole et de gaz dans le BSOC, définis au sens large. Le commissaire a ajouté que [traduction] « les clients les plus touchés sont généralement situés dans le nord-est de la Colombie-Britannique, dans le nord-ouest de l’Alberta, dans l’Ouest de l’Alberta, dans la région de production de pétrole lourd classique, à Lloydminster et à Kindersley ».

[134] Dans sa réponse modifiée, Secure a affirmé sans surprise que cette définition était imprécise. Le Tribunal en convient et fait remarquer que le commissaire sera tenu de faire mieux à l’avenir.

[135] La thèse du commissaire a en fin de compte été éclaircie dans le rapport initial de M. Miller. Dans ce rapport, M. Miller explique qu’un grand nombre de marchés géographiques ont été définis en fonction de l’emplacement des clients pour chacun des trois marchés de produit pertinents. Plus précisément, les limites géographiques de ces marchés ont été établies d’après : i) l’emplacement des puits desquels une installation locale tire 90 % de ses revenus liés aux services de gestion des déchets; ii) les groupes de clients qui [traduction] « évoluent dans des conditions de concurrence à peu près semblables ». M. Miller a eu recours à cette approche pour définir 271 régions géographiques distinctes au sein desquelles des installations de Secure et de Tervita tiraient des revenus des services d’élimination des déchets. En d’autres termes, il s’agit des régions où on observait un chevauchement concurrentiel direct entre les installations des parties au fusionnement. Ces régions de chevauchement représentaient environ 63 % des revenus combinés des parties au fusionnement. Autrement dit, approximativement 37 % des revenus combinés des parties au fusionnement étaient générés dans des régions où le chevauchement concurrentiel était inexistant. Ces régions sont ainsi exclues des 271 [traduction] « marchés » géographiques qui se chevauchent définis par M. Miller.

[136] L’illustration ci-dessous figurait dans le rapport initial de M. Miller :

[137] La zone hachurée en vert représente un [traduction] « marché » géographique distinct au sein duquel les clients ne disposaient que de deux options concurrentielles avant le fusionnement, à savoir Secure et Tervita. Pour établir les limites de ce marché, M. Miller a d’abord classé les clients qui avaient fait appel aux services de l’installation de Secure en fonction de la distance qui les séparait de cette installation, puis, en additionnant les revenus issus de ces clients en suivant l’ordre de classement, M. Miller a isolé le groupe de clients étant à l’origine de 90 % des revenus totaux de l’installation. La distance la plus grande recensée au sein du groupe de clients représentant 90 % des revenus de l’installation correspond à la distance entre l’installation de Secure et la ligne délimitant la région de collecte. L’exercice a été reproduit pour l’installation de Tervita.

[138] La zone hachurée en bleu représente un [traduction] « marché » distinct au sein duquel trois options s’offraient aux clients avant le fusionnement. Les limites géographiques de l’installation concurrente correspondent à une distance fixe, établie en fonction de la plus longue distance utilisée dans le cas de l’installation de Secure et de la plus longue distance utilisée dans le cas de l’installation de Tervita.

[139] M. Miller a expliqué qu’il avait entrepris de définir les [traduction] « marchés » géographiques suivant l’emplacement de la clientèle, parce que cette approche permettait de mieux cerner les effets concurrentiels du fusionnement quand les vendeurs sont en mesure d’exercer efficacement une discrimination par les prix au sein du bassin d’acheteurs. En effet, dans de telles circonstances, les effets concurrentiels du fusionnement peuvent varier d’un groupe de clients à un autre. C’est donc dire que l’entité fusionnée pourrait majorer les prix pour certains clients selon ce qu’elle sait au sujet de leur emplacement et de ce qu’il leur en coûte pour transporter leurs déchets vers les installations concurrentes. Dans l’impossibilité d’opérer un arbitrage entre des installations concurrentes, les clients pourraient être contraints d’accepter la hausse de prix que l’entité fusionnée tente d’imposer.

[140] M. Miller ajoute que cette approche [traduction] « prudente » donne lieu à de « vastes » marchés géographiques, parce que les régions de collecte des installations tiers qu’il a incluses dans les marchés sont vraisemblablement plus petites que celles qu’il a utilisées. De plus, il a tenu compte dans son analyse de nombreux tiers dont les installations ne constituent pas réellement des options concurrentielles.

[141] La thèse de M. Miller à cet égard est étayée par les réponses transmises par Secure au Bureau de la concurrence (le « Bureau ») en 2018 par suite d’une demande de renseignements (DR) au sujet de l’acquisition de Newalta par Tervita. Ces réponses ont été acheminées par lettre les 17 mai et 19 juin 2018, et ces lettres ont respectivement été déposées comme pièces sous les cotes CB-A-341/P-A-342 (« réponse de Secure à la DR de 2018 ») et CB-A-347/P-A-348[18]. À la page 2 de cette seconde lettre, Secure affirme ce qui suit :

[traduction]
Nous ne sommes également pas en mesure de fournir les cartes de densité de la clientèle ou les cartes des régions de collecte. Nous réitérons toutefois nos observations initiales ainsi que nos commentaires formulés dans le cadre de notre entretien téléphonique du 31 mai selon lesquels nous avons utilisé XXXXXXX pour définir en quoi consiste une « zone de marché ». Cependant, des facteurs peuvent avoir une incidence importante sur la façon de définir une zone de marché, notamment certaines routes et la topographie du secteur (p. ex. présence de montagnes et de vallées), les installations et les préférences des clients, et la capacité des installations. Il convient de souligner que cette définition s’applique de façon générale aux activités que nous menons en Alberta et que notre réponse initiale peut varier selon la province concernée et le cadre réglementaire applicable. Vous pouvez présumer que les petites régions de collecte se rapportent aux installations de petite taille (c.-à-d. les PDEA) et que les vastes régions de collecte (XXXXXXX) concernent les plus grandes installations qui offrent davantage de services (c.-à-d. les TSC et les lieux d’enfouissement). Mais, encore là, plusieurs facteurs entrent en ligne de compte.

[142] Les réponses de M. Miller aux questions de la formation viennent également étayer sa thèse relativement à la nature conservatrice de son approche. À cet égard, il a mentionné que l’étendue géographique des marchés définis autour des tiers concurrents allait au-delà de 100 kilomètres (transcription confidentielle B, à la p. 1050). Compte tenu de l’ensemble des éléments de preuve présentés en l’espèce, le Tribunal estime que la plupart des clients ne seraient pas disposés à parcourir 100 kilomètres en réaction à une hausse de prix modeste, mais significative et non transitoire.

[143] En outre, Secure a reconnu que, selon l’analyse de ses données réalisée par M. Miller, [traduction] « la majorité des déchets va parcourir une distance moyenne inférieure à 100 kilomètres à partir du puits, et Secure ne conteste pas cette analyse » (transcription publique, à la p. 30).

[144] Compte tenu de tout ce qui précède, le Tribunal est convaincu que l’approche adoptée par M. Miller est effectivement prudente.

[145] Mme Duplantis, au paragraphe 161 de son rapport initial et de son rapport révisé, a adopté cette même approche visant à définir les marchés géographiques selon l’emplacement de la clientèle. Dans sa présentation de diapositives, Mme Duplantis a mentionné que les approches adoptées pour définir les marchés de produit et les marchés géographiques étaient des [traduction] « points de consensus importants » entre M. Miller et elle. À l’étape des observations finales, les avocats des deux parties ont confirmé que ce point n’était pas contesté (transcription publique, aux p. 2900 et 3215).

[146] Le Tribunal fait remarquer que le recours à l’approche selon laquelle les marchés géographiques sont définis en fonction de l’emplacement de la clientèle dans le contexte où la discrimination par les prix est répandue est une pratique conforme à ce qui est mentionné au paragraphe 4.17 du document Fusions – Lignes directrices pour l’application de la loi publié par le Bureau le 6 octobre 2011 (les « Lignes directrices »).

[147] À la lumière de tout ce qui précède, le Tribunal est prêt à accepter à titre de marchés géographiques pertinents potentiels les 271 régions de chevauchement analysées par M. Miller et par Mme Duplantis. Le tableau qui suit présente une synthèse de ces 271 régions :

Tableau 2 – Évolution de la structure des régions de collecte se chevauchant

 

Structure du marché

Lieux d’enfouissement

ITRE

PDEA

Total

De 2 à 1

0

16

3

19

De 3 à 2

3

23

14

40

De 4 à 3+

25

56

131

212

Total

28

95

148

271

 

C. Les marchés « pertinents » aux fins de l’analyse de la DSC et de l’analyse des dessaisissements

[148] Le commissaire allègue que la concurrence sera vraisemblablement diminuée sensiblement dans 143 des 271 régions de chevauchement géographique décrites précédemment. Ces 143 marchés ont été établis au moyen des deux critères suivants : i) une part de marché de 35 % par suite du fusionnement et ii) une hausse de prix estimée de 5 %[19]. Il s’agit là des marchés qui s’avèrent « pertinents » dans le contexte de la présente demande[20]. Ces marchés (désignés au paragraphe 36 comme étant les « marchés pertinents »), dont la liste figure à l’annexe 2 des présents motifs, peuvent être ainsi résumés :

Tableau 3 – Synthèse de la structure des marchés pertinents

Structure du marché

Lieux d’enfouissement

ITRE

PDEA

(et ITRE)

Total

De 2 à 1

0

14

3

17

De 3 à 2

2

16

12

30

De 4 à 3+

5

34

57

96

Total

7

64

72

143

 

XII. Parts de marché

[149] M. Miller a calculé les parts de marché dans chacun des 143 marchés pertinents mentionnés précédemment, d’après les données internes des parties au fusionnement concernant la transaction et les données obtenues auprès de plus de 30 concurrents réels et allégués.

[150] M. Miller a intégré dans son rapport initial le tableau ci-dessous, qui offre un aperçu de l’ensemble élargi des 271 marchés au sein desquels on observe un chevauchement concurrentiel entre les parties au fusionnement :

[151] S’agissant des 143 marchés pertinents, les estimations de M. Miller font état des parts de marché minimales suivantes pour chacune des catégories de structure de marché (« de 2 à 1 », « de 3 à 2 » et « de 4 à 3+ ») :

Tableau 4 – Estimations des parts de marché dans les marchés pertinents

Structure du marché

Nombre de marchés

Part de marché minimale

De 2 à 1

17

90 %

De 3 à 2

30

73 %*

De 4 à 3+

96

46 %

 

* Un marché fait exception (le marché no 60). Au sein de celui-ci, la part de l’entité fusionnée est estimée à XXX.

[152] Il convient de souligner que les parts de marché dont fait état le tableau ci-dessus constituent des estimations prudentes.

[153] En effet, M. Miller a qualifié de « prudents » ses calculs des parts de marché parce que ceux-ci tiennent compte des décharges municipales et des installations situées sur les sites des fournisseurs de premier niveau qui acceptent les déchets d’autres producteurs, et ce, même si elles ne sont pas nécessairement considérées comme des solutions de rechange concurrentielles viables à Secure. De plus, pour les besoins de ses calculs, M. Miller a posé l’hypothèse globale selon laquelle, dans chacun des marchés pertinents, les clients dépensent 10 % du revenu total généré au sein du marché concerné dans les installations dont la région de collecte ne chevauche aucun des marchés qu’il a définis[21]. Il s’ensuit que, même dans les marchés « de 2 à 1 », M. Miller a présumé que la part de Secure après le fusionnement n’était que de 90 %. Compte tenu de l’ensemble des éléments de preuve versés au dossier, le Tribunal estime que la part de marché de Secure est probablement sous-estimée dans la majorité des 143 marchés pertinents.

[154] Mme Duplantis et Secure n’ont pas contesté les parts de marché estimées par M. Miller. De fait, Mme Duplantis a affirmé qu’elle s’était fondée sur les estimations de M. Miller relativement au revenu total et aux parts de marché pour parvenir à une estimation implicite de la taille globale du marché. Elle a précisé qu’elle avait également pris appui sur les valeurs estimées par M. Miller pour produire ses propres estimations de la perte sèche (rapport révisé de Mme Duplantis, au par. 167, figure 20). À l’étape de la présentation des observations finales, les avocats de Secure ont reconnu que les parties ne contestaient pas les parts de marché estimées par M. Miller (transcription publique, à la p. 3215).

[155] Le Tribunal fait remarquer que ces estimations concordent de façon générale avec la documentation de Secure et de Tervita versée au dossier, laquelle fait état des parts de marché élevées des parties au fusionnement. À titre d’exemple, selon une mise à jour interne de Tervita sur la répartition du marché des services d’évacuation des eaux en janvier 2020, la part de Tervita s’élevait à 39 %, celle de Secure, à 38 %, et celle de l’ensemble des autres concurrents, à 23 %. Ce rapport ne tenait pas compte des [traduction] « quatre nouvelles zones d’exploitation » de Tervita. Un document interne similaire de Secure préparé le 5 mars 2021 indique que la part du marché albertain de l’évacuation des eaux se chiffrait à 49 % dans le cas de Tervita et à 34 % dans le cas de Secure.

[156] À la lumière de ce qui précède, le Tribunal accepte la structure des marchés pertinents alléguée par M. Miller et reconnaît comme acceptables les estimations des parts de marché produites par M. Miller pour chacun de ces marchés.

XIII. Question 1 – Le fusionnement aura-t-il vraisemblablement pour effet de diminuer sensiblement la concurrence?

A. Principes juridiques applicables

[157] Pour déterminer si le fusionnement aura vraisemblablement pour effet de diminuer la concurrence, le Tribunal s’en tiendra à déterminer si le fusionnement aura vraisemblablement pour effet de rendre plus facile l’exercice d’une nouvelle ou d’une plus grande puissance commerciale par l’entité issue du fusionnement, qu’elle ait agi seule ou en interdépendance avec d’autres entreprises rivales (Tervita CSC, au par. 55).

[158] La puissance commerciale s’entend de la capacité d’exercer de façon profitable une influence sur les prix ou les autres dimensions de la concurrence, et ce, pendant une période significative sur le plan économique (Tervita CSC, au par. 44; Canada (Commissaire de la concurrence) c Rogers Communications Inc et Shaw Communications Inc, 2023 Trib conc 1 (« Rogers-Shaw »), au par. 128; Canada (Commissaire de la concurrence) c Parrish & Heimbecker, Limited, 2022 Trib conc 18 (« P&H »), aux par. 457 et 458; Tervita TC, au par. 371).

[159] En conséquence, l’examen visant à déterminer si la concurrence pourrait vraisemblablement être diminuée repose généralement sur l’évaluation de la capacité de l’entité fusionnée à augmenter les prix ou à réduire des dimensions pertinentes de la concurrence autres que les prix, par rapport aux niveaux qui auraient vraisemblablement prévalu en l’absence de la fusion. En d’autres termes, le Tribunal évalue les niveaux des prix et des autres dimensions de la concurrence qui auraient vraisemblablement existé n’eût été le fusionnement (Tervita CSC, au par. 51; Rogers-Shaw, au par. 129; P&H, au par. 464; Tervita TC, au par. 373).

[160] Les dimensions autres que les prix qui sont généralement évaluées incluent le service, la qualité, la variété et l’innovation (Tervita CSC, au par. 44).

[161] Lorsque le Tribunal détermine qu’un fusionnement ne permettra vraisemblablement pas à l’entité fusionnée d’exercer une plus grande puissance commerciale que celle qu’elle aurait exercée en l’absence du fusionnement, le Tribunal conclura habituellement que le fusionnement n’aura pas du tout pour effet de diminuer la concurrence, encore moins de façon sensible (Tervita TC, au par. 370).

[162] Pour déterminer si le fusionnement aura vraisemblablement pour effet de diminuer sensiblement la concurrence, le Tribunal s’en tiendra à déterminer si l’entité issue du fusionnement, qu’elle ait agi seule ou de concert avec d’autres entreprises, sera vraisemblablement en mesure d’exercer une puissance commerciale nettement plus importante qu’en l’absence du fusionnement (Tervita CSC, au par. 54; Rogers-Shaw, au par. 134; P&H, au par. 465).

[163] Cela implique une évaluation de l’ampleur, de la portée et de la durée vraisemblables de tout effet défavorable sur les dimensions de la concurrence, liées aux prix ou autres, qui découlera vraisemblablement du fusionnement (Tervita CSC, au par. 45; Rogers-Shaw, au par. 135; P&H, au par. 467; Tervita TC, au par. 375).

[164] En ce qui a trait au degré de diminution, ou à son ampleur, le Tribunal cherche généralement à déterminer si l’entité fusionnée aura la capacité d’augmenter les prix de manière importante, ou de réduire de façon importante une ou plusieurs dimensions pertinentes de la concurrence autres que les prix, par rapport aux niveaux qui auraient prévalu en l’absence du fusionnement (Rogers-Shaw, au par. 136; P&H, au par. 468; Tervita TC, au par. 377).

[165] En ce qui a trait à la portée, le Tribunal évalue généralement si l’entité fusionnée serait vraisemblablement en mesure d’imposer de tels effets dans une partie importante du marché pertinent ou encore relativement à un volume important de ventes (Rogers-Shaw, au par. 137; P&H, au par. 474).

[166] En ce qui a trait à la durée, le Tribunal évalue habituellement si l’entité fusionnée serait vraisemblablement en mesure de maintenir une hausse importante des prix, ou une diminution importante de dimensions de concurrence autres que les prix, pendant environ deux ans ou plus en l’absence de fusionnement (Tervita CSC, au par. 80; Tervita TC, aux par. 123 et 379).

[167] Le fardeau d’établir qu’un fusionnement aura vraisemblablement pour effet d’empêcher ou de diminuer sensiblement la concurrence incombe au commissaire (Tervita CAF, aux par. 107 et 108; Rogers-Shaw, au par. 141; P&H, au par. 476).

[168] Aux termes du paragraphe 92(2) de la Loi, le Tribunal ne peut conclure qu’un fusionnement diminue sensiblement la concurrence, ou qu’il aura vraisemblablement cet effet, en raison seulement de la concentration ou des parts de marché. Néanmoins, la preuve étayant des variations dans les parts de marché et les niveaux de concentration est pertinente et a souvent une influence sur l’appréciation du Tribunal (P&H, aux par. 459 et 567).

[169] Par conséquent, il est nécessaire de tenir compte des facteurs d’évaluation quantitatifs et qualitatifs, individuellement et de façon cumulative. Sur ce dernier point, il convient de souligner que tous les facteurs pertinents doivent être pris en considération, et que la pertinence de chacun de ces facteurs et le poids à y accorder varieront selon le contexte factuel. De plus, il n’y a pas de critère de référence numérique précis (comme une hausse de prix de 5 %) permettant de mesurer ce qui est important ou sensible, et l’exercice dépendra [traduction] « fortement du contexte » (P&H, au par. 466).

[170] Une liste non exhaustive des facteurs que le Tribunal peut examiner se trouve à l’article 93 de la Loi. Aux fins des présentes, les facteurs pertinents de l’article 93 sont examinés à la section C de la partie XIII ci-après.

B. Les positions des parties

(1) Le commissaire

[171] Pour étayer sa thèse selon laquelle le fusionnement aura vraisemblablement pour effet de diminuer sensiblement la concurrence, le commissaire fait valoir que Secure a déjà nettement renforcé sa puissance commerciale en faisant l’acquisition de Tervita. Il soutient que cette puissance commerciale accrue entraînera vraisemblablement une hausse des prix et/ou une diminution des autres dimensions de la concurrence.

[172] Plus précisément, le commissaire s’est appuyé sur les estimations de M. Miller par rapport aux aspects suivants : (i) l’évolution de la structure du marché (p. ex. le nombre de concurrents passant de 2 à 1, ou de 3 à 2); (ii) les parts de marchés élevées (dont il a été question précédemment); (iii) les ratios de détournement élevés entre Secure et Tervita; (iv) les hausses de prix observées dans les 143 marchés pertinents, qui varient entre 5 % et 72,30 %.

[173] De plus, le commissaire s’appuie sur les éléments de preuve de nature générale concernant divers facteurs d’évaluation qualitatifs qui, selon lui, s’appliquent de manière générale à chacun de ces marchés pertinents. S’agissant de ces facteurs, le commissaire allègue ce qui suit :

· le fusionnement a entraîné la disparation d’un concurrent dynamique et efficace qui était le plus proche rival de Secure;

· la concurrence restante, le cas échéant, est composée de concurrents de taille beaucoup plus petite qui ne seront pas en mesure d’empêcher Secure d’accroître de façon sensible ses prix ou de réduire d’autres dimensions de la concurrence auxquelles les clients accordent de l’importance;

· les décharges municipales et la biorestauration ne sont pas des substituts acceptables des produits pertinents;

· les entraves à l’accès aux marchés pertinents sont majeures;

· les clients n’auront vraisemblablement pas la capacité d’exercer un pouvoir compensateur suffisant pour restreindre les hausses de prix alléguées et la diminution alléguée des autres aspects de la concurrence, que ce soit en menaçant Secure de gérer à l’interne l’élimination de leurs déchets (approvisionnement autonome) ou en la menaçant de délaisser Secure dans d’autres marchés où les solutions de rechange concurrentielles sont plus nombreuses.

[174] Ces facteurs seront examinés plus en détail ci-après.

(2) Secure

[175] Dans sa réponse modifiée, Secure a fait valoir que le fusionnement [traduction] « n’a pas, et n’aura pas, pour effet d’empêcher ou de diminuer la concurrence, parce qu’il ne confère pas, et ne conférera pas, à SECURE la capacité d’exercer une puissance commerciale ».

[176] Pour étayer sa thèse, Secure a affirmé qu’aucun des marchés de produit ou des marchés géographiques pertinents ne présente d’entraves importantes à l’accès ou à l’expansion. Secure a ajouté qu’elle continue de faire face à une concurrence réelle en provenance des producteurs de pétrole et de gaz qui éliminent leurs déchets à même leur site (les « fournisseurs de premier niveau ») et en provenance des tiers fournisseurs de services d’élimination des déchets, lesquels ont les moyens d’élargir leur capacité en réaction à une hausse de prix alléguée. En outre, Secure a affirmé que les producteurs de pétrole et de gaz peuvent faire en sorte, et font en sorte, d’ouvrir l’accès à de nouveaux concurrents ou de permettre l’expansion des fournisseurs de services existants.

[177] Par ailleurs, selon Secure, ses clients ont la capacité de limiter les hausses de prix en menaçant, et ce, en toute crédibilité, de se tourner vers d’autres fournisseurs dans d’autres marchés où davantage de solutions de rechange concurrentielles s’offrent à eux ou en gérant à l’interne l’élimination de leurs déchets (approvisionnement autonome).

[178] Dans ses observations finales, Secure a ajouté que le commissaire ne s’était pas acquitté du fardeau qui lui incombait de démontrer l’existence d’une DSC dans chacun des marchés. À cet égard, Secure a fait valoir que le commissaire n’avait pas présenté de preuve ou d’analyse significative témoignant de la dynamique concurrentielle dans chacun des marchés géographiques locaux ou pour chacune des gammes de services pertinentes.

[179] Enfin, Secure a réitéré que [traduction] « l’approvisionnement autonome et la capacité des producteurs à soutenir l’arrivée d’un nouveau concurrent ou l’expansion d’un concurrent existant au sein d’un marché constituent des contraintes concurrentielles pour Secure dans le BSOC ».

C. L’appréciation faite par le Tribunal

[180] Ainsi qu’il a été expliqué précédemment à la partie XII, les parties ne contestent ni le changement de nature structurelle qui s’est opéré dans chacun des marchés pertinents par suite du fusionnement, ni les parts de marché après le fusionnement telles qu’elles ont été estimées par M. Miller pour chacun des marchés pertinents. Par conséquent, l’analyse qui suit portera essentiellement sur les indices quantitatifs estimés par M. Miller, sur les facteurs d’évaluation qualitatifs énumérés à l’article 93 de la Loi qui s’avèrent pertinents en l’espèce, de même que sur d’autres éléments soulevés par les parties.

(1) Ratios de détournement, marges et effets prévus sur les prix

[181] Le commissaire soutient que plusieurs indices quantitatifs viennent étayer une conclusion de DSC, soit les ratios de détournement élevés, les marges élevées et les hausses de prix importantes estimés par M. Miller.

(a) Ratios de détournement élevés

[182] Les ratios de détournement entre les produits des parties à un fusionnement sont au nombre des facteurs qui peuvent s’avérer pertinents dans l’analyse des effets vraisemblables du fusionnement sur la concurrence. En effet, ces ratios peuvent fournir de l’information sur la proximité de la concurrence entre les produits. En résumé, le ratio de détournement a pour but d’estimer la proportion des ventes que perdrait une partie au fusionnement au profit de l’autre partie à la transaction si la première partie augmentait son prix. Si le ratio de détournement est élevé, cela signifie que le degré de substitution de la première partie par l’autre partie est grand. Il en va de même dans le cas de ratios de détournement élevés entre les produits d’une partie au fusionnement et les produits d’autres concurrents présents sur le marché (P&H, au par. 437).

[183] Le Bureau donne l’explication suivante dans ses Lignes directrices :

Le ratio de détournement entre le produit de l’entreprise A et le produit de l’entreprise B est égal à la fraction des ventes perdues par l’entreprise A au profit de l’entreprise B quand l’entreprise A augmente le prix de son produit. De même, le ratio de détournement entre le produit de l’entreprise B et le produit de l’entreprise A est égal à la fraction des ventes perdues par l’entreprise B au profit de l’entreprise A quand l’entreprise B augmente le prix de son produit. Les ratios de détournement entre l’entreprise A et l’entreprise B n’ont pas à être symétriques.

Lignes directrices, au par. 6.15, note de bas de page 35.

[184] Les pièces 12 à 17 du rapport initial de M. Miller offrent des représentations graphiques des ratios de détournement estimés entre Secure et Tervita dans la plupart des marchés pertinents, exception faite de ceux où l’une ou l’autre des parties exerçait un monopole. Au paragraphe 110 de son rapport, M. Miller estime que les ratios de détournement entre Secure et Tervita (exprimés en pourcentage) pour les ITRE, les PDEA et les lieux d’enfouissement s’établissent en moyenne à 75 %, à 37 % et à 55 %, respectivement. Les ratios de détournement correspondants entre Tervita et Secure pour les ITRE, les PDEA et les lieux d’enfouissement s’élèvent, selon les estimations de M. Miller, à 69 %, à 57 % et à 58 %, respectivement (rapport initial de M. Miller, au par. 110).

[185] Dans son tableur détaillé, M. Miller a également estimé les ratios de détournement entre Secure et Tervita dans chacun des 143 marchés pertinents (les « ratios de détournement pertinents »).

[186] Secure n’a présenté aucune estimation des ratios de détournement et n’a contesté ni les ratios de détournement fondés sur les marchés estimés par M. Miller ni la méthode que ce dernier a appliquée pour parvenir à ces valeurs (transcription publique, aux p. 3215 et 3216).

[187] Comme on pouvait s’y attendre, les ratios de détournement pertinents sont très élevés dans les 17 marchés pertinents « de 2 à 1 », mais ils sont également assez élevés dans les 30 marchés pertinents « de 3 à 2 ». Plus précisément, à l’exception d’une valeur aberrante[22], la plus faible valeur que prend le plus grand des deux ratios de détournement pertinents est de 0,669 (ou 66,9 %). La plus faible valeur qu’affiche l’autre ratio correspond à 0,405, sauf dans trois cas qui font exception[23]. Cette dernière valeur est supérieure à 0,500 dans la grande majorité des marchés.

[188] S’agissant des marchés pertinents « 4 à 3+ », la valeur du plus grand des deux ratios de détournement pertinents est supérieure à 0,500 dans 68 des 96 marchés et supérieure à 0,400 dans 81 de ces marchés. Dans les 15 autres marchés, la valeur s’établit au-dessus de 0,300[24]. La valeur du plus bas des deux ratios s’établit au-dessus de 0,300 dans 53 de ces marchés[25].

[189] Au vu de ce qui précède, le Tribunal accepte les estimations de M. Miller et juge que les ratios de détournement pertinents élevés issus des calculs de ce dernier donnent à penser que Secure pourrait avoir la capacité d’exercer une puissance commerciale accrue après le fusionnement. Le Tribunal conclut que les valeurs élevées des ratios de détournement pertinents indiquent que le fusionnement aura potentiellement un effet négatif important sur les prix des services des lieux d’enfouissement, des ITRE et des PDEA au sein des marchés pertinents. Les estimations de M. Miller permettent par ailleurs de penser que les solutions de rechange à Secure ou à Tervita sont limitées.

(b) Marges élevées

[190] Le Tribunal a reconnu que la preuve de l’existence d’une rente économique ou de marges élevées fournit une indication directe de puissance commerciale (P&H, au par. 495; Canada (Loi sur la concurrence, Directeur des enquêtes et recherches) c Télé-Direct (Publications) Inc, [1997] DTCC no 8 297 (« Télé-Direct »), au par. 286).

[191] Le commissaire soutient qu’il existe une telle preuve en l’espèce. À cet égard, le commissaire s’appuie principalement sur les marges sur coût variable élevées calculées par M. Miller pour les installations de Secure et pour celles qui appartenaient auparavant à Tervita. Ces marges sont issues des états financiers des parties au fusionnement, en particulier les états des résultats de chacune des installations. En bref, M. Miller a retranché les coûts variables du revenu, selon les données figurant dans les états financiers, afin d’estimer le profit variable – aussi appelé [traduction] « marge sur coût variable » – de chaque installation pertinente (rapport initial de M. Miller, au par. 179 et aux pièces 43 à 45). M. Miller a également mentionné dans son rapport que la plupart de ces installations étaient rentables (rapport initial de M. Miller, au par. 152 et à la note de bas de page 246).

[192] Le commissaire s’est fondé sur ces marges sur coût variable élevées pour faire la démonstration d’une puissance commerciale, mais aussi pour appliquer une des deux méthodes qui lui ont permis d’estimer la perte sèche associée à la fermeture d’installations par Secure. Ainsi qu’il est expliqué plus en détail à la section B de la partie XV des présents motifs, il s’agit de la [traduction] « méthode axée sur le profit » décrite dans le rapport initial de M. Miller, aussi désignée par ce dernier et par le commissaire comme une [traduction] « méthode axée sur le revenu »[26]. Suivant cette méthode, le commissaire et M. Miller soutiennent que la marge sur coût variable d’une installation représente la valeur additionnelle qu’elle génère pour les consommateurs et que cette valeur est perdue si l’installation est appelée à fermer (rapport initial de M. Miller, au par. 137; rapport en réplique de M. Miller, à la note de bas de page 137).

[193] M. Miller a d’abord calculé la moyenne pondérée des marges sur coût variable pour les installations qui desservent l’ensemble élargi des 271 régions de chevauchement géographique entre les parties au fusionnement :

Tableau 5 – Moyenne pondérée des marges des installations de Secure et de Tervita dans les 271 régions de chevauchement géographique, selon les calculs initiaux (2019)[27]

 

Lieux d’enfouissement

ITRE/Cavernes

PDEA

Secure

69,6 %

82,4 %

87,9 %

Tervita

73,9 %

77,9 %

83,9 %

[194] En réponse aux points soulevés par M. Harington, M. Miller a procédé au rajustement des valeurs ci-dessus pour tenir compte de certains coûts qui, selon M. Harington, sont de nature variable, en particulier les coûts au titre de l’épuisement des actifs et les obligations additionnelles liées à la mise hors service d’immobilisations. Voici les nouvelles marges proposées par M. Miller après la révision de ses calculs :

Tableau 6 – Moyenne pondérée des marges des installations de Secure et de Tervita, selon les calculs révisés (2019)[28]

 

Lieux d’enfouissement

ITRE/Cavernes

PDEA

Secure

41,3 %

80,6 %

86,0 %

Tervita

49,9 %

75,5 %

76,1 %

[195] Dans son rapport en réplique, aux pièces 4 à 6, M. Miller a également entrepris de réviser ses estimations du profit variable de chacune des installations. La quasi-totalité de ces estimations affiche une valeur positive.

[196] À l’étape de la présentation des observations finales, Secure a confirmé qu’elle ne contestait pas les marges sur coût variable calculées par M. Miller (transcription publique, à la p. 3216). De fait, au cours de l’audience, (transcription confidentielle B, à la p. 2101), Mme Duplantis a confirmé qu’elle avait eu recours à ces marges dans un des tableurs qu’elle avait préparés pour le Tribunal (pièce CB-R-417, tableur préparé par Mme Renée Duplantis : perte sèche selon l’option de dessaisissement hypothétique (le « tableur de Mme Duplantis »)). Secure a toutefois contesté les inférences que le commissaire a tirées de cet élément de preuve.

[197] En dépit de ce qui précède, M. Engel a fait valoir que les données sur les profits et les pertes ne rendent pas compte avec exactitude de la rentabilité d’une installation. M. Engel a entre autres fait remarquer que bon nombre des coûts associés à une installation donnée font l’objet d’un suivi centralisé par Secure et que les états financiers propres à chacune des installations ne font donc pas état de ces coûts. Il a ajouté que d’autres coûts, comme les coûts liés à la dépréciation et à l’épuisement de la capacité, les coûts en capital initiaux, les coûts en capital périodiques et les coûts en capital en fin de vie utile, peuvent ne pas figurer dans ces états des résultats (pièce P-R-152/CB-R-153, déclaration de témoin de M. David Engel au nom de Secure (la « déclaration de témoin de M. Engel »), aux par. 94 et 95). Toutefois, M. Engel n’a fourni aucun élément de preuve convaincant donnant à penser que les estimations du profit variable de chacune des installations calculées par M. Miller et acceptées par Mme Duplantis n’offraient pas, de façon générale, un juste reflet de la réalité.

[198] Dans ses observations finales, Secure a ajouté que plusieurs raisons pouvaient expliquer la valeur élevée des marges sur coût variable, notamment :

a) le fait qu’une installation doive affecter à la couverture de ses coûts fixes une partie de sa marge sur coût variable;

b) la nécessité de tenir compte d’un éventuel passif environnemental à long terme;

c) l’existence d’une puissance commerciale antérieure du fait de la formation des prix en régime d’oligopole;

d) l’existence d’une puissance commerciale antérieure en raison des entraves à l’accès au marché.

[199] En contre-interrogatoire, M. Miller a fait valoir que ses modèles tenaient compte de la structure oligopolistique de l’industrie et, de façon indirecte, des entraves à l’accès au marché (transcription publique, aux p. 933 et 936). De plus, dans son rapport en réplique, M. Miller a ajouté que les coûts fixes [traduction] « irrécupérables », une fois que l’installation est en service, n’interviennent pas dans le processus décisionnel lié à l’établissement des prix dans l’objectif de maximiser les profits (rapport en réplique de M. Miller, aux par. 32 et 46). Néanmoins, ainsi qu’il a été mentionné précédemment, M. Miller a révisé ses estimations des marges bénéficiaires des parties au fusionnement pour tenir compte de certains types de coûts que Mme Duplantis et M. Harington avaient qualifiés de coûts variables.

[200] À la lumière des estimations révisées de M. Miller, lesquelles ne sont pas contestées par Secure et font toujours état de marges élevées, le Tribunal estime que cet élément de preuve milite en faveur de la conclusion selon laquelle Secure et Tervita jouissaient toutes deux d’une puissance commerciale avant le fusionnement. Compte tenu du fait que Secure a maintenant rassemblé toute cette puissance commerciale en son sein, cela donne à penser qu’elle pourrait avoir la capacité d’exercer une puissance commerciale accrue après le fusionnement.

(c) Hausses de prix importantes prévues

[201] Comme il en a été question au paragraphe 172 des présents motifs, M. Miller a estimé les hausses de prix pour chacun des 143 marchés pertinents. Celles-ci varient entre 5 % et 72,30 %.

[202] Les estimations initiales de M. Miller ont été générées au moyen d’un modèle reconnu de simulation de fusion, dans lequel il a notamment intégré ses estimations au titre des parts de marché, des marges sur coût variable et des ratios de détournement (rapport initial de M. Miller, aux par. 124 à 130 et à la note de bas de page 242; rapport en réplique de M. Miller, aux par. 7 à 11, y compris les notes de bas de page). Après avoir procédé à la révision de ses estimations des marges sur coût variable, comme il a été mentionné au paragraphe 194 des présents motifs, M. Miller a calculé, d’après une pondération en fonction du revenu, que les hausses de prix seraient en moyenne de 8,9 % aux lieux d’enfouissement, de 24,3 % aux ITRE et de 11,1 % aux PDEA (rapport en réplique de M. Miller, à la pièce 1). En réponse aux questions du Tribunal, M. Miller a confirmé que ses estimations des hausses de prix étaient indépendantes de toute considération liée à l’inflation générale des prix (transcription publique, à la p. 988).

[203] Mme Duplantis a critiqué à plusieurs égards les estimations de M. Miller. Tout d’abord, Mme Duplantis a fait valoir que ces estimations étaient largement supérieures aux hausses de prix qu’elle avait estimées au moyen d’une analyse fondée sur une [traduction] « expérience naturelle » dans le contexte de l’acquisition de Newalta par Tervita en 2018. Pour réaliser cette analyse, Mme Duplantis a appliqué la méthode des « doubles différences ». Suivant ses explications, la méthode des doubles différences peut aider à isoler l’effet d’un fusionnement en permettant d’établir une comparaison entre la variation des prix payés par les clients touchés par le fusionnement (le « groupe à l’étude ») et la variation des prix payés par les clients qui ne sont pas concernés par le fusionnement (le « groupe de référence ») (voir également Tervita TC, au par. 110). Afin de tenir compte du fait que Secure demeurait un concurrent après l’acquisition de Newalta, Mme Duplantis a analysé séparément les régions où l’entreprise était présente et celles où elle ne l’était pas, ce qui lui a permis de restreindre son groupe de référence aux régions qui, selon elle, n’avaient pas subi de changement dans la structure du marché par suite de l’acquisition.

[204] Il ressort de l’analyse de Mme Duplantis que l’acquisition de Newalta a engendré les hausses de prix moyennes suivantes : 11 % pour les clients des marchés « de 2 à 1 »; 9,8 % pour les clients des marchés « de 3 à 2 »; 0,9 % pour les clients des marchés « de 4 à 3+ » (rapport initial de Mme Duplantis, au par. 168)[29]. Les résultats pour la catégorie « de 2 à 1 » étaient statistiquement significatifs au seuil de 10 %, tandis que les résultats pour les deux autres catégories n’étaient pas statistiquement significatifs. Néanmoins, Mme Duplantis a fait valoir que ces résultats offraient une confirmation claire que le modèle appliqué par M. Miller dans le but de prévoir les effets du fusionnement sur les prix ne cadrait pas avec la dynamique de prix qui entre en jeu en l’espèce.

[205] M. Miller a répondu que Mme Duplantis n’avait pas adéquatement tenu compte de la présence de Secure par suite de l’acquisition de Newalta, et que son analyse fondée sur une [traduction] « expérience naturelle » comportait plusieurs lacunes au plan de la méthode, notamment les suivantes : (i) utilisation d’un ensemble de données restreint qui couvre une période de huit mois débutant immédiatement après la fin de l’enquête du Bureau et se terminant en mars 2020, au moment où des mesures importantes ont commencé à être mises en place en réaction à la pandémie de COVID-19; (ii) défaut de fournir des éléments de preuve démontrant que les prix dans le groupe à l’étude et les prix dans le groupe de référence suivaient des tendances comparables jusqu’à l’annonce de l’acquisition de Newalta; (iii) recours à un très petit échantillon de clients, s’agissant des services des lieux d’enfouissement; (iv) regroupement des données transactionnelles selon le client plutôt que selon l’emplacement du puits. M. Miller a entre autres affirmé qu’en raison de cette dernière erreur, d’importantes variations au sein des marchés « de 2 à 1 » avaient été ignorées dans l’analyse.

[206] En ce qui a trait à l’allégation selon laquelle Mme Duplantis n’a pas adéquatement tenu compte dans son analyse de la présence de Secure par suite de l’acquisition de Newalta, le commissaire est revenu sur sa position à l’étape des observations finales (transcription confidentielle B, aux p. 2941et 2942). Par conséquent, bien que le Tribunal était favorablement disposé à examiner la critique de M. Miller concernant cet aspect de l’analyse de Mme Duplantis, il ne se penchera pas davantage sur la question.

[207] Le Tribunal souscrit également à la thèse de M. Miller selon laquelle la période de huit mois sur laquelle portent les données utilisées par Mme Duplantis était trop courte pour que les résultats ainsi générés se révèlent fiables. La preuve démontre entre autres choses que les clients vont souvent prendre de nombreux mois pour négocier leurs taux, et ce, même après un fusionnement qui a pour effet d’accroître la marge de manœuvre du fournisseur de services de gestion des déchets, comme c’est le cas en l’espèce. En outre, les clients ont souvent des contrats en vigueur sur lesquels une période aussi courte que huit mois n’aurait pas d’incidence. Le Tribunal croit comprendre que Mme Duplantis n’a pas veillé à exclure de son ensemble de données les prix protégés par ces ententes contractuelles. Il se peut fort bien aussi que Tervita ait été réticente à accroître ses prix dans les mois qui ont immédiatement suivi la fin de l’enquête menée par le Bureau, en particulier dans le contexte où le commissaire dispose d’un délai d’un an après que le fusionnement eut été essentiellement complété pour contester la transaction (article 97 de la Loi). Enfin, il est raisonnable de penser que la pandémie de COVID-19 a eu une incidence sur les décisions de Tervita en matière d’établissement des prix.

[208] Par ailleurs, le Tribunal convient avec M. Miller que Mme Duplantis n’a pas démontré, que ce soit par l’application d’une méthode statistique ou à l’aide d’un autre type de preuve, que le groupe à l’étude et le groupe de référence affichaient des tendances communes sur le plan des prix. Le Tribunal admet également, d’une part, que l’ensemble de données dont s’est servie Mme Duplantis pour évaluer les prix des services d’enfouissement était trop restreint pour générer des résultats fiables et, d’autre part, que le regroupement des données transactionnelles selon le client a donné lieu aux lacunes relevées par M. Miller. En outre, le Tribunal estime que l’analyse de Mme Duplantis n’était pas fondée sur une réelle [traduction] « expérience naturelle » dans le cadre de laquelle une certaine force ou action exogène (c.-à-d. qui n’est pas liée à l’événement faisant l’objet de l’étude) vient créer une distinction entre le groupe à l’étude et le groupe de référence, réduisant ou éliminant ainsi le biais d’auto-sélection potentiel. Mme Duplantis ne semble pas avoir prévu de facteurs explicites permettant de tenir compte d’un éventuel biais de sélection dans son analyse.

[209] Au-delà de tout ce qui précède, le Tribunal estime que la preuve liée aux prix pratiqués dans l’industrie par suite de l’acquisition de Newalta par Tervita en 2018 ne constitue pas un paramètre fiable de prévision des prix pour 2023 étant donné que les conditions générales de l’industrie ont beaucoup évolué. M. Engel a notamment affirmé qu’à partir de 2014, et pendant de nombreuses années, Secure a eu du mal à surmonter le déclin des prix du pétrole à l’échelle mondiale, le ralentissement des activités de forage et d’achèvement et la situation de capacité excédentaire. Il a ajouté que ces difficultés ont été exacerbées par la pandémie de COVID-19 et par la guerre des prix opposant la Russie et l’Arabie saoudite (déclaration de témoin de M. Engel, au par. 17). Toutefois, selon l’opinion d’expert de M. Johnston à laquelle le Tribunal se rallie, on peut raisonnablement s’attendre à une croissance soutenue dans le BSOC jusqu’à la fin de 2030 (pièce P-A-001, rapport d’expert de M. Rory Johnston, aux par. 25 et 35; transcription publique, aux p. 152 et 157 à 160). Aucun élément de preuve ne donne à penser qu’on peut prévoir de façon significative le comportement de Secure en matière d’établissement des prix après le fusionnement en 2022, dans un contexte de croissance soutenue de la production à l’échelle de l’industrie, en se fondant sur les prix pratiqués par une autre entreprise (Tervita) en 2019-2020 alors que celle-ci devait composer avec le ralentissement économique mondial.

[210] Mme Duplantis a également critiqué les prix estimés par M. Miller en affirmant que le modèle de simulation de fusion de ce dernier, qu’elle a appliqué à l’acquisition de Newalta par Tervita, prévoyait des hausses de prix beaucoup plus importantes que celles qui s’étaient réellement produites. Toutefois, compte tenu des préoccupations dont il a été question précédemment au sujet de l’ensemble de données restreint utilisé par Mme Duplantis et des lacunes que présente la méthode sous-jacente à son analyse, le Tribunal n’admet pas cette critique.

[211] Mme Duplantis a formulé une troisième critique par rapport à l’analyse de M. Miller, à savoir que cette analyse est très sensible aux hypothèses qu’il a posées, en particulier l’hypothèse d’une part de marché de 10 % (la « part externe ») attribuée aux fournisseurs de services de gestion des déchets[30] situés à l’extérieur des limites géographiques des marchés pertinents. À cet égard, elle a estimé que si la part externe présumée était infiniment petite dans un marché « de 2 à 1 », la hausse de prix issue du modèle de M. Miller s’établirait au-dessus de 2 000 %, tandis que si on posait l’hypothèse d’une part externe de 25 % dans ce même marché, les effets sur les prix se chiffreraient à environ 21 % (transcription publique, à la p. 1776). Cependant, bien que Mme Duplantis ait fait valoir que les parts externes pourraient être autres que 10 %, elle n’a revu aucune des données relatives aux parts externes (transcription publique, aux p. 2038 et 2039). Elle n’a pas non plus été en mesure de fournir sa propre estimation de la part externe (transcription publique, aux p. 2039 et 2040). Compte tenu de l’ensemble des éléments de preuve en l’espèce, le Tribunal estime que la part externe de 10 % proposée par M. Miller constitue vraisemblablement une estimation très prudente[31].

[212] À la lumière de ce qui précède, le Tribunal conclut que les estimations de M. Miller quant aux effets qu’aura vraisemblablement le fusionnement sur les prix sont plus fiables que celles produites par Mme Duplantis. En l’absence d’éléments de preuve convaincants qui mettraient en doute les estimations de M. Miller, le Tribunal accepte ces estimations d’une manière générale.

[213] Quoiqu’il en soit, ni M. Miller, ni Mme Duplantis, ni d’ailleurs les parties ne contestent le résultat selon lequel les effets estimés du fusionnement sur les prix seront vraisemblablement supérieurs à 5 % dans les 17 marchés pertinents « de 2 à 1 » et dans les 30 marchés pertinents « de 3 à 2 ». Le Tribunal est convaincu que, dans le contexte de l’industrie des services de gestion des déchets, des hausses de prix prévues d’une telle ampleur peuvent être qualifiées d’importantes.

[214] En ce qui concerne les 96 autres marchés pertinents « de 4 à 3+ », le Tribunal s’attardera aux facteurs qualitatifs exposés ci-après.

[215] Le Tribunal fait observer au passage que les hausses de prix prévues par M. Miller constituent vraisemblablement des estimations prudentes du fait qu’elles sont fondées sur les parts de marché avant le fusionnement. Cette méthode a donné lieu à environ 56 cas où la variation prévue des prix affichait une valeur négative, lorsque Secure prévoyait fermer l’installation pratiquant le prix le plus élevé au sein d’un marché. Compte tenu du fait que M. Miller a également fait intervenir un critère de hausse des prix de 5 % dans sa démarche visant à cerner les marchés où une DSC était alléguée, certains cas de DSC ont probablement été omis. En outre, l’intégration de valeurs négatives dans le calcul des hausses de prix moyennes a vraisemblablement eu pour effet de réduire le niveau des hausses de prix moyennes prévues.

(2) Disparition d’un concurrent dynamique et efficace (alinéa 93f))

[216] Le commissaire soutient que le fusionnement a eu pour effet d’éliminer la rivalité intense entre les deux plus importants fournisseurs de services de gestion des déchets dans le BSOC. Selon lui, Secure et Tervita se livraient une concurrence étroite au regard des prix et des services, et elles étaient chacune la plus proche concurrente de l’autre.

[217] À l’appui de sa thèse, le commissaire a renvoyé le Tribunal aux pièces CB-A-864/P-A-865 et CB-A-866/P-A-865, lesquelles renferment des centaines de documents internes de Tervita, soit des autorisations de rabais dans le premier cas et des demandes d’approbation d’offres dans le deuxième cas. Ces documents concernent des réductions visant à faire concurrence à Secure dans un grand nombre de marchés distincts. Le commissaire a également fait référence à la pièce CB-A-206/P-A-207, qui regroupe des milliers de rapports de visites de clients. Ces rapports, présentés dans un tableur, comportent entre autres une colonne intitulée [traduction]« Renseignements concurrentiels ». Le nom de Secure est mentionné plus de 800 fois dans les quelque 1 800 lignes de cette colonne où figurent des données. Là encore, l’information concerne un grand nombre de marchés distincts.

[218] Aux paragraphes 91 à 99 de son rapport initial, M. Miller se réfère à des documents internes semblables provenant de Tervita et de Secure.

[219] Dans un autre document auquel M. Miller se reporte, il est fait mention que, pour 16 des 27 installations de Tervita, Secure est l’entreprise rivale qui jouit de la plus forte part de marché (après rajustement pour tenir compte du fait que Tervita a plus tard acquis Newalta) (pièce CB-A-762/P-A-763, examen des ITRE et des puits de déversement daté du 1er février 2017). Le Tribunal fait remarquer que la plupart des autres installations de Tervita n’avaient pas d’installation concurrente exploitée par Secure.

[220] M. Miller a également estimé qu’entre 63 % et 84 % des clients de Secure (avant le fusionnement) étaient situés dans des régions où la prochaine installation la plus proche appartenait à Tervita, plus précisément 63,9 % des clients des lieux d’enfouissement, 84,4 % des clients des ITRE et 66,4 % des clients des PDEA. Les estimations correspondantes pour les clients de Tervita s’établissent à 17,2 % dans le cas des lieux d’enfouissement, à 30,0 % dans le cas des ITRE et à 48,4 % dans le cas des PDEA (rapport initial de M. Miller, aux par. 101 et 102). Il a ajouté que les clients de Secure étaient situés à une distance moyenne de 76 kilomètres de l’installation de Tervita, et que la distance moyenne qui les séparait de l’installation d’un concurrent était de 140 kilomètres. Les distances correspondantes pour les clients de Tervita étaient de 61 kilomètres par rapport à l’installation de Secure et de 105 kilomètres par rapport à l’installation d’un tiers (rapport initial de M. Miller, aux par. 100 à 102). Secure n’a pas contesté cette preuve.

[221] En plus de ce qui précède, le commissaire a fait référence à la pièce CB-A-568/P-A-569, dossier no 0701-13328 – interrogatoires écrits de la partie défenderesse (dommages-intérêts), 31 juillet 2020, laquelle contient les réponses de Tervita aux interrogatoires écrits fournies à Secure dans le contexte d’un litige devant la Cour du Banc de la Reine de l’Alberta opposant Secure et l’entité qui a précédé Tervita, CCS. En réponse à la demande no 7, Tervita a affirmé ce qui suit :

XXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXX.

[222] Dans sa réponse à la demande no 9 dans le contexte du litige susmentionné, Tervita a ajouté ce qui suit :

XXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXX.

[223] XXXXXXXxXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXX

[224] XXXXXXXX XXXXXXXXXXXXXXX XXXXXXXXXX XXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXX

[225] Au-delà de l’information dont il a été question précédemment, le commissaire a fourni des éléments de preuve permettant d’établir que Secure et Tervita se livraient également concurrence en ce qui a trait à l’emplacement de leurs installations (à titre d’exemple, voir : pièce CB-A-512/P-A-513, communication par courriel le 12 décembre 2018 entre M. Alastair Graham, M. Robert Clarke et d’autres personnes au sujet des réunions concernant la municipalité régionale de Wood Buffalo et le développement économique, aux p. 2 et 3; pièce CB-A-820/P-A-821, résumé de la réunion sur la stratégie relative aux lieux d’enfouissement, 5 février 2020, à la p. 1; pièce CB-A-472/P-A-473, tableur intitulé [traduction] « Modèle d’estimation de l’autorisation de dépenses »; pièce CB-A-403/P-A-404, communication par courriel le 18 septembre 2019 entre M. Rene Besler et M. Corey Higham au sujet de CNRL 07-17, à la p. 2; transcription confidentielle B, à la p. 1075).

[226] En outre, les rapports de Secure destinés au grand public font expressément mention de Tervita tout comme les rapports de nature publique de Tervita font aussi précisément mention de Secure. À cet égard, voici le passage pertinent de la notice annuelle de Secure pour 2020 (pièce P-A-363, notice annuelle de Secure pour l’exercice s’étant terminé le 31 décembre 2020, datée du 25 février 2021 (la « notice annuelle de Secure pour 2020 »), à la p. 30) :

[traduction]
Les autres concurrents sur le marché des tiers fournisseurs de services de traitement et d’élimination des déchets des champs pétrolifères comprennent de petits fournisseurs de services régionaux et de grandes entreprises qui mènent des activités dans le BSOC. SECURE, qui est l’un des principaux fournisseurs de services de traitement et d’élimination des déchets des champs pétrolifères, compte 42 installations dans le BSOC et cinq installations aux États-Unis. Tervita Corporation (« Tervita ») possède environ 50 installations de traitement, de récupération et d’élimination situées principalement dans l’Ouest canadien. On dénombre aussi plusieurs concurrents de plus petite taille qui exploitent des installations indépendantes, lesquelles offrent, pour la plupart, un éventail restreint de services.

[227] De façon similaire, Tervita affirme ce qui suit dans sa notice annuelle pour 2020 (pièce P-A-364, notice annuelle de Tervita pour l’exercice s’étant terminé le 31 décembre 2020, datée du 4 mars 2021 (la « notice annuelle de Tervita pour 2020 »), à la p. 21) :

[traduction]
Les principaux concurrents de Tervita pour chacune des gammes de services sont les suivants :

  • Services de traitement, de récupération et d’élimination, et lieux d’enfouissement – Parmi les principaux concurrents de Tervita mentionnons Secure Energy Services Inc. ainsi qu’un certain nombre de plus petits exploitants régionaux, principalement détenus par des intérêts privés, de même que des producteurs qui s’occupent eux-mêmes du traitement de leurs déchets.

[...]

[228] L’information qui précède concorde avec les observations formulées par Tervita à l’intention du commissaire concernant l’acquisition de Newalta en 2018. En particulier, Tervita a affirmé ce qui suit à propos de Newalta et d’elle-même :

[traduction]
Les deux parties nomment Secure à titre de principal tiers concurrent, ce qui donne à penser que chacune des parties perd plus souvent des ventes au profit de Secure qu’au profit de l’autre partie. Selon Tervita, Secure est perçue comme le plus important concurrent en raison de sa situation financière plus enviable. En effet, les difficultés financières récentes de Newalta ont restreint la capacité de cette dernière à pratiquer des prix concurrentiels, tandis que Secure adopte généralement une stratégie de prix plus agressive.

Pièce CB-A-337/P-A-338, demande de certificat de décision préalable déposée par Tervita le 1er mars 2018 concernant Newalta, à la p. 22.

[229] En dépit de ce qui précède, Secure soutient que Tervita était [traduction] « en réelle difficulté » avant le fusionnement (transcription publique, à la p. 3453). Toutefois, selon les documents publics de Tervita, le bénéfice annuel avant intérêts, impôts et amortissements (« BAIIA ») de la division des services environnementaux de l’entreprise, de laquelle relèvent les ITRE, les PDEA et les lieux d’enfouissement, a varié entre 179 millions de dollars et 240 millions de dollars au cours des trois années ayant précédé le fusionnement (transcription publique, aux p. 1123 et 1124).

[230] Le Tribunal s’arrête un moment pour faire observer qu’en contre-interrogatoire, M. Engel, témoin de Secure, a reconnu que la division de l’infrastructure intermédiaire de Secure, qui concerne les ITRE et les PDEA, avait été rentable pendant les périodes de 12 mois se terminant les 31 décembre 2020 et 31 décembre 2021, et que c’était aussi le cas de la division des solutions environnementales et de la gestion des fluides, qui gère les activités de l’entreprise en matière de lieux d’enfouissement (transcription publique, aux p. 1121 et 1122). Il a aussi reconnu qu’en 2017, en 2018 et en 2019, la division de l’infrastructure intermédiaire de Secure avait affiché un BAIIA positif et qu’à cette époque, les lieux d’enfouissement relevaient de la division de l’infrastructure intermédiaire (transcription publique, à la p. 1119).

[231] À la lumière de l’ensemble des éléments de preuve examinés ci-dessus, le Tribunal conclut que le fusionnement a entraîné la disparition d’un concurrent dynamique, à savoir Tervita, qui était le plus proche rival de Secure dans la quasi-totalité des 143 marchés pertinents. Le Tribunal est convaincu qu’en l’absence de fusionnement, Secure et Tervita auraient continué, dans un avenir prévisible, de se livrer une vive concurrence au sein des marchés pertinents. Il n’existe aucun élément de preuve démontrant que Tervita aurait cessé d’être un concurrent dynamique et efficace n’eût été le fusionnement.

(3) Concurrence réelle restante (alinéa 93e))

(a) Introduction et identification des « concurrents » dans les marchés pertinents

[232] Le commissaire fait valoir que la concurrence restante ne suffit pas pour restreindre la puissance commerciale exercée par Secure.

[233] À l’appui de sa thèse, le commissaire affirme que Secure surpasse de loin toutes les autres entreprises au plan de l’étendue géographique des installations et de l’éventail de produits. En conséquence, les concurrents restants sont nettement désavantagés par rapport à Secure.

[234] Le commissaire souligne que, depuis le fusionnement, Secure exploite 62 ITRE, 24 lieux d’enfouissement, huit PDEA et trois cavernes dans le BSOC. À titre comparatif, voici comment se décline le portefeuille d’installations des six concurrents qui suivent en importance dans cette région, au regard des services de gestion des déchets pertinents :

· Wolverine Energy and Infrastructure Inc. Wolverine ») exploite cinq ITRE en Alberta et un lieu d’enfouissement industriel en Saskatchewan;

· Aqua Terra exploite huit PDEA, deux situés en Colombie-Britannique, cinq en Alberta, et un en Saskatchewan;

· Ridgeline Canada Inc. (« Ridgeline ») accepte certains types de déchets solides dans des décharges municipales en Alberta et en Saskatchewan;

· Catapult Water Midstream (« Catapult ») exploite trois PDEA en Alberta et un en Colombie-Britannique;

· Medicine River Oil Recyclers (« MROR ») exploite une ITRE et un PDEA en Alberta;

· White Swan Environmental Ltd. (« White Swan ») exploite une ITRE et une caverne en Alberta.

[235] S’agissant de l’évacuation des eaux, le commissaire ajoute qu’en février 2021, Secure et Tervita ont, de façon combinée, injecté plus de 20 000 mètres cubes d’eaux usées, comparativement à 6 000 mètres cubes combinés pour les trois concurrents qui suivent en importance (c.-à-d. Aqua Terra, MROR et Catapult).

[236] Secure a répondu qu’elle continuerait de faire face à une concurrence réelle en provenance des fournisseurs de premier niveau et des tiers fournisseurs de services d’élimination des déchets. Selon elle, ces fournisseurs ont généralement les moyens d’élargir leur capacité en réaction à une hausse de prix alléguée.

[237] Cependant, comme il en a été question au paragraphe 204 des présents motifs, Mme Duplantis a reconnu que la variation de prix moyenne serait une hausse d’au moins 11,0 % dans les marchés « de 2 à 1 » et d’au moins 9,8 % dans les marchés « de 3 à 2 ». En guise de comparaison, M. Miller a estimé que la hausse de prix varierait entre 6,54 % et 64,57 % dans les marchés « de 2 à 1 » et entre 6,95 % et 72,30 % dans les marchés « de 3 à 2 ».

[238] Voici les principaux concurrents répertoriés au sein des marchés pertinents.

[239] Wolverine. Wolverine décrit ses activités de gestion des déchets comme étant [traduction] « des activités intermédiaires de traitement des eaux, notamment la gestion des eaux ainsi que l’évacuation et le recyclage des eaux usées, et une gamme complète de services de gestion des déchets » (pièce CA-A-149/P-A-150, déclaration de témoin de M. John Paul Herbert Smith au nom de Wolverine (la « déclaration de témoin de Wolverine »), au par. 5). Dans sa déclaration de témoin, Wolverine décrit les types de déchets qui sont acceptés dans ses différentes installations, dont les quatre installations suivantes que les parties ont associées à un ou plusieurs marchés pertinents :

· Grande Cache, Alberta — Cette installation accepterait un vaste éventail de déchets dangereux et non dangereux. L’installation, qui comprend un puits de déversement de catégorie 1B, traite les émulsions et les fluides issus de la production.

· Mayerthorpe, Alberta — Essentiellement la même description que ce qui précède.

· Rycroft, Alberta — Essentiellement la même description que ce qui précède.

· Cynthia, Alberta — Cette installation traite aussi les émulsions et les fluides issus de la production et comprend un puits de déversement de catégorie 1B. L’éventail de déchets dangereux et non dangereux qui y sont acceptés est toutefois beaucoup plus restreint.

[240] NA. Dans les documents déposés par les parties, la désignation NA est associée aux fournisseurs de services de gestion des déchets suivants :

· MROR – Selon le commissaire, MROR exploite une ITRE à Drayton Valley, en Alberta, de même qu’un puits de déversement de catégorie 1B non loin de là.

· Rush Energy Services Inc.Rush ») – Selon la liste d’installations établie par le commissaire, Rush possède deux installations : (i) une ITRE située près de Breton, en Alberta, et (ii) un PDEA de catégorie II situé à proximité de Rimbey, en Alberta.

· White Owl Energy Services Inc. White Owl ») – M. Owen Pinnell, dans sa déclaration de témoin au nom de White Owl (la « déclaration de témoin de White Owl »), décrit l’installation que possède White Owl dans la région de Grande Prairie, en Alberta, comme une [traduction] « installation de traitement et d’élimination reliée à un oléoduc » (déclaration de témoin de White Owl, au par. 6). Les revenus indiqués pour cette installation se chiffrent à moins de 2 millions de dollars pour 2019 et à moins de 150 000 dollars pour 2020. Le commissaire décrit cette installation comme étant une ITRE.

· Albright Flush Systems Ltd.Albright ») – Selon le commissaire, Albright possède une ITRE située à Fort St. John, en Colombie-Britannique.

[241] Aqua Terra. D’après la déclaration de témoin de M. Hall au nom d’Aqua Terra (la « déclaration de témoin d’Aqua Terra »), l’entreprise offre des services de gestion des eaux, de logistique entourant l’évacuation des eaux, de recyclage et de transport par pipeline à ses installations de Fort St. John (Colombie-Britannique), de Dawson Creek (Colombie-Britannique), de Gordondale (Alberta), de Gold Creek (Alberta), de Hillmond (Saskatchewan), de Drumheller (Alberta), et de Torrington (Alberta).

[242] Pure Environmental. Dans sa déclaration de témoin au nom de Pure Environmental, M. Ramin Bogzaran mentionne que l’entreprise offre des services de stockage en caverne de même que des services de traitement, de récupération et d’élimination à son installation de Fort Kent, en Alberta.

[243] Envolve Energy Services Corp. Envolve »). Selon une carte interne de Tervita répertoriant les installations concurrentes qui offrent des services de gestion des déchets dans le BSOC, Envolve possède un PDEA près de South Grande Prairie, en Alberta.

[244] Catapult. Selon la description faite par M. Ryan Kaminski dans sa déclaration de témoin au nom de Catapult (la « déclaration de témoin de Catapult »), l’entreprise offre des services en matière de recyclage et d’élimination des fluides. Ses installations de Fox Creek et du secteur Berland, en Alberta, ont reçu les autorisations nécessaires pour pouvoir accepter les fluides de catégorie II et de catégorie 1B, alors que son installation de la région Pipestone, en Alberta, n’est autorisée à recevoir que les fluides de catégorie II (saumure et fluides équivalents). Sa quatrième installation, située à South Taylor, en Colombie-Britannique, est en mesure d’accepter l’eau produite et l’eau de reflux. Selon la déclaration de témoin de M. Dziuba au nom de Chevron (la « déclaration de témoin de Chevron »), l’installation de Catapult située à Fox Creek permet l’élimination de l’eau saline, mais ne peut prendre en charge d’autres flux de déchets. À l’audience, M. Broen, d’Athabasca, a ajouté qu’il ferait appel à Catapult uniquement dans un contexte d’urgence (transcription confidentielle B, à la p. 1675). Un graphique qui figure à l’onglet 2 de la déclaration de témoin de Catapult témoigne du fait que le volume d’eaux usées traitées par Secure après le fusionnement dans les principales régions productrices de pétrole et de gaz en Alberta et en Colombie-Britannique était plus de XX fois supérieur au volume d’eaux usées traitées par Catapult en mars 2021 (XXXXXXXXXXXXXXXX) et plus de XX fois supérieur au volume d’eaux usées traitées par le prochain concurrent en importance, à savoir Aqua Terra. Les autres concurrents identifiés (Voda Inc., MROR et Envolve) ont chacun traité moins de XXXXXXX.

[245] CNRL. CNRL est un producteur de pétrole et de gaz qui possède plusieurs installations d’élimination des déchets. Certaines de ces installations acceptent les déchets provenant de tiers. En ce sens, il s’agit donc d’un fournisseur de premier niveau. Parmi les installations de CNRL qui acceptent les déchets de tiers, notons le lieu d’enfouissement Peejay, dans le nord-est de la Colombie-Britannique, et le lieu d’enfouissement Wabasca, en Alberta. Récemment, un troisième lieu d’enfouissement, l’installation Manatokan, en Alberta, a reçu l’autorisation d’accepter les déchets de tiers. CNRL exploite également en Alberta et en Saskatchewan 13 puits de catégorie 1B ou de catégorie II qui acceptent les déchets provenant de tiers.

[246] White Swan. White Swan possède une installation à Conklin, en Alberta, laquelle est répertoriée en tant qu’ITRE sur la carte interne de Tervita mentionnée précédemment. XXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXX XXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXX XXXXXXXXXXXXXXXXXX XXXXXXX. Selon ce qu’affirme M. Phil Porter dans sa déclaration de témoin au nom de White Swan (la « déclaration de témoin de White Swan »), la capacité quotidienne de l’installation Conklin s’élève à XXXXXX. Dans sa déclaration de témoin au nom de ConocoPhillips (la « déclaration de témoin de ConocoPhillips »), Mme McRae souligne que l’installation de White Swan fournit principalement des services d’élimination des déchets liquides et que sa capacité quotidienne de gestion de déchets solides n’est que de 200 mètres cubes (déclaration de témoin de ConocoPhillips, au par. 17). XXXXX XXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXX (transcription confidentielle B, à la p. 1650).

[247] Sprocket Energy Corporation Sprocket »). Sprocket, un producteur de pétrole et de gaz, semble aussi agir à titre de fournisseur de premier niveau dans un petit nombre de marchés pertinents.

[248] En plus des entreprises susmentionnées, certaines autres entités sont répertoriées en tant que [traduction] « concurrents » dans les tableurs fournis par les parties. Les éléments de preuve ne permettent toutefois pas d’étayer cette désignation, du moins en ce qui concerne les marchés pertinents. Par conséquent, ces installations ne sauraient être considérées comme des concurrents de Secure. En voici des exemples :

· Dans sa déclaration de témoin au nom de TAQA North Ltd. (« TAQA ») (la « déclaration de témoin de TAQA »), M. Nigel Wiebe a affirmé que TAQA n’acceptait pas les déchets provenant de tiers.

· Selon un courriel joint à la déclaration de témoin de M. Travis Tweit au nom de White Cap Resources Inc. (« White Cap ») (la « déclaration de témoin de White Cap »), White Cap n’a reçu aucun déchet de tiers au cours de la période visée par une ordonnance rendue par la Cour fédérale en vertu de l’article 11 de la Loi (c.-à-d. entre le 1er janvier 2019 et le 14 octobre 2021, date du courriel).

· Dans un courriel joint à la déclaration de témoin déposée au nom de Tidewater Midstream Ltd. (« Tidewater »), un représentant de Tidewater mentionne que, même si l’entreprise fournit de temps à autre certains services de traitement des émulsions et d’évacuation des eaux, ceux-ci ne sont pas au cœur même des activités de l’entreprise et cette dernière ne se perçoit pas comme un concurrent de Secure.

· M. Scott Lauinger, président-directeur général de Dragos Water Management (« Dragos ») a affirmé dans sa déclaration de témoin que l’entreprise avait fermé son installation à l’automne 2021.

· M. Frank Vanden Elsen, de Gibson Energy Inc. Gibson »), un autre participant de l’industrie, a mentionné dans sa déclaration de témoin que Gibson avait vendu à Wolverine ses installations d’élimination des déchets dans le BSOC en 2019.

· D’après la déclaration de témoin présentée par Mme Lora Brenan d’Aquatera Utilities Inc. (« AUI ») (la « déclaration de témoin d’AUI »), AUI estime que son lieu d’enfouissement à Grande Prairie ne livre pas concurrence à ceux exploités par des entreprises comme Secure et Tervita, parce que son installation accepte principalement des déchets ménagers et industriels et qu’elle recycle des matières telles que le carton et les métaux.

(b) Marchés où le nombre de concurrents passe de 2 à 1 (marchés « de 2 à 1 »)

[249] Par définition, la concurrence restante est inexistante dans les 19 marchés « de 2 à 1 » dont fait état le tableau 2 des présents motifs. Toutefois, ainsi que l’indique le tableau 3, la diminution sensible vraisemblable de la concurrence alléguée par le commissaire ne vise que 17 de ces marchés. Il en est ainsi parce que le seuil de 5 % que le commissaire a fixé pour le critère de la hausse des prix n’a pas été dépassé dans deux marchés. Plus précisément, la variation prévue des prix s’établit à XXXXXX dans le marché no 9 et à XXXXX dans le marché no 11.

[250] Dans son rapport en réplique, M. Miller explique comment son analyse a pu générer des projections négatives relativement aux variations de prix. Pour résumer, ces prévisions découlent du fait qu’il a exclu de son analyse certaines installations qui affichaient des revenus importants et des parts de marché élevées et dont la fermeture est prévue par Secure. Au moment de répartir ces revenus entre les installations restantes, il s’est avéré que la part de marché de l’entité fusionnée était en fin de compte inférieure à celle de l’installation fermée. Étant donné que les marges et les prix sont déterminés par les parts de marché, la marge (prix) de l’entité fusionnée était, selon les prévisions du modèle, inférieure à la marge (prix) avant le fusionnement de l’installation visée par une fermeture. Au moment de faire état dans son rapport des fluctuations de prix prévues, M. Miller a utilisé la moyenne pondérée de ces deux variations. Dans certains cas, cette façon de procéder a donné lieu à une variation des prix négative et a eu pour effet de [traduction] « masquer la hausse réelle des prix » (rapport en réplique de M. Miller, aux par. 70 et 71).

[251] Nonobstant ce qui précède, le commissaire n’a allégué aucune diminution sensible vraisemblable de la concurrence dans les 56 marchés, parmi l’ensemble élargi des 271 régions géographiques où il y a chevauchement de la concurrence entre les parties au fusionnement, pour lesquels l’analyse a généré des prévisions de hausses de prix négatives, et cela inclut les deux marchés « de 2 à 1 » de cette catégorie. Le commissaire n’a pas non plus proposé d’inclure l’un ou l’autre de ces 56 marchés dans la catégorie des marchés touchés par une DSC. Par conséquent, et compte tenu de l’absence de concession ou d’autres observations de la part de Secure sur cet aspect, le Tribunal ne se penchera pas davantage sur les marchés en question. Le Tribunal fait remarquer au passage que cette considération revêt peu d’importance puisque, dans la grande majorité de ces marchés, l’installation de Tervita la plus proche des clients figure sur la liste des dessaisissements qui sont, selon ce qu’a établi le Tribunal, nécessaires pour contrer la DSC.

[252] Étant donné, d’une part, que la structure des 17 marchés « de 2 à 1 » visés par l’allégation de diminution sensible vraisemblable de la concurrence formulée par le commissaire n’a pas été contestée et, d’autre part, que Mme Duplantis a reconnu que le fusionnement allait vraisemblablement entraîner une hausse de prix importante (11 %) au sein de ces marchés, ceux-ci ne feront pas l’objet d’une analyse plus poussée de la part du Tribunal. Le Tribunal est convaincu que le fusionnement a donné lieu à une DSC dans ces marchés et qu’il continuera vraisemblablement de produire cet effet dans un avenir prévisible. Compte tenu du fait que le Tribunal retient de manière générale les estimations de M. Miller au regard des effets vraisemblables du fusionnement sur les prix, le Tribunal conclut que les prix dans la quasi-totalité de ces marchés pertinents vont vraisemblablement afficher une hausse supérieure à la moyenne de 11 % estimée par Mme Duplantis.

(c) Marchés où le nombre de concurrents passe de 3 à 2 (marchés « de 3 à 2 »)

[253] Le Tribunal a conclu que les concurrents restants dans les 30 marchés « de 3 à 2 » qui, selon l’allégation du commissaire, subiront vraisemblablement une DSC ne seront vraisemblablement pas suffisamment efficaces pour empêcher une telle situation de se produire.

[254] Ainsi qu’il a été mentionné précédemment, Mme Duplantis a reconnu que les effets sur les prix dans ces 30 marchés pertinents se chiffreraient en moyenne à 9,8 % au moins. Le Tribunal estime que les prix dans chacun de ces marchés pertinents vont vraisemblablement être majorés d’au moins 5 %, soit la valeur estimée par M. Miller, et ce, parce que presque tous ces marchés pertinents peuvent être à juste titre décrits comme étant des marchés « de 2 à 1 » pour au moins une partie des clients de ces marchés. Cela s’explique par l’une ou l’autre des situations suivantes : (i) le « concurrent » restant identifié n’est en aucun cas un concurrent[32]; (ii) le « concurrent » restant identifié n’accepte que certains types de déchets[33]; (iii) les clients estiment que le « concurrent » restant identifié ne constitue pas une solution de rechange acceptable[34]; (iv) le « concurrent » restant identifié est beaucoup plus éloigné des clients que les installations de Secure (y compris celles qui appartenaient auparavant à Tervita)[35].

(d) Marchés où le nombre de concurrents passe de 4 à 3, ou plus (marchés « de 4 à 3+ »)

(i) Introduction

[255] Le commissaire a répertorié 96 marchés « de 4 à 3+ » pour lesquels il allègue que le fusionnement aura vraisemblablement pour effet de diminuer sensiblement la concurrence.

[256] Comme c’était le cas dans certains des marchés « de 3 à 2 » dont il a été question précédemment, certains des « concurrents » identifiés au sein des marchés « de 4 à 3+ » n’assureront vraisemblablement pas une concurrence réelle à Secure, nommément :

· les décharges municipales, qui n’ont pas l’autorisation d’accepter certains types de déchets solides ou encore qui sont situées beaucoup plus loin des clients que l’installation pertinente de Secure et l’installation pertinente qui appartenait auparavant à Tervita;

· TAQA, White Cap, Dragos et Gibson, qui ne sont pas réellement des concurrents (voir le paragraphe 248 ci-dessus).

[257] À titre d’observation de nature générale, malgré l’inclusion de ces entités et des autres soi-disant « concurrents » dans les marchés pertinents, M. Miller a tout de même estimé que la hausse des prix serait, selon toute vraisemblance, d’au moins 5 % dans tous ces marchés. Dans plus de 50 % des marchés « de 4 à 3+ », la hausse des prix estimée est supérieure à 10 %. Lorsque le Tribunal parvient à la conclusion que les concurrents restants ne seront vraisemblablement pas suffisamment efficaces pour empêcher une DSC, le Tribunal accepte les estimations de prix de M. Miller.

[258] Le Tribunal tient à formuler une deuxième observation générale, à savoir que le commissaire ne lui a pas fourni d’analyse traditionnelle marché par marché. L’information transmise par le commissaire au sujet des différents marchés pertinents se limitait essentiellement aux données des tableurs préparés par M. Miller, qui a estimé les revenus, les parts de marché, les ratios de détournement, les hausses de prix et la perte sèche associée aux effets hors prix pour chacun des marchés (pièce CA-A-065/P-A-066, pièces 8 à 10, effet prévu sur les prix et perte sèche dans les marchés définis en fonction de la clientèle (le « tableur de M. Miller »); pièce CA-A-919, réponse à la communication du Tribunal datée du 20 mai 2022 au sujet de la pièce CA-A-065 (le « tableur combiné de M. Miller et de Mme Duplantis »)). Dans ses observations finales, le commissaire a complété cette information en y ajoutant un petit nombre de renseignements et de cartes propres à chacune des installations dont le commissaire sollicite le dessaisissement. L’information n’y était toutefois pas présentée en fonction du marché, mais plutôt en fonction des installations visées par un dessaisissement. Compte tenu du fait que la plupart de ces installations desservent un grand nombre de marchés pertinents, le Tribunal a eu du mal à tirer de ces documents de l’information utile sur les différents marchés. Bien entendu, une partie des autres documents fournis dans le cadre de la présente instance contenaient des renseignements relatifs à certains marchés pertinents précis, mais ces documents n’étaient pas présentés d’une façon qui permettait au Tribunal d’établir facilement une corrélation entre les données et les différents marchés pertinents.

[259] Le Tribunal a à maintes reprises demandé aux parties de lui fournir des cartes qui l’aideraient à réaliser les analyses marché par marché qui s’imposaient et, en fin de compte, Secure a préparé de telles cartes à partir des éléments de preuve au dossier. Bien que ces cartes n’aient pas été versées au dossier du Tribunal à titre de pièces, elles ont été utiles aux fins de l’analyse[36]. Ces cartes et les éléments de preuve sous-jacents ont entre autres permis au Tribunal de mieux comprendre où étaient situés les clients par rapport aux installations concurrentes qui, selon ce que prétend Secure, continueront d’assurer une concurrence réelle. Lorsqu’il est question de l’emplacement des clients dans l’analyse ci-après, le Tribunal fait référence à ce qui est indiqué sur les cartes fournies par Secure.

[260] Le Tribunal fait une parenthèse et souligne qu’un défendeur qui serait tenté, dans le cadre d’une future instance, de s’abstenir de fournir au Tribunal l’information qui l’aiderait dans son analyse le ferait à ses propres risques. En effet, le commissaire transmet généralement au Tribunal l’information ayant trait aux parts de marché (concentration du marché) et aux facteurs d’évaluation qualitatifs énumérés à l’article 93 de la Loi, et le Tribunal peut s’appuyer sur cette information pour tirer des conclusions favorables à l’égard du commissaire. Pour éviter de telles inférences, les défendeurs ont tout intérêt à présenter l’information pertinente à cet égard. C’est généralement ce qui a été fait par le passé. En l’espèce, l’un des principaux avantages que retire Secure du fait d’avoir fourni des cartes au Tribunal est que ces dernières ont aidé le Tribunal à conclure que le fusionnement n’aura vraisemblablement pas pour effet de diminuer sensiblement la concurrence dans certains des 143 marchés pertinents. Le Tribunal s’est également appuyé sur ces cartes pour parvenir à la conclusion que certains des dessaisissements demandés par le commissaire ne seraient pas nécessaires pour rétablir la concurrence de façon à éliminer le caractère sensible de la diminution de la concurrence découlant du fusionnement.

(ii) Lieux d’enfouissement

[261] Selon ce qu’allègue le commissaire, le fusionnement entraînera vraisemblablement une DSC dans cinq des marchés des lieux d’enfouissement « de 4 à 3+ », à savoir les marchés nos 62, 63, 78, 79 et 80 (voir le tableau 3 et l’annexe 2 des présents motifs).

[262] Le Tribunal est d’accord avec le commissaire pour dire que, dans chacun de ces marchés, les concurrents restants ne sont pas suffisamment efficaces pour empêcher une DSC de se produire par suite du fusionnement. En d’autres termes, les concurrents restants ne sont pas suffisamment efficaces pour empêcher Secure d’exercer une puissance commerciale nettement plus importante qu’avant le fusionnement. Le dossier n’offre aucun élément de preuve convaincant qui donne à penser que cette situation pourrait vraisemblablement être appelée à changer.

[263] En bref, dans chacun de ces marchés, soit les concurrents restants identifiés sont des décharges municipales, soit ils sont beaucoup plus éloignés des clients que le lieu d’enfouissement de Secure et le lieu d’enfouissement qui appartenait auparavant à Tervita les plus proches de ces clients. Comme il est expliqué aux paragraphes 129 et 130 et aux paragraphes 293 et 294 des présents motifs, les décharges municipales n’acceptent normalement pas certains des principaux types de déchets solides que les producteurs cherchent à éliminer. De plus, au sein des marchés nos 62 et 63, la décharge municipale est passablement éloignée de la plupart ou de la totalité des clients[37]. Qui plus est, dans le marché no 79, le concurrent le plus proche, Ridgeline, est beaucoup plus éloigné, en plus de ne pas être perçu comme livrant concurrence à Secure (pièce CA-A-040/CB-A-041/P-A-042, déclaration de témoin de M. Hart au nom de CNRL (la « déclaration de témoin de CNRL »), au par. 19; pièce CA-A-109/P-A-110, déclaration de témoin de TAQA, au par. 16). Ridgeline représente par ailleurs, au sein du marché no 78, le seul lieu d’enfouissement répertorié sur la carte comme un « concurrent » qui n’est pas une décharge municipale, mais il est par contre très éloigné. Il en va de même pour le lieu d’enfouissement Peejay (CNRL) dans les marchés nos 62 et 63, et RemedX dans le marché no 80.

(iii) ITRE

[264] Le commissaire allègue que le fusionnement entraînera vraisemblablement une DSC dans 34 marchés des ITRE « de 4 à 3+ ». Si l’on fait abstraction de deux marchés (les marchés nos 123 et 126), le Tribunal convient avec le commissaire que les concurrents restants dans les marchés susmentionnés ne sont pas suffisamment efficaces pour empêcher une DSC de se produire par suite du fusionnement. Le dossier n’offre aucun élément de preuve convaincant qui donne à penser que cette situation pourrait vraisemblablement être appelée à changer.

[265] Il est possible de répartir les 34 marchés en différents groupes suivant leurs caractéristiques fondamentales, puis de présenter une synthèse pour chacun de ces groupes.

[266] Neuf marchés se situent aux alentours de Grande Prairie, en Alberta, notamment tout juste au sud et à l’ouest de la ville. Il s’agit des marchés nos 86, 88, 90, 91, 92, 94, 95, 96 et 98. À l’exception du marché no 98 où la part de marché est estimée à XXXXX, tous les autres marchés sont associés à une part supérieure à 85 % ou s’en approchant. En outre, dans chacun des marchés, la valeur du plus grand des deux ratios de détournement pertinents s’établit au-dessus de 0,69. Par ailleurs, exception faite du marché no 95, la plupart ou la totalité des clients dans ces marchés sont situés beaucoup plus près de l’installation pertinente de Secure et de l’installation pertinente qui appartenait auparavant à Tervita que des installations concurrentes de tiers répertoriées. C’est pourquoi ces clients s’exposent à des hausses de prix importantes ou à une forte augmentation des frais de transport en raison du fusionnement. Dans le marché no 95, de nombreux clients auront encore accès à une installation n’appartenant pas à Secure (c.-à-d. une installation d’Envolve ou de White Owl) située plus proche d’eux que l’installation pertinente de Secure. Cependant, étant donné les ratios de détournement élevés (XXXXXXXX), ces clients s’exposent aussi à des hausses de prix importantes de la part de Secure, et c’est particulièrement vrai en période de « forte augmentation » parce que les volumes d’eaux usées que traitent les concurrents restants (Envolve et White Owl) sont très faibles. Compte tenu de ce qui précède, le Tribunal n’hésite pas à conclure que les concurrents restants au sein de ces marchés ne sont pas suffisamment « efficaces » pour empêcher Secure d’exercer une puissance commerciale nettement plus importante qu’avant le fusionnement.

[267] Six autres marchés sont situés en Alberta, près de l’installation Brazeau et de l’installation Niton Junction qui appartenaient précédemment à Tervita. Au sein des marchés nos 99, 101, 111, 117 et 136, entre deux et cinq ITRE concurrentes sont identifiées. Toutefois, exception faite de l’installation Cynthia de Wolverine, les installations concurrentes sont beaucoup plus éloignées de bon nombre de clients que l’installation pertinente de Secure et l’installation pertinente qui appartenait auparavant à Tervita. Qui plus est, l’installation Cynthia n’accepte que certains flux de déchets (voir le paragraphe 239 des présents motifs). Par conséquent, les clients dans ces marchés s’exposent à des hausses de prix importantes ou à une forte augmentation des frais de transport en raison du fusionnement. Au sein du sixième marché défini dans cette région, soit le marché no 102, l’installation Mayerthorpe de Wolverine semble être plus proche pour la plupart des clients comparativement à l’installation pertinente de Secure. Toutefois, les ratios de détournement pertinents dans ce marché sont de XXXXXXX. Par ailleurs, les parts de marché estimées, pour ce qui est des marchés nos 99, 101, 102 et 136, sont toutes supérieures à 75 %[38]. Compte tenu de ce qui précède, le Tribunal conclut que les concurrents restants au sein de ces six marchés ne sont pas suffisamment « efficaces » pour empêcher Secure d’exercer une puissance commerciale nettement plus importante qu’avant le fusionnement.

[268] Cinq autres marchés sont situés à proximité de Dawson Creek, en Colombie-Britannique. Il s’agit des marchés nos 104, 105, 106, 107 et 108. Dans chacun de ces marchés, la plupart ou la totalité des clients sont situés à une distance plus grande des installations concurrentes de tiers répertoriées que des installations de Secure et de Tervita les plus proches. Pour ces clients, le fusionnement a eu pour effet d’établir une structure de marché « de 2 à 1 », Secure ayant désormais la capacité d’accroître nettement les prix puisqu’elle sait où sont situés les clients, quelles sont les installations concurrentes et à combien s’élèvent les frais de transport. Cette capacité ne changera vraisemblablement pas dans un avenir prévisible. Par conséquent, le Tribunal conclut que les concurrents restants au sein de ces marchés ne sont pas suffisamment « efficaces » pour empêcher qu’un tel effet anticoncurrentiel ne découle du fusionnement.

[269] De façon similaire, dans les marchés nos 119, 121, 124 et 127, la plupart ou la totalité des clients sont plus éloignés des ITRE concurrentes de tiers répertoriées que des installations de Secure et de Tervita les plus proches. Ainsi, les observations et la conclusion formulées au paragraphe qui précède s’appliquent de la même façon aux marchés en question.

[270] Le constat est le même pour trois marchés (les marchés nos 128, 129 et 130) situés près de Beaverlodge, à l’ouest de Grande Prairie, en Alberta, ainsi que pour deux marchés (les marchés nos 116 et 138) situés à proximité de Rocky Mountain House, en Alberta.

[271] Dans trois autres marchés (les marchés nos 93, 132 et 134) situés près de Spirit River, en Alberta, les clients ont accès, à proximité, à au moins une solution de rechange à Secure. Dans les marchés nos 93 et 132, l’installation Rycroft de Wolverine est située près de l’installation pertinente de Secure et de l’installation pertinente qui appartenait auparavant à Tervita. Dans le marché no 134, les clients ont en plus une deuxième solution de rechange, nommément White Owl. Cependant, la part de marché de Secure est, selon les estimations, supérieure à 85 % dans chacun de ces trois marchés, et le plus élevé des deux ratios de détournement s’établit à XXXXXXXXXXX, respectivement, dans chacun des marchés. Par conséquent, le Tribunal conclut que les concurrents restants au sein de ces trois marchés ne seront pas, selon toute vraisemblance, suffisamment « efficaces » pour empêcher une DSC de se produire par suite du fusionnement.

[272] Dans les deux derniers marchés des ITRE (les marchés nos 123 et 126), le Tribunal n’est pas en mesure de conclure, sur la foi de la preuve au dossier, que les concurrents restants ne sont pas efficaces. Il ne semble y avoir aucun client pour qui les installations pertinentes de Secure et de Tervita se situent à moins grande distance que l’ITRE concurrente la plus proche. Au sein du marché no 123, les clients ont, à proximité, deux solutions de rechange à Secure (nommément MROR et l’installation de Rimbey, en Alberta, qui appartenait auparavant à Gibson). Le constat est le même dans le marché no 126, où les clients ont accès à deux installations à proximité, soit celles exploitées par Rush et par Wolverine (Mayerthorpe). Le Tribunal souligne au passage que cela pourrait expliquer pourquoi l’estimation de la part de marché de Secure est inférieure dans ces marchés (en deçà de 50 % dans les deux cas) et pourquoi les ratios de détournement pertinents sont relativement bas dans ces marchés (XXXXXXXXXXXXX, respectivement).

[273] En résumé, à la lumière de ce qui précède, le Tribunal conclut que les concurrents restants ne sont pas, et ne seront vraisemblablement pas, suffisamment efficaces pour empêcher Secure d’exercer une puissance commerciale nettement plus importante qu’avant le fusionnement dans 32 des 34 marchés des ITRE « de 4 à 3+ » pertinents. Le dossier n’offre aucun élément de preuve convaincant qui donne à penser que cette situation pourrait vraisemblablement être appelée à changer. Cependant, le Tribunal conclut que les concurrents restants dans les deux autres marchés (les marchés nos 123 et 126) sont, et demeureront vraisemblablement, suffisamment efficaces pour empêcher qu’une telle situation se produise.

(iv) PDEA

[274] Le commissaire allègue que le fusionnement entraînera vraisemblablement une DSC dans 57 marchés des PDEA « de 4 à 3+ » pertinents. Les marchés pertinents qui présentent une structure similaire, du moins au regard d’un nombre significatif de clients dans chacun d’eux, peuvent être commodément regroupés aux fins de l’analyse.

[275] Dans 17 de ces marchés pertinents, le nombre de solutions de rechange concurrentielles situées à une distance raisonnable pour les clients, ou du moins pour un nombre significatif de clients, est passé de deux à une par suite du fusionnement. Il s’agit des marchés nos 143, 144, 145, 146, 147, 148, 150, 154, 155, 157, 160, 163, 166, 177, 232, 233 et 246.

[276] Par « solutions de rechange à distance raisonnable », le Tribunal entend les installations de tiers qui sont accessibles sans que le client ait à parcourir à une grande distance supplémentaire et, donc, à débourser d’importantes sommes additionnelles au titre des frais de transport, comparativement à ce qu’il en était avant le fusionnement (les « solutions de rechange à distance raisonnable »)[39]. Si l’étendue géographique des marchés pertinents avait été définie en fonction du critère du monopoleur hypothétique, les autres solutions de rechange représentées sur les cartes fournies au Tribunal ou dont il est fait mention dans le tableur de M. Miller n’auraient fort probablement pas fait partie de ces marchés pertinents[40].

[277] En l’absence de solution de rechange à distance raisonnable, les clients s’exposent à des hausses de prix importantes ou à une forte augmentation des frais de transport en raison du fusionnement. Autrement dit, Secure aura la capacité de hausser les prix qu’elle fait payer à ces clients. Par conséquent, le Tribunal conclut que les « concurrents » restants identifiés dans ces 17 marchés pertinents n’assurent pas, et n’assureront vraisemblablement pas, une concurrence réelle, et qu’ils ne pourront vraisemblablement pas empêcher une DSC de se produire par suite du fusionnement.

[278] Dans dix autres marchés pertinents, le fusionnement a eu pour effet de faire passer le nombre de solutions de rechange à distance raisonnable de trois à deux, du moins pour un nombre significatif de clients. Il s’agit des marchés nos 142, 152, 159, 168, 193, 196, 206, 235, 252 et 257. Dans chacun de ces marchés, la part de Secure est estimée à environ 50 % ou plus. De fait, dans plusieurs marchés, la part de Secure est beaucoup plus élevée. Dans un marché défini en fonction du critère du monopoleur hypothétique, la part de marché réelle de Secure serait même probablement encore plus élevée. De plus, la valeur du plus grand des deux ratios de détournement pertinents s’établit au-dessus de 0,43 dans tous les marchés, sauf deux, pour lesquels le ratio est XXXXXXXX. Enfin, l’étendue des activités du concurrent restant dans chacun de ces marchés est très loin d’être comparable à l’envergure des activités de Secure. Compte tenu de ce qui précède, le Tribunal conclut que les concurrents restants au sein de ces dix marchés pertinents ne seront vraisemblablement pas suffisamment efficaces pour empêcher qu’une DSC ne découle du fusionnement.

[279] Dans 22 autres marchés pertinents, le fusionnement a eu pour effet de faire passer le nombre de solutions de rechange à distance raisonnable de quatre à trois, du moins pour un nombre significatif de clients. Il s’agit des marchés nos 156, 162, 164, 165, 169, 171, 172, 173, 174, 176, 183, 186, 188, 200, 202, 241, 242, 245, 247, 251, 255 et 259.

[280] Parmi ces 22 marchés, 12 sont situés dans la région de Fox Creek, en Alberta, soit les marchés nos 156, 169, 171, 172, 173, 174, 176, 183, 186, 188, 245 et 247. Dragos s’étant retirée du marché, les seuls concurrents restants dans cette région sont Catapult (installations Berland et Fox Creek) et Sprocket. Compte tenu des éléments de preuve au dossier concernant la concurrence observée dans cette région, le Tribunal est convaincu que les concurrentes restants ne sont pas suffisamment efficaces pour empêcher qu’une DSC ne découle du fusionnement. À cet égard, M. Dziuba a affirmé que Chevron [traduction] « a peu d’options dans la région de Fox Creek pour l’élimination de nombreux types de déchets, outre les installations exploitées par Secure (et les installations qui appartenaient auparavant à Tervita) dans les régions de Kaybob et de Fox Creek » (déclaration de témoin de Chevron, au par. 19). Il a expliqué que Chevron a déjà fait appel à l’installation de Catapult située à Fox Creek pour l’élimination de l’eau saline, mais que celle-ci n’est pas une option pour l’élimination d’autres flux de déchets[41]. M. Broen, d’Athabasca, a ajouté qu’il ferait appel à Catapult uniquement dans un contexte d’urgence (transcription confidentielle B, à la p. 1675). M. Cain, de Halo, a également décrit Catapult et les autres concurrents restants dans la région de Fox Creek comme étant de [traduction] « petites installations indépendantes permettant l’élimination de l’eau produite dont l’étendue des activités n’a rien à voir avec l’ampleur de celles des installations de Secure et de Tervita dans la grande région de Fox Creek » (transcription confidentielle A, aux p. 370 et 371).

[281] Dans cinq autres marchés situés au sud de Grande Prairie, en Alberta, de nombreux clients n’ont plus qu’Envolve et Aqua Terra comme solutions de rechange à distance raisonnable depuis le fusionnement. Il s’agit des marchés nos 162, 164, 165, 241 et 242[42]. Toutefois, compte tenu des éléments de preuve attestant du très faible volume de déchets traités par ces deux concurrents, le Tribunal conclut que ces derniers ne sauraient être considérés comme livrant une concurrence réelle à Secure (voir le paragraphe 244 des présents motifs).

[282] Il reste donc cinq marchés au sein desquels le fusionnement a eu pour effet de faire passer de quatre à trois le nombre de solutions de rechange à distance raisonnable, à savoir les marchés nos 200, 202, 251, 255 et 259. De l’avis du Tribunal, les conditions de concurrence qui caractérisent le marché no 202 sont semblables à celles décrites au paragraphe qui précède. En résumé, les clients dans ce marché situé tout juste au nord de Grande Prairie, en Alberta, n’ont désormais que très peu de solutions de rechange à distance raisonnable, nommément Envolve, Aqua Terra et White Owl. Le Tribunal conclut que, collectivement, ces concurrents n’assurent pas une concurrence réelle à Secure dans le marché no 202.

[283] Les marchés nos 200, 251, 255 et 259 sont situés près de Dawson Creek, en Colombie-Britannique. Dans les deux derniers marchés, le Tribunal conclut que l’installation Tower TD de Catapult et les deux installations d’Aqua Terra situées dans la région seraient vraisemblablement en mesure d’assurer une concurrence réelle. Pour parvenir à cette conclusion, le Tribunal a aussi tenu compte du fait que les hausses de prix prévues par M. Miller dépassaient tout juste le seuil de 5 % (5,3 % et 6,0 %, respectivement). Le Tribunal s’estime par ailleurs conforté dans son analyse par le fait que le marché no 259 est de très petite taille et qu’il est associé à des recettes annuelles inférieures à XXXX. Toutefois, en ce qui concerne les marchés nos 200 et 251, deux des membres de la formation ont conclu que les concurrents restants ne seront vraisemblablement pas suffisamment efficaces pour empêcher Secure d’exercer une puissance commerciale nettement plus importante qu’avant le fusionnement, eu égard à d’autres facteurs. Les facteurs en question sont les suivants : (i) les hausses de prix prévues par M. Miller se chiffrent à 7,7 % et à 7,2 %, respectivement; (ii) dans les deux marchés, au moins un des ratios de détournement pertinents s’approche de 0,50; (iii) les marges au sein de ces marchés sont élevées (XXXXXXXXXXXXXXX).

[284] Dans les huit derniers marchés (de la grande catégorie des marchés « de 4 à 3+ ») visés par l’allégation de DSC du commissaire, les clients ont accès à quatre ou à cinq solutions de rechange à distance raisonnable. Toutefois, pour trois de ces marchés (les marchés nos 179, 184 et 208), les hausses de prix estimées par M. Miller sont supérieures à 10 % : 14,5 %, 11,6 % et 12,8 %, respectivement. À la lumière de ces estimations et des valeurs élevées au titre des parts de marché, des ratios de détournement pertinents et des marges[43], le Tribunal conclut que les concurrents restants dans ces marchés ne seront vraisemblablement pas suffisamment efficaces pour empêcher qu’une DSC ne survienne par suite du fusionnement. S’agissant de deux autres marchés (les marchés nos 200 et 249), deux des membres de la formation concluent que les concurrents restants ne seront vraisemblablement pas suffisamment efficaces à cette fin, si on prend en considération l’ensemble des facteurs pertinents dans une perspective cumulative. Pour parvenir à cette conclusion, les membres de la formation ont tenu compte des hausses de prix de 7,7 % et de 7,0 % respectivement prévues par M. Miller de même que des valeurs élevées calculées au titre des parts de marché (XXXXXX), des marges (XXXXXX) et des ratios de détournement pertinents (XXXXX dans le cas du marché no 200 et XXXXXX dans le cas du marché no 249). Les éléments de preuve permettent de conclure, selon la prépondérance des probabilités, que le fusionnement provoque, ou provoquera vraisemblablement, une DSC dans ces marchés. S’agissant des trois derniers marchés (les marchés nos 203, 204 et 205), le Tribunal estime que la preuve au dossier n’est pas suffisante pour établir que les concurrents restants n’assurent pas une concurrence réelle. Pour résumer, il restera quatre solutions de rechange valables à distance raisonnable (c.-à-d. Catapult, Aqua Terra, Rycroft et l’installation de CNRL à Wembly). Ainsi, Secure ne sera vraisemblablement pas en mesure d’exercer une puissance commerciale nettement plus importante qu’avant le fusionnement. Le Tribunal fait remarquer que les hausses de prix prévues par M. Miller étaient tout juste au-dessus du seuil de 5 %, soit 5,9 %, 5,3 % et 6,9 %, respectivement.

[285] En somme, pour les motifs exposés ci-dessus, le Tribunal conclut que, dans 52 des 57 marchés des PDEA « de 4 à 3+ » visés par l’allégation de DSC du commissaire, les concurrents restants ne sont pas suffisamment efficaces pour empêcher la DSC alléguée de se produire par suite du fusionnement. Dans les cinq autres marchés, à savoir les marchés nos 203, 204, 205, 255 et 259, le Tribunal n’est toutefois pas convaincu que les concurrents restants n’assurent pas une concurrence réelle. Autrement dit, le commissaire n’est pas parvenu à démontrer que les concurrents restants ne sont pas suffisamment efficaces pour empêcher Secure d’exercer une puissance commerciale nettement plus importante qu’avant le fusionnement.

(v) Conclusion au regard de la concurrence réelle restante

[286] En résumé, pour les motifs énoncés aux paragraphes 249 à 252 ci-dessus, le Tribunal conclut que la concurrence restante n’est pas suffisamment efficace dans les 17 marchés « de 2 à 1 » visés par l’allégation du commissaire selon laquelle le fusionnement entraînera vraisemblablement une DSC. Le dossier ne contient aucun élément de preuve convaincant donnant à penser que cette situation pourrait vraisemblablement changer dans un avenir prévisible.

[287] Pour les motifs énoncés aux paragraphes 253 et 254 ci-dessus, le Tribunal parvient à la même conclusion au regard des 30 marchés « de 3 à 2 » visés par l’allégation de DSC vraisemblable formulée par le commissaire.

[288] Pour les motifs énoncés aux paragraphes 255 à 285 ci-dessus, le Tribunal parvient également à cette conclusion au regard de 89 des 96 marchés « de 4 à 3+ » visés par cette même allégation de la part du commissaire. Ces 89 marchés sont ainsi répartis : (i) les cinq marchés des lieux d’enfouissement identifiés par le commissaire dans cette catégorie; (ii) 32 des 34 marchés des ITRE identifiés par le commissaire dans cette catégorie; (iii) 52 des 57 marchés des PDEA identifiés par le commissaire dans cette catégorie.

[289] Par conséquent, le Tribunal conclut, de façon générale, que dans 136 des 143 marchés pertinents, les concurrents restants ne sont pas suffisamment efficaces pour empêcher Secure d’exercer une puissance commerciale nettement plus importante par suite du fusionnement.

(4) Disponibilité de produits pouvant servir de substituts acceptables (alinéa 93c))

[290] Secure soutient que les décharges municipales et la biorestauration sont des substituts acceptables des services fournis aux lieux d’enfouissement. Elle ajoute que certains producteurs (aussi appelés « premières parties ») permettent à d’autres producteurs d’accéder à leurs [traduction] « installations pétrolières » pour y obtenir certains types de services de traitement des déchets. Secure affirme également que certaines premières parties donnent à d’autres producteurs l’accès au puits de déversement d’eau qui se trouve sur leur site.

[291] Les observations de Secure à cet égard concernent sept marchés pertinents, soit les marchés nos 22, 23, 62, 63, 78, 79 et 80.

[292] La preuve au dossier ne permet pas d’étayer la thèse de Secure. Au contraire, elle vient appuyer la thèse du commissaire selon laquelle ces substituts allégués des services fournis par Secure et par Tervita en matière de lieux d’enfouissement, d’ITRE et de PDEA ne seront pas en mesure de restreindre la capacité de Secure à exercer une puissance commerciale accrue après le fusionnement.

(a) Décharges municipales

[293] S’agissant des décharges municipales, M. Barrie Flood, de RemedX, qui exploite un lieu d’enfouissement de catégorie II à Breton, en Alberta, a affirmé ce qui suit : [traduction] « Si les coûts associés à l’élimination des déchets sont plus faibles dans le cas des décharges municipales, de façon générale, celles-ci ne peuvent pas accepter tous les types de déchets qui peuvent être éliminés dans les lieux d’enfouissement de catégorie II, et elles peuvent également être associées à de plus grands risques pour l’environnement » (pièce CA-A-122/P-A-123, déclaration de témoin de M. Flood au nom de RemedX (la « déclaration de témoin de RemedX »), au par. 13). Ces propos ont été corroborés par M. Lammens, de PECL, qui a mentionné ce qui suit : [traduction] « Les décharges municipales ne représentent pas une option pour PECL, car elles n’ont pas l’autorisation d’accepter le type de déchets solides de champs pétrolifères que PECL génère, et elles ne sont pas non plus conçues de manière à pouvoir traiter de tels déchets » (pièce P-A-036/CA-A-037/CB-A-038, déclaration de témoin de M. Lammens au nom de PECL (la « déclaration de témoin de PECL »), au par. 36). Mme Brenan, d’AUI, a ajouté que, même si AUI possède un lieu d’enfouissement de catégorie II à Grande Prairie, en Alberta, ce lieu d’enfouissement [traduction] « accepte principalement des déchets ménagers et industriels, et il recycle des matières diverses telles que le carton et les métaux » (déclaration de témoin d’AUI, au par. 5). Par conséquent, de l’avis de Mme Brenan, ce lieu d’enfouissement ne livre pas concurrence à ceux exploités par Secure et par Tervita. Ainsi, dans les marchés pertinents dans lesquels se retrouve le lieu d’enfouissement d’AUI, à savoir les marchés nos 22, 23 et 78, le Tribunal n’a pas accordé une grande importance à la présence d’AUI.

[294] Dans cinq des sept marchés dont il a été question précédemment, à savoir les marchés nos 22, 23, 62, 63 et 79, une deuxième raison vient expliquer pourquoi le Tribunal n’a pas accordé une grande importance sur le plan concurrentiel aux lieux d’enfouissements répertoriés. En effet, ces décharges municipales sont beaucoup plus éloignées de bon nombre de clients, ou de la totalité d’entre eux, que l’installation de Secure et l’installation qui appartenait auparavant à Tervita.

(b) Biorestauration

[295] Comme il a été mentionné précédemment, plusieurs témoins ont affirmé que la biorestauration n’est pas un substitut valable des services offerts aux lieux d’enfouissement (voir le paragraphe 131 des présents motifs), d’une part parce que cette technique ne permet pas de décomposer les sels qui contaminent l’eau produite ou encore les métaux qui contaminent les sols et, d’autre part, parce que certains types d’hydrocarbures, entre autres les hydrocarbures lourds, engendrent des coûts d’assainissement importants.

(c) Fournisseurs de premier niveau

[296] Comme il a aussi été mentionné précédemment, M. Miller a tenu compte des fournisseurs de premier niveau qui acceptent les déchets de tiers dans sa démarche visant à définir les marchés et à estimer les parts de marché (voir le paragraphe 153 et la note de bas de page 30 ci-dessus). Il a procédé ainsi dans l’objectif de générer des estimations [traduction] « prudentes ». Sa méthode, combinée aux cartes faisant état de l’emplacement de ces fournisseurs de premier niveau, a aidé le Tribunal à apprécier la mesure dans laquelle ces fournisseurs de services de gestion des déchets contribueraient vraisemblablement à maintenir une concurrence réelle au sein de ces marchés pertinents après la fusion[44].

[297] Il est entendu qu’à l’exception de CNRL dans un petit nombre de marchés et des installations pétrolières de Tourmaline dans un marché, aucun fournisseur de premier niveau notable n’a été identifié dans les marchés pertinents relatifs aux lieux d’enfouissement ou aux ITRE. S’agissant des PDEA, les fournisseurs de premier niveau qui acceptent les eaux usées de tiers ont été répertoriés et analysés par rapport à un grand nombre de marchés pertinents. Le Tribunal a toutefois jugé qu’ils n’avaient pas une importance suffisamment grande au plan concurrentiel pour lui permettre de conclure qu’une concurrence réelle existe encore ou existera vraisemblablement encore après le fusionnement. Les exceptions dignes de mention sont les marchés no 203, 204, 205 et 259, où l’installation de CNRL à Wembly fait partie des concurrents restants, et le marché no 255, où se trouvent les installations pétrolières de Tourmaline de même que plusieurs autres concurrents restants.

[298] Le Tribunal souligne que le fait que les fournisseurs de premier niveau ne jouent pas, dans la grande majorité des marchés pertinents, un rôle important sur le plan de la concurrence concorde avec une observation formulée par Secure en 2018 en réponse à une DR provenant du Bureau au sujet de l’acquisition proposée de Newalta par Tervita. Secure avait alors affirmé que [traduction] « XXXXXXXXXX XXXXXXX XXXXXXXXXXXXXXXXXXX ». Elle avait également ajouté que XXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXX XXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXX (réponse de Secure à la DR de 2018, à la p. 5).

(5) Entraves à l’accès (alinéa 93d))

(a) Introduction

[299] Comme le Tribunal l’a déjà fait remarquer par le passé, « [l]es conditions d’entrée sur un marché pertinent peuvent constituer un facteur déterminant lorsque le Tribunal examine [si] un fusionnement aurait vraisemblablement pour effet d’empêcher ou de diminuer sensiblement la concurrence » (Tervita TC, au par. 216).

[300] Pour déterminer si une nouvelle entrée ou une expansion à l’intérieur d’un marché pertinent peut être invoquée pour conclure qu’une DSC ne se produira vraisemblablement pas, le Tribunal examinera si cette entrée ou cette expansion sera opportune, probable et suffisante (P&H, aux par. 604 et 605; Tervita TC, au par. 217).

[301] Pour déterminer si l’entrée ou l’expansion sera opportune, le Tribunal s’appuie sur une période de référence d’environ deux ans (voir le paragraphe 166 des présents motifs).

[302] Pour déterminer si l’entrée ou l’expansion sera probable, le Tribunal doit être d’avis que celle-ci se produira « probablement » (Tervita CSC, aux par. 65 et 66).

[303] Pour déterminer si l’entrée ou l’expansion sera suffisante, l’ampleur de celle-ci doit être telle qu’elle garantit que la concurrence ne sera pas sensiblement diminuée. C’est donc dire que la portée de la nouvelle entrée ou de l’expansion doit être suffisante pour engendrer l’un ou l’autre des effets suivants : (i) annuler toute hausse de prix « importante » ou toute diminution « importante » d’une forme de concurrence autre que par les prix qui s’est produite, ou qui se produira vraisemblablement, avant l’entrée; (ii) empêcher que des effets anticoncurrentiels d’une telle importance ne se produisent en premier lieu (Tervita TC, au par. 217).

[304] Secure soutient que les producteurs sont en mesure d’ouvrir l’accès au marché à un nouveau concurrent ou d’élargir les capacités d’un concurrent existant en réaction à toute hausse de prix que pourrait imposer Secure. À cet égard, Secure fait remarquer que plusieurs de ses témoins ont livré un témoignage venant corroborer cette position, et elle ajoute que c’est grâce au soutien de ses clients qu’elle a elle-même pu accéder au marché et prendre de l’expansion au sein du BSOC. Secure souligne par ailleurs que XXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXX XXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXX.

[305] Le Tribunal reconnaît qu’un certain nombre de témoins de Secure ont effectivement appuyé la thèse de Secure à cet égard (pièce P-R-311/CB-R-312, déclaration de témoin de M. Hogue au nom de l’IPC (la « déclaration de témoin de l’IPC »), au par. 16; pièce P-R-313/CB-R-314, déclaration de témoin de M. Gee au nom de Peyto (la « déclaration de témoin de Peyto »), au par. 15; pièce P-R-318/CB-R-319, déclaration de témoin de M. Gray au nom de Baytex (la « déclaration de témoin de Baytex »), au par. 17; pièce P-R-320/CB-R-321, déclaration de témoin de M. Broen au nom d’Athabasca (la « déclaration de témoin d’Athabasca »), au par. 27).

[306] Toutefois, MM. Hogue et Gee ont quant à eux simplement mentionné qu’il s’agissait d’une possibilité ou d’une option. M. Broen s’est contenté de mentionner qu’Athabasca a la capacité d’ouvrir l’accès au marché des services d’élimination des déchets à d’autres concurrents. Il n’a pas affirmé qu’Athabasca, en réaction à une hausse de prix de 5 %, de 10 % ou de toute autre ampleur, soutiendrait de nouveaux concurrents qui voudraient faire leur entrée sur le marché. M. Gray s’est simplement dit confiant que, [traduction] « [s]i les marges dans l’industrie atteignent un seuil suffisamment élevé, [...] soit un nouveau venu sur le marché (soutenu ou non par les producteurs) livrera concurrence à SECURE, soit les concurrents existants élargiront leurs activités » (déclaration de témoin de Baytex, au par. 17). M. Gray n’a pas précisé quel serait le niveau de marges suffisant pour attirer les investissements nécessaires.

[307] Le Tribunal fait remarquer au passage que l’expert de Secure, Mme Duplantis, n’a pas expressément donné son opinion en l’espèce au sujet des entraves à l’accès au marché (transcription confidentielle B, à la p. 1938). Elle a cependant fait mention, à titre de facteur qui pourrait expliquer les marges dans l’industrie, de l’[traduction]« existence d’une puissance commerciale antérieure en raison des entraves à l’accès au marché » (transcription publique, aux p. 1799 et 1800).

[308] La thèse de Secure au regard de la question de l’accès ou de l’expansion est très différente de celle qu’elle avait présentée précédemment au Bureau. En effet, dans une lettre datée du 1er mai 2008, Secure avait affirmé ce qui suit : [traduction] XXXXXXXXXXXXXXXX XXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXX XXXXXXXXXXXXXXXXXXXXX XXXXXXXXXXXXX XXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXX XXXXXXXXXXXXXXXXXX XXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXX XXXXXXXXXXXXXXXXX XXXXXXXXXXXXXXXXXXXX XXXXXXXXXXXXXXXXXXXX XXXXXXXXXXXXXXX XXXXXXXXXXXXXXXXX Ainsi qu’il en sera question ci-après, Secure a fourni de l’information supplémentaire à cet égard en réponse à une DR présentée par le Bureau au sujet de l’acquisition de Newalta par Tervita en 2018 (réponse de Secure à la DR de 2018, à la p. 24).

[309] Les positions adoptées par Secure en 2008 et en 2018 cadrent davantage avec la preuve en l’espèce que la thèse qu’elle défend dans la présente affaire.

(b) Lieux d’enfouissement

[310] En 2018, Secure avait affirmé ce qui suit concernant les entraves à l’accès au marché des services des lieux d’enfouissement : XXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXX
[traduction]

  • XXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXX XXXXXXX XXXXXXXXXXXXXXXXX;

  • XXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXX XXXXXXXXXXXXXX XXXXXXXXXXXXX XXXXXXXXXXXXXXXXXXXX XXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXX;

  • XXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXX XXXXXXXXXXXX XXXXXXXXXXX XXXXXXXXXXXXXXXXXXXXX XXXXXXXXXXXXXXXXX

  • XXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXX

Réponse de Secure à la DR de 2018, à la p. 24.

[311] Au cours de l’interrogatoire préalable relatif à la présente instance, M. Engel, témoin de Secure, a reconnu que la situation décrite précédemment était toujours d’actualité (pièce P-A-680/CB-A-681, extraits de l’interrogatoire préalable produits par le commissaire (les « extraits du commissaire »), aux p. 223 à 226).

[312] Divers témoins dans le cadre de la présente procédure ont transmis de l’information similaire.

[313] À titre d’exemple, M. Dziuba, de Chevron, a dit des entraves à l’accès au marché des services d’élimination des déchets qu’elles étaient [traduction] « majeures » et qu’elles donnaient lieu à des [traduction] « exigences financières et réglementaires importantes [pour] les nouveaux venus » (déclaration de témoin de Chevron, au par. 18). À ce sujet, il a mentionné qu’[traduction]« il faut compter entre 24 et 36 mois pour obtenir les autorisations nécessaires pour pouvoir amorcer l’aménagement d’un lieu d’enfouissement, qu’il peut être très difficile ne serait-ce que de trouver un emplacement approprié sur le plan géologique, et que les estimations initiales des dépenses en capital requises pour mettre en place une ITRE, un TSC ou un lieu d’enfouissement portent à croire que le projet ne serait pas réalisable sur le plan économique » (déclaration de témoin de Chevron, au par. 25).

[314] Mme McRae, de ConocoPhillips, a ajouté que le processus de délivrance de permis pour le projet de lieu d’enfouissement de l’entreprise à Surmont (Alberta) a coûté approximativement XXXXXXX et s’est échelonné sur trois ans environ, du démarrage du projet jusqu’au moment de l’approbation. ConocoPhillips estime qu’il lui faudra débourser XX XXXX de plus pour la construction initiale, qu’il faudra [traduction] « au moins deux ans » pour mener à bien la construction de l’installation, et que chaque cellule d’enfouissement supplémentaire exigera des dépenses en capital additionnelles s’élevant à XXXXXXX. L’entreprise ajoute que si le projet de lieu d’enfouissement voit le jour, il n’est pas prévu que l’installation offre des services d’élimination de déchets à d’autres producteurs (déclaration de témoin de ConocoPhillips, aux par. 21 et 22).

[315] M. Hart, responsable de la construction et des activités des lieux d’enfouissement pour CNRL, a affirmé que la construction d’un lieu d’enfouissement [traduction] « va généralement prendre entre 18 mois (au mieux) et quatre ans à partir du moment où il est décidé d’entreprendre la construction [...] [et] que le coût connexe peut s’établir au-delà de XXXXXX » (déclaration de témoin de CNRL, au par. 25).

[316] M. DePauw, de l’OWA, s’est exprimé ainsi :

[traduction]
L’OWA ne possède aucun lieu d’enfouissement et aucune ITRE. Il n’est pas non plus prévu que l’OWA se dote de telles installations. Le processus réglementaire visant à obtenir les autorisations nécessaires et à construire de nouveaux lieux d’enfouissement est ardu, coûteux et chronophage. Dans le cadre des fonctions que j’occupais précédemment au sein de Penn West, j’ai été appelé à examiner la possibilité de construire notre propre lieu d’enfouissement et notre propre ITRE, mais il a été décidé de ne pas donner suite au projet en raison des dépenses en capital nécessaires et des exigences réglementaires qui demandent beaucoup de temps.

Pièce P-A-030/CA-A-031/CB-A-032, déclaration de témoin de M. DePauw au nom de l’OWA, au par. 39.

[317] Le témoignage de Mme Carol Nelson, spécialiste de la gestion des déchets au ministère de l’Environnement et des Parcs de l’Alberta (« MEPA »), corrobore de manière générale une grande partie de ce qui a été dit précédemment. Voici les remarques qu’elle a soulevées dans sa déclaration de témoin :

· en raison des exigences de nature géologique associées au processus de demande d’autorisation de construction d’un lieu d’enfouissement, [traduction] « les possibilités de sites pour l’établissement d’un lieu d’enfouissement sont grandement restreintes »;

· il y a [traduction] « souvent » des retards dans le traitement des demandes d’aménagement d’un lieu d’enfouissement;

· à sa connaissance, en Alberta, il n’y a qu’un seul lieu d’enfouissement tiers qui accepterait les déchets de pétrole et de gaz dont la construction est actuellement envisagée : la demande a été présentée par RemedX (voir le paragraphe qui suit);

· le MEPA s’attend à recevoir une proposition de nouveau site environ une fois par an ou tous les deux ans pour un lieu d’enfouissement de catégorie II, mais le fait d’aviser le MEPA ne signifie pas nécessairement qu’une demande sera formellement déposée par la suite;

· il en coûte habituellement entre trois millions de dollars et huit millions de dollars pour fermer un lieu d’enfouissement typique.

Pièce CA-A-084/P-A-085, déclaration de témoin de Mme Nelson au nom du MEPA, au par. 21 à 29.

[318] En outre, M. Flood, de RemedX, a affirmé que RemedX [traduction] « a consacré approximativement six millions de dollars à la construction du lieu d’enfouissement Breton, et le processus s’est échelonné sur environ deux ans ». Il a ajouté que [traduction] « la mise en place de cette installation a été réalisée plus rapidement que dans le cas d’un lieu d’enfouissement typique parce que RemedX avait déjà une installation de traitement des sols sur le même site [...] et que l’entreprise a rencontré peu de problèmes avec les propriétaires des terrains avoisinants » (déclaration de témoin de RemedX, au par. 14). XXXXXXXXXXXXXXXXXX XXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXX (déclaration de témoin de RemedX, au par. 17).

[319] Dans le cadre d’une présentation interne, Tervita a estimé que l’investissement initial nécessaire à la construction d’un lieu d’enfouissement se chiffrait environ à XXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXX X XXXXXXXXXX XXXXXXXXX XXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXX. Tervita a ajouté qu’on pouvait compter jusqu’à XXX ans avant qu’un nouveau lieu d’enfouissement soit opérationnel, dans le contexte d’un niveau de complexité réglementaire médian (pièce CB-A-798/P-A-799, présentation de diapositives – Fort McMurray, 19 février 2019 (la « présentation de Fort McMurray »), à la p. 20).

[320] De plus, le Tribunal estime à propos de souligner que Secure tente depuis 2013 de construire un lieu d’enfouissement à Wonowon, en Colombie-Britannique. Secure a également abandonné un projet d’installation à Conklin, en Alberta, après avoir consacré plusieurs années à tenter de faire progresser le dossier (Modèle d’estimation de l’autorisation de dépenses, aux lignes 10 à 15; extraits du commissaire, aux p. 162 à 164 (Q659) et aux p. 179 à 181 (Q716 à Q720)).

[321] S’agissant du temps et des ressources financières nécessaires pour aménager une caverne, Secure avait mentionné ce qui suit au Bureau en 2018 et elle a confirmé à l’étape des interrogatoires préalables que l’information était toujours valable aujourd’hui :

· XXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXX

· XXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXX

· XXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXX

Réponse de Secure à la DR de 2018, à la p. 24; extraits du commissaire, aux p. 237 à 239 et 242 à 244.

[322] En résumé, compte tenu de l’ensemble des éléments de preuve analysés ci-dessus, le Tribunal conclut que les entraves à l’accès au marché des services des lieux d’enfouissement sont majeures et qu’il faudrait compter beaucoup plus que deux ans pour qu’une nouvelle installation soit opérationnelle. Cela va dans le sens de la conclusion rendue par le Tribunal dans Tervita TC, selon laquelle « [...] même si un emplacement est éloigné et que des demandes de permis concomitantes sont présentées, un nouvel arrivant devrait consacrer au moins 30 mois pour terminer le processus de sélection d’un nouveau site, obtenir les autorisations requises et construire un nouveau site d’enfouissement sécuritaire » (Tervita TC, au par. 222).

(c) ITRE

[323] Les documents internes de Secure viennent corroborer la preuve présentée par MM. Dziuba et DePauw, dont il a été question aux paragraphes 313 et 316 des présents motifs. Dans ces documents, Secure explique que l’investissement initial requis en vue de la construction d’une ITRE varie entre XXXXXXXXXX et XXXXXXXX, et qu’à cette somme il faut ajouter un montant d’environ XXXXXXXXXXXXXX chaque année. À l’étape des interrogatoires préalables, M. Engel a décrit cette fourchette de valeurs comme étant [traduction] « un peu élevée » et a ajouté que [traduction] « [d]e façon générale [...] XXXXXXX constitue probablement une estimation plus réaliste » (extraits du commissaire, aux p. 182 et 183 (Q726 à Q730)).

[324] Cette valeur cadre avec le coût total de la construction d’une nouvelle ITRE à Kakwa (Alberta) tel qu’il a été estimé par Tervita à l’interne, soit XXXXXXXXXXXXXXX (pièce CB-A-250/P-A-251 jointe à la pièce CB-A-248 (« aperçu de Kakwa »), à la p. 2). En ce qui a trait au temps nécessaire pour que la construction d’une nouvelle ITRE soit approuvée et que l’installation soit opérationnelle, la preuve de Secure indique que la construction d’une installation peut prendre 12 mois et qu’il faut ensuite compter de deux à trois ans pour la rendre pleinement opérationnelle, compte tenu du haut niveau de complexité que présente la réglementation (présentation de Fort McMurray, à la p. 18; aperçu de Kakwa, à la p. 2).

[325] Étant donné ce qui précède, le Tribunal conclut que les entraves à l’accès au marché des ITRE dans le BSOC sont majeures et qu’il faudrait compter beaucoup plus que deux ans pour qu’une nouvelle installation soit opérationnelle.

(d) PDEA

[326] En 2018, Secure a transmis l’information suivante au Bureau, laquelle a été confirmée par M. Engel à l’étape des interrogatoires préalables relatifs à la présente affaire :

  • XXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXX

  • XXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXX

  • XXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXX

  • XXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXX

Réponse de Secure à la DR de 2018, à la p. 24; extraits du commissaire, à la p. 221.

[327] L’information qui précède a de façon générale été corroborée par M. Kaminski, premier vice-président à Catapult, qui a affirmé que la construction d’une installation d’évacuation des eaux exige des investissements d’envergure, des consultations publiques et des évaluations du marché et de la durabilité, et que le projet fait intervenir des risques importants sur le plan géologique (déclaration de témoin de Catapult, aux par. 10 à 12). Il a poursuivi ainsi :

[traduction]
Les activités de production (comme la construction d’un puits) peuvent entraîner une hausse importante de la quantité d’eau produite. C’est donc pendant ces périodes que les besoins des producteurs en matière d’évacuation des eaux atteignent un sommet et que ces derniers doivent habituellement faire appel aux services de tiers.

Déclaration de témoin de Catapult, au par. 14.

[328] Le Tribunal admet la preuve de M. Gee selon laquelle le fait de convertir un trou de forage existant – ce qui, selon ce qu’a compris le Tribunal, désigne un puits de pétrole qui n’est plus productif – peut permettre de diminuer considérablement les coûts associés à la mise en place d’un nouveau puits d’évacuation (transcription publique, aux p. 1581 à 1583). Toutefois, à peu près rien ne prouve l’existence dans les marchés pertinents de tels puits qui seraient hors service ou épuisés.

[329] En résumé, selon la prépondérance de la preuve en l’espèce, il existe des entraves significatives à l’accès aux marchés pertinents pour ce qui est des services des PDEA. Le Tribunal n’est pas convaincu qu’une nouvelle entrée ou une expansion à l’intérieur de ces marchés serait vraisemblablement suffisante pour empêcher une diminution sensible de la concurrence par suite du fusionnement.

(e) Conclusion au regard des entraves à l’accès

[330] Compte tenu de tout ce qui précède, le Tribunal conclut à l’existence d’entraves majeures à l’accès aux marchés pertinents en ce qui concerne les services des lieux d’enfouissement, des ITRE et des PDEA. Le Tribunal conclut également qu’une nouvelle entrée ou une expansion à l’intérieur de ces marchés ne serait vraisemblablement pas suffisante pour empêcher une diminution sensible de la concurrence par suite du fusionnement.

[331] En plus des considérations examinées précédemment, plusieurs témoins ont affirmé que la notion de réputation représentait un facteur important au moment de déterminer à qui confier les déchets, car ce sont les producteurs qui demeurent responsables de leurs déchets. Ainsi, il est peu probable qu’ils confieraient leurs déchets à un nouveau venu qui n’aurait pas encore bâti une réputation, et ce, même si ce nouveau fournisseur de services de gestion des déchets pratiquait des prix moins élevés (à titre d’exemple, voir : transcription publique aux p. 446 et 447 (M. McLean, Clean Harbors); transcription confidentielle A, aux p. 1535 et 1536 (M. Hogue, IPC); transcription publique, à la p. 1587 (M. Gee, Peyto); XXXXXXXXXXXXXXXXXXXXX XXXXXXXXXX XXXXX; transcription confidentielle A, à la p. 1678 (M. Broen, Athabasca); déclaration de témoin de Chevron, au par. 19; déclaration de témoin de M. McSween au nom de DEL Canada, au par. 8).

[332] Qui plus est, dans les régions où une installation de Secure était fermée, une entreprise qui souhaiterait accéder au marché ou encore élargir ses activités au sein du marché serait dissuadée par le fait que l’installation pourrait être relancée relativement rapidement, c.-à-d. XXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXX (transcription confidentielle B, à la p. 2155).

(6) Autres facteurs pertinents (alinéa 93h))

(a) Pouvoir compensateur

[333] Secure soutient que le fusionnement n’entraînera vraisemblablement pas une DSC parce que ses clients ont la capacité d’exercer un pouvoir compensateur. À cet égard, Secure fait mention de deux sources distinctes de pouvoir compensateur : le pouvoir lié au marché géographique ou au produit, et l’approvisionnement autonome.

(i) Pouvoir lié au marché géographique ou au produit

[334] Dans sa réponse modifiée, Secure a affirmé que la quasi-totalité de ses revenus provient des services qu’elle fournit à des producteurs qui exercent des activités dans plusieurs régions ou encore qui font appel à elle pour obtenir des services de gestion des déchets de différents types. Secure fait valoir que ces clients peuvent en toute crédibilité menacer de riposter à une hausse de prix qu’elle tenterait d’imposer dans une région géographique donnée ou pour un type précis de service de gestion des déchets, et que ces sanctions peuvent prendre deux formes. Dans un premier temps, les clients peuvent délaisser Secure au profit des concurrents dans d’autres régions géographiques au sein desquelles Secure est soumise à une pression concurrentielle plus intense. Dans un deuxième temps, les clients peuvent se tourner vers d’autres fournisseurs qui livrent une concurrence plus féroce à Secure sur le plan des produits. Dans le cadre de l’audience relative à la présente demande, Secure a mis l’accent sur la première de ces deux sources de pouvoir compensateur.

[335] À l’appui de sa thèse à cet égard, Secure a mis en avant les témoignages présentés par ses témoins. Précisément, M. Gee a affirmé que si Secure tentait de hausser les prix dans une région qui offrait à Peyto peu d’autres options en matière d’élimination des déchets, cette dernière menacerait d’imposer des sanctions à Secure dans d’autres régions où elle jouit d’un plus grand nombre de possibilités (déclaration de témoin de Peyto, au par. 11). M. Hogue a mentionné que l’IPC pourrait faire de même, bien qu’elle ne va généralement pas formuler des menaces directes ou imposer de réelles sanctions (déclaration de témoin de l’IPC, au par. 15). La déclaration de témoin de M. Broen, d’Athabasca, va dans le même sens (déclaration de témoin d’Athabasca, au par. 26). Aucun de ces témoins n’a toutefois donné en exemple une situation réelle où ce levier de négociation avait été employé dans le but de limiter les hausses de prix imposées par Secure ou par un autre fournisseur de services de gestion des déchets.

[336] En réponse aux questions de la formation, M. Dziuba a affirmé que Chevron ne disposait pas d’un tel levier de négociation, essentiellement parce qu’elle n’a pas accès à des solutions de rechange dans la région où elle exerce ses activités (transcription publique, à la p. 341). Dans le même ordre d’idées, M. DePauw, représentant de l’OWA, dont les activités couvrent une grande partie du territoire albertain, a affirmé de façon catégorique qu’[traduction]« il ne serait d’aucune façon possible de tirer parti » des activités de l’OWA dans d’autres régions (transcription publique à la p. 518). Il a donné l’explication suivante : [traduction] « s’il n’existe aucun autre concurrent et que nous avons besoin d’enfouir nos déchets, il n’y a alors que les frais de transport par camion et la redevance de déversement qui entrent en ligne de compte » (transcription publique, aux p. 517 et 518). Il a poursuivi en mentionnant que [traduction] « en l’absence de concurrence, il est impossible de négocier » (transcription publique, à la p. 511). M. Lammens, de PECL, a formulé essentiellement la même observation, quoique le contexte n’était pas précisément celui du pouvoir lié au marché géographique. Il a simplement fait remarquer que [traduction] « la concurrence n’étant pas très forte, PECL n’a pas beaucoup d’options pour l’élimination de ses déchets » (transcription confidentielle A, à la p. 577).

[337] Compte tenu de ce qui précède, le Tribunal conclut que les clients ne peuvent vraisemblablement pas recourir à un levier de négociation de nature géographique pour empêcher Secure d’exercer une puissance commerciale nettement plus importante qu’avant le fusionnement. Autrement dit, les clients ne peuvent vraisemblablement pas menacer avec crédibilité Secure de lui retirer des volumes de déchets pour les confier à d’autres concurrents, dans des régions à l’extérieur des marchés pertinents où les solutions de rechange concurrentielles sont plus nombreuses, de manière à empêcher Secure de hausser le prix de ses services de gestion des déchets ou de réduire le niveau de service au sein des marchés pertinents.

(ii) Approvisionnement autonome

[338] S’agissant de la deuxième source de pouvoir compensateur, Secure soutient que la plupart de ses clients ont la capacité de s’approvisionner à l’interne pour répondre à leurs besoins en matière d’élimination de déchets. À cet égard, Secure fait remarquer que les producteurs gèrent déjà à l’interne l’élimination de la grande majorité des volumes d’eaux usées en donnant une nouvelle vocation aux puits de pétrole qui ne sont plus productifs. Secure fait valoir que la capacité des producteurs à recourir à l’approvisionnement autonome confère à ces derniers un pouvoir de négociation important et restreint la marge de manœuvre de Secure en matière de prix, non seulement pour les services d’élimination de l’eau produite, mais aussi les services des ITRE et des lieux d’enfouissement.

[339] À l’appui de la thèse de Secure, Mme Duplantis a affirmé que XXXXXXXXXXXXXXX XXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXxX (rapport révisé de Mme Duplantis, au par. 75). Mme Duplantis n’était toutefois pas en mesure de citer un exemple précis de cas où la menace de l’approvisionnement autonome avait eu un effet sur le comportement de Secure en matière d’établissement des prix. XXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXX XXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXX. Elle a précisé que la menace de l’approvisionnement autonome [traduction] « pourrait » simplement donner lieu à une baisse des prix (transcription confidentielle B, aux p. 1921 et 1919 à 1931).

[340] Secure a également cité en exemple trois cas où l’entreprise avait perdu des volumes d’activités parce que les clients s’étaient tournés vers l’approvisionnement autonome. Toutefois, la prépondérance de la preuve donne à penser que les producteurs ne vont habituellement pas envisager l’approvisionnement autonome pour répondre à leurs besoins en matière d’élimination de déchets quand la redevance de déversement augmente de 5 % à 10 % seulement. Entre autres choses, cela ne cadrerait pas avec la tendance suivant laquelle les producteurs de pétrole et de gaz ont davantage recours à des fournisseurs externes pour l’élimination de leurs déchets, tendance dont il est expressément question dans certains documents publics de Secure (à titre d’exemple, voir la déclaration de témoin de M. Engel, la pièce 5 (notice annuelle de Secure pour l’exercice s’étant terminé le 31 décembre 2019, datée du 24 février 2020, à la p. 31) et la pièce 6 (notice annuelle de Secure pour 2020, à la p. 20)). En outre, la propre preuve de Secure indique que la concurrence issue de l’approvisionnement autonome est négligeable. À cet égard, M. Engel a affirmé lors de son témoignage que Secure et Tervita avaient enregistré, au cours de la période allant de 2016 à 2022, une perte de revenus se chiffrant à [traduction] « au moins XX million » de dollars au chapitre des services d’évacuation des eaux usées, au profit de l’approvisionnement autonome (déclaration de témoin de M. Engel, aux par. 38 et 53). Ce montant représente moins de XX des revenus combinés des parties au fusionnement pour cette période de six ans (transcription confidentielle B, aux p. 1901 à 1904).

[341] En 2018, en réponse à une DR concernant l’acquisition proposée de Newalta par Tervita, Secure a mentionné au Bureau que l’option de l’approvisionnement autonome XXXXXXXXXX XXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXX (réponse de Secure à la DR de 2018, à la p. 5).

[342] D’autres éléments de preuve indiquent que c’est effectivement le cas pour chacune des catégories que sont les services des lieux d’enfouissement, les services des ITRE et les services des PDEA, essentiellement pour les mêmes motifs que ceux exposés dans l’analyse des entraves à l’accès au marché à l’article C(5) de la partie XIII. En bref, ces motifs ont trait au coût et aux risques financiers, au temps et à l’expertise.

[343] S’agissant des services des lieux d’enfouissement, M. Taylor, de Crew Energy, s’est exprimé ainsi :

[traduction]
Le savoir est un autre facteur capital dans le contexte de l’exploitation d’un lieu d’enfouissement. En effet, il est essentiel de connaître les règles et la réglementation se rattachant aux lieux d’enfouissement, en plus d’avoir de l’expérience et une expertise au regard des activités sur le terrain, mais aussi une expérience et une expertise qui vont au-delà du terrain, qui touchent le travail administratif. Le coût en capital est probablement élevé en soi, mais j’hésiterais... Je ne suis pas convaincu qu’une petite entreprise comme Crew Energy devrait exploiter un lieu d’enfouissement.

Transcription confidentielle A, à la p. 413.

[344] M. Taylor a par ailleurs affirmé que Crew Energy n’avait pas envisagé l’aménagement d’un lieu d’enfouissement ou d’une caverne en raison des coûts très élevés qui y sont rattachés et parce que cela dépasse la portée normale des travaux de l’entreprise (pièce CA-A-022/CB-A-023/P-A-024, déclaration de témoin de M. Taylor au nom de Crew Energy (la « déclaration de témoin de Crew Energy »), au par. 18). Selon un autre témoin, M. Lammens de PECL, cette dernière ne produit pas des volumes de déchets solides de champs pétrolifères suffisamment importants pour qu’il soit justifié pour l’entreprise de se doter de son propre lieu d’enfouissement autorisé (déclaration de témoin de PECL, au par. 58).

[345] S’agissant des ITRE, Secure n’a pas donné d’exemple où un producteur aurait décidé désormais de s’occuper à l’interne de ses besoins en services d’ITRE en réponse à des hausses de prix imposées par un fournisseur de tels services. Bien que M. Engel ait nommé deux producteurs (c.-à-d. Baytex et Cenovus/Husky) ayant des [traduction] « installations [autorisées] de traitement des déchets en Alberta », il n’est pas manifeste qu’il s’agit d’ITRE offrant des services complets[45]. De plus, Baytex ne figure que sur une seule des cartes des marchés pertinents fournies par Secure (marché no 53 – évacuation des eaux), et Cenovus/Husky ne fait l’objet d’aucune mention.

[346] Même CNRL, un fournisseur de premier niveau, n’a pas la capacité d’exécuter à l’interne l’éventail complet des services qu’offrent Secure et d’autres fournisseurs de services d’ITRE (transcription confidentielle B, à la p. 659).

[347] S’agissant des services d’évacuation des eaux, les éléments de preuve démontrent que même les producteurs qui ont leurs propres installations internes d’évacuation doivent généralement faire appel à des tiers fournisseurs de services de gestion des déchets à certaines périodes où les volumes d’eau produite sont en [traduction] « forte augmentation » (déclaration de témoin de Catapult, aux par. 13 à 15; déclaration de témoin de Chevron, au par. 26; déclaration de témoin de ConocoPhillips, au par. 25; déclaration de témoin de CNRL, aux par. 36 et 37; transcription publique, aux par. 1581 à 1583).

[348] À cet égard, M. Lammens, de PECL, a affirmé qu’il ne serait pas pratique de se doter d’une capacité interne pour de telles hausses périodiques (transcription confidentielle A, à la p. 573).

[349] Mme McRae a ajouté que la capacité interne d’évacuation dont dispose ConocoPhillips équivaut à au plus [traduction] « une semaine ou deux » en termes de volume (transcription confidentielle A, aux p. 553 et 554).

[350] À la lumière de ce qui précède, le Tribunal conclut que l’approvisionnement autonome constitue une menace très limitée et qu’il n’aura vraisemblablement pas pour effet d’empêcher Secure d’exercer la puissance commerciale accrue dont elle jouira par suite du fusionnement et qui lui permettra d’accroître de façon importante le prix des services de gestion des déchets. Selon la preuve, même dans le cas d’un client majeur comme CNRL, la menace de l’approvisionnement autonome n’a pas de fait incité Secure à modifier ses pratiques en matière de tarification.

[351] XXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXxXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXX

(b) Discrimination par les prix

[352] La « capacité [...] de faire de la discrimination par les prix est synonyme de puissance commerciale » (Télé-Direct, au par. 297; P&H, au par. 495).

[353] Ainsi qu’il a été question au paragraphe 135 des présents motifs, pour les besoins de la présente affaire, M. Miller a entrepris de définir les marchés géographiques en fonction de l’emplacement de la clientèle parce que cette approche permet de mieux cerner les effets concurrentiels du fusionnement quand les vendeurs sont en mesure d’exercer efficacement une discrimination par les prix au sein du bassin d’acheteurs.

[354] Comme il est mentionné au paragraphe 145 ci-dessus, Mme Duplantis a expliqué que les approches adoptées pour définir les marchés de produit et les marchés géographiques étaient des [traduction] « points de consensus importants » entre M. Miller et elle. À l’audience, Mme Duplantis a admis les éléments de preuve relatifs à la discrimination par les prix selon la distance, XXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXX (transcription confidentielle B, aux p. 2125 et 2129). XXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXX XXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXxxxxxxxxxxX (transcription confidentielle B, aux p. 1856 et 1870 à 1876). XXXXXXXXX XXXXXXXX XXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXxxxxxxxxxx XXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXX (transcription confidentielle B, à la p. 1873). Le principal point sur lequel Mme Duplantis ne s’entend pas avec M. Miller est quand ce dernier suppose que Secure est en mesure d’exercer une discrimination par les prix au regard de toutes les dimensions dont peut se soucier un client. D’après sa propre analyse, la discrimination par les prix reposait [traduction] « principalement sur la distance » et elle n’avait pas eu connaissance d’éléments de preuve démontrant l’existence d’une discrimination par les prix au regard d’autres dimensions (transcription confidentielle B, à la p. 1876).

[355] XXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXxXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXX XXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXX

[356] À l’étape de la présentation des observations finales, Secure a convenu qu’[traduction]« il y avait certainement des éléments de preuve faisant état d’une discrimination par les prix », mais elle s’est montrée réticente à parler d’une discrimination [traduction] « répandue » parce que le terme est relatif (transcription publique, à la p. 3215). Secure était toutefois disposée à admettre que les prix pratiqués dans l’industrie des services de gestion des déchets sont généralement le fruit d’une négociation (transcription publique, à la p. 3216).

[357] Le Tribunal estime que le dossier de preuve en l’espèce démontre que Secure a la capacité de faire une discrimination par les prix en fonction de la distance qui sépare ses installations de celles de ses clients, et qu’elle exerce cette capacité lorsqu’il est dans son intérêt de le faire.

(7) Conclusion au regard de la DSC

[358] Après avoir examiné les facteurs qui précèdent de façon individuelle et cumulative, le Tribunal conclut que le fusionnement a diminué sensiblement la concurrence, et qu’il continuera vraisemblablement de le faire dans un avenir prévisible, dans 136 des 143 marchés pertinents. Ces 136 marchés (les « marchés touchés par une DSC ») sont énumérés à l’annexe 3 des présents motifs.

[359] En résumé, les parts de marché après le fusionnement sont très élevées dans les marchés pertinents : par définition, au moins 90 % dans les marchés « de 2 à 1 », et en moyenne 73 % dans les marchés « de 3 à 2 » et 46 % dans les marchés « de 4 à 3+ ».

[360] De plus, M. Miller a démontré, preuve claire et convaincante à l’appui, que le fusionnement entraînera vraisemblablement des hausses de prix d’au moins 5 % au titre des services d’élimination des déchets dans les marchés touchés par une DSC. De ce fait, le Tribunal accepte le témoignage de M. Miller selon lequel les hausses de prix découlant du fusionnement seront, selon toute vraisemblance, nettement supérieures à 5 % dans bon nombre de marchés touchés par une DSC.

[361] Le Tribunal conclut par ailleurs que le fusionnement a eu pour effet d’éliminer le plus proche rival de Secure dans les 143 marchés pertinents. Le rival en question, Tervita, livrait une étroite concurrence à Secure avant le fusionnement, autant sur le plan des prix qu’au regard d’autres dimensions de la concurrence. Le Tribunal est convaincu qu’en l’absence de fusionnement, Tervita et Secure auraient continué, dans un avenir prévisible, de se livrer une vive concurrence au sein des marchés pertinents. Bien que Tervita ait fait état de légères pertes à l’échelle de l’entreprise pour la période allant de 2018 à 2020, ses activités touchant les ITRE, les PDEA et les lieux d’enfouissement ont toujours été rentables au cours des années ayant précédé le fusionnement (transcription publique, aux p. 1124 et 1125). Il n’existe aucun élément de preuve indiquant que Tervita aurait cessé d’être un concurrent dynamique et efficace n’eût été le fusionnement, et Secure n’a pas laissé entendre le contraire.

[362] Qui plus est, le Tribunal conclut que les marchés pertinents n’offrent aucun substitut acceptable et qu’il existe des entraves majeures à l’entrée et à l’expansion pour ce qui concerne les marchés pertinents des services des lieux d’enfouissement, des ITRE et des PDEA. Pour plus de précision, le Tribunal est convaincu que, selon toute vraisemblance, les nouvelles entrées ou les expansions ne se produiront pas à une échelle suffisante, sur une période d’au moins deux ans, pour contrer les hausses de prix importantes qui, suivant la conclusion du Tribunal, découleront vraisemblablement du fusionnement. Il en va de même pour la diminution du niveau de service et des autres dimensions de la concurrence hors prix qui se produira par suite du fusionnement, comme le Tribunal en est convaincu. Encore une fois, cette diminution ne sera vraisemblablement pas neutralisée par l’expansion de concurrents existants ou par l’arrivée de nouveaux concurrents.

[363] En outre, le Tribunal conclut qu’il n’existe pas de concurrence réelle restante dans les 136 marchés touchés par une DSC et que cette situation ne va vraisemblablement pas changer dans un avenir prévisible.

[364] La capacité de Secure d’imposer des hausses de prix importantes au sein des marchés touchés par une DSC sera facilitée par sa capacité d’exercer une discrimination par les prix et d’établir les prix selon ce qu’elle connaît de l’emplacement des clients et des plus proches solutions de rechange qui s’offrent à eux en matière de services d’ITRE, de PDEA et de lieux d’enfouissement. Contrairement à ce que fait valoir Secure, cette capacité, combinée à sa capacité d’abaisser les niveaux de service et les autres dimensions de la concurrence hors prix, ne sera pas restreinte de façon importante par un quelconque pouvoir compensateur qui serait exercé par les clients.

[365] La conclusion qui précède est étayée par la preuve non contestée de M. Miller concernant le niveau élevé des ratios de détournement pertinents et des marges bénéficiaires au sein des marchés touchés par une DSC.

[366] En somme, le Tribunal conclut que dans les 136 marchés touchés par une DSC, les effets anticoncurrentiels qui résulteront ou résulteront vraisemblablement du fusionnement sont de l’ampleur requise sur le plan des hausses de prix et de la diminution des autres dimensions de la concurrence dans le contexte des services d’élimination des déchets. Le Tribunal conclut également que Secure sera en mesure d’imposer de tels effets dans une portion sensible des marchés pertinents et relativement à un volume important de ventes, et qu’elle sera en mesure de maintenir une hausse importante des prix et une diminution importante des dimensions de la concurrence hors prix pendant environ deux ans ou plus.

[367] Quant aux sept marchés pertinents qui ne sont pas touchés par une DSC, le Tribunal conclut que le fusionnement n’a pas donné lieu à une DSC et qu’il n’aura vraisemblablement pas cet effet dans un avenir prévisible. S’agissant de ces sept marchés, à savoir les marchés no 123, 126, 203, 204, 205, 255 et 259, le Tribunal n’est pas convaincu que le commissaire s’est acquitté du fardeau que lui impose l’article 92. Le Tribunal conclut entre autres choses que les concurrents restants au sein de ces marchés sont vraisemblablement suffisamment efficaces pour empêcher Secure d’exercer une puissance commerciale beaucoup plus importante qu’avant le fusionnement. Le Tribunal souligne en outre que, dans ces marchés, en comparaison avec les marchés touchés par une DSC, les ratios de détournement pertinents sont généralement plus faibles (autour de 30 %), les hausses de prix prévues plus modestes (en deçà de 7 %, sauf dans le cas d’un marché) et les parts de marché moins importantes (entre 46 % et 52 %).

XIV. Question 2 – Quelle est la mesure corrective appropriée?

A. Introduction

[368] Vu la conclusion selon laquelle le fusionnement diminuera sensiblement la concurrence dans les 136 marchés touchés par une DSC, l’étape suivante consiste à établir la mesure corrective appropriée.

[369] Dans sa demande modifiée, le commissaire sollicitait une ordonnance enjoignant à Secure de [traduction] « se départir des éléments d’actifs nécessaires afin d’assurer une réparation efficace compte tenu de l’ensemble des circonstances par suite [du fusionnement] ». Ainsi qu’il est expliqué au paragraphe 39 des présents motifs, le commissaire a ciblé 41 installations dont il demande le dessaisissement. La liste dressée par le commissaire se compose de 26 ITRE, de cinq PDEA, de huit lieux d’enfouissement et de deux cavernes.

[370] Le commissaire a le fardeau de démontrer que les 41 dessaisissements qui font l’objet de sa demande sont nécessaires en vue de « rétablir la concurrence de façon qu’il ne soit plus possible de dire qu’elle est sensiblement inférieure à ce qu’elle était avant le fusionnement », comme il le soutient (Canada (Directeur des enquêtes et recherches) c Southam Inc, [1997] 1 RCS 748 (« Southam CSC »), aux par. 85 et 89). À cet égard, le commissaire s’appuie sur ce principe bien établi : « S’il faut choisir entre une mesure qui va au-delà de ce qui est strictement nécessaire pour rétablir la concurrence à un niveau acceptable, et une mesure qui ne permet même pas d’atteindre le niveau acceptable, alors c’est certes la première qui doit être préférée. Une mesure de redressement doit à tout le moins être efficace » (Southam CSC, au par. 89).

[371] Conformément au sous‐alinéa 92(1)e)(ii) de la Loi, le Tribunal peut, sous réserve des articles 94 à 96, rendre une ordonnance enjoignant à toute partie à un fusionnement réalisé ou à toute personne de se départir, selon les modalités qu’il indique, des éléments d’actif et des actions qu’il indique.

B. La demande de Secure visant la tenue d’une audience distincte sur les mesures correctives

[372] Avant de se pencher sur les arguments de fond invoqués par Secure à l’égard des dessaisissements demandés, le Tribunal analysera la demande par laquelle Secure sollicite la tenue d’une audience distincte sur la question des mesures correctives. Précisément, Secure a demandé l’autorisation de présenter des observations au sujet des dessaisissements demandés, si le Tribunal concluait que le fusionnement allait vraisemblablement entraîner une DSC. Selon Secure, il s’agit là d’une question d’équité procédurale, du moins en partie. À cet égard, Secure a fait valoir qu’elle n’avait pas eu l’occasion de présenter une preuve d’expert sur la question de savoir si les dessaisissements sollicités satisfont aux critères juridiques décrits précédemment, parce que le commissaire a fait connaître les dessaisissements précis qu’il demandait seulement la veille de l’audience.

[373] Le Tribunal n’accepte pas l’argument de Secure selon lequel elle aurait subi un préjudice tel qu’elle le décrit. Par ailleurs, le Tribunal n’adhère pas à la thèse de Secure selon laquelle ses droits en matière d’équité procédurale seraient diminués si on ne lui donnait pas l’occasion de formuler des observations au sujet de la mesure corrective demandée par le commissaire, advenant le cas où le Tribunal parvenait à la conclusion que le fusionnement entraînera vraisemblablement une DSC.

[374] Le 5 mai 2022, peu de temps après que le commissaire eut précisé les dessaisissements faisant l’objet de sa demande, et avant le début de l’audience, le Tribunal a proposé un ajournement aux parties de façon à leur accorder plus de temps pour examiner les dessaisissements demandés par le commissaire. Les deux parties ont décliné l’offre (transcription publique, aux p. 3445 et 3446). Secure avait jusqu’au 10 juin 2022, date limite pour la présentation de ses observations finales écrites, pour faire valoir tous ses points sur les dessaisissements demandés. En réalité, Secure a eu jusqu’au 16 juin 2022 pour ce faire, date à laquelle s’est amorcée la présentation de ses observations orales. Secure a toutefois fait le choix de ne pas saisir ces occasions. Le Tribunal mentionne également que Secure aurait pu chercher à obtenir, beaucoup plus tôt dans la présente instance, des détails quant à la cession des éléments d’actifs demandée par le commissaire à titre de mesure corrective dans sa demande modifiée.

[375] Par conséquent, le Tribunal ne souscrit pas aux arguments de Secure selon lesquels elle subira un préjudice et sera privée de ses droits en matière d’équité procédurale si elle n’a pas l’occasion de présenter des observations au sujet des dessaisissements proposés, maintenant que le Tribunal a conclu que le fusionnement entraînerait vraisemblablement une DSC dans 136 marchés.

[376] Le Tribunal fait observer que Mme Duplantis a reconnu que la hausse de prix moyenne serait d’environ 11 % dans les marchés « de 2 à 1 » et d’environ 9,8 % dans les marchés « de 3 à 2 ». Mme Duplantis a du même coup reconnu que le fusionnement entraînerait vraisemblablement une DSC dans 47 des 143 marchés pertinents. Secure n’a pas tenté de se distancier des constats faits par Mme Duplantis. S’agissant des 96 autres marchés pertinents, Secure était au fait que M. Miller alléguait une hausse de prix vraisemblable de 5 % ou plus dans ces marchés puisqu’elle avait obtenu le document no 8966 du livre conjoint, document qui est devenu le tableur de M. Miller.

[377] À l’appui de sa thèse, Secure a fait remarquer que les parties défenderesses à deux instances antérieures se sont vu accorder l’occasion de présenter des observations à propos des mesures correctives (Canada (Directeur des enquêtes et recherches) c Southam Inc, 1992 CarswellNat 637 (« Southam CF »), au par. 482; Canada (Commissaire de la concurrence) c Canadian Waste Services Holdings Inc, 2001 Trib conc 3 (« Canadian Waste »), au par. 236). Cependant, dans le premier cas, les deux parties avaient demandé la tenue d’une audience distincte relative aux mesures correctives. Qui plus est, le Tribunal avait mentionné que le défi consisterait à trouver une mesure de redressement efficace puisqu’il avait tranché en faveur du demandeur (le directeur des enquêtes et recherches, ancien nom du commissaire) uniquement au regard d’une très petite portion de l’affaire. En ce qui a trait à la décision Canadian Waste, la raison pour laquelle le Tribunal a ordonné la tenue d’une audience distincte sur la question des mesures correctives n’est pas claire.

[378] Quoi qu’il en soit, le fait qu’il est dans l’intérêt public qu’une décision sur les mesures correctives soit rendue en temps utile, combiné au souci d’économie des ressources judiciaires, va souvent pousser le Tribunal à trancher les questions de fond et la question des mesures correctives dans le cadre d’une même audience. En l’absence d’arguments convaincants liés à des aspects comme un problème véritable d’équité procédurale, la contrainte ou la nature excessive ou disproportionnée d’une mesure corrective revendiquée, le Tribunal pourrait ne pas être disposé à accueillir une demande visant à scinder l’audience en deux, comme l’a proposé Secure.

[379] C’est particulièrement vrai dans les instances où le moyen de défense fondé sur les gains en efficience est invoqué. En pareil cas, la thèse que fait valoir Secure aurait pour résultat le fractionnement de l’instance en trois volets, du moins suivant l’interprétation de l’article 96 fondée sur l’ordonnance qui a été adoptée dans le passé (Tervita TC, au par. 264; Commissaire de la concurrence c Supérieur Propane Inc, 2002 Trib conc 16 (« Supérieur Propane III »), aux par. 147 à 149). La raison en est que l’analyse comparative ne peut être réalisée qu’une fois qu’on a déterminé quels sont les gains en efficience qui « ne seraient vraisemblablement pas réalisés si l’ordonnance était rendue », ainsi que le prévoit le paragraphe 96(1). Pour parvenir à déterminer quels sont ces gains, il faut connaître les détails de l’ordonnance réparatrice en question.

[380] Nonobstant ce qui précède, le Tribunal est sensible à la situation dans laquelle Secure s’est retrouvée dans la présente affaire. C’est la raison pour laquelle le Tribunal a proposé aux parties d’ajourner l’audience, de façon à accorder plus de temps à Secure pour examiner les dessaisissements dont le commissaire a fait connaître la liste pour la première fois la veille seulement de l’audience. Le Tribunal comprend que Secure a pu considérer cette possibilité comme étant plus problématique que le fait d’avoir moins de temps que souhaité à cette fin. De l’avis du Tribunal, la meilleure façon d’éviter un tel problème dans l’avenir est que le commissaire précise « les détails de l’ordonnance demandée » dans son avis de demande, comme le prévoit expressément l’alinéa 36(2)e) des Règles. Dans l’avenir, le non-respect de cette règle pourrait entraîner des conséquences sévères.

C. Les arguments de fond avancés par Secure et l’appréciation faite par le Tribunal

[381] Secure affirme qu’il incombe au commissaire de démontrer que les dessaisissements qu’il demande constituent une [traduction] « atteinte minimale » en ce sens qu’ils n’auraient pas d’autres effets que celui de rétablir la concurrence de façon qu’il ne soit plus possible de dire qu’elle est sensiblement inférieure à ce qu’elle était avant le fusionnement (transcription confidentielle B, aux p. 3433 et 3434). Secure soutient que cela découle de l’enseignement de la CSC selon lequel « [...] la mesure de redressement appropriée en cas de diminution sensible de la concurrence consiste à rétablir la concurrence de façon qu’il ne soit plus possible de dire qu’elle est sensiblement inférieure à ce qu’elle était avant le fusionnement » (Southam CSC, au par. 85).

[382] Selon l’interprétation du Tribunal, l’arrêt Southam n’impose pas au commissaire un tel fardeau. Le passage cité ci-dessus constituait plutôt une partie de la réponse de la CSC à la thèse de l’intimé selon laquelle « le critère de détermination de la mesure de redressement consiste à se demander si celle-ci rétablit les parties dans la situation de concurrence dans laquelle elles se trouvaient avant le fusionnement » (Southam CSC, au par. 84). Le critère proposé a été rejeté en faveur de celui qui est cité au paragraphe qui précède.

[383] Bien que le législateur ait estimé qu’il y avait lieu d’inclure une restriction d’[traduction]« atteinte minimale » dans les dispositions de la Loi qui concernent l’abus de position dominante[46], les dispositions relatives au fusionnement ne contiennent aucune formulation de la sorte. C’est donc que le législateur ne souhaitait pas imposer ce type de restriction en ce qui a trait au pouvoir du Tribunal de rendre des ordonnances dans le contexte d’un fusionnement (Canada c Loblaw Financial Holdings Inc, 2021 CSC 51, au par. 59; Mohr c Ligue nationale de hockey, 2022 CAF 145Mohr »), au par. 22).

[384] Le législateur a plutôt choisi de conférer au Tribunal le pouvoir discrétionnaire absolu de rendre une ordonnance enjoignant à toute personne de se départir, selon les modalités qu’il indique, des éléments d’actifs et des actions qu’il indique. Lorsqu’il exerce ce pouvoir discrétionnaire, au moment où il est appelé à se pencher sur un ou plusieurs dessaisissements demandés par le commissaire, le Tribunal s’en remet à l’enseignement de la CSC dont il a été question ci-dessus de même qu’aux enseignements corollaires selon lesquels la mesure doit être efficace et que, s’il faut choisir entre une mesure qui « va au-delà de ce qui est strictement nécessaire pour rétablir la concurrence à un niveau acceptable, et une mesure qui ne permet même pas d’atteindre le niveau acceptable, alors c’est certes la première qui doit être préférée » (Southam CSC, au par. 89).

[385] Le Tribunal reconnaît que dans le cas où on soumet au Tribunal plus d’une mesure corrective efficace, et que l’une d’elles fait plus que « rétablir la concurrence de façon qu’il ne soit plus possible de dire qu’elle est sensiblement inférieure à ce qu’elle était avant le fusionnement », l’arrêt Southam CSC exige du Tribunal qu’il sélectionne la mesure qui ne va pas au-delà de ce qui est nécessaire en ce sens. Le Tribunal a implicitement adopté ce principe dans la décision Tervita TC, aux paragraphes 333, 338 et 341.

[386] Secure soutient également que la demande du commissaire visant le dessaisissement de 41 installations avait pour but de rétablir la concurrence à ce qu’elle était avant le fusionnement, plutôt que de garantir que la concurrence ne serait pas « sensiblement » diminuée. Secure a fait valoir, en d’autres termes, que le commissaire tentait de [traduction] « recréer Tervita ».

[387] Le Tribunal estime que cette thèse n’est pas totalement dénuée de fondement, malgré le fait qu’environ 30 autres installations qui appartenaient auparavant à Tervita ne sont pas visées par la demande de dessaisissement du commissaire. En effet, au cours de l’audience, les avocats du commissaire ont expliqué que pour chacun des marchés touchés par une DSC, le commissaire demande le dessaisissement de l’ensemble des installations de Tervita qui réalisaient des ventes dans le marché concerné (transcription confidentielle B, aux p. 3125 et 3126). Les avocats ont aussi expliqué que cette approche avait été adoptée parce que [traduction] « [l]es activités de Secure et de Tervita sont fortement concentrées et les marchés se chevauchent un peu partout, de sorte qu’on ne peut aisément dresser une liste vu la nature du chevauchement de ces installations » (transcription confidentielle B, à la p. 3127).

[388] Le Tribunal souscrit à la thèse de Secure selon laquelle cet aspect de l’approche du commissaire est erroné. Le fait qu’il puisse s’avérer ardu d’établir une mesure corrective efficace permettant simplement de rétablir la concurrence de façon à éliminer le caractère « sensible » de la diminution de la concurrence alléguée ne justifie aucunement l’adoption d’une approche simplifiée qui aurait pour effet de rétablir la concurrence à ce qu’elle était avant. S’il est possible, dans la mesure du raisonnable, de cibler une mesure corrective permettant d’atteindre le premier objectif sans avoir à recourir à une approche simplifiée visant le deuxième objectif, alors c’est ce qu’il convient de faire.

[389] Grâce aux cartes fournies par Secure et aux éléments de preuve sur lesquelles elles reposent, le Tribunal a été en mesure de cerner un ensemble d’éléments d’actifs visés par les dessaisissements qui satisfait au critère applicable, sans avoir à y inclure d’autres installations qui ne sont pas nécessaires à cette fin. Ainsi, le Tribunal a pu cibler un ensemble d’éléments d’actifs dont le dessaisissement, à son avis, rétablirait la concurrence de façon à éliminer le caractère vraisemblablement « sensible » de la diminution de la concurrence qui a été établie par le Tribunal. Les installations qui n’étaient pas nécessaires à cette fin n’ont pas été retenues.

[390] Dans le cadre de cet exercice, le Tribunal a reconnu que, pour plusieurs marchés touchés par une DSC, le commissaire sollicitait plus d’un dessaisissement, et ce, même dans les cas où Secure ne possédait qu’une seule installation au sein du marché concerné avant le fusionnement. Pour certains de ces marchés touchés par une DSC, le Tribunal a pris en considération le nombre d’installations de même que leur taille relative exprimée en termes de capacité et de revenus (dans la mesure où des éléments de preuve existaient) afin de déterminer si un seul dessaisissement suffirait à rétablir la concurrence au niveau décrit ci-dessus. Le Tribunal a également examiné si le dessaisissement d’autres installations placerait vraisemblablement l’acquéreur des éléments d’actifs concernés dans une meilleure position que celle qu’occupait Secure au sein du marché pertinent avant le fusionnement. Le Tribunal cherche généralement à éviter une telle issue, s’il existe une autre mesure corrective efficace.

[391] Le Tribunal s’interrompt pour souligner que sa tâche a été grandement compliquée par le fait que l’information sur les revenus générés par chacune des installations de Secure et de Tervita dans chacun des marchés pertinents n’était généralement pas accessible. En effet, le commissaire n’a fourni au Tribunal que le revenu total généré dans un marché par l’ensemble des installations de Secure et de Tervita qui offraient des services de gestion des déchets aux clients situés dans le marché concerné, sans proposer une ventilation détaillée de ces revenus selon l’installation. Ces données se seraient avérées utiles au Tribunal dans le cadre de son analyse.

[392] Secure soutient par ailleurs qu’il y a une [traduction] « dissonnance » entre les effets anticoncurrentiels allégués par le commissaire et les dessaisissements qu’il demande (transcription publique, à la p. 3454). À cet égard, Secure fait observer que les effets hors prix liés aux installations visées par une fermeture représentent la grande majorité de la perte sèche calculée par le commissaire. Pourtant, les dessaisissements demandés concernent tous des marchés pour lesquels des effets sur les prix et sur la production sont allégués par le commissaire. Secure ajoute que la liste des dessaisissements demandés n’a pas subi de modifications même après que le commissaire eut reconnu que le nombre d’installations visées par une fermeture était moindre que ce que M. Miller pensait.

[393] Le Tribunal reconnaît que le commissaire n’a pas cherché à obtenir une mesure corrective dans le but de contrer la perte sèche qu’il allègue au titre des effets hors prix et que ces effets représentent la majorité de la perte sèche globale qu’il a estimée. Cela n’empêche toutefois pas le commissaire de solliciter des dessaisissements pour contrer les effets sur les prix et sur la production qu’il allègue. En fait, bon nombre de ces dessaisissements concernent des installations que Secure a fermées complètement ou partiellement, ou qu’elle planifie de fermer complètement ou partiellement. Dans la mesure où le Tribunal juge que certaines de ces installations devraient faire l’objet d’un dessaisissement, les effets de la fermeture d’installations (autrement dit, les effets hors prix) associés à ces installations en particulier seraient indirectement pris en compte.

[394] Qui plus est, l’objet des mesures correctives que prévoit l’article 92 de la Loi consiste à contrer la DSC alléguée, et non la perte sèche alléguée. Bien souvent, cette distinction ne fait aucune différence d’un point de vue pratique, mais il s’agit néanmoins d’un principe important à garder à l’esprit.

[395] Secure soutient en outre que les dessaisissements que demande le commissaire ont été déterminés selon des seuils arbitraires au titre des parts de marché et des hausses de prix (part de marché de 35 %/hausse de prix de 5 %)[47]. Secure insiste sur le fait que le commissaire n’a pas procédé à d’autres analyses pour chacun des marchés pertinents afin de convaincre le Tribunal que les dessaisissements demandés visent à contrer la DSC alléguée au sein de ces marchés[48].

[396] Cette lacune dans l’approche adoptée par le commissaire n’est pas de nature dirimante. En définitive, l’examen de l’ensemble des facteurs et des éléments de preuve décrits à la section C de la partie XIII ci-dessus a convaincu le Tribunal que le fusionnement avait entraîné une DSC dans 136 marchés pertinents. Dans sa démarche l’ayant amené à tirer cette conclusion, le Tribunal a également conclu que le fusionnement n’avait pas eu le même effet, et n’aurait vraisemblablement pas ce même effet, dans les sept autres marchés pertinents.

[397] Enfin, Secure soutient que le Tribunal n’a pas compétence pour accorder une partie de la réparation demandée par le commissaire. Secure fait valoir précisément que le Tribunal n’a pas compétence pour exiger d’elle qu’elle donne au commissaire un préavis écrit d’au moins 30 jours pour tout fusionnement ultérieur proposé auquel elle serait partie, pour une période de cinq ans, dans le cas où le fusionnement proposé ne devrait pas par ailleurs faire l’objet d’un avis au titre de la Partie IX de la Loi.

[398] Le Tribunal en convient. Il est maintenant bien établi qu’en l’absence de consentement, le Tribunal est limité à deux types d’ordonnance dans le cas d’un fusionnement réalisé : (i) dissolution du fusionnement conformément aux directives du Tribunal; (ii) cession d’éléments d’actif ou d’actions selon les modalités indiquées par le Tribunal (alinéa 92(1)e) de la Loi; Canada (Directeur des enquêtes et recherches) c Air Canada (1993), 49 CPR (3d) 417 (CAF), à la p. 430; Canadian Waste, aux par. 50 et 101).

D. Les dessaisissements requis

(1) Introduction

[399] À l’annexe 2 des présents motifs figurent une liste et une brève description des 143 marchés pertinents. Les rangées ombrées où l’italique est utilisé désignent les sept marchés pour lesquels le Tribunal a conclu que le fusionnement n’aura vraisemblablement pas pour effet de diminuer la concurrence. Les dessaisissements dont il est question ci-dessous se rapportent aux 136 autres marchés figurant sur la liste, c.-à-d. les marchés touchés par une DSC.

[400] Le tableau ci-après offre un aperçu des marchés touchés par une DSC.

Tableau 7Marchés touchés par une DSC, selon la structure du marché

Structure du marché

Lieux d’enfouissement

ITRE

PDEA

(et ITRE)

Total

De 2 à 1

0

14

3

17

De 3 à 2

2

16

12

30

De 4 à 3+

5

32

52

89

Total

7

62

67

136

(2) Lieux d’enfouissement

(a) Introduction

[401] Sept marchés touchés par une DSC sont des marchés des lieux d’enfouissement. En voici la synthèse :

Tableau 8 – Marchés des lieux d’enfouissement touchés par une DSC

Structure du marché

No des marchés

Total

De 2 à 1

 

0

De 3 à 2

22, 23

2

De 4 à 3+

62, 63, 78, 79 et 80

5

Total

 

7

[402] Le commissaire demande le dessaisissement de huit lieux d’enfouissement qui appartenaient auparavant à Tervita : Elk Point, Fox Creek, La Glace, Marshall, Silverberry, South Wapiti, Spirit River et Willesden Green.

[403] Le Tribunal a conclu qu’il serait nécessaire de procéder au dessaisissement de seulement six de ces lieux d’enfouissement pour rétablir la concurrence dans les marchés susmentionnés de façon à éliminer le caractère sensible de la diminution de la concurrence. Les lieux d’enfouissement dont le dessaisissement n’est pas requis, selon le Tribunal, sont les installations Fox Creek et Marshall.

(b) Lieux d’enfouissement Elk Point et Marshall

[404] Le dessaisissement du lieu d’enfouissement Elk Point serait nécessaire pour contrer la DSC dans le marché no 79. Le commissaire demande également le dessaisissement du lieu d’enfouissement Marshall, apparemment pour contrer la DSC au sein de ce même marché[49]. Le Tribunal estime toutefois que le dessaisissement de la première installation suffirait pour rétablir la concurrence dans le marché no 79 de façon à éliminer le caractère sensible de la diminution de la concurrence[50]. Le Tribunal fait observer que ce dessaisissement permettrait également de rétablir le contexte de concurrence qui existait avant le fusionnement, soit : (i) une entreprise (désormais Secure) possédant de multiples installations; (ii) une entreprise (désormais l’acquéreur des éléments d’actifs visés par les dessaisissements) possédant une installation qui était la plus grande rivale de l’installation Tulliby Lake de Secure; (iii) le lieu d’enfouissement Ridgeline; (iv) le lieu d’enfouissement Manatokan de CNRL.

(c) Lieu d’enfouissement Fox Creek

[405] Le Tribunal ne souscrit pas à la thèse du commissaire selon laquelle le lieu d’enfouissement Fox Creek doit être cédé. En bref, aucun des 143 marchés pertinents ne figure parmi les marchés qui, selon le commissaire, sont desservis par cette installation. Autrement dit, les deux seuls marchés qui, selon le commissaire, sont desservis par cette installation sont les marchés nos 21 et 64, pour lesquels les hausses de prix estimées par M. Miller affichaient une valeur négative. Pour les motifs exposés précédemment, le Tribunal juge qu’il n’y a pas lieu d’octroyer des mesures correctives à l’égard de ces marchés[51].

(d) Lieux d’enfouissement La Glace, South Wapiti et Spirit River

[406] Le dessaisissement de ces lieux d’enfouissement suffirait à rétablir la concurrence au niveau décrit ci-dessus dans les marchés nos 22, 23 et 78. Avant le fusionnement, les clients au sein de ces trois marchés recevaient principalement des services d’au moins un des trois lieux d’enfouissement de Tervita (La Glace, South Wapiti et Spirit River) et des deux lieux d’enfouissement de Secure (Saddle Hills et South Grande Prairie). XXXXXXXXX XXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXX (rapport révisé de M. Harington, au par. 157).

[407] Le commissaire a demandé le dessaisissement des trois lieux d’enfouissement de Tervita. Le Tribunal estime toutefois que le dessaisissement du lieu d’enfouissement Spirit River, qui affiche les plus faibles revenus parmi les trois installations, n’est pas nécessaire pour éliminer le caractère sensible de la diminution de la concurrence découlant du fusionnement dans les marchés nos 22, 23 et 78. En effet, dans ces marchés, les lieux d’enfouissement La Glace et South Wapiti sont plus proches de la grande majorité des clients que l’installation Spirit River. Ces deux lieux d’enfouissement se trouvent également dans une situation plus favorable que l’installation Spirit River dans une perspective à long terme, XXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXX XXXXXXXXXXXXXXXX (rapport révisé de M. Harington, au par. 157). De plus, il semblerait que, par suite du dessaisissement des lieux d’enfouissement La Glace et South Wapiti uniquement, aucun des clients n’aurait à parcourir une plus longue distance pour atteindre ces installations que celle qu’ils devaient parcourir pour se rendre au lieu d’enfouissement de Secure le plus proche avant le fusionnement. En d’autres termes, le dessaisissement des installations La Glace et South Wapiti uniquement permettrait de rétablir le contexte concurrentiel qui existait avant le fusionnement. Une entreprise posséderait trois installations, et il y aurait deux autres installations situées pas plus loin que les deux installations qui livraient concurrence à l’entité possédant trois lieux d’enfouissement.

[408] L’analyse qui précède revêt toutefois peu d’importance, puisque le dessaisissement du lieu d’enfouissement Spirit River sera nécessaire pour contrer la DSC qui, selon ce qu’a conclu le Tribunal, se produira vraisemblablement dans le marché no 62. En effet, il semble que cette installation était la principale, sinon la seule, installation de Tervita qui fournissait des services aux clients dans le marché no 62 avant le fusionnement. Les clients en question sont situés à l’ouest et au nord-ouest de l’installation Saddle Hills de Secure, et à l’est et au nord-est de Dawson Creek. De la preuve résumée aux pages 146 à 148 de l’annexe B des observations finales du commissaire, il ressort clairement que la concurrence au sein de ce marché s’exerçait essentiellement entre l’installation Spirit River et l’installation Saddle Hills. Le Tribunal reconnaît que, selon les projections, le lieu d’enfouissement Spirit River devrait atteindre sa pleine capacité en 2025 environ. Il estime toutefois que le dessaisissement de ce lieu d’enfouissement est nécessaire pour que la concurrence ne soit pas sensiblement diminuée d’ici là.

[409] Le Tribunal s’arrête un moment pour souligner que les cartes fournies par Secure donnent à penser que le lieu d’enfouissement Silverberry de Tervita se trouve dans la région de collecte de ce marché. Le Tribunal n’est pas de cet avis. Compte tenu des éléments de preuve versés au dossier, cette installation est située beaucoup plus loin des clients que l’installation Spirit River. Par conséquent, c’est bien le lieu d’enfouissement Spirit River qui doit faire l’objet d’un dessaisissement au sein de ce marché. Il est entendu que, dans ce marché, le lieu d’enfouissement Spirit River est également situé beaucoup plus près de la plupart des clients que le lieu d’enfouissement La Glace, ce qui pourrait expliquer pourquoi cette dernière installation ne semble pas avoir touché de revenus dans le marché no 62.

(e) Lieu d’enfouissement Silverberry

[410] Nonobstant ce qui précède, le Tribunal convient avec le commissaire que le lieu d’enfouissement Silverberry devrait faire l’objet d’un dessaisissement pour contrer la DSC dans le marché no 63. Il s’agit, semble-t-il, du seul lieu d’enfouissement de Tervita qui générait des revenus appréciables au sein de ce marché avant le fusionnement. De plus, le lieu d’enfouissement Silverberry était le principal concurrent de l’installation Saddle Hills de Secure. Dans ce marché, les clients sont situés près de l’autoroute, entre les deux installations, très loin du lieu d’enfouissement Peejay (CNRL) et du lieu d’enfouissement (décharge municipale) Grande Prairie Clairemont.

(f) Lieu d’enfouissement Willesden Green

[411] Le Tribunal convient aussi avec le commissaire que le lieu d’enfouissement Willesden Green est celui qui doit faire l’objet d’un dessaisissement pour contrer la DSC dans le marché no 80. L’installation est située pratiquement à côté du lieu d’enfouissement Willy Green de Secure et serait apparemment la seule installation de Tervita qui aurait touché des revenus appréciables dans ce marché. Aucune autre installation à proximité n’appartenait précédemment à Tervita.

 

 

(g) Conclusion au regard des dessaisissements visant des lieux d’enfouissement

[412] En somme, le Tribunal conclut que le dessaisissement des lieux d’enfouissement Elk Point, La Glace, Silverberry, South Wapiti, Spirit River et Willesden Green, qui appartenaient auparavant à Tervita, suffirait pour contrer la DSC qui, selon ce qu’a conclu le Tribunal, se produira vraisemblablement dans les marchés pertinents des lieux d’enfouissement. En tirant cette conclusion, le Tribunal a déterminé qu’il n’y aurait pas lieu d’ordonner le dessaisissement des deux autres lieux d’enfouissement ciblés par le commissaire, nommément l’installation Fox Creek et l’installation Marshall, qui appartenaient précédemment à Tervita. Le tableau ci-dessous résume les conclusions du Tribunal au sujet des dessaisissements visant des lieux d’enfouissement :

Tableau 9 – Synthèse des conclusions du Tribunal au regard des dessaisissements visant des lieux d’enfouissement[52]

Lieu d’enfouissement

Principaux marchés touchés par une DSC concernés

Conclusion

Elk Point

79

Dessaisissement requis

La Glace

22, 23, 78

Dessaisissement requis

Silverberry

63

Dessaisissement requis

South Wapiti

22, 23, 78

Dessaisissement requis

Spirit River

62

Dessaisissement requis

Willesden Green

80

Dessaisissement requis

Fox Creek

 

Dessaisissement non requis

Marshall

 

Dessaisissement non requis

 

(3) ITRE

(a) Introduction

[413] Au total, 62 marchés touchés par une DSC sont des marchés des ITRE. En voici la synthèse :

Tableau 10 – Marchés des ITRE touchés par une DSC

Structure du marché

No des marchés

Total

De 2 à 1

2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 10, 12, 13, 14, 15, 16 et 17

14

De 3 à 2

25, 26, 27, 28, 29, 30, 31, 32, 35, 36, 37, 38, 41, 42, 45 et 46

16

De 4 à 3+

86, 88, 90, 91, 92, 93, 94, 95, 96, 98, 99, 101, 102, 104, 105, 106, 107, 108, 111, 116, 117, 119, 121, 124, 127, 128, 129, 130, 132, 134, 136 et 138

32

Total

 

62

[414] S’agissant de ces 62 marchés, le commissaire demande le dessaisissement de 26 ITRE et de deux cavernes[53]. Ces installations, qui appartenaient toutes auparavant à Tervita, feront l’objet d’une analyse ci-après. Le tableau 11 ci-dessous offre une synthèse des conclusions du Tribunal.

[415] En résumé, le Tribunal a conclu qu’il serait nécessaire de procéder au dessaisissement de seulement 17 de ces 26 ITRE (en plus des cavernes Lindbergh et Unity) pour rétablir la concurrence dans les marchés susmentionnés de façon à éliminer le caractère sensible de la diminution de la concurrence.

(b) ITRE Boundary Lake, South Taylor et Gordondale

[416] Le Tribunal juge opportun d’exiger le dessaisissement des ITRE South Taylor et Gordondale, mais pas de l’ITRE Boundary Lake.

[417] Les marchés des ITRE touchés par une DSC qui sont desservis par ces trois installations sont les marchés nos 28, 41, 104, 105, 106, 107, 108 et 132.

[418] Parmi ceux-ci, l’ITRE Boundary Lake fournit des services aux clients des marchés nos 41, 104, 105, 106, 107 et 108. Toutefois, les clients au sein de ces marchés reçoivent aussi les services de l’ITRE South Taylor ou de l’ITRE Gordondale, ou encore des deux installations. Le Tribunal a conclu que le dessaisissement de ces deux dernières ITRE suffirait pour rétablir la concurrence dans les marchés susmentionnés de façon à éliminer le caractère sensible de la diminution de la concurrence relevée par le Tribunal, et ce, malgré le fait que le commissaire a mentionné que l’installation Boundary Lake était l’ITRE appartenant auparavant à Tervita située la plus proche des clients dans les marchés nos 41 et 105. Dans ces deux marchés, la distance additionnelle que doivent parcourir les clients pour atteindre l’ITRE South Taylor ou l’ITRE Gordondale n’est pas particulièrement importante. Dans les marchés nos 104, 106, 107 et 108, les clients sont établis plus proches de l’une de ces ITRE, ou des deux ITRE, que de l’ITRE Boundary Lake.

[419] Une autre considération pertinente qui concerne l’ITRE Boundary Lake est qu’avant le fusionnement, les six marchés susmentionnés desservis par cette installation semblaient recevoir les services d’une seule ITRE de Secure. Le Tribunal estime que, pour les clients dans ces marchés, le dessaisissement de l’ITRE South Taylor et de l’ITRE Gordondale permettrait de rétablir au niveau requis le contexte concurrentiel qui existait avant le fusionnement. Par conséquent, il n’y a pas lieu d’exiger un troisième dessaisissement. Il est entendu que le dessaisissement de deux plutôt qu’une ITRE dans cette région est nécessaire en raison de la distribution géographique particulière des clients dans les six marchés susmentionnés de même que dans d’autres marchés touchés par une DSC à proximité. En l’absence de l’un ou l’autre de ces dessaisissements, Secure serait alors en mesure d’imposer à certains clients des hausses de prix importantes.

[420] Le dessaisissement de l’ITRE South Taylor s’avère nécessaire pour empêcher Secure d’exercer cette puissance commerciale accrue dont elle jouit depuis le fusionnement, à l’égard de la plupart ou de l’ensemble des clients du marché no 107 de même que de certains clients des marchés nos 108 et 105. Il en va de même pour l’ITRE Gordondale s’agissant des marchés nos 28, 41, 104, 105, 106, 108 et 132.

(c) ITRE Brazeau

[421] Le Tribunal estime que le dessaisissement de cette installation serait nécessaire pour rétablir au niveau requis le contexte concurrentiel qui existait avant le fusionnement dans les principaux marchés des ITRE touchés par une DSC que cette installation dessert, à savoir les marchés nos 36, 99, 101, 111, 117 et 136. L’installation Brazeau est l’ITRE appartenant auparavant à Tervita qui est située la plus proche – et de loin – de la plupart ou de la totalité des clients au sein de ces marchés. En l’absence de ce dessaisissement, Secure serait en mesure d’imposer à ces clients des hausses de prix importantes.

(d) ITRE Buck Creek

[422] Le principal marché des ITRE touché par une DSC desservi par l’ITRE Buck Creek est le marché no 124. L’installation est située au cœur de ce vaste marché, très près de l’ITRE Drayton Valley appartenant à Secure. Le Tribunal estime que le dessaisissement de l’ITRE Buck Creek serait nécessaire pour contrer la DSC qui, selon lui, se produirait au sein de ce marché. Ce dessaisissement permettrait également de remédier à la DSC dans une partie du marché no 102.

(e) ITRE Kindersley[54], ITRE Coronation, ITRE Gull Lake et cavernes Unity

[423] Les marchés des ITRE touchés par une DSC qui sont desservis par ces installations, soit les marchés nos 2, 14 et 17, présentent beaucoup de chevauchements.

[424] Le Tribunal estime que le dessaisissement de l’ITRE Kindersley et des cavernes Unity suffirait pour contrer la DSC découlant du fusionnement au sein de ces marchés. Il ne serait ni nécessaire ni opportun d’exiger en plus à cette fin le dessaisissement de l’ITRE Coronation ou de l’ITRE Gull Lake.

[425] Avant le fusionnement, Secure n’avait aucun autre concurrent que Tervita dans les marchés nos 2, 14 et 17. L’installation de Tervita la plus près des clients dans le marché no 2 est soit l’ITRE Kindersley, soit les cavernes Unity, et il en va de même pour la plupart, sinon la totalité, des clients du marché no 17. C’est le cas aussi pour de nombreux clients du marché no 14.

[426] Dans chacun de ces trois marchés, une seule installation de Secure, aussi située à Kindersley, livrait concurrence à Tervita. Par conséquent, le dessaisissement de l’installation Kindersley qui appartenait auparavant à Tervita permettrait de rétablir dans une pleine mesure le contexte concurrentiel qui existait avant le fusionnement pour la plupart des clients ou pour un bon nombre d’entre eux. À l’avenir, Secure et l’acquéreur des éléments d’actif dessaisis se livreraient donc concurrence pour attirer ces clients essentiellement depuis le même emplacement principal, à Kindersley. La situation serait la même pour la plupart des autres clients, pour qui l’installation de Tervita la plus proche était les cavernes Unity. Dans cette perspective, le Tribunal estime qu’il ne serait ni nécessaire ni opportun d’ordonner le dessaisissement de l’ITRE Gull Lake (qui enregistre des ventes dans le marché no 17) ou de l’ITRE Coronation (qui génère des ventes dans les marchés nos 2 et 14).

[427] Aux fins du dossier, le Tribunal souligne que le dessaisissement des cavernes Unity permettrait aussi, pour certains clients dans les marchés nos 15 et 27, de rétablir la concurrence de manière à éliminer le caractère sensible de la diminution de la concurrence découlant du fusionnement[55].

(f) ITRE Eckville, Willesden Green et Stauffer

[428] Là encore, certains des marchés des ITRE touchés par une DSC desservis par ces installations reçoivent les services d’au moins deux d’entre elles.

[429] Le Tribunal juge que le dessaisissement de l’ITRE Willesden Green est nécessaire pour contrer la DSC dans le marché no 10, au sein duquel seules Secure et Tervita se livraient concurrence avant le fusionnement. Le dessaisissement de cette installation s’avère également nécessaire dans les marchés nos 127 et 138, où l’installation est située à proximité des clients et de l’ITRE Rocky Mountain House de Secure.

[430] De même, le dessaisissement de l’ITRE Stauffer est nécessaire pour contrer la DSC découlant du fusionnement dans le marché no 46, cette installation étant de loin celle qui, parmi les trois installations, est située la plus proche des clients dans ce marché.

[431] Le dessaisissement des ITRE Willesden Green et Stauffer permettrait également de remédier dans une mesure suffisante à la DSC découlant du fusionnement dans les marchés nos 116, 119 et 121. Même si l’ITRE Eckville a réalisé des ventes dans ces trois marchés, l’installation Stauffer est située plus près de la plupart, voire de la totalité, des clients dans le marché no 119. Le constat est le même pour l’ITRE Willesden Green dans le marché no 121, tandis que dans le marché no 116, l’ITRE Willesden Green et l’ITRE Stauffer semblent être établies plus près de l’ensemble des clients que l’ITRE Eckville.

[432] Le dessaisissement des ITRE Willesden Green et Stauffer permettrait vraisemblablement aussi de remédier dans une mesure suffisante à la DSC découlant du fusionnement dans le marché no 45. Bien que les cartes fournies par les parties n’indiquent pas l’emplacement des clients au sein de ce marché, l’emplacement relatif des différentes installations donne à penser que le dessaisissement de l’ITRE Eckville n’est pas nécessaire dans ce marché. Quoi qu’il en soit, le commissaire ne s’est pas acquitté de son fardeau de démontrer que le dessaisissement de l’ITRE Eckville devrait être ordonné pour rétablir la concurrence au niveau requis dans le contexte de la diminution de la concurrence qui, selon le Tribunal, se produira.

[433] Le Tribunal fait remarquer au passage que, dans la mesure où l’installation qui appartenait auparavant à Tervita la plus proche de certains clients dans les marchés nos 99 et 117 est l’ITRE Willesden Green, l’ITRE Stauffer, ou encore les deux, le dessaisissement des deux ITRE contribuerait à faire en sorte que ces clients ne puissent pas subir des hausses de prix importantes de la part de Secure.

(g) ITRE Elk Point et cavernes Lindbergh

[434] Ces deux installations sont situées assez près l’une de l’autre. Le Tribunal juge que le dessaisissement de l’ITRE Elk Point suffirait pour contrer la DSC découlant du fusionnement dans le marché no 4, au sein duquel seules Secure et Tervita se livraient concurrence avant le fusionnement. Le constat est le même dans le marché no 25, où un troisième « concurrent » allégué est situé très loin des clients.

[435] De même, le Tribunal conclut que les cavernes Lindbergh représentent la meilleure option de dessaisissement afin de contrer la DSC découlant du fusionnement dans le marché no 26, du fait qu’elles sont situées plus près de la plupart des clients que l’ITRE Elk Point. Par conséquent, le dessaisissement de cette installation permettrait plus efficacement d’empêcher Secure d’imposer une hausse de prix à ces clients.

[436] Le Tribunal fait remarquer au passage que le dessaisissement des cavernes Lindbergh et de l’ITRE Elk Point contribuerait à remédier à la DSC qui, selon lui, se produira dans deux marchés additionnels, soit les marchés nos 15 et 27. Ces marchés ont été analysés précédemment dans le contexte des cavernes Unity. Dans la mesure où certains clients dans ces marchés semblent être situés plus près de l’ITRE Elk Point et des cavernes Lindbergh que des cavernes Unity, le dessaisissement des deux premières installations contribuerait de façon marquée à empêcher Secure d’imposer des hausses de prix importantes à ces clients.

[437] Le Tribunal reconnaît que l’ITRE Elk Point a été détruite lors d’un incendie à la fin de l’année 2021. Toutefois, le Tribunal croit comprendre que, n’eût été le fusionnement, Tervita aurait construit une nouvelle installation pour remplacer l’ITRE incendiée. Selon M. Harington, l’acheteur des éléments d’actifs dessaisis ferait vraisemblablement la même chose (rapport révisé de M. Harington, au par. 236).

(h) ITRE Fort McMurray

[438] Cette installation dessert seulement un marché touché par une DSC, soit le marché no 60, qui est un marché des PDEA « de 3 à 2 ». Le Tribunal convient avec le commissaire que le dessaisissement de l’ITRE Fort McMurray est nécessaire pour rétablir la concurrence dans ce marché de manière à éliminer le caractère sensible de la diminution de la concurrence découlant du fusionnement.

(i) ITRE Fox Creek (Bigstone), ITRE Fox Creek East et installation Fox Creek Highway Terminal (« HT »)

[439] Ces installations sont situées assez près les unes des autres. Compte tenu des liens qui existent entre ces installations et de la place prépondérante qu’occupe Secure dans la région (au sein des marchés combinés des ITRE et des PDEA), le Tribunal estime que les trois installations doivent faire l’objet d’un dessaisissement.

[440] Ces dessaisissements seraient nécessaires pour rétablir la concurrence au niveau requis dans les marchés nos 5, 12, 13, 29, 30, 31 et 32.

[441] Au sein des marchés nos 5, 12 et 13, seules Secure et Tervita se livraient concurrence avant le fusionnement. Selon le Tribunal, les marchés nos 29 et 31 s’apparentent également à des marchés « de 2 à 1 ». Parmi les trois installations, l’ITRE Bigstone est située la plus près de la plupart ou de la totalité des clients au sein des marchés nos 5 et 29, tandis que l’installation Fox Creek East est située la plus près des clients dans les marchés nos 12 et 31. Au sein du marché no 13, certains clients sont situés plus près de l’installation Bigstone tandis que d’autres sont situés plus près de l’installation Fox Creek East.

[442] Comme il en sera question plus loin dans le contexte de l’installation Judy Creek (Tervita), le dessaisissement de ces trois installations de Fox Creek qui appartenaient auparavant à Tervita contribuerait à contrer la DSC dans les marchés nos 30 et 32.

[443] L’ITRE Fox Creek (Bigstone) est située à environ huit kilomètres de l’autoroute, et elle est reliée par pipeline à l’installation Fox Creek HT. XXXXXXXXXXXXXXXXXXX XXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXx (transcription confidentielle B, à la p. 2190; pièce P-R-868/CB-R-869, déclaration de témoin de M. Blundell au nom de Secure (la « déclaration de témoin de M. Blundell »), au par. 92). XXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXX XXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXZZZZZZZZZZXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXX XXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXx (transcription confidentielle B, aux p. 2168 et 2185) XXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXX XXXXXXXXXXXXXXXX (pièce CB-A-860/P-A-861, plan de vente des installations de Tervita pour le T3 de 2020 daté du 15 juillet 2020 (« plan de vente de Tervita »), à la p. 30).

[444] XXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXxXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXX.

[445] Compte tenu du fait qu’une seule ITRE de Secure (connue sous le nom TSC Fox Creek) fournissait des services dans ces marchés, le Tribunal a cherché à déterminer si le dessaisissement d’une seule des trois ITRE appartenant auparavant à Tervita pourrait convenir. Toutefois, au-delà des différences importantes qui existent entre ces trois installations, le Tribunal a statué que le dessaisissement d’une seule d’entre elles ne suffirait pas pour contrer la DSC qui, selon lui, se produira dans certains marchés des PDEA[56]. En d’autres termes, compte tenu des différences entre les deux installations et des effets du fusionnement sur les marchés des PDEA et sur les marchés des ITRE, le Tribunal est convaincu que le dessaisissement de l’ITRE Fox Creek (Bigstone), y compris l’installation Fox Creek HT, et le dessaisissement de l’ITRE Fox Creek East seraient nécessaires pour rétablir la concurrence au niveau requis dans les marchés pertinents des ITRE et des PDEA.

(j) ITRE La Glace, South Wapiti, Spirit River et Grande Prairie Industrial

[446] Les marchés touchés par une DSC qui sont desservis par ces quatre installations qui appartenaient auparavant à Tervita, soit les marchés nos 86, 88, 90, 91, 92, 93, 94, 95, 96, 98, 128, 129, 130 et 134, présentent beaucoup de chevauchements.

[447] Le Tribunal conclut que le dessaisissement des ITRE La Glace, South Wapiti et Spirit River, qui appartenaient précédemment à Tervita, suffirait pour contrer la DSC découlant du fusionnement dans ces marchés[57]. Il ne serait ni nécessaire ni opportun d’exiger en plus à cette fin le dessaisissement de l’ITRE Grande Prairie Industrial.

[448] Dans les marchés nos 90, 91, 128 et 130, l’installation La Glace est située plus près de la grande majorité ou de la totalité des clients que l’ITRE Grande Prairie Industrial[58]. Il en va de même pour l’installation South Wapiti eu égard aux marchés nos 86, 88, 92, 96, 98 et 129. Le constat est également le même pour l’ITRE Spirit River dans les marchés nos 93 et 134, et pour certains clients dans le marché no 91.

[449] L’ITRE South Wapiti est également située plus près des clients dans le marché no 35 que l’ITRE Grande Prairie Industrial.

[450] Le Tribunal reconnaît que, parmi ces quatre installations, l’ITRE Grande Prairie Industrial est celle qui est située la plus près de la majorité des clients au sein des marchés nos 94 et 95 et d’un petit nombre de clients dans le marché no 91. Cependant, comme les installations White Owl et Envolve dans ces marchés se trouvent tout près de l’ITRE Grande Prairie Industrial, le Tribunal conclut que le dessaisissement de cette dernière installation ne serait pas nécessaire pour empêcher Secure d’imposer des hausses de prix à ces clients. Aux fins du dossier, le Tribunal souligne que certains clients dans ces deux marchés (c.-à-d. les marchés nos 94 et 95) sont situés plus près de l’installation La Glace ou de l’installation South Wapiti que de l’ITRE Grande Prairie Industrial.

(k) ITRE Judy Creek, Mitsue et Green Court

[451] Encore une fois, les marchés touchés par une DSC desservis par les trois ITRE susmentionnées qui appartenaient précédemment à Tervita présentent beaucoup de chevauchements. Le Tribunal conclut que le dessaisissement de l’ITRE Judy Creek suffirait pour contrer la DSC découlant du fusionnement dans les marchés nos 8 et 16, au sein desquels Tervita et Secure étaient les seuls concurrents avant la transaction. Combiné aux dessaisissements des installations de Fox Creek dont il a été question précédemment, le dessaisissement de l’ITRE Judy Creek permettrait d’atteindre ce même résultat dans les marchés nos 30 et 32.

[452] Par conséquent, le Tribunal conclut qu’il ne serait pas nécessaire ou opportun d’ordonner le dessaisissement des ITRE Mitsue et Green Court.

[453] Le Tribunal reconnaît que, comparativement à l’ITRE Judy Creek, l’ITRE Mitsue est située plus près de la totalité ou de la plupart des clients dans le marché no 16. Les éléments de preuve démontrent toutefois qu’avant le fusionnement, Tervita établissait le prix des services offerts à ces clients en fonction de l’emplacement de l’installation de Secure dans le secteur Judy Creek. Par conséquent, le Tribunal est convaincu que le dessaisissement de l’ITRE Judy Creek qui appartenait auparavant à Tervita permettra de rétablir la dynamique concurrentielle qui était en place avant le fusionnement. La seule chose qui sera appelée à changer est que Secure reprendra le rôle de Tervita et l’acquéreur des éléments d’actifs dessaisis, celui de Secure, et qu’il n’y aura qu’une seule installation dans le secteur Judy Creek.

[454] Le Tribunal reconnaît également que l’ITRE Green Court générait certains revenus dans un nombre important de marchés des ITRE touchés par une DSC, à savoir les marchés nos 8, 12, 16, 29, 30, 31, 36, 37, 38, 42, 47, 49, 50, 51, 101, 102, 111et 117. Le Tribunal est toutefois convaincu que d’autres dessaisissements examinés dans les présents motifs seraient plus que suffisants pour rétablir la concurrence dans ces marchés de façon à éliminer le caractère sensible de la diminution de la concurrence.

[455] Sauf peut-être dans le cas des marchés nos 101 et 102, ces autres installations qui feraient l’objet d’un dessaisissement sont situées plus près de la totalité ou de la grande majorité des clients, comparativement à l’installation Green Court. Quant aux marchés nos 101 et 102, les éléments de preuve démontrent qu’avant le fusionnement, Tervita établissait le prix des services offerts aux clients dans ces marchés en fonction de l’emplacement des installations concurrentes les plus proches, c.-à-d. les ITRE Mayerthorpe et Cynthia de Wolverine de même que les ITRE Edson et Drayton Valley de Secure. Compte tenu de la présence des installations de Wolverine et du fait que les deux installations de Secure sont situées pratiquement à côté de deux ITRE qui feraient l’objet d’un dessaisissement (nommément les installations Buck Creek et West Edson)[59], le Tribunal est convaincu que le dessaisissement de l’installation Green Court n’est pas requis, et ce, malgré le fait que l’ITRE Cynthia accepte seulement une gamme restreinte de déchets. En résumé, le Tribunal estime que le dessaisissement des ITRE Buck Creek et West Edson suffirait pour rétablir la concurrence au niveau requis au sein des marchés nos 101 et 102.

(l) ITRE West Edson et Niton Junction

[456] À l’instar de certaines des installations analysées ci-après, on observe un certain chevauchement dans les marchés touchés par une DSC desservis par ces deux ITRE qui appartenaient auparavant à Tervita, soit dans les marchés nos 3, 6, 7, 36, 37, 38 et 42.

[457] Le Tribunal estime que le dessaisissement de l’ITRE West Edson uniquement suffirait pour contrer la DSC découlant du fusionnement au sein de tous ces marchés, sauf le marché no 36. Comparativement à l’ITRE Niton Junction, l’ITRE West Edson est située beaucoup plus près des clients dans ces marchés, à l’exception peut-être de quelques clients dans le marché no 38 qui peuvent être situés un peu plus près de l’ITRE Niton Junction. Le Tribunal fait observer que les clients dans les marchés nos 3, 6, 7, 37 et 42 sont tous situés à l’ouest de l’ITRE West Edson, tandis que l’ITRE Niton Junction est établie loin à l’est d’Edson.

[458] Combiné au dessaisissement des ITRE Willesden Green et Brazeau, le dessaisissement de l’ITRE West Edson contribuerait également à contrer la DSC dans le marché no 36, duquel l’installation tire certains revenus. Bien que l’installation Niton Junction réalise aussi des ventes à l’intérieur de ce marché, le Tribunal estime que le dessaisissement de cette quatrième ITRE n’est pas requis pour contrer la DSC dans ce marché. Pour plus de précision, il ne semble pas qu’un nombre appréciable de clients, si tant est qu’il y en ait, soient situés plus près de l’ITRE Niton Junction que des trois autres ITRE susmentionnées.

[459] Le Tribunal reconnaît que l’ITRE Niton Junction générait certains revenus dans un nombre important d’autres marchés des ITRE touchés par une DSC, à savoir les marchés nos 29, 30, 31, 32, 101, 102, 111, 117, 121, 124, 136 et 138. Le Tribunal est toutefois convaincu que d’autres dessaisissements examinés dans les présents motifs seraient plus que suffisants pour rétablir la concurrence dans ces marchés de façon à éliminer le caractère sensible de la diminution de la concurrence. Exception faite des marchés nos 101 et 102, qui ont fait l’objet d’une analyse plus haut dans le contexte de l’ITRE Green Court, d’autres installations visées par un dessaisissement sont situées beaucoup plus près des clients dans ces marchés.

(m) ITRE Valleyview et Silverberry

[460] Le Tribunal estime qu’il n’est pas nécessaire d’ordonner le dessaisissement de l’ITRE Valleyview pour rétablir la concurrence de façon à éliminer le caractère sensible de la diminution de la concurrence dans l’un ou l’autre des marchés des ITRE touchés par une DSC.

[461] Le Tribunal reconnaît que l’ITRE Valleyview générait certains revenus dans un nombre important d’autres marchés des ITRE touchés par une DSC, à savoir les marchés nos 3, 5, 6, 7, 12, 13, 16, 29, 30, 31, 32, 35, 37, 42, 47, 49, 90, 93, 94, 95, 96, 98, 99, 101, 102, 104, 105, 106, 107, 108, 111, 117, 121, 124, 127, 128, 129, 130 et 132. Le Tribunal est toutefois convaincu que d’autres dessaisissements examinés dans les présents motifs seraient plus que suffisants pour rétablir la concurrence dans ces marchés de façon à éliminer le caractère sensible de la diminution de la concurrence. Dans chacun de ces marchés, d’autres installations visées par un dessaisissement sont situées plus près des clients que ne l’est l’ITRE Valleyview.

[462] S’agissant de l’ITRE Silverberry, le Tribunal souligne qu’elle touchait des revenus dans plusieurs marchés des ITRE touchés par une DSC, soit les marchés no 104, 106, 107 et 108. Là encore, le Tribunal est toutefois convaincu que d’autres dessaisissements abordés dans les présents motifs seraient plus que suffisants pour rétablir la concurrence au sein de ces marchés de façon à éliminer le caractère sensible de la diminution de la concurrence. Dans chacun de ces marchés, d’autres installations visées par un dessaisissement (nommément les ITRE South Taylor et Gordondale) sont situées plus près des clients que ne l’est l’ITRE Silverberry. Néanmoins, ainsi qu’il en sera question au paragraphe 471 des présents motifs, le dessaisissement de l’ITRE Silverberry serait nécessaire pour contrer la DSC qui, selon ce qu’a conclu le Tribunal, se produira dans les marchés des PDEA nos 148 et 168.

(n) Conclusion au regard des dessaisissements visant des ITRE

[463] Pour résumer, le Tribunal estime que le dessaisissement de seulement 17 des 26 ITRE visées par la demande du commissaire, et le dessaisissement des deux cavernes aussi visées par sa demande, seraient nécessaires pour rétablir la concurrence dans les marchés des ITRE touchés par une DSC de manière à éliminer le caractère sensible de la diminution de la concurrence. Le tableau ci-dessous résume les conclusions du Tribunal à cet égard :

Tableau 11 – Synthèse des conclusions du Tribunal au regard des dessaisissements visant des ITRE[60]

ITRE

Marchés des ITRE touchés par une DSC concernés

Autres marchés des PDEA concernés?

Conclusion

Brazeau

36, 99, 111, 117 et 136

Oui – Voir ci-dessous

Dessaisissement requis

Buck Creek

124

 

Dessaisissement requis

Elk Point

4, 15, 25 et 27

Oui – Voir ci-dessous

Dessaisissement requis

Fort McMurray

60

 

Dessaisissement requis

Fox Creek (Bigstone)

et Fox Creek HT

5 et 29

Oui – Voir ci-dessous

Dessaisissement requis

Fox Creek East

12, 13 et 31; en partie : 30 et 32

Oui – Voir ci-dessous

Dessaisissement requis

Gordondale

28, 104, 106, 108 et 132; en partie : 41, 105 et 107

Oui – Voir ci-dessous

Dessaisissement requis

Judy Creek

8, 16, 30 et 32

Oui – Voir ci-dessous

Dessaisissement requis

Kindersley

2, 14 et 17

Oui – Voir ci-dessous

Dessaisissement requis

La Glace

90, 91, 94, 95, 128 et 130; en partie : 93

Oui – Voir ci-dessous

Dessaisissement requis

Silverberry

148 et 168 (PDEA)

Oui – Voir ci-dessous

Dessaisissement requis

South Taylor

en partie : 41, 104, 105, 106, 107 et 108

Oui – Voir ci-dessous

Dessaisissement requis

South Wapiti

35, 86, 88, 92, 94, 95, 96, 98 et 129

Oui – Voir ci-dessous

Dessaisissement requis

Spirit River

91, 93 et 134

Oui – Voir ci-dessous

Dessaisissement requis

Stauffer

45, 46, 116, 119, 121 et 127

Non

Dessaisissement requis

West Edson

3, 6, 7, 18, 19, 36, 37, 42, 47, 50, 51 et 55; en partie : 99

Oui – Voir ci-dessous

Dessaisissement requis

Willesden Green

10; en partie : 45, 99, 127, 138, 116, 117, 119 et 121

Non

Dessaisissement requis

Cavernes Lindbergh

15, 25, 26 et 27

Oui – Voir ci-dessous

Dessaisissement requis

Cavernes Unity

14 et 58; en partie : 2 et 15

Non

Dessaisissement requis

Boundary Lake

 

s.o.

Dessaisissement non requis

Coronation

 

s.o.

Dessaisissement non requis

Eckville

 

s.o.

Dessaisissement non requis

Grande Prairie Industrial

 

s.o.

Dessaisissement non requis

Green Court

 

s.o.

Dessaisissement non requis

Gull Lake

 

s.o.

Dessaisissement non requis

Mitsue

 

s.o.

Dessaisissement non requis

Niton Junction

 

s.o.

Dessaisissement non requis

Valleyview

 

s.o.

Dessaisissement non requis

 

(4) PDEA

[464] Au total, 67 marchés touchés par une DSC sont des marchés des PDEA. En voici la synthèse :

 

Tableau 12 – Marchés des PDEA touchés par une DSC

Structure du marché

No des marchés

Total

De 2 à 1

18, 19 et 20

3

De 3 à 2

47, 49, 50, 51, 52, 53, 54, 55, 57, 58, 59 et 60

12

De 4 à 3+

142, 143, 144, 145, 146, 147, 148, 150, 152, 154, 155, 156, 157, 159, 160, 162, 163, 164, 165, 166, 168, 169, 171, 172, 173, 174, 176, 177, 179, 183, 184, 186, 188, 193, 196, 200, 201, 202, 206, 208, 232, 233, 235, 241, 242, 245, 246, 247, 249, 251, 252 et 257

46

Total

 

67

(a) Marchés pour lesquels les dessaisissements visant des ITRE s’avèrent suffisants

[465] Le Tribunal estime que la diminution sensible qui, selon ce qu’il a conclu, se produira vraisemblablement dans 43 des marchés touchés par une DSC mentionnés ci-dessus sera réglée par les dessaisissements d’ITRE dont il a été question à la section précédente et qui ont été résumés dans le tableau 11, au paragraphe 463 des présents motifs. Les marchés en question sont les suivants :


 

Tableau 13 – Marchés des PDEA touchés par une DSC pour lesquels les dessaisissements visant des ITRE s’avèrent suffisants

Structure du marché

No du marché et ITRE visée par un dessaisissement

Total

De 2 à 1

20, 55 – West Edson[61]

2

De 3 à 2

49, 57 – Judy Creek

50, 51 – West Edson

52, 53 – Kindersley

58 – Kindersley/Cavernes Unity

60 – Fort McMurray

8

De 4 à 3+

142 – Kindersley

143, 147, 246 – West Edson

144, 146, 206 – Brazeau

145, 193 – Brazeau

156, 157, 169, 171, 172, 173, 174, 176, 188, 245, 247 – Fox Creek/Fox Creek East

160 – Judy Creek

162, 241 – South Wapiti[62]

183, 186 – Judy Creek/Fox Creek/Fox Creek East

184, 208, 251 – La Glace/Spirit River/Gordondale

200 – South Taylor/Gordondale

235 – Elk Point/Cavernes Lindbergh

196, 252, 257 – Gordondale

33

Total

 

43

(b) Autres marchés des PDEA touchés par une DSC

[466] Le Tribunal se penchera maintenant sur les 24 autres marchés des PDEA touchés par une DSC.

[467] Dans quatre de ces marchés (les marchés nos 18, 19, 47 et 150), le dessaisissement de l’ITRE West Edson ne suffirait pas pour rétablir la concurrence de manière à éliminer le caractère sensible de la diminution de la concurrence qui, selon ce qu’a conclu le Tribunal, se produira. Il en est ainsi parce que certains clients au sein de ces marchés sont situés plus près du PDEA Moose Creek que de l’ITRE West Edson. Si le PDEA Moose Creek ne faisait pas l’objet d’un dessaisissement, Secure serait en mesure d’imposer des hausses de prix importantes aux clients de cette installation, lesquels n’auraient alors pour seule autre option que l’ITRE West Edson dessaisie, située plus loin.

[468] Il semble que la situation soit la même dans le cas du marché no 152. Bien que le dessaisissement de l’ITRE Brazeau s’avérerait suffisant pour la plupart des clients dans ce marché, le dessaisissement du PDEA Moose Creek contribuerait à empêcher Secure d’imposer des hausses de prix importantes aux clients qui sont situés plus près du PDEA Moose Creek que de l’ITRE Brazeau.

[469] Quoi qu’il en soit, dans quatre autres marchés (les marchés nos 54, 59, 166 et 233), les clients sont établis plus près du PDEA Kakwa que de toute autre installation qui appartenait auparavant à Tervita. Par conséquent, le dessaisissement du PDEA Kakwa serait nécessaire pour empêcher Secure d’augmenter ses prix de façon importante au sein de ces marchés.

[470] Dans neuf autres marchés (les marchés nos 154, 155, 159, 163, 164, 165, 177, 232 et 242), le dessaisissement de l’ITRE South Wapiti permettrait d’enrayer la DSC relevée par le Tribunal, mais uniquement pour un sous-groupe de clients. Dans la mesure où d’autres clients dans chacun de ces marchés sont situés plus près du PDEA Kakwa que de l’ITRE South Wapiti, le dessaisissement du PDEA Kakwa serait nécessaire pour empêcher Secure d’imposer à ces clients des hausses de prix importantes.

[471] Dans deux autres marchés (les marchés nos 148 et 168), le dessaisissement du PDEA Mile 103 serait requis pour contribuer à l’atteinte de ce même objectif. Le Tribunal souligne que, si cette installation était en mesure de fonctionner au maximum de sa capacité, son dessaisissement permettrait essentiellement de rétablir le contexte concurrentiel qui existait avant le fusionnement, au moment où la seule installation que Secure exploitait dans la région était le PDEA Wonowon. XXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXX XXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXX. Par conséquent, le Tribunal estime que le dessaisissement de l’ITRE Silverberry serait également nécessaire pour rétablir la concurrence dans les marchés nos 148 et 168 de manière à éliminer le caractère sensible de la diminution de la concurrence. L’avis du Tribunal à cet égard resterait le même XXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXX XXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXX.

[472] Enfin, selon le Tribunal, le dessaisissement du PDEA 08-09 serait nécessaire pour empêcher Secure d’imposer des hausses de prix importantes aux clients des marchés nos 179, 201, 202 et 249.

[473] Étant donné que les dessaisissements dont il a été question précédemment suffiraient pour contrer la DSC relevée par le Tribunal dans les 67 marchés des PDEA touchés par une DSC, il n’y aurait pas lieu d’ordonner à Secure de se dessaisir du PDEA Swan Hills. D’après l’information fournie par le commissaire[63], il semble que cette installation ne touchait des revenus que dans les marchés nos 160 et 237. Toutefois, le dessaisissement de l’ITRE Judy Creek suffirait à contrer la DSC dans le marché no 160, et le marché no 237 ne fait pas partie des marchés touchés par une DSC. En outre, il semble qu’avant le fusionnement, Tervita avait prévu de fermer l’installation Swan Hills parce que celle-ci dépendait des eaux usées du lieu d’enfouissement Judy Creek, lequel atteindra bientôt sa pleine capacité et sera recouvert dans un avenir proche (déclaration de témoin de M. Blundell, au par. 70).

(c) Conclusion au regard des dessaisissements visant des PDEA

[474] En résumé, certains des dessaisissements d’ITRE qui, selon l’appréciation du Tribunal, serait nécessaires pour contrer la DSC qu’il a relevée dans les marchés des ITRE concernés suffiraient également pour remédier à la DSC dans 43 des 67 marchés des PDEA touchés par une DSC. Le tableau 13 ci-dessus fait mention de ces dessaisissements ainsi que des marchés concernés.

[475] S’agissant des 24 autres marchés des PDEA touchés par une DSC, le Tribunal a conclu qu’il serait nécessaire que Secure cède cinq installations additionnelles, nommément le PDEA Moose Creek, le PDEA Kakwa, le PDEA Mile, le PDEA 08-09 et l’ITRE Silverberry. Ces dessaisissements seraient nécessaires pour rétablir la concurrence au sein de ces marchés des PDEA touchés par une DSC de manière à éliminer le caractère sensible de la diminution de la concurrence qui, selon ce qu’a conclu le Tribunal, se produira.

[476] Étant donné ce qui précède, le Tribunal conclut qu’il n’y a pas lieu pour Secure de se départir du PDEA Swan Hills, malgré que le commissaire soutienne le contraire.

[477] Le tableau ci-dessous résume les conclusions du Tribunal au sujet des dessaisissements visant des PDEA :

Tableau 14 – Synthèse des conclusions du Tribunal au regard des dessaisissements visant des PDEA

PDEA

Principaux marchés touchés par une DSC concernés

Conclusion

08-09

179, 201, 202 et 249

Dessaisissement requis

Kakwa

54, 59, 166 et 233; en partie : 154, 155, 159, 163, 164, 165, 177, 232 et 242

Dessaisissement requis

Mile 103

148 et 168

Dessaisissement requis

Moose Creek

en partie : 18, 19, 47, 150 et 152

Dessaisissement requis

Swan Hills

 

Dessaisissement non requis

(5) Conclusion au regard des dessaisissements

[478] En conclusion, le Tribunal juge qu’il serait opportun d’ordonner le dessaisissement de six des huit lieux d’enfouissement visés par la demande du commissaire.

[479] Le Tribunal conclut également que le dessaisissement de 17 des 26 ITRE visées par la demande du commissaire, et le dessaisissement des deux cavernes aussi visées par sa demande, seraient suffisants pour rétablir la concurrence de manière à éliminer le caractère sensible de la diminution de la concurrence relevée par le Tribunal.

[480] Enfin, le Tribunal parvient à la conclusion que le dessaisissement de quatre des cinq PDEA visés par la demande du commissaire suffirait dans le même objectif.

[481] Ainsi, le Tribunal conclut que 29 des 41 dessaisissements demandés par le commissaire suffiraient pour contrer la DSC qui, selon la conclusion du Tribunal, découle du fusionnement.

[482] Les conclusions qui précèdent sont résumées dans le tableau 15 ci-dessous.

Tableau 15 – Synthèse des conclusions du Tribunal relativement aux dessaisissements, selon l’installation

Dessaisissement requis[64]

Dessaisissement non requis

No

Nom de l’installation

Type d’installation

No

Nom de l’installation

Type d’installation

1

Brazeau

ITRE

1

Boundary Lake

ITRE

2

Buck Creek

ITRE

2

Coronation

ITRE

3

Elk Point

ITRE

3

Eckville

ITRE

4

Fort McMurray

ITRE

4

Grande Prairie Industrial

ITRE

5

Fox Creek East

ITRE

5

Green Court

ITRE

6

Fox Creek (Bigstone et HT)

ITRE

6

Gull Lake

ITRE

7

Gordondale

ITRE

7

Mitsue

ITRE

8

Judy Creek

ITRE

8

Niton Junction

ITRE

9

Kindersley

ITRE

9

Valleyview

ITRE

10

La Glace

ITRE

 

 

 

11

Silverberry

ITRE

10

Swan Hills

PDEA

12

South Taylor

ITRE

 

 

 

13

South Wapiti

ITRE

11

Fox Creek

Lieu d’enfouissement

14

Spirit River

ITRE

12

Marshall

Lieu d’enfouissement

15

Stauffer

ITRE

 

16

West Edson

ITRE

 

17

Willesden Green

ITRE

 

 

 

18

08-09

PDEA

 

19

Kakwa

PDEA

 

20

Mile 103

PDEA

 

21

Moose Creek

PDEA

 

 

 

22

Elk Point

Lieu d’enfouissement

 

23

La Glace

Lieu d’enfouissement

 

24

Silverberry

Lieu d’enfouissement

 

25

South Wapiti

Lieu d’enfouissement

 

26

Spirit River

Lieu d’enfouissement

 

27

Willesden Green

Lieu d’enfouissement

 

 

 

28

Lindbergh

Caverne

 

29

Unity

Caverne

 

[483] Aux fins du dossier, le Tribunal fait observer que, s’il juge en fin de compte que Secure n’a pas rempli les conditions d’application de la défense fondée sur les gains en efficience que prévoit l’article 96 de la Loi, les modalités sollicitées par le commissaire dans son projet d’ordonnance sont essentiellement celles qui doivent être imposées, sous réserve des observations formulées aux paragraphes 397 et 398 des présents motifs et de certains autres rajustements.

XV. Question 3 – Les conditions d'application de la défense fondée sur les gains en efficience ont-elles été remplies?

 

A. Principes juridiques

(1) Introduction

[484] Le paragraphe 96(1) de la Loi est rédigé comme suit :

(1) Le Tribunal ne rend pas l’ordonnance prévue à l’article 92 dans les cas où il conclut que le fusionnement, réalisé ou proposé, qui fait l’objet de la demande a eu pour effet ou aura vraisemblablement pour effet d’entraîner des gains en efficience, que ces gains surpasseront et neutraliseront les effets de l’empêchement ou de la diminution de la concurrence qui résulteront ou résulteront vraisemblablement du fusionnement réalisé ou proposé et que ces gains ne seraient vraisemblablement pas réalisés si l’ordonnance était rendue.

(1) The Tribunal shall not make an order under section 92 if it finds that the merger or proposed merger in respect of which the application is made has brought about or is likely to bring about gains in efficiency that will be greater than, and will offset, the effects of any prevention or lessening of competition that will result or is likely to result from the merger or proposed merger and that the gains in efficiency would not likely be attained if the order were made.

[485] Malgré le fait que la note marginale du paragraphe 96(1) précise que cette disposition concerne un cas d’exception, la jurisprudence a néanmoins posé les gains en efficience comme un moyen de défense (Tervita CSC, au par. 89). La raison en est que l’analyse des effets anticoncurrentiels allégués par le commissaire doit être réalisée avant l’exercice de comparaison qu’appelle la disposition.

[486] Pour s’acquitter de la tâche que lui impose le paragraphe 96(1), le Tribunal a le loisir de choisir la méthode élémentaire qui, selon lui, convient le mieux dans les circonstances. À cet égard, deux critères principaux ont été reconnus dans la jurisprudence, à savoir le critère du « surplus total » et celui des « coefficients pondérateurs » (Tervita CSC, au par. 91). Ce dernier critère a également été décrit comme une démarche fondée sur les « effets socialement défavorables » (Le commissaire de la concurrence c Supérieur Propane Inc, 2003 CAF 53 (« Supérieur Propane IV »), aux par. 20 à 23, 58). Cependant, il conviendrait davantage de parler du critère du « surplus pondéré » (Tervita TC, au par. 399).

[487] Suivant le critère du surplus total, l’accent est mis sur la variation de la somme des surplus économiques (le surplus du consommateur et le surplus du producteur) qui découlerait vraisemblablement du fusionnement en question. Par conséquent, les transferts purs de surplus entre les « consommateurs » (en l’espèce, les clients de Secure) et les « producteurs » (en l’espèce, Secure) sont considérés comme neutres (Tervita CSC, au par. 95; P&H, au par. 649).

[488] Cela dit, suivant le critère du surplus pondéré, les transferts de richesse entre les consommateurs et l’entité fusionnée ne sont pas nécessairement considérés comme neutres. Le Tribunal doit plutôt porter des jugements de valeur concernant les effets de redistribution qu’aura le fusionnement sur les consommateurs et les actionnaires de l’entité fusionnée (voir, de manière générale, Tervita CSC, aux par. 96 à 98; Tervita TC, aux par. 400 à 406).

[489] Comme le critère du surplus total demeure le point de départ de l’analyse et comme Secure et le commissaire ont tous deux fait valoir qu’il s’agit du critère qui devrait être retenu en l’espèce, rien ne sert d’en dire plus sur le critère du surplus pondéré (Tervita TC, aux par. 281 à 283; transcription publique, à la p. 80; transcription confidentielle B, à la p. 3267).

[490] Étant donné que le paragraphe 96(1) opère essentiellement comme moyen de défense, il incombe aux parties au fusionnement (en l’espèce, Secure) de prouver que des gains en efficience admissibles découleront vraisemblablement du fusionnement (Tervita CSC, aux par. 89, 136). Toutefois, le commissaire a le fardeau de prouver l’ampleur des effets de l’empêchement ou de la diminution de la concurrence qui résulteront ou résulteront vraisemblablement du fusionnement réalisé ou proposé (Tervita CSC, au par. 122; P&H, aux par. 694 à 697). Il en sera question plus en détail ci-après.

(2) Gains en efficience admissibles

[491] L’article 96 accorde la primauté à l’efficience de l’économie. Toutefois, la Loi et la jurisprudence imposent plusieurs limites au regard des gains en efficience qui peuvent être pris en considération conformément à cette disposition (Tervita CSC, au par. 111). Celles-ci peuvent aussi être commodément vues comme des étapes que doivent franchir les gains en efficience allégués pour être admissibles aux fins de l’application de l’article 96.

[492] Pour commencer, le Tribunal a posé cinq étapes initiales à appliquer pour filtrer les gains en efficience allégués (P&H, aux par. 655 à 658; Tervita TC, aux par. 262 à 264, 270. Voir aussi Tervita CSC, aux par. 102, 107 à 110).

[493] La première étape concerne les types de gains en efficience qui peuvent être pris en considération. En bref, les gains en efficience qui appartiennent à une des trois grandes catégories suivantes peuvent être pris en considération dans ce contexte : (i) les gains en efficience de la production, qui permettent de produire une certaine quantité d’extrants en utilisant moins de ressources ou d’obtenir plus d’extrants avec la même quantité de ressources; (ii) les gains en efficience dynamique, réalisés grâce à l’invention, à l’élaboration et à la diffusion de nouveaux produits et processus de production; (iii) les autres gains en efficience susceptibles d’accroître globalement l’efficience de la répartition des ressources, c’est-à-dire de permettre une affectation des ressources à leur emploi le plus valable (Tervita CSC, au par. 102). Tous les gains en efficience allégués par Secure appartiennent à l’une ou l’autre de ces trois catégories.

[494] La deuxième étape concerne la probabilité que les gains en efficience allégués se concrétisent. En bref, seuls les gains en efficience qui se produiront vraisemblablement ou qui se sont effectivement produits peuvent être pris en considération dans ce contexte (paragraphe 96(1) de la Loi). Encore une fois, les gains en efficience que Secure a mis de l’avant remplissent la condition, sous réserve de l’application de la cinquième étape dont il sera question plus loin.

[495] La troisième étape exclut les gains en efficience allégués qui se produiraient ou qui se sont déjà produits en raison seulement d’une redistribution de revenu entre plusieurs personnes (paragraphe 96(3) de la Loi). Le commissaire n’a pas laissé entendre que des gains en efficience allégués par Secure puissent appartenir à cette catégorie.

[496] La quatrième étape exclut : (i) les gains en efficience allégués qui seraient réalisés à l’extérieur du Canada et dont les actionnaires au Canada ne bénéficieraient pas, ainsi que (ii) les gains qui seraient réalisés au Canada mais dont des actionnaires étrangers bénéficieraient. En réponse aux questions de la formation, le commissaire s’est sciemment abstenu d’affirmer qu’il conviendrait de minimiser quelque gain en efficience allégué par Secure à cet égard (transcription publique, aux p. 2775 à 2777). Le commissaire et Secure n’ayant pas présenté d’éléments de preuve ni d’arguments sur ce point, le Tribunal a fait savoir au cours de l’audience qu’il ne pousserait pas plus loin l’analyse à ce sujet (transcription publique, aux p. 2776 et 2777, 3222). Lorsqu’il en a décidé ainsi, le Tribunal était conscient du fait que Secure est une entreprise canadienne et que peu d’éléments de preuve donnaient à penser que des actionnaires de l’entreprise étaient étrangers[65]. Dans l’avenir, la partie invoquant la défense fondée sur les gains en efficience devra établir, selon la prépondérance des probabilités et au moyen d’une preuve claire et convaincante, le lieu où sont établis ses actionnaires.

[497] La cinquième étape exclut deux grandes catégories de gains en efficience, soit les gains en efficience qui seraient réalisés par d’autres moyens si le Tribunal rendait l’ordonnance qu’il estime nécessaire pour veiller à ce que le fusionnement en question n’empêche ou ne diminue sensiblement la concurrence, et les gains en efficience qui seraient vraisemblablement réalisés à la suite du fusionnement même si l’ordonnance était rendue. Cela comprend généralement les gains en efficience réalisés dans les marchés non visés par l’ordonnance en question. Toutefois, les gains en efficience qui sont si intrinsèquement liés aux marchés pertinents qu’ils ne seraient vraisemblablement pas réalisés si l’ordonnance était rendue sont admissibles (Tervita TC, au par. 394).

[498] La cinquième étape décrite ci-dessus a un rôle important à jouer dans la présente affaire.

[499] Secure, s’appuyant sur le sens ordinaire de l’article 96, s’y oppose. Elle affirme que cette interprétation empêche le Tribunal de rendre une ordonnance au sujet d’un fusionnement qui entraînera vraisemblablement des gains en efficience qui surpasseront les effets anticoncurrentiels qui en découleront vraisemblablement. En d’autres termes, Secure fait valoir que tous les gains en efficience que le fusionnement entraînera vraisemblablement sont admissibles au titre de l’article 96. Pour étayer cette interprétation, elle invoque les passages de l’arrêt Tervita dans lesquels la CSC a souligné que l’article 96 empêche le Tribunal de rendre une ordonnance s’il conclut que le fusionnement aura vraisemblablement pour effet d’entraîner des gains en efficience qui surpasseront et neutraliseront ses effets anticoncurrentiels (Tervita CSC, aux par. 17, 48). Secure ajoute que la disposition finale du paragraphe 96(1) (« et que ces gains ne seraient vraisemblablement pas réalisés si l’ordonnance était rendue ») existe simplement pour éviter que les gains en efficience attribuables au fusionnement soient minimisés.

[500] Le Tribunal n’est pas du même avis que Secure au sujet de la cinquième étape. En bref, une interprétation de l’article 96 qui est axée sur l’ordonnance et qui sous-tend cette étape a été expressément retenue à la fois au paragraphe 262 de la décision Tervita TC et aux paragraphes 148 et 149 de la décision Supérieur Propane III (conf par Supérieur Propane IV (voir aussi P&H, au par. 657)). Cette interprétation est également implicite au paragraphe 172 de l’arrêt Tervita CAF. Par ailleurs, les paragraphes 17 et 48 de l’arrêt Tervita CSC invoqués par Secure, tel qu’il a été mentionné précédemment, sont muets sur la disposition finale du paragraphe 96(1). Il semble que ces passages avaient simplement pour but de résumer le moyen de défense fondé sur les gains en efficience, de manière générale. Lorsque la CSC a par la suite analysé les limites entourant les gains en efficience admissibles aux fins de l’application de l’article 96, elle a clairement reconnu que le Tribunal doit conclure que « les gains en efficience [qui découleraient vraisemblablement du fusionnement réalisé ou proposé] ne seraient vraisemblablement pas réalisés s’il rendait l’ordonnance prévue à l’art. 92 » (Tervita CSC, au par. 113). L’interprétation que fait Secure du libellé de l’article 96 ne reconnaît pas que cette disposition crée un élément de la défense fondée sur les gains en efficience et que celui-ci doit être établi par ceux qui invoquent cette défense (Tervita CSC, au par. 136).

[501] Qui plus est, comme la thèse de Secure suppose que la dernière partie du paragraphe 96(1) soit interprétée comme faisant référence aux gains totaux qui découleraient du fusionnement, il faudrait que le Tribunal s’écarte du sens ordinaire de cette disposition, et en particulier du sens ordinaire de la dernière partie qui vient tout juste d’être citée. Or, comme c’est le cas en l’espèce, lorsque le libellé d’une disposition « est précis et sans équivoque, le sens ordinaire des mots joue un rôle primordial dans le processus d’interprétation » (Orphan Well Association c Grant Thornton Ltd, 2019 CSC 5, au par. 88, citant Canada Trustco Mortgage Co c Canada, 2005 CSC 54, au par. 10. Voir aussi Mohr, aux par. 13 et 23).

[502] Il est entendu que l’interprétation proposée par Secure ne trouve écho nulle part dans les dispositions liées aux fusionnements, ni ailleurs dans la Loi en fait. Si le législateur avait eu l’intention que le paragraphe 96(1) ait l’effet mis de l’avant par Secure, il aurait facilement pu ajouter l’adjectif totaux dans la disposition afin qu’il soit clair que l’exercice de comparaison doit se faire entre les gains en efficience totaux qui découleront vraisemblablement du fusionnement et les effets de l’empêchement ou de la diminution de la concurrence qui découleront vraisemblablement du fusionnement. Le fait que le législateur n’a pas inclus l’adjectif totaux dans la disposition donne à penser que tel n’est pas le critère qu’il avait l’intention de créer.

[503] Par ailleurs, suivant l’interprétation proposée par Secure, le moyen de défense fondé sur les gains en efficience pourrait être fructueux même lorsque la plupart des gains en efficience allégués se produiraient vraisemblablement par d’autres moyens si l’ordonnance était rendue. Voilà qui poserait problème, parce que les deux objectifs que sont la préservation de la concurrence et la stimulation de l’efficience ne pourraient être maximisés. Au lieu de cela, le premier objectif serait entièrement subordonné au deuxième, même lorsque la plupart des gains en efficience se produiraient vraisemblablement par d’autres moyens. Dans la mesure où l’interprétation axée sur l’ordonnance permet d’obtenir un meilleur équilibre entre ces deux objectifs, elle doit l’emporter sur celle proposée par Secure.

[504] L’interprétation axée sur l’ordonnance a également pour avantage de mettre l’accent sur le coût réel de l’ordonnance en question, nommément la perte de gains en efficience qui ne seront vraisemblablement pas réalisés si l’ordonnance est rendue. Ainsi, cette interprétation fait place à un arbitrage entre ce coût et la perte sèche qui découlerait de l’empêchement ou de la diminution de la concurrence à la suite du fusionnement[66].

[505] Secure souligne que l’interprétation axée sur l’ordonnance est lacunaire en ce que les parties au fusionnement doivent attendre de connaître les détails de l’ordonnance demandée par le commissaire pour pouvoir faire valoir leurs arguments au regard de l’article 96. Secure fait remarquer que le caractère inéquitable d’une telle interprétation ressort en l’espèce, car ce n’est que la veille de l’audience que le commissaire a fait connaître la mesure corrective qu’il proposait.

[506] De l’avis du Tribunal, cette lacune est plus théorique que pratique. Conformément à l’alinéa 36(2)e) des Règles, le commissaire fournit les détails de l’ordonnance demandée, à défaut de quoi la partie défenderesse peut en faire la demande. Secure a convenu de ce fait à l’audience (transcription publique, à la p. 3448). De plus, comme il est souligné aux paragraphes 33 et 380 des présents motifs, dans l’avenir, le commissaire pourrait se voir refuser la possibilité de déposer des demandes qui ne respectent pas les exigences énoncées à l’article 36 des Règles. En outre, comme les parties qui pourraient envisager sérieusement d’invoquer la défense fondée sur les gains en efficience retiendront vraisemblablement les services d’un avocat compétent, on peut présumer qu’elles seront informées par celui-ci de la nature de l’ordonnance qui sera vraisemblablement rendue par le Tribunal. À cet égard, le Tribunal fait remarquer qu'il a jugé que la mesure corrective présentée à la partie XIV des présents motifs était appropriée après avoir appliqué des principes bien établis que tout avocat spécialisé en droit de la concurrence devrait bien connaître. Bien qu’on ne puisse en dire autant de l’ordonnance demandée par le commissaire, il reste que c’est l’ordonnance qui serait vraisemblablement rendue par le Tribunal en vertu de l’article 92 qui importe pour les besoins de l’application de l’article 96.

[507] Le Tribunal s’arrête un moment pour faire remarquer que M. Harington a présenté un autre ensemble d’allégations fondées sur une interprétation du paragraphe 96(1) axée sur l’ordonnance, dans l’éventualité où le Tribunal retienne comme par le passé cette interprétation au regard de la cinquième étape. Le commissaire a convenu que ces allégations concernaient uniquement les gains en efficience qui ne seraient vraisemblablement pas réalisés si l’ordonnance demandée était rendue (transcription publique, à la p. 2774).

[508] En plus des cinq étapes décrites précédemment, deux limites additionnelles ont été posées concernant les gains en efficience qui peuvent être considérés comme admissibles aux fins de l’application de l’article 96. La première limite exclut les gains en efficience qu’une partie au fusionnement réaliserait plus rapidement qu’un autre acheteur du simple fait que cet autre acheteur, en raison de la procédure judiciaire liée à une ordonnance de dessaisissement, mettrait plus de temps qu’elle à réaliser les gains en efficience. En d’autres termes, les gains en efficience qui découlent des processus réglementaires prévus par la Loi ne sont pas admissibles au titre de l’article 96 (Tervita CSC, aux par. 107, 114 et 115).

[509] Enfin, la deuxième limite exclut les gains en efficience déjà réalisés. Ceux-ci ne sont pas admissibles, car on ne peut en dire qu’ils « ne seraient vraisemblablement pas réalisés si l’ordonnance était rendue », comme il est prévu au paragraphe 96(1) (Tervita TC, au par. 274).

[510] En plus des sept étapes ou limites exposées précédemment concernant les gains en efficience pouvant être pris en considération aux fins de l’application de l’article 96, ajoutons que tout gain en efficience admissibles dans ce contexte doit être rajusté en fonction de ce qu’il en coûtera pour sa réalisation (Le commissaire de la concurrence c Superior Propane, 2000 Trib conc 15 (« Supérieur Propane I »), aux par. 333, 340). En effet, de tels coûts réduisent les économies qui découleront globalement de la réalisation des gains en efficience en question. Comme les gains en efficience déjà réalisés ne sont pas admissibles, il est entendu que les coûts de réalisation de ces gains en efficience ne sont pas déduits au cours du processus d’évaluation, et ce, dans un souci de traitement symétrique de ces gains en efficience et des coûts qui s’y rattachent.

(3) Effets anticoncurrentiels admissibles

(a) Introduction

[511] Les effets admissibles au titre de l’article 96 sont fonction du critère fondamental adopté par le Tribunal dans une affaire donnée. Comme il est mentionné au paragraphe 489 des présents motifs, le critère applicable en l’espèce est celui du surplus total.

[512] Par conséquent, les effets admissibles pouvant raisonnablement être quantifiés sont ceux qui entraîneraient une réduction du surplus du consommateur (en l’espèce, le surplus des clients de Secure) et du surplus du producteur (en l’espèce, le surplus des actionnaires de Secure)[67], sans que ce surplus perdu soit récupéré par Secure. Cette réduction du surplus global constituerait une perte sèche pour l’économie canadienne.

[513] Il s’ensuit que tout surplus qui sera vraisemblablement tout simplement redistribué entre consommateurs et producteurs est considéré comme neutre selon le critère du surplus total. Par conséquent, ces effets de redistribution ou transferts de richesse ne sont pas pris en considération pour mesurer l’ampleur des effets anticoncurrentiels d’un fusionnement (Tervita CSC, au par. 95; P&H, au par. 649).

[514] Comme il est souligné au paragraphe 490 des présents motifs, le commissaire a le fardeau de prouver l’ampleur des « effets de l’empêchement ou de la diminution de la concurrence qui résulteront ou résulteront vraisemblablement du fusionnement », comme il est énoncé au paragraphe 96(1) de la Loi. Pour ce faire, le commissaire doit entre autres quantifier ces effets, pour autant qu’ils puissent l’être, et la précision n’est pas exigée si elle n’est pas raisonnablement possible. Dans un tel cas, une estimation suffira, même s’il s’agit seulement d’une fourchette raisonnable (Tervita CSC, au par. 124 et 125; P&H, aux par. 180, 651). Cela dit, les estimations doivent reposer sur une preuve qui peut être attaquée et soupesée (Tervita CSC, au par. 125).

[515] Lorsqu’il n’est pas raisonnablement possible de mesurer les effets anticoncurrentiels, il est possible d’en faire une analyse qualitative dans le cadre de l’analyse comparative prévue à l’article 96 (Tervita CSC, aux par. 100, 124, 144 à 147; P&H, aux par. 651 et 652). En l’espèce, le commissaire a confirmé ne pas faire valoir l’existence de tels effets qualitatifs (transcription publique, à la p. 2894), parce que son témoin expert, M. Miller, a fourni des estimations quantitatives des effets allégués que sont les effets sur les prix et sur la production et les effets hors prix. Partant, l’analyse qui suit se limite aux effets anticoncurrentiels quantifiables.

[516] Le Tribunal s’interrompt pour souligner que l’exigence selon laquelle les effets anticoncurrentiels quantifiables doivent être quantifiés s’applique aussi aux gains en efficience admissibles (P&H, au par. 656). Étant donné que les gains en efficience allégués devront « vraisemblablement » découler du fusionnement, il doit y avoir une preuve convaincante des économies alléguées et du moyen par lequel les gains en efficience allégués se réaliseront (Supérieur Propane I, aux par. 347 et 348).

[517] En d’autres termes, comme le Tribunal l’a souligné aux paragraphes 697 et 726 à 749 de la décision P&H, tout comme il est imposé au commissaire de prouver l’existence d’effets anticoncurrentiels en vertu de l’article 96, les parties au fusionnement (Secure, en l’espèce) sont tenues de s’acquitter du fardeau de prouver les gains en efficience admissibles en vertu de cet article. Ainsi, si un gain en efficience peut être quantifié, il doit l’être, ou à tout le moins être estimé. Cette quantification ou estimation doit être fondée sur une preuve qui peut être attaquée et soupesée. En l’absence d’une telle preuve, l’allégation ne se verra accorder aucun poids. En outre, les gains en efficience allégués qui n’ont pas été quantifiés alors qu’ils auraient pu l’être ne seront pas considérés sous l’angle qualitatif (Tervita CSC, au par. 124; Supérieur Propane IV, au par. 35). Les gains en efficience qualitatifs allégués, le cas échéant, doivent également être étayés par une preuve qui peut être attaquée et soupesée.

(b) Les « effets » admissibles se limitent à ceux découlant de l’exercice d’une puissance commerciale

[518] Pour les besoins du paragraphe 96(1), les « effets » ne sont admissibles que s’ils découlent de l’exercice d’une puissance commerciale. Cette affirmation est conforme aux principes dont il est question aux paragraphes 161 à 166 des présents motifs (Tervita CSC, au par. 44; Le commissaire de la concurrence c Supérieur Propane Inc, 2001 CAF 104 (« Supérieur Propane II »), au par. 160, demande d’autorisation d’appel à la CSC refusée, 28593 (13 septembre 2001); Tervita TC, aux par. 232, 370; Supérieur Propane I, aux par. 412, 466).

[519] Les parties ne contestent pas ce principe fondamental. Par contre, elles ne s’entendent pas sur ce qu’il signifie relativement à l’étendue des « effets » admissibles en l’espèce.

[520] Secure fait valoir que la portion des effets hors prix qui est liée à des régions géographiques au sein desquelles Secure et Tervita ne se livraient pas concurrence avant le fusionnement (les « régions de non-concurrence ») n’est pas admissibles [68]. En d’autres termes, Secure affirme que la portion des effets hors prix qui est liée à des régions au-delà des 271 dans lesquelles il y avait un chevauchement géographique entre Secure et Tervita n’est pas attribuable à l’exercice d’une puissance commerciale et ne fait donc pas partie des « effets de l’empêchement ou de la diminution de la concurrence » au sens du paragraphe 96(1).

[521] Le commissaire n’est pas du même avis. Selon lui, ces effets hors prix sont admissibles même si la perte sèche ne s’observe pas dans une ou plusieurs des 271 régions géographiques dans lesquelles les parties au fusionnement étaient en concurrence directe auparavant. Il présente deux arguments à l’appui de cette thèse.

[522] Premièrement, il souligne que les fermetures d’installations qui ont eu lieu ou auront vraisemblablement lieu dans les régions de non-concurrence sont le résultat direct du fusionnement comme l’entend l’article 96. Le Tribunal est d’avis que cet argument ne suffit pas pour que les effets hors prix dans les régions de non-concurrence, tels qu’ils sont allégués, soient visés par l’article 96. Les effets anticoncurrentiels pertinents aux fins de cette disposition sont « les effets de l’empêchement ou de la diminution de la concurrence qui résulteront ou résulteront vraisemblablement du fusionnement réalisé ou proposé ». Le libellé est sans équivoque : les seuls effets d’un fusionnement réalisé ou proposé qui sont admissibles sont ceux qui sont liés à l’empêchement ou à la diminution de la concurrence résultant de ce fusionnement. Les autres effets du fusionnement en question ne sont pas admissibles. Le Tribunal admet qu’il a pu laisser entrevoir autre chose au paragraphe 230 de la décision Supérieur Propane III. Cela dit, dans cette décision, sa remarque tenait en une seule phrase et ne faisait pas de lien avec le passage du paragraphe 96(1) immédiatement précité.

[523] Deuxièmement, le commissaire soutient que les fermetures d’installations dans les régions de non-concurrence tiennent à l’exercice d’une puissance commerciale par Secure, comme il est exigé (transcription publique, à la p. 3169). À cet égard, le commissaire fait valoir que les installations appelées à fermer étaient bel et bien en concurrence étroite avec des installations exploitées par l’autre partie, qu’elles étaient rentables et qu’il serait économiquement illogique qu’elles ferment en l’absence de concurrence étroite entre les parties au fusionnement (transcription publique, aux p. 2889 à 2893). Il ajoute que l’ampleur des effets hors prix qu’il met de l’avant est directement liée au degré de concurrence entre chacune des installations visées par une fermeture et l’installation concurrente la plus proche.

[524] Selon le Tribunal, les effets hors prix allégués ne présentent pas de lien avec l’exercice d’une puissance commerciale dans les régions de non-concurrence, contrairement à l’exigence à remplir. Il est entendu que ces effets seraient observés au‐delà des 271 régions de chevauchement géographique entre Secure et Tervita. Le Tribunal reconnaît que les installations visées par une fermeture réalisaient toutes certaines ventes dans une ou plusieurs de ces 271 régions. Cela dit, bon nombre de ces installations vendaient aussi des services de gestion des déchets à des producteurs établis dans des régions où les parties au fusionnement ne se livraient pas concurrence avant le fusionnement. Il demeure entendu que le commissaire n’a pas établi, preuve claire et convaincante à l’appui, que les parties au fusionnement se sont déjà livré concurrence ou se seraient vraisemblablement livré concurrence à l’avenir dans une de ces régions autres que les 271 régions de chevauchement concurrentiel. Par conséquent, le fusionnement ne peut empêcher ou diminuer la concurrence dans ces régions au sens de la Loi. Autrement dit, les « effets » visés à l’article 96 se limitent à ceux qui se sont produits, qui se produisent ou qui se produiront vraisemblablement dans un marché dans lequel les parties au fusionnement se livraient concurrence entre elles ou étaient susceptibles de le faire avant le fusionnement (Tervita CSC, au par. 90; Tervita TC, aux par. 375, 378). En l’espèce, les parties s’entendent pour dire que ces marchés sont les 271 régions de chevauchement géographique désignées par le commissaire. En l’absence d’éléments de preuve concernant la concurrence réelle ou future probable entre Secure et Tervita en dehors de ces 271 régions, les « effets » qui pourraient se produire au-delà de ces 271 régions ne sont pas des « effets de l’empêchement ou de la diminution de la concurrence qui résulteront ou résulteront vraisemblablement » du fusionnement au sens du paragraphe 96(1).

[525] Secure fait aussi valoir que les effets hors prix ne sont pas admissibles, même lorsqu’ils touchent ces 271 régions de chevauchement, parce qu’ils ne sont pas subordonnés à l’exercice d’une puissance commerciale. Secure invoque deux arguments principaux à cet égard.

[526] Premièrement, elle souligne que M. Miller a admis en contre-interrogatoire que ces effets resteraient inchangés même si l’entité fusionnée n’exerçait aucune puissance commerciale et même en l’absence d’augmentation de la part de marché ou de la concentration du marché à la suite du fusionnement (transcription publique, aux p. 833 et 834). Secure ajoute que M. Miller a également convenu que son estimation des effets hors prix reposait sur des états financiers antérieurs au fusionnement qui importent peu pour les clients de Secure (transcription publique, aux p. 817 et 818).

[527] Deuxièmement, Secure affirme de manière plus générale que les effets liés à la fermeture d’installations ne peuvent être considérés comme des effets anticoncurrentiels au sens de la Loi. À ce sujet, elle s’appuie sur le passage suivant de la décision Supérieur Propane I :

Le Tribunal signale qu’un fusionnement anticoncurrentiel peut avoir d’autres effets économiques et sociaux importants. Par exemple, la presse fait souvent état des congédiements et des fermetures d’usines, sans doute à cause des effets immédiats et appréciables qu’ils peuvent avoir sur les personnes et les collectivités touchées.

Bien que nous ne voulions pas minimiser l’importance des effets pour les personnes touchées, le Tribunal tient à souligner que ces effets ne résultent pas uniquement de fusionnements anticoncurrentiels. Les congédiements et les fermetures d’usines résultent souvent de fusionnements et de restructurations non contestables contre lesquels le commissaire ne prendra aucune mesure en vertu de la Loi sur la concurrence. En conséquence, le Tribunal est d’avis que ces effets ne peuvent être pris en considération s’ils découlent d’un fusionnement anticoncurrentiel.

Par conséquent, le Tribunal rejette la prétention du commissaire selon laquelle l’article 96 n’est pas limitatif quant à l’éventail des « effets » à considérer.

Supérieur Propane I, aux par. 443 à 445 [non souligné dans l’original].

[528] Dans le passage précité, le Tribunal a pris soin de restreindre ses observations aux effets de « fusionnements et de restructurations non contestables » [non souligné dans l’original].

[529] De manière plus générale, les arguments que Secure a mis de l’avant reviennent essentiellement à dire que si les effets anticoncurrentiels allégués sont les mêmes dans un scénario où le lien requis avec une puissance commerciale a été établi et dans un scénario où ce lien n’a pas été établi, alors ces effets ne sont pas admissibles.

[530] Le Tribunal rejette cette proposition. Dans la présente affaire, le lien à établir avec les effets hors prix allégués qui se réaliseront vraisemblablement dans les 271 régions de chevauchement géographique a de fait été établi par la preuve selon laquelle Secure et Tervita se livraient concurrence entre elles dans ces régions. Secure n’a pas contesté cette preuve.

(c) Les effets anticoncurrentiels dans les marchés qui se chevauchent et dans lesquels la diminution de la concurrence n’est pas sensible

[531] Secure soutient que les effets anticoncurrentiels admissibles au titre du paragraphe 96(1) se limitent à ceux qui se produiraient vraisemblablement dans les marchés où se produirait une diminution sensible de la concurrence, selon ce qu’a conclu le Tribunal, nommément les 136 marchés touchés par une DSC. À l’appui de cette thèse, Secure affirme qu’inclure des effets anticoncurrentiels se produisant dans des marchés autres que ceux dans lesquels Secure et Tervita se livraient concurrence entre elles avant le fusionnement reviendrait à comparer des pommes avec des oranges, parce que les gains en efficience pris en considération dans l’analyse comparative prévue à l’article 96 se limitent à ceux se produisant dans les marchés où la concurrence sera vraisemblablement empêchée ou diminuée sensiblement[69].

[532] Le Tribunal n’est pas du même avis. Étant donné que le paragraphe 96(1) prévoit qu’il y a lieu de soupeser « les effets de l’empêchement ou de la diminution de la concurrence qui résulteront ou résulteront vraisemblablement du fusionnement » [non souligné dans l’original], tout effet tel est admissible. Autrement dit, l’analyse ne se limite pas aux marchés dans lesquels l’empêchement ou la diminution de la concurrence est ou sera vraisemblablement sensible (voir, entre autres, Supérieur Propane III, au par. 230).

[533] Si le législateur avait souhaité éviter l’asymétrie que mentionne Secure, il aurait aisément pu inclure l’adverbe « sensiblement » au paragraphe 96(1). Comme il a été mentionné précédemment, en l’absence de cet adverbe que l’on trouve par ailleurs un peu partout dans les dispositions de la Loi qui concernent les fusionnements[70], on peut conclure que le législateur n’avait pas l’intention de limiter l’analyse comparative prévue au paragraphe 96(1) aux effets se produisant dans les marchés pour lesquels il a été conclu à un empêchement ou à une diminution sensible de la concurrence (voir, de manière générale, P&H, au par. 646; Supérieur Propane II, au par. 83).

[534] Par conséquent, les gains en efficience admissibles établis par Secure doivent surpasser et neutraliser tout effet de l’empêchement ou de la diminution de la concurrence qui résulterait du fusionnement dans les 271 régions de chevauchement géographique désignées par M. Miller. Il ne suffit pas que les effets admissibles surpassent simplement, et neutralisent, les effets qui découleront vraisemblablement de l’empêchement ou de la diminution « sensible » de la concurrence dans les 136 marchés touchés par une DSC. En bref, alors que les gains en efficience admissibles se limitent aux gains en efficience qui ne seront vraisemblablement pas réalisés si le Tribunal rend une ordonnance particulière, la portée des effets anticoncurrentiels admissibles aux fins de l’évaluation est entièrement indépendante de l’ordonnance à rendre par le Tribunal. Qui plus est, alors que les gains en efficience admissibles se limitent aux gains en efficience qui seront vraisemblablement perdus quand l’ordonnance sera rendue (c.-à-d. que les gains en efficience dépendent de l’ordonnance et existent au moment où celle-ci est rendue), les effets anticoncurrentiels sont ceux qui découlent du fusionnement au sujet duquel la demande est faite et qui se produisent dès que le fusionnement est achevé.

(d) Les effets anticoncurrentiels qui ne sont pas directement liés à une réduction de la production

[535] Secure fait valoir que les effets anticoncurrentiels admissibles se limitent aux effets anticoncurrentiels liés à l’exercice d’une puissance commerciale ayant pour effet de réduire la production. À l’appui de cette thèse, elle souligne que la CSC a souscrit à l’affirmation selon laquelle la perte sèche « résulte de la chute de la demande des produits des entités fusionnées par suite d’une hausse de prix intervenue après le fusionnement et de l’affectation inefficiente des ressources qui se produit lorsque, par suite de la hausse des prix, les consommateurs achètent un produit de substitution convenant moins bien » (Tervita CSC, au par. 94, citant Supérieur Propane IV, au par. 13). Après avoir cité ce passage, dans le même paragraphe, la CSC a fait observer que « [l]’estimation de l’élasticité de la demande — ou la mesure dans laquelle la demande d’un produit varie selon son prix — est nécessaire aux fins du calcul de la perte sèche » (Tervita CSC, au par. 94, citant Tervita TC, au par. 244).

[536] Le Tribunal ne souscrit pas à l’interprétation que fait Secure de ces passages de l’arrêt Tervita CSC. Pour résumer, au moment où l’affaire Tervita a été tranchée, les analyses que l’on pouvait trouver dans la jurisprudence au sujet de la perte sèche se limitaient généralement à la perte sèche associée à l’exercice d’une puissance commerciale sous la forme d’une réduction de la production. En fait partie le passage du paragraphe 244 de la décision Tervita TC mentionné au paragraphe 94 de la décision de la majorité dans Tervita CSC, lui-même cité au paragraphe précédent des présents motifs. Néanmoins, il a généralement été reconnu que la Loi s’intéresse aux effets anticoncurrentiels sur les prix et autres, et que le terme « prix » est généralement le terme regroupant tous les aspects des activités d’une entreprise qui ont une incidence sur ses clients (Tervita CSC, au par. 44). Le Tribunal reconnaît que, jusqu’ici, les effets anticoncurrentiels pris en compte aux fins de l’application de l’article 96 correspondaient généralement à la perte sèche associée à une hausse vraisemblable des prix et à la réduction connexe de la production. Cela dit, les effets anticoncurrentiels ne se limitent pas à cela. En vertu de l’article 92 et également en vertu de l’article 96 de la Loi, les effets anticoncurrentiels englobent [traduction] « tout effet pertinent sur les prix ou autre qui résulteront vraisemblablement du fusionnement [...] » (P&H, au par. 647), sous réserve des observations formulées aux paragraphes 520 à 524 des présents motifs. Il s’agit notamment des effets hors prix, comme une réduction des services, de la qualité, de l’éventail de produits et de l’innovation, entre autres dimensions de la concurrence auxquelles les consommateurs accordent de l’importance. De fait, dans la décision Supérieur Propane I, le Tribunal a reconnu qu’une réduction de l’éventail de produits pouvait faire partie des effets anticoncurrentiels qui, bien que non pris en compte dans la valeur de la perte sèche, pouvaient être visés à l’article 96 (Supérieur Propane I, aux par. 460, 464). Dans cette affaire, le Tribunal avait attribué une valeur de trois millions de dollars aux effets qualitatifs découlant d’une réduction de l’éventail de produits et de « la modification de sa gamme de produits par l’entité fusionnée » (Supérieur Propane III, au par. 229). Ces effets n’avaient pas été quantifiés par le commissaire, mais ils ont été inclus dans la perte sèche totale de six millions de dollars calculée par le Tribunal.

[537] Dans la mesure où ils sont mesurables et où ils réduiront vraisemblablement le surplus total, les effets hors prix de l’empêchement ou de la diminution de la concurrence sont admissibles au titre du paragraphe 96(1) (voir notamment Supérieur Propane III, aux par. 229, 240 et 241; Supérieur Propane III, aux par. 466 et 467)[71]. À cet égard, le Tribunal accepte le témoignage de M. Miller selon lequel il est bien établi en économie que le surplus total peut être réduit par une diminution des possibilités s’offrant au consommateur (transcription confidentielle B, aux p. 780 et 781; rapport en réplique de M. Miller, au par. 93; voir aussi la transcription publique, aux p. 759, 920; transcription confidentielle B, à la p. 786). Mme Duplantis a confirmé en contre-interrogatoire qu’une diminution de l’éventail de produits à la suite de la fermeture d’une installation peut entraîner une perte sèche, et ce, même en l’absence d’une réduction de la production. À ce propos, elle était d’accord pour dire que s’il existe seulement deux épiceries d’un bout à l’autre d’une ville, la fermeture de l’une d’elles en raison d’une fusion peut théoriquement entraîner une diminution du surplus du consommateur, et ce, même si le volume d’articles achetés en épicerie reste inchangé. Elle a néanmoins précisé que, dans la présente affaire, les effets anticoncurrentiels prétendument associés aux fermetures d’installations n’étaient pas [traduction] « représentatifs de la perte sèche » (transcription publique, aux p. 1850 et 1851).

[538] Au vu de ce qui précède, le Tribunal n’adhère pas à la thèse de Secure selon laquelle la théorie proposée par le commissaire au sujet des effets hors prix est nouvelle et qu’elle devrait de toute façon être rejetée. Le fait qu’elle n’a pas été analysée dans la jurisprudence n’en fait pas une théorie inédite.

[539] Antérieurement à l’arrêt Tervita CSC, il semble que le commissaire considérait qu’il n’y avait pas lieu de quantifier ces effets ou d’autres types d’effets anticoncurrentiels et que ceux-ci pouvaient se voir accorder une valeur qualitative dans l’évaluation globale prévue à l’article 96. Or, dans l’arrêt Tervita CSC, les juges formant la majorité ont sur ce point expressément rejeté la thèse du commissaire dans les cas où les effets anticoncurrentiels allégués peuvent être quantifiés. La décision de la majorité a précisé que le commissaire est tenu en droit de quantifier tous les effets anticoncurrentiels allégués qui peuvent l’être, si ce n’est qu’au moyen d’estimations, pourvu que ces estimations soient fondées sur une preuve (Tervita CSC, aux par. 124 et 125; P&H, aux par. 651 à 652). S'il ne s'acquitte pas de ce fardeau, de tels effets anticoncurrentiels se verront accorder un poids nul (Tervita CSC, aux par. 128, 137, 139, 159, 165). La tentative du commissaire de faire une estimation de la réduction de la perte sèche à la suite de la fermeture d’installations est simplement une réponse aux enseignements de la CSC.

[540] Le Tribunal s’interrompt pour souligner qu’il n’est peut‐être pas toujours possible de mesurer des effets anticoncurrentiels hors prix sous la forme d’une variation de la perte sèche. Si un effet anticoncurrentiel hors prix ne peut raisonnablement être mesuré, alors il peut faire l’objet d’une analyse qualitative. Il importe toutefois d’insister sur le fait qu’un tel exercice n’est acceptable que si les effets ne sont pas quantifiables : « [l]es effets anticoncurrentiels qualitatifs, dont la diminution du service ou de la qualité, ne sont appréciés que sur un fondement subjectif, car une telle analyse fait appel à l’examen de considérations qui ne peuvent être quantifiées parce qu’elles n’ont aucune commune unité de mesure (à savoir elles sont “incommensurables”) » (Tervita CSC, au par. 125). Toutefois, des effets raisonnablement quantifiables que le commissaire a omis de quantifier, ne serait-ce qu’au moyen d’une estimation, ne peuvent renaître sous la forme d’effets qualitatifs (Tervita CSC, au par. 100).

(4) L’analyse comparative prévue à l’article 96

[541] Le paragraphe 96(1) de la Loi appelle un examen de la question de savoir si le fusionnement en question a eu pour effet ou aura vraisemblablement pour effet d’entraîner des gains en efficience admissibles qui surpasseront et neutraliseront les effets anticoncurrentiels admissibles qui résulteront vraisemblablement du fusionnement. À cet égard, le verbe « surpasseront » évoque une comparaison numérique des gains en efficience et des effets anticoncurrentiels, alors que le verbe « neutraliseront » implique une analyse subjective des considérations incommensurables, c’est-à-dire celles qui ne peuvent être comparées sur le plan quantitatif (Tervita CSC, au par. 144).

[542] Ainsi, l’analyse prévue au paragraphe 96(1) est un exercice en deux étapes. Dans un premier temps, il faut comparer les gains en efficience quantitatifs du fusionnement à ses effets anticoncurrentiels quantitatifs. Dans un deuxième temps, il faut mettre en balance les gains en efficience qualitatifs et les effets anticoncurrentiels qualitatifs (Tervita CSC, au par. 147; P&H, au par. 661). Comme il a été mentionné précédemment, le commissaire s’est expressément abstenu d’évaluer les effets anticoncurrentiels qualitatifs, parce que son expert a fourni une estimation chiffrée des effets hors prix qui sont en cause en l’espèce.

[543] Cette évaluation comparative, ou mise en balance, est un exercice souple qui nécessite que le Tribunal soit au fait de l’incertitude qui peut être inhérente aux modèles économiques retenus par les parties (Tervita CSC, aux par. 146, 154). Or il convient de souligner que l’ampleur des gains en efficience et des effets anticoncurrentiels allégués doit être étayée par des éléments de preuve et être objectivement raisonnable (Tervita CSC, aux par. 125, 146; P&H, aux par. 660, 662).

B. L’appréciation faite par le Tribunal

(1) Gains en efficience allégués par Secure

(a) Résumé de la thèse de Secure

[544] Secure soutient que le fusionnement remplit les exigences de la défense fondée sur les gains en efficience que prévoit l’article 96 de la Loi. À cet égard, elle affirme avoir démontré que le fusionnement entraînera vraisemblablement des gains en efficience autrement non réalisés qui surpasseront et neutraliseront les effets de la DSC qui découlera vraisemblablement du fusionnement.

[545] En particulier, Secure affirme que le fusionnement entraînera des gains en efficience annualisés de 52,8 millions de dollars, ou des gains en efficience actualisés de 328,4 millions de dollars sur une période de 10 ans[72], après déduction d’une somme d’environ 4 millions de dollars correspondant à l’inefficience associée à la hausse des frais de transport assumés par les clients à la suite de la fermeture d’installations[73]. Elle prétend que cette somme annualisée et cette somme actualisée sur 10 ans sont entièrement admissibles selon une lecture simple de l’article 96.

[546] Prenant acte du fait que la jurisprudence a jusqu’ici adopté une interprétation de l’article 96 axée sur l’ordonnance, Secure a présenté d’autres estimations, reposant cette fois sur cette interprétation. À ce propos, Secure soutient que les gains en efficience autrement non réalisés s’établiraient à 20,2 millions de dollars par année, ou une somme actualisée de 138,5 millions de dollars sur 10 ans. Ces gains en efficience sont ceux qui ne se réaliseraient vraisemblablement pas si le Tribunal rendait une ordonnance exigeant les 41 dessaisissements demandés par le commissaire.

[547] Pour les raisons exposées précédemment aux paragraphes 499 à 507, les gains en efficience allégués qui sont utiles pour l’appréciation que doit faire le Tribunal sont ceux que M. Harington a calculés en adoptant l’interprétation axée sur l’ordonnance, soit 20,2 millions de dollars par année, ou à une somme actualisée de 138,5 millions de dollars sur 10 ans. Il sera question de ces chiffres ci-après. Pour faciliter l’analyse, le Tribunal se concentrera sur l’estimation de la VAN sur 10 ans, sauf indication contraire.

(b) Rajustements apportés pour tenir compte de la liste de dessaisissements du Tribunal

[548] L’estimation de 138,5 millions de dollars de M. Harington est la forme arrondie de 138 456 865 $. Elle est inscrite à la ligne 195 de l’appendice 4.1 du rapport révisé de M. Harington. Cette estimation repose sur (i) la liste des 41 dessaisissements dont il est question aux paragraphes 39 à 40 et 369 à 370 et dans le tableau 15 des présents motifs et sur (ii) la liste des intégrations d’installations fournie dans les tableaux 4 et 5 du rapport révisé de M. Harington. Étant donné que le Tribunal a conclu, au paragraphe 481 des présents motifs, que seuls 29 dessaisissements ont lieu d’être, l’estimation de 138 456 865 $ fournie par M. Harington doit être rajustée. Le tableau suivant donne un résumé des rajustements à apporter.

Tableau 16 – Rajustements à apporter aux gains en efficience allégués par Secure, à la lumière de la liste révisée des dessaisissements du Tribunal

 

Rajustements à apporter

VAN

(2023‐2033)

Observations[74]

 

138 456 865 $

Point de départ.

-2 165 457 $

136 291 408 $

Retrait de toutes les économies alléguées liées à XXXXXXXXXXXX, qui ne figure plus sur la liste des dessaisissements du Tribunal. L’ordonnance du Tribunal n’aurait pas d’incidence sur le projet qu’a Secure de rediriger les déchets auparavant traités à cette installation vers XXXXXXXXXXXXXXXXXX.

+2 744 911 $

139 036 320 $

Inclusion des économies liées à XXXXXXX XXXXXX, qui n’ont pas été incluses à l’appendice 4.1 du rapport de M. Harington, mais qui ont été incluses à l’onglet 3.1 de son tableur à l’appui. Les chiffres dudit tableur ont été rajustés pour tenir compte de la méthode axée sur la date de l’ordonnance, comme il est expliqué ci-après. Par souci de clarté, le Tribunal a ajouté cette installation à sa liste des dessaisissements, car celle-ci fait véritablement partie de l’installation XXXXXXXXXXX. Le Tribunal ne voit pas très bien pourquoi elle n’a pas été incluse dans l’analyse de M. Harington.

-2 354 682 $

136 681 637 $

Retrait de toutes les économies alléguées liées à XXXXXXXXXXXXXXX, qui ne figure plus sur la liste des dessaisissements du Tribunal. L’ordonnance du Tribunal n’aurait pas d’incidence sur le projet qu’a Secure de rediriger les déchets auparavant traités à cette installation vers ses autres installations situées non loin.

-1 380 615 $

135 301 023 $

Retrait de toutes les économies liées à XXXXXXXXXXXXXXXX, qui ne figure plus sur la liste des dessaisissements du Tribunal. L’ordonnance du Tribunal n’aurait pas d’incidence sur le projet qu’a Secure de rediriger les déchets auparavant traités à cette installation vers ses autres installations situées non loin.

-1 883 304 $

133 417 719 $

Retrait de tous les gains en efficience allégués liés à XXXXXXXXXXXXX. N’eut été la transaction, un nouveau puits aurait été nécessaire à XXX. Secure a affirmé que ce coût serait évité si l’installation était fermée et si les déchets traités à cet endroit étaient absorbés par une combinaison de XXXXXXXXXXXXXXX, de XXXXXXXXXXXX, de XXXXXXXXXXX et de XXXXXXXXXXXXXXXXX, entre autres. Secure a ajouté que ces économies seraient perdues dans l’éventualité d’un dessaisissement de ces installations. Puisque XXXXXXX et XXXXXXXXXXX ne feront pas l’objet d’un dessaisissement, le Tribunal est d’avis que XXXXXXXXXX demeurera probablement fermée.

-2 962 539 $

130 455 180 $

Retrait de toutes les économies alléguées liées à XXXXXXXXXXXXXXXX, qui ne figure plus sur la liste des dessaisissements du Tribunal. L’ordonnance du Tribunal n’aurait pas d’incidence sur le projet qu’a Secure de rediriger les déchets auparavant traités à cette installation vers ses autres installations situées non loin, par exemple XXXXXXXXX et XXXXXXXXXX.

767 688 $

131 222 867 $

XXXXXXXXXXXXXXXX ne figure plus sur la liste des dessaisissements du Tribunal. L’ordonnance du Tribunal n’aurait pas d’incidence sur le projet qu’a Secure de fermer l’installation XXXXX située non loin et de rediriger les déchets vers XXXXXXXXXXXX. Par conséquent, les [traduction] « gains en efficience négatifs » qu’a inclus M. Harington pour tenir compte de l’intégration de cette installation XXXXX n’ont plus à être déduits des gains en efficience totaux allégués par Secure.

-4 287 311 $

126 935 556 $

XXXXXXXXXXXXXXX ne figure plus sur la liste des dessaisissements du Tribunal. L’ordonnance du Tribunal n’aurait pas d’incidence sur le projet qu’a Secure de fermer XXXXX située non loin, de rediriger les déchets vers XXXXXXXXXXXXXXX et de construire un pipeline pour acheminer le lixiviat depuis XXXXXXXXXXXXX. Ces gains en efficience que Secure considère comme des économies de coûts d’exploitation d’ordre géographique s’ajoutent aux valeurs liées à l’intégration XXXX rajustées ci-dessus.

-1 204 990 $

125 730 566 $

Retrait de toutes les économies alléguées liées à XXXXXXXXXXX, qui ne figure plus sur la liste des dessaisissements du Tribunal L’ordonnance du Tribunal n’aurait pas d’incidence sur le projet qu’a Secure de rediriger les déchets traités à cette installation vers ses autres installations situées non loin.

12 345 994 $

138 076 560 $

Retrait des autres [traduction] « gains en efficience négatifs » que M. Harington a déduits des gains en efficience allégués par Secure, étant donné que certains clients auraient à composer avec des frais de transport accrus à la suite de regroupements d’installations. Dans les rajustements dont il est question dans les rangées ci-dessus, comme le retrait de toutes les entrées liées à XXXXXXXX, les coûts de main-d’œuvre et les autres coûts, de même que les économies liées à la hausse des frais de transport, ont été inclus. S’agissant de toutes les autres installations visées à l’appendice 4.1 du rapport de M. Harington et non mentionnées dans les rangées ci-dessus, le rajustement consiste à retirer le total des entrées négatives liées aux frais de transport. Ces effets négatifs sur les frais de transport sont inclus implicitement dans la perte sèche associée aux fermetures d’installations, laquelle n’a pas été examinée par M. Harington.

4 113 800 $

142 190 360 $

Ce rajustement est apporté pour tenir compte des gains en efficience perdus en raison de XXXXX XXX, dans l’éventualité où XXXXXXXX, comme l’a fait valoir M. Harington. Ces gains en efficience perdus n’ont pas été inclus à l’appendice 4.1 du rapport de M. Harington, mais ils l’ont été à l’appendice 7. L’inclusion de XXXXXXXX dans la liste des dessaisissements du Tribunal implique qu’il y aura XXXXXX XXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXxX, entre autres. Le Tribunal a rajusté ces entrées pour tenir compte de la date approximative à laquelle son ordonnance entrerait en vigueur (la « méthode axée sur la date de l’ordonnance ») et pour retirer la hausse des frais de transport.

-1 551 687 $

140 638 674 $

Ce rajustement concerne le retrait de XXXXXXXXXX des allégations de Secure, car cette dernière a rouvert cette installation après avoir revu son plan d’intégration[75].

140 638 674 $

 

Il s’agit de la valeur rajustée des gains en efficience admissibles. Elle représente la VAN des gains en efficience allégués par Secure pour la période 2023-2033. Le montant annualisé équivalent se chiffre à 20 168 105 $ par année.

[549] Le Tribunal s’arrête un moment pour souligner que Secure n’a pas invoqué de gains en efficience liés à l’intégration de sept autres installations que le Tribunal a retirées de la liste des dessaisissements proposés par le commissaire.[76]

[550] En bref, une fois apportés les rajustements susmentionnés, le Tribunal obtient le chiffre de 140 638 674 $ comme point de départ pour son analyse des gains en efficience allégués par Secure. Ces rajustements ont été apportés pour tenir compte des éléments suivants : (i) six installations pour lesquelles Secure a invoqué des gains en efficience, mais qui ont été retirées de la liste des dessaisissements proposés par le commissaire, (ii) retrait des économies liées à l’accès à un pipeline dans le cas de XXXXXXXXXXX, (iii) ajout des coûts liés à XXXXXXX et à XXXXXXXXX, (iv) conclusion du Tribunal selon laquelle il est peu probable que les dessaisissements aient une incidence sur le projet de Secure de fermer XXXXXXXXX, et (v) retrait de certains [traduction] « gains en efficience négatifs » à la lumière de la liste (allongée) des dessaisissements proposés par le commissaire. Ces rajustements ont été apportés à la suite du dépôt de l’appendice 4.1 du rapport révisé de M. Harington, en supposant le 30 juin 2023 comme date de l’ordonnance (par. 14), suivant la méthode axée sur la date de l’ordonnance.

[551] Cette somme rajustée et actualisée sur 10 ans de 140 638 674 $ est répartie comme suit dans les quatre grandes catégories de gains en efficience désignées par M. Harington (rapport révisé de M. Harington, au tableau 6):


 

Tableau 17 – Gains en efficience allégués par Secure (VAN), rajustés, par catégorie[77]

Valeurs initiales

en fonction de l’appendice 4.1

(rapport révisé de M. Harington)

Valeurs rajustées

ÉCONOMIES ATTRIBUABLES À LA RATIONALISATION DES ITRE/PDEA[78]

 

Économies associées aux coûts de main-d’œuvre

XXXXXXX

XXXXXXX

Économies associées aux coûts hors main-d’œuvre

XXXXXXX

XXXXXXX

Hausse des frais de transport assumés par les clients[79]

XXXXXXXX

 

TOTAL LIÉ À L’INTÉGRATION DES ITRE/PDEA

55 359 949 $

60 449 729

Équivalent annualisé

 

8 668 714 $

 

ÉCONOMIES DE COÛTS LIÉES À LA RATIONALISATION DES INSTALLATIONS D’ENFOUISSEMENT[80]

 

Économies associées aux coûts de main-d’œuvre

XXXXXX

XXXXXX

Coûts de licenciement (4,7 mois selon l’appendice 6.2)

XXXXX

XXXXX

Économies associées aux coûts hors main-d’œuvre

XXXXXX

XXXXXX

Hausse des frais de transport assumés par les clients

XXXXXXX

 

TOTAL LIÉ À L’INTÉGRATION DES INSTALLATIONS D’ENFOUISSEMENT

11 686 564 $

14 270 895 $

Équivalent annualisé

 

2 046 499 $

 

TOTAL DES ÉCONOMIES DE COÛTS D’EXPLOITATION D’ORDRE GÉOGRAPHIQUE[81]

11 778 284 $

6 285 983 $

Équivalent annualisé

 

901 433 $

 

TOTAL DES ÉCONOMIES DE COÛTS D’EXPLOITATION

59 632 068 $

59 632 068 $

Équivalent annualisé

 

8 551 459 $

 

Total

138 456 865 $

140 638 674 $

Équivalent annualisé

19 855 226 $

20 168 105 $

[552] Les chiffres ci-dessus ont été calculés suivant la méthode axée sur la date de l’ordonnance. La date de l’ordonnance est, de l’avis du commissaire et de Secure, le point de départ qui convient pour calculer les gains en efficience aux fins de l’application de l’article 96 de la Loi[82]. Le Tribunal est d’accord pour dire que la date de l’ordonnance est un point de départ préférable à la date de conclusion du fusionnement, étant donné que la disposition finale de l’article 96 circonscrit les gains en efficience admissibles à ceux qui ne seraient vraisemblablement pas réalisés si l’ordonnance était rendue. Par conséquent, les gains en efficience qui ont déjà été réalisés, notamment à la suite d’une rationalisation d’usines achevée, ne peuvent être pris en compte, car il est peu vraisemblable qu’une éventuelle ordonnance du Tribunal y changerait quoi que ce soit. Par souci d’équité et de cohérence, les coûts associés à l’atteinte de ces gains en efficience déjà réalisés sont également exclus de l’analyse.

(c) Gains en efficience allégués relativement à la rationalisation d’installations

[553] Comme le montre le tableau 17 ci-dessus, parmi les gains en efficience totaux allégués par Secure, une somme de 60 449 729 $ est liée à la rationalisation d’ITRE et de PDEA. De plus, des gains de 14 270 895 $ sont liés à l’intégration d’installations d’enfouissement. Pour les motifs qui suivent, le Tribunal conclut que ces gains sont admissibles, mais que leur démonstration n’a pas été faite selon la prépondérance des probabilités. Par conséquent, le total des gains en efficience de 140 638 674 allégués par Secure doit être réduit de ces deux montants, ce qui laisse des gains en efficience allégués totalisant de 65 918 050 $ aux fins de l’analyse menée aux paragraphes B(1)d) et e) de la partie XV, ci-après[83]. L’équivalent annualisé de ces gains en efficience restants est de 9 452 892 $.

(i) L’assertion du commissaire selon laquelle ces gains en efficience allégués ne sont pas admissibles

[554] Le commissaire fait valoir que les économies de coûts que Secure associe à la rationalisation d’installations d’enfouissement, d’ITRE et de PDEA ne sont pas admissibles étant donné qu’elles découleront d’un appauvrissement de l’éventail de produits. À cet égard, M. Eastman a expliqué que si, selon ce qu’il comprenait, M. Miller affirmait que les installations visées par une fermeture constituent des produits différenciés, alors les économies découlant de l’élimination d’un de ces produits ne sont pas des gains en efficience productifs. Pour étayer cette thèse, M. Eastman s’est appuyé sur le principe général voulant que les économies découlant d’une réduction du choix dans les produits ne sont pas admissibles (Lignes directrices, au par. 12.20). M. Eastman a ajouté qu’il n’avait pas examiné si les installations visées par une fermeture devraient être considérées comme des produits différenciés et qu’il ne se prononçait pas sur cette question.

[555] En définitive, le commissaire a précisé qu’en fait, il n’affirmait pas que les installations visées par une fermeture devraient être considérées comme des produits différenciés en soi. Le commissaire a plutôt posé pour thèse que ces installations offrent chacune un service différencié, en ce sens que l’ensemble de services achetés par les clients n’est pas le même d’une installation à l’autre (transcription confidentielle B, à la p. 3168). Néanmoins, le commissaire a fait valoir que les gains en efficience allégués par Secure relativement à la rationalisation et au regroupement d’installations ne sont pas admissibles, au motif qu’ils découlent d’une réduction du choix dans les produits.

[556] Le Tribunal n’est pas de cet avis. Il y a une distinction à faire entre l’ensemble de services offerts à une installation et l’installation elle-même. Pour autant que l’ensemble de services offerts aux installations absorbantes demeure essentiellement le même que celui qui était offert aux installations visées par une fermeture, toute économie de ressource réelle pour l’économie canadienne qui découlera vraisemblablement de la rationalisation de ces installations est admissible aux fins de l’application de l’article 96. Cette affirmation vaut même si les clients accordent une valeur — laquelle sera perdue — à l’emplacement géographique des installations qui seront fermées (voir entre autres Supérieur Propane I, aux par. 21, 321 à 323, 380 à 383).

[557] Sous réserve des conclusions qu’il exposera ci-après au sujet des effets sur les prix et sur la production, le Tribunal retient le témoignage de M. Harington lorsque celui-ci affirme être convaincu, après examen de l’ensemble des services fournis par Secure et Tervita avant le fusionnement, qu’il n’y aurait pas de réduction de la production, des services, de la qualité ou du choix dans les produits, au sens où on l’entend ordinairement (transcription confidentielle B, à la p. 2478). Par conséquent, dans la mesure où les gains en efficience associés à la rationalisation des installations visées par une fermeture ont été démontrés selon la prépondérance des probabilités, ils sont admissibles en tant qu’économies de ressources productives bien réelles, car des ensembles de services similaires pourront être offerts aux clients, et ce, à coût moindre qu’avant le fusionnement.

[558] Nonobstant ce qui précède, comme il en est question dans la partie XV, paragraphe B(2)c), ci-après, la perte de la valeur associée à l’emplacement d’une installation visée par une fermeture est un aspect à examiner dans l’autre volet de l’analyse comparative, au moment de comparer les gains en efficience établis avec les effets anticoncurrentiels vraisemblables d’un fusionnement.

(ii) Lacune alléguée dans l’analyse de corrélation de Secure

[559] Le commissaire affirme que le calcul qu’a fait Secure des économies de coûts fixes associées à la rationalisation des installations d’enfouissement, des ITRE et des PDEA est lacunaire en ce qu’il repose en partie sur une analyse de corrélation entre la production et certaines grandes catégories de coûts distinctes d’un petit nombre d’installations. Secure s’est fondée sur cette analyse réalisée par M. Harington pour cerner les coûts variables et ensuite les retirer du total des coûts des installations, et ainsi faire une estimation des économies de coûts fixes.

[560] Dans le cadre de son analyse, M. Harington a retenu les moyennes de certains éléments de coûts importants dans les installations qu’il avait sélectionnées, malgré la grande variation de ces éléments d’une installation à l’autre.

[561] Le commissaire affirme que les lacunes de cette démarche se dégagent entre autres du fait que bon nombre des corrélations négatives présentées par M. Harington ne trouvent aucune interprétation économique logique.

[562] M. Harington a fait des analyses de corrélation distinctes pour les PDEA, les ITRE et les lieux d’enfouissement, respectivement, en se fondant sur les chiffres tirés des états des résultats mensuels pour la période allant de janvier 2019 à octobre 2021, dans le cas de Tervita, et pour la période allant de janvier 2020 à octobre 2021, dans le cas de Secure. Ces états des résultats affichaient, pour chaque installation, tous les coûts par catégorie. Les analyses de M. Harington se sont limitées aux installations visées par le plan d’intégration de Secure. Autrement dit, elles excluaient toutes les installations ne faisant pas partie de ce plan. Dans le cas des ITRE, son évaluation était restreinte aux installations offrant deux gammes de services, à savoir le traitement des déchets et l’évacuation des eaux, ce qui lui a permis d’extraire les coûts d’évacuation des eaux afin d’isoler ceux liés au traitement des déchets (transcription confidentielle B, aux p. 2606 et 2607).

[563] Pour cerner les coûts variables des PDEA, M. Harington a fait une corrélation entre les volumes mensuels d’eaux traitées, en mètres cubes, et les dépenses mensuelles associées à chaque élément de coût. Il a ensuite repéré les éléments pour lesquels se dégageait une forte corrélation avec les volumes. Après avoir pris en considération la nature de chacun des éléments et demandé l’avis des dirigeants de Secure[84], M. Harington a établi un pourcentage fixe pour chaque élément, à la lumière du pourcentage variable observé en moyenne pour ce poste dans l’ensemble des installations examinées.

[564] En fin de compte, quatre éléments contribuaient pour XXX des coûts totaux des PDEA de Secure ayant fait l’objet de l’analyse, à savoir la rémunération (XxX), la réparation et l’entretien des installations et de terrains (XXx), les services publics (Xxx) et le transport par camion (Xx). Parmi ceux-ci, seuls les coûts des services publics semblaient être corrélés avec les volumes traités aux installations visées par une fermeture. De façon similaire, parmi les autres éléments analysés, seuls deux sont ressortis comme étant corrélés avec les volumes traités, soit les produits chimiques et la location d’équipement, qui contribuaient ensemble pour seulement environ XX des coûts totaux des installations examinées. Par conséquent, les coûts des services publics sont le seul élément non négligeable sur lequel M. Haringtona a fait reposer son analyse de corrélation au regard des PDEA de Secure. Il en va de même pour les PDEA de Tervita[85],

[565] Dans le cas des services publics, le calcul de M. Harington a donné une corrélation moyenne de XXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXX XXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXX (transcription confidentielle B, aux p. 2509 et 2510).

[566] M. Harington a adopté une démarche similaire dans le cas des ITRE et des lieux d’enfouissement (rapport révisé de M. Harington, aux par. 116 et 117, 150). En ce qui a trait aux ITRE, les services publics étaient également le seul élément de coût pour lequel l’analyse de corrélation de M. Harington jouait de manière importante sur ses estimations globales des économies de coûts fixes. Précisément, les services publics contribuaient pour environ XXX de l’ensemble des coûts fixes des installations, et les coûts de ces services étaient fixes dans une proportion estimée à XX (rapport révisé de M. Harington, aux tableaux 14 et 15). [86] Dans le cas des lieux d’enfouissement, la rémunération était l’élément qui, parmi ceux ayant fait l’objet d’une analyse de corrélation, représentait le plus fort pourcentage des coûts, soit environ XXX du total des coûts fixes. La part de coûts fixes dans la rémunération était estimée à Xx (rapport révisé de M. Harington, aux tableaux 21 et 22)[87]. Les services publics contribuaient pour environ XxX de l’ensemble des coûts des installations.

[567] En contre-interrogatoire, le commissaire a démontré l’existence d’une forte variation dans les coûts des services publics des installations de Secure et de Tervita qui avaient été pris en compte dans l’analyse de corrélation (transcription confidentielle B, aux p. 2511 à 2516). Par exemple, dans le cas des PDEA de Secure auxquelles est attribuée la moyenne de XXX mentionnée au paragraphe 565 des présents motifs, le pourcentage des coûts des services publics qui variait en fonction des volumes étaient les suivants : ITRE Nosehill (XX), PDEA Kaybob (XXX), PDEA Eccles (XXX), ITRE Rycroft (XXX), PDEA Kaybob South (XXX), PDEA Emerson (XXX), ITRE Silverdale (XXX), et PDEA Wild River (XXX) (rapport révisé de M. Harington, au par. 417).

[568] M. Harington a reconnu que les corrélations négatives obtenues pour XXX XXXXXXXXXXXXX étaient illogiques, donnant à penser qu’une hausse des volumes se traduisait par une baisse des dépenses consacrées aux services publics (transcription confidentielle B, à la p. 2514). Il a également reconnu le même manque de logique concernant les corrélations négatives obtenues entre la rémunération et les volumes (transcription confidentielle B, aux p. 2516 et 2517). Il a de plus reconnu avoir appliqué des moyennes à un ensemble d’installations situées dans des régions différentes, malgré qu’il admettait qu’il y avait des différences entre les régions (transcription confidentielle B, aux p. 2525 et 2526). En outre, il a reconnu qu’aucune installation de certains groupes visés par une intégration n’avait été incluse dans l’analyse, et aussi que l’installation absorbante avait été exclue de son analyse dans le cas de six autres groupes visés par une intégration (transcription confidentielle B, aux p. 2529 à 2531). Il a cependant affirmé que l’exclusion de ces installations n’avait pas véritablement d’incidence sur son analyse (transcription confidentielle B, à la p. 2531).

[569] Le Tribunal rejette cette dernière affirmation. Le Tribunal considère qu’en raison des lacunes de l’analyse qu’a faite M. Harington des coûts des services publics des PDEA et des ITRE, ses estimations des économies de coûts fixes associées aux services publics ne sont pas fiables. Le Tribunal n’est pas en mesure d’apporter des rajustements pour combler cette lacune, parce que le dossier ne permet pas à la formation d’établir le poids des services publics dans l’ensemble des économies de coûts fixes alléguées par Secure qui, selon elle, découleront de la rationalisation des PDEA et des ITRE. Par conséquent, le Tribunal convient avec le commissaire que Secure n’a pas démontré ou quantifié correctement les économies de coûts fixes liées aux PDEA et aux ITRE et qu’elle n’en a pas fourni d’estimation fiable non plus.

[570] Le Tribunal parvient à la même conclusion concernant les économies de coûts fixes associées aux lieux d’enfouissement. En bref, ces économies de coûts alléguées sont irrémédiablement entachées par l’analyse de corrélation qu’a réalisée M. Harington au regard de la rémunération[88].

[571] Étant donné la conclusion tirée dans la section qui suit immédiatement la présente, il n’y a pas lieu d’examiner ici l’incidence des lacunes que présente l’analyse de corrélation réalisée par M. Harington pour ce qui est des économies de coûts fixes alléguées par Secure qui, selon elle, découleront de la rationalisation d’installations.

(iii) Lacunes alléguées de l’évaluation que fait Secure de l’incidence totale d’une hausse des volumes traités dans les installations absorbantes

[572] Le commissaire fait aussi valoir que l’analyse que fait Secure des économies de coûts liées à la rationalisation d’installations repose sur une série d’hypothèses qui n’ont pas été démontrées, soit que : (i) les coûts variables unitaires observés aux installations absorbantes sont égaux ou inférieurs à ceux observés aux installations visées par une fermeture; (ii) les installations absorbantes traiteront des quantités accrues sans qu’il en découle une hausse des coûts variables unitaires; (iii) les installations absorbantes traiteront des quantités accrues sans qu’il en découle une hausse des coûts fixes. Compte tenu de ces lacunes, le commissaire réitère que Secure n’a pas démontré ou quantifié correctement les économies de coûts fixes associées à la rationalisation d’installations. Le Tribunal est du même avis.

[573] Pour chacune des installations pour lesquelles sont alléguées des économies découlant d’intégrations, Secure a fourni des données annuelles sur les économies qu’elle prétend pouvoir réaliser au regard des coûts de main-d’œuvre et des coûts hors main-d’œuvre. Sauf indication contraire dans les présents motifs[89], le Tribunal est prêt à accepter ces chiffres comme point de départ de son analyse. Il ne s’agit que d’un point de départ, parce qu’il convient ensuite d’évaluer l’incidence qu’aura une redirection des déchets traités aux installations visées par une fermeture vers les installations absorbantes.

[574] Plusieurs des appendices du rapport révisé de M. Harington montrent que la structure des coûts variables est très différente d’une installation à l’autre parmi celles pour lesquelles Secure allègue des gains en efficience[90]. Or Secure n’a pas tenté de quantifier les coûts variables unitaires aux différentes installations, pas même pour les installations visées par une fermeture et les installations absorbantes appariées (transcription confidentielle B, à la p. 2558). Elle n’a pas tenté de calculer les écarts de coûts variables entre les différentes installations (transcription confidentielle B, à la p. 2559). Secure s’est plutôt fondée sur les hypothèses de M. Harington en supposant que les coûts variables des installations visées par une fermeture et des installations absorbantes appariées étaient les mêmes et resteraient les mêmes[91].

[575] Le Tribunal ne retient pas ces hypothèses. Ayant déjà travaillé pour Tervita, M. Harington était bien au fait qu’il était utile d’évaluer (i) toute différence entre les coûts d’exploitation variables de l’installation visée par la fermeture et de l’installation absorbante, et (ii) l’incidence potentielle d’une hausse importante du volume de déchets traités sur les coûts variables d’une installation absorbante. Il savait aussi qu’il est possible que les coûts variables supplémentaires soient importants au point de surpasser les économies de coûts fixes associées à la fermeture d’une installation dans le but d’en rediriger les volumes vers l’installation absorbante.

[576] En particulier, dans le contexte de l’acquisition de Newalta par Tervita en 2018, M. Harington a produit un rapport d’expert sur les gains d’efficience qui découleraient vraisemblablement du fusionnement (pièce CB-A-897/P-A-898, Tervita Newalta, The Brattle Group Initial Report évaluant des gains en efficience découlant de la transaction, daté du 11 juin 2018 (le « rapport de M. Harington sur Newalta »)). Dans ce rapport, M. Harington a évalué à la fois (i) la réduction des coûts d’exploitation fixes (comme il l’a fait en l’espèce) et (ii) la différence entre les coûts variables d’une installation visée par une fermeture et les coûts variables de l’installation qui en absorberait les volumes (rapport de M. Harington sur Newalta, au par. 51). Plus loin dans ce même rapport, M. Harington a expliqué avoir tenu compte de [traduction] « certains gains en efficience positifs ou négatifs découlant de différences dans les coûts variables unitaires parmi les différentes installations » (rapport de M. Harington sur Newalta, au par. 62).

[577] Le Tribunal fait remarquer au passage que, dans le rapport de M. Harington sur Newalta, l’auteur et Tervita ont également pris soin d’évaluer les coûts variables de chaque installation. Ils ne se sont pas fondés sur une moyenne pour l’ensemble des installations obtenue d’après une analyse de corrélation du type de celle dont nous venons de parler dans la section qui précède.

[578] En contre-interrogatoire dans la présente affaire, M. Harington a reconnu qu’il serait la norme de soustraire les coûts variables supplémentaires avec lesquels devra composer l’installation absorbante des économies alléguées associée à l’installation visée par une fermeture (transcription confidentielle B, à la p. 2554). XXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXX XXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXX (transcription confidentielle B, aux p. 2555 à 2558; rapport de M. Harington sur Newalta, à la p. 77, appendice 2.5.7(B)). XXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXX (rapport de M. Harington sur Newalta, à l’appendice 2.5, note de bas de page A).

[579] Pour chacune des sept installations qui ont fait l’objet d’une analyse dans le rapport de M. Harington sur Newalta, il a été question de gains en efficience négatifs associés à une hausse des coûts variables aux installations absorbantes (rapport de M. Harington sur Newalta, à l’appendice 2.5). En l’espèce, malgré qu’il était au fait de ce point des plus pertinents, M. Harington n’a pas fait de rajustements pour tenir compte des coûts variables dans son analyse des économies de coûts qui découleraient de la rationalisation d’installations.

[580] Étant donné que de tels rajustements n’ont pas été apportés pour tenir compte des coûts variables aux installations absorbantes, et compte tenu des lacunes dans la méthode retenue par Secure pour calculer les économies de coûts fixes, lacunes dont il a été question dans la section précédente des présents motifs, le Tribunal conclut que Secure n’a pas démontré, selon la prépondérance des probabilités, les gains en efficience globaux allégués qu’elle attribue à la rationalisation d’installations. L’expert de Secure, M. Harington, était non seulement bien au fait de l’utilité de faire une analyse de l’incidence qu’aurait un regroupement des volumes sur les installations absorbantes, mais aussi en possession des données qui lui auraient permis de mener une telle analyse, semble-t-il, du moins pour certaines installations[92]. Qui plus est, il aurait pu demander les données dont il avait besoin concernant les autres installations.

[581] Le Tribunal reconnaît que certains aspects de l’analyse auraient pu compliquer l’évaluation des coûts variables à certaines installations devant être fermées pour être intégrées à une installation absorbante. Cela dit, ni M. Harington ni Secure n’a tenté d’expliquer ces difficultés ou de dire pourquoi aucune méthode ne pouvait raisonnablement être appliquée pour faire l’estimation des coûts variables supplémentaires aux installations absorbantes[93].

[582] En ne réalisant pas une telle analyse et en omettant de faire une évaluation plus robuste des économies de coûts fixes, Secure n’a pas été à la hauteur des attentes, ce qu’elle reproche justement au commissaire lorsqu’il fait l’estimation des effets anticoncurrentiels du fusionnement. Ainsi, Secure n’a pas quantifié les économies alléguées qui pouvaient et peuvent raisonnablement l’être, alors que M. Harington l’avait pourtant fait s’agissant de l’acquisition de Newalta par Tervita en 2018. Ces deux lacunes ont pour conséquence que les éléments que Secure a fournis pour étayer les gains en efficience allégués qu’elle attribue à la rationalisation d’installations sont incomplets et prêtent doublement à confusion. Autrement dit, Secure ne s’est pas acquittée du fardeau qu’elle a en droit de quantifier ces gains en efficience (Tervita CSC, aux par. 124, 128)[94].

[583] Par conséquent, le Tribunal n’est pas en mesure de vérifier ces lacunes alléguées. En outre, le commissaire ne pouvait s’opposer aux allégations autrement qu’en faisant valoir l’argument général dont il est question dans la présente section. Ainsi, ces allégations doivent se voir attribuer une valeur nulle aux fins de l’application de l’article 96 (Tervita CSC, aux par. 128, 137, 139, 151, 159, 165).

[584] Compte tenu de cette conclusion, il n’y a pas lieu d’examiner en détail les autres observations formulées par le commissaire concernant les gains en efficience allégués par Secure relativement à la rationalisation d’installations. Cela dit, afin que cela puisse servir pour l’avenir, le Tribunal fera ci-après de brefs commentaires sur ces observations.

(iv) Prétendue omission de tenir compte de la croissance de l’industrie et de la demande

[585] Le commissaire soutient que si les prévisions de Secure concernant la demande future se révélaient erronées, les installations absorbantes n’auront pas la capacité d’absorber les volumes provenant des installations visées par une fermeture. Il affirme qu’une telle situation pourrait avoir pour conséquence que Secure doive rouvrir des installations déjà fermées ou garder en activité des installations dont la fermeture n’a pas encore eu lieu. À titre subsidiaire, le commissaire soutient que Secure pourrait devoir faire des investissements supplémentaires dans la capacité.

[586] M. Eastman a, de façon similaire, convenu que la capacité actuelle et prévue des installations absorbantes pourrait ne pas suffire pour composer avec des volumes de production de l’ordre de ceux observés avant la pandémie de COVID-19, avec la croissance future de la demande ou avec d’éventuels goulots d’étranglement. Il a ajouté que Secure a omis d’aborder certaines autres déséconomies d’échelle potentielles (rapport de M. Eastman, aux par. 45 à 47).

[587] Ayant soigneusement examiné le dossier de la preuve, le Tribunal retient l’opinion de M. Harington selon laquelle les installations absorbantes auront probablement une capacité suffisante pour composer avec la hausse de la demande qui se produira vraisemblablement dans un avenir prévisible. Pour parvenir à cette conclusion, le Tribunal a tenu compte du fait que le nombre d’installations figurant sur sa liste des dessaisissements (29) est inférieur d’environ 30 % au nombre de dessaisissements réclamés par le commissaire (41). En outre, comme il a été expliqué dans le tableau 16 précédemment, le Tribunal a conclu qu’à la suite des dessaisissements, certaines autres installations que Secure avait prévu fermer devront rouvrir.

[588] Le Tribunal a également tenu compte de la preuve non contestée de M. Harington XXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXX (pièce P-R-884/CB-R-885, présentation de diapositives révisée de M. Andrew Harington (« présentation de diapositives de M. Harington »), à la p. 30), XXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXX (transcription confidentielle B, aux p. 2434 et 2435). Par ailleurs, le Tribunal a pris en compte l’analyse détaillée des installations visées par une fermeture et des installations absorbantes présentée à l’annexe F du rapport révisé de M. Harington. En outre, le Tribunal fait remarquer que XXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXX XXXXXXXXXXXXXXXX; transcription confidentielle B, à la p. 2478), alors que l’analyse de M. Harington reposait sur la moyenne correspondant à la période de 12 mois durant laquelle la production a été la plus élevée à chacune des installations entre janvier 2018 et octobre 2021 (transcription confidentielle B, aux p. 2425 à 2431, 2478 et 2479; présentation de diapositives de M. Harington, à la p. 67).

[589] Au vu des éléments de preuve exposés précédemment et des autres éléments de preuve au dossier, le Tribunal conclut que les hypothèses de Secure au sujet de la demande future et des capacités des installations absorbantes étaient raisonnables. Autrement dit, le Tribunal n’accepte pas l’observation du commissaire selon laquelle Secure n’a pas démontré que sa capacité suffira pour composer avec la hausse de la demande. Le Tribunal rejette également l’assertion du commissaire selon laquelle des contraintes de capacité nécessiteront une hausse de la capacité par la voie (i) d’investissements supplémentaires dans la capacité, (ii) d’une réouverture d’installations qui ont été fermées[95] ou (iii) du maintien en activité d’installations dont la fermeture est prévue[96].

(v) Les gains en efficience allégués associés aux coûts de main-d’œuvre des installations

[590] Le commissaire soutient que Secure, n’ayant pas fourni d’éléments de preuve sur la production associée aux travailleurs licenciés et à ceux maintenus en poste, n’a pas suffisamment étayé les gains en efficience productifs qui, selon ses allégations, découleront d’une baisse des effectifs. Le commissaire ajoute que M. Harington s’est simplement fié à l’estimation que fait Secure des employés qui sont superflus, sans faire une analyse indépendante des flux de travail.

[591] À l’appui des économies de coûts de main‐d’œuvre qu’elle allègue, Secure a présenté un tableur faisant état des noms des travailleurs licenciés. Le Tribunal considère que cette information suffirait normalement pour démontrer des gains en efficience allégués associés à des économies d’effectifs. Il n’est pas nécessaire d’aller plus loin en fournissant des éléments de preuve sur la production des travailleurs licenciés et des travailleurs maintenus en poste, ni d’entreprendre de manière indépendante une analyse des flux de travail. De telles démarches ne cadreraient pas avec la compréhension que se fait le Tribunal de la manière dont se prennent normalement les décisions de licencier des travailleurs dans le contexte d’un fusionnement.

[592] Au-delà de ce qui précède, le commissaire a déposé des éléments de preuve montrant que Secure a cherché à doter des postes correspondant à des postes qui ont été coupés et qui ont été inclus dans les gains en efficience découlant du fusionnement. XXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXX. Le Tribunal convient que ces éléments de preuve donnent à penser que Secure n’a effectivement pas rajusté ses économies de coûts de main-d’œuvre allégués pour tenir compte de ces faits subséquents. Dans la mesure où Secure a embauché ou embauchera vraisemblablement des travailleurs pour doter des postes pour lesquels des réductions de coûts ont été alléguées, les réductions en question doivent être réduites.

[593] Compte tenu de la décision du Tribunal de rejeter la totalité des économies de coûts associées à la rationalisation d’installations et de rejeter certaines [traduction] « économies de coûts organisationnels » dont il sera question ci-après, il n’y a pas lieu de calculer l’effet de cette omission particulière de la part de Secure.

(vi) Omission alléguée de tenir compte du détournement de la production

[594] Le commissaire affirme en outre que les gains en efficience allégués par Secure ne tiennent pas compte du fait qu’une partie de la production sera vraisemblablement détournée des installations absorbantes, y compris vers les concurrents. À l’appui de cette thèse, le commissaire souligne que tant M. Miller que Mme Duplantis ont estimé qu’il y aurait une réduction de la production en conséquence de la hausse de prix qui se produira à la suite au fusionnement.

[595] En principe, cet argument est valable. Étant donné que la demande n’est pas parfaitement inélastique et qu’on trouve un ou plusieurs concurrents dans bon nombre de marchés pertinents, on peut raisonnablement s’attendre à ce qu’au moins une partie de la production soit détournée depuis Secure vers ces concurrents. Une baisse générale de la production est également probable. Ces points sont examinés plus loin au paragraphe B(2)c) de la partie XV.

[596] Pour les besoins de l’espèce, il suffit de souligner que si le Tribunal n’avait pas déjà, pour les motifs exposés aux paragraphes 569 et 570 et 574 à 583 des présents motifs, décidé de rejeter les économies de coûts alléguées par Secure relativement à la rationalisation d’installations, il aurait fallu rajuster à la baisse ces économies pour tenir compte de la production moindre associée aux effets défavorables sur les prix et aux élasticités de la demande, dont l’étendue est contestée. Le Tribunal reconnaît que Secure s’est retrouvée dans une position singulière à cet égard, ayant soutenu que le fusionnement n’aura vraisemblablement pas pour effet d’empêcher ou de diminuer sensiblement la concurrence. Or l’article 96 offre un moyen de défense dans le cas où il est conclu que la concurrence sera sensiblement empêchée ou diminuée. Cette disposition ne peut être invoquée tant qu’une telle conclusion n’a pas été rendue. Dans ce contexte, il n’est pas acceptable de produire des estimations des gains en efficience en s’appuyant sur l’hypothèse que la production demeurera constante, comme l’a fait M. Harington dans son rapport. Il incombe plutôt à ceux qui invoquent ce moyen de défense de rajuster leurs estimations des gains en efficience qui se produiront vraisemblablement, compte tenu de l’étendue contestée des effets sur les prix et des élasticités de la demande. Néanmoins, pour les motifs exposés au paragraphe 584 précédemment, il n’est pas nécessaire de faire des rajustements pour tenir compte de l’omission faite par Secure à cet égard.

(vii) Prétendue omission de tenir compte de l’épuisement accéléré des PDEA et des lieux d’enfouissement

[597] Enfin, le commissaire soutient que Secure a omis de tenir compte du fait que le regroupement des eaux usées et des déchets solides dans les PDEA et les lieux d’enfouissement qui les absorberont accélérera l’épuisement des puits de déversement et des cellules d’enfouissement, respectivement. M. Harington l’a reconnu en contre-interrogatoire (transcription confidentielle B, aux p. 2577 à 2581). Il a également reconnu que certaines dépenses en capital qui, selon ce qu’il allègue, seront évitées seraient plus judicieusement considérées comme étant des économies liées à la valeur temporelle de l’argent, plutôt que des économies de coût en capital (transcription confidentielle B, aux p. 2579 et 2580). XXXXXXXXXXXXXXXXX XXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXX[97]. Toutefois, pour les motifs exposés précédemment au paragraphe 584, il n’y a pas lieu d’apporter de rajustement pour tenir compte de cette omission de Secure à cet égard.

(viii) Synthèse des économies de coûts fixes alléguées relativement à la rationalisation d’installations

[598] En somme, pour les motifs exposés aux paragraphes 569 et 570 et 574 à 583 des présents motifs, le Tribunal conclut que Secure n’a pas correctement étayé (i) les économies de coûts fixes totalisant 60 449 729 $ qu’elle a alléguées relativement à la rationalisation d’ITRE et de PDEA, et (ii) les économies de coûts fixes totalisant 14 270 895 $ qu’elle a alléguées relativement au regroupement de lieux d’enfouissement. Ces sommes doivent donc être déduites de l’ensemble des économies de coûts totalisant 140 638 674 $ alléguées par Secure (voir les paragraphes 548 à 550 des présents motifs). Une fois ces déductions faites, les gains en efficience allégués par Secure totalisent 65 918 050 $. Le montant annualisé équivalent se chiffre à 9 452 892 $. Au vu de cette conclusion, il n’y a pas lieu d’apporter de rajustement pour tenir compte des lacunes qui ont été relevées dans l’analyse faite par Secure et dont il a été question dans la partie XV, alinéas B(1)c)(v) et (vii).

(d) Allégations d’économies de coûts organisationnels

[599] Secure a allégué des [traduction] « économies de coûts organisationnels » totalisant 59 632 068 $. Le commissaire a fait valoir que, pour différentes raisons, cette somme doit être revue à la baisse.

[600] Tout d’abord, il soutient que Secure n’a pas quantifié et déduit au moins deux catégories de coûts associés à la réalisation de certains des gains en efficience qu’elle allègue. Ces coûts sont liés (i) aux primes versées aux cadres qui [traduction] « atteignent certaines cibles ou certains indicateurs de rendement » et qui génèrent ainsi des gains en efficience; et (ii) à la main-d’œuvre utilisée pour réaliser les gains en efficience.

[601] Le Tribunal convient que les primes versées en échange d’efforts supplémentaires peuvent constituer « un coût économique réel des gains [en] efficience que les défenderesses prétendent réaliser » (Supérieur Propane I, au par. 340). On peut en dire tout autant d’autres types de coûts de gestion, de main-d’œuvre et de renonciation qui s’ajoutent pour permettre la réalisation de ces gains en efficience (Supérieur Propane I, au par. 333). M. Harington l’a en effet reconnu dans le rapport qu’il a produit relativement à l’acquisition de Newalta par Tervita en 2018 et qui a été mentionné précédemment (rapport de M. Harington sur Newalta, au tableau 8, p. 49, par. 153; transcription confidentielle B, aux p. 2603 à 2605).

[602] Cela dit, la preuve produite en l’espèce concerne (i) les primes versées en 2021, notamment en reconnaissance d’une contribution à la conclusion du fusionnement, et (ii) les dépenses de 2021 et de 2022 liées à la rémunération des membres de l’équipe responsable de l’intégration que Secure a mise sur pied pour cerner les gains en efficience allégués, planifier en conséquence et, au bout du compte, réaliser ces gains.

[603] Puisque ces dépenses ou d’autres dépenses ont eu lieu pour réaliser des gains en efficience avant qu'une ordonnance puisse être rendue en vertu de l’article 92 en l’espèce, elles n’ont pas à être déduites des gains en efficience allégués. En effet, ces gains en efficience ne sont pas admissibles (voir le paragraphe 552 précédemment). Il serait ainsi illogique d’exclure ces gains en efficience de l’analyse tout en tenant compte des dépenses engagées pour les réaliser.

[604] Le commissaire fait également valoir que les gains en efficience qui se réaliseraient vraisemblablement par tout autre acheteur acceptable ne devraient pas être inclus dans l’analyse réalisée au titre de l’article 96. Le Tribunal est du même avis. En bref, ces gains ne sont pas des gains qui « ne seraient vraisemblablement pas réalisés si l’ordonnance était rendue », comme le veut le critère énoncé au paragraphe 96(1). Il est entendu qu’il n’est pas nécessaire qu’un quelconque acheteur vraisemblable soit identifié pour que le Tribunal puisse conclure que ces gains en efficience seraient vraisemblablement réalisés par un autre acheteur (Tervita TC, au par. 267).

[605] Les gains en efficience qui, selon ce que prétend le commissaire, seraient vraisemblablement réalisés par tout autre acheteur acceptable sont liés aux économies de coûts alléguées par Secure relativement à Xx postes. Le commissaire affirme que les éventuels acheteurs d’éléments d’actif dessaisis n’auraient vraisemblablement pas besoin de ces postes. Par conséquent, il affirme que les économies alléguées par Secure relativement à ces postes, et dont la VAN est de XXXXXXX[98], ne sont pas des gains en efficience admissibles aux fins de l’application de l’article 96. Pour étayer son affirmation, le commissaire fait remarquer que M. Eastman a convenu qu’il est raisonnable de dire qu’un acheteur ou ensemble d’acheteurs potentiels n’aurait vraisemblablement pas à réembaucher XZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZXXXXX XXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXX, comme M. Harington l’a supposé. M. Eastman a présenté la même opinion concernant XXXXXXXXXXXXX XXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXX. Il a affirmé que ces XX postes existent couramment dans bon nombre d’organisations (rapport de M. Eastman, au par. 93; transcription confidentielle B, à la p. 2725).

[606] En contre-interrogatoire, M. Eastman a concédé que, à sa connaissance, aucun des acheteurs potentiels qu’il avait recensés n’avait préparé de plan d’intégration précisant comment pourrait se faire l’intégration d’éventuelles installations achetées dans leurs activités existantes (transcription publique, aux p. 2775 et 2776). Il a également reconnu qu’il faudrait exercer un certain degré de diligence raisonnable avant de produire un plan d’intégration en bonne et due forme (transcription publique, à la p. 2777).

[607] Qu’importe si un acheteur potentiel, parmi ceux provisoirement désignés, aurait à mener un exercice supplémentaire de diligence raisonnable pour pouvoir ensuite produire un plan d’intégration détaillé, il demeure que M. Eastman affirme ceci, éléments de preuve à l’appui : (i) on peut raisonnablement supposer qu’un acheteur potentiel ou un ensemble d’acheteurs potentiels n’aurait pas à réembaucher qui que ce soit pour doter les postes décrits ci-dessus, et (ii) de tels postes existent couramment dans bon nombre d’organisations. Le Tribunal est d’avis que ces éléments de preuve sont, de manière générale, corroborés par plusieurs témoins des acheteurs potentiels d’éléments d’actifs dessaisis, dont M. McLean de Clean Harbors (pièce P-A-029, déclaration de témoin en réplique de M. Cameron McLean de Clean Harbors Canada Inc., au par. 12)[99]; M. John Smith de Green Impact Partners Inc., qui a fait l’acquisition des éléments d’actif reposant sur l’énergie propre de Wolverine en mai 2021 environ (pièce P-A-095, déclaration de témoin de M. John Paul Smith de Green Impact Partners Inc., aux par. 8 et 9); M. Kaminski de Catapult (déclaration de témoin de Catapult, aux par. 33 et 34); et, du moins dans une certaine mesure, M. Pinnell de White Owl (déclaration de témoin de White Owl, au par. 11).

[608] M. Harington a déclaré que XXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXX XXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXX (transcription confidentielle B, à la p. 2470). Il a ajouté que XXXXXXXXXXXXXXXXXXX XXXXXXXXXXXXXXXXXXX (transcription confidentielle B, à la p. 2473). Voilà qui ne correspond pas tout à fait à une preuve claire et convaincante.

[609] En revanche, en réponse aux questions que lui posait la formation, M. Blundell a affirmé que, selon lui, [traduction] « bon nombre des éléments de [son] affidavit tiendraient même si un acheteur potentiel était situé dans l’Ouest canadien » (transcription confidentielle B, à la p. 2384). Cela ne répond pas à la question de savoir quelle partie des estimations fournies dans sa déclaration de témoin ne se réaliserait pas (déclaration de témoin de M. Blundell, au par. 124)[100].

[610] Compte tenu de ce qui précède, le Tribunal conclut que Secure n’a pas démontré, selon la prépondérance des probabilités, que les économies de coûts associées aux XX postes désignés par M. Eastman et décrits au paragraphe 605 des présents motifs seraient vraisemblablement non réalisées dans l’éventualité d’une ordonnance de dessaisissement des 29 installations dont il est question au tableau 15 ci-dessus. Par conséquent, les économies de coûts organisationnels de Secure doivent être réduites de 22 986 790 $, soit un équivalent annualisé de 3 296 391 $.

[611] Le Tribunal souligne au passage qu’il accepte la thèse de M. Harington selon laquelle les économies alléguées par Secure relativement à ces postes représenteraient de réelles économies de ressources pour le Canada si l’acheteur d’éléments d’actif dessaisis n’avait pas à doter ces postes au bout du compte parce qu’il dispose de travailleurs en nombre suffisant pour remplir les fonctions en question à l’extérieur du Canada. Autrement dit, le Tribunal est d’accord pour dire que, dans de telles circonstances, les gains en efficience allégués rempliraient les exigences énoncées à l’article 96, étant donné qu’ils ne se réaliseraient vraisemblablement pas au Canada si l’ordonnance en question était rendue. Cela dit, étant donné que l’identité de l’acheteur vraisemblable ou des acheteurs vraisemblables des installations mentionnées dans le tableau 15 ci-dessus n’est pas encore connue, cela relève de la supposition pour le moment. Parmi les acheteurs potentiels recensés jusqu’ici, Clean Harbors pourrait être partiellement concernée par une telle éventualité. De fait, M. McLean a affirmé lors de son témoignage que certaines des fonctions remplies par les titulaires des postes sont actuellement assurées par des employés de Clean Harbour aux États-Unis, alors que d’autres sont réalisées par des travailleurs au Canada (transcription publique, aux p. 461, 466 et 467, 472 à 474, 476).

[612] Au-delà de ce qui précède, M. Harington a expliqué lors de l’audience que le montant des économies de coûts organisationnels alléguées par Secure reposait sur la liste complète des [traduction] « quelque 40 » dessaisissements demandés par le commissaire en l’espèce (transcription confidentielle B, à la p. 2498). Il a aussi expliqué qu’à défaut d’avoir la liste réelle des dessaisissements, il ne pouvait rajuster les [traduction] « économies de coûts organisationnels » en conséquence. Par conséquent, il a convenu que la façon la plus raisonnable de procéder serait de réduire le montant total des [traduction] « économies de coûts organisationnels » alléguées dans la même proportion que celle par laquelle le Tribunal a écourté la liste des dessaisissements proposés par le commissaire.

[613] Seulement 29 installations figurent sur la liste des dessaisissements du Tribunal. Comme le commissaire a demandé 41 dessaisissements, la fraction par laquelle les économies devraient être réduites est de 12/41. Cette fraction doit être multipliée par 36 645 278 $, soit le total obtenu lorsque le rajustement décrit au paragraphe 610 précédemment (soit 22 986 790 $) est soustrait du total des [traduction] « économies de coûts organisationnels » que Secure a provisoirement alléguées (soit 59 632 068 $). Le produit de cette multiplication est 10 725 447 $, lequel montant doit être déduit de 36 645 278 $. Une fois cette déduction faite, il en résulte des [traduction] « économies de coûts organisationnels » de 25 919 831 $[101]. Il s’agit du montant des [traduction] « économies de coûts organisationnels » admissibles aux fins de l’application de l’article 96 de la Loi.

[614] Pour résumer, le Tribunal conclut que le total actualisé sur 10 ans des [traduction] « économies de coûts organisationnels » alléguées par Secure (soit 59 632 068 $) doit être réduit pour tenir compte de la décision du Tribunal de rejeter les économies alléguées par Secure relativement aux XX postes dont il est question aux paragraphes 605 à 610 des présents motifs. Ces économies alléguées totalisent 22 986 790 $. Si l’on soustrait cette somme à celle de 59 632 068 $, il en découle un montant rajusté de 36 645 278 $.

[615] Ce résultat doit ensuite être réduit dans une proportion de 12/41, soit un pourcentage d’environ 29 % (c.-à-d. 10 725 447 $) pour tenir compte du fait que la liste des dessaisissements du Tribunal est plus courte que celle des dessaisissements demandés par le commissaire (voir les paragraphes 612 et 613 ci-dessus). Il reste ainsi un montant de 25 919 831 $ d’[traduction] « économies de coûts organisationnels » admissibles aux fins de l’application de l’article 96 de la Loi. Le montant annualisé équivalent se chiffre à 3 716 999 $.

[616] Le Tribunal fait remarquer que les deux déductions dont il est question dans les deux paragraphes précédents totalisent 33 712 237 $[102]. Lorsque ce dernier montant est déduit du total des gains en efficience allégués qui restent (65 918 050 $) une fois éliminés les gains allégués relativement à la rationalisation d’installations (voir le paragraphe 598 des présents motifs), l’on obtient des gains en efficience de 32 205 813 $. Le montant annualisé équivalent se chiffre à 4 618 433 $.


 

(e) Gains en efficience qui seront vraisemblablement réalisés au cours de la période nécessaire à la mise en œuvre l’ordonnance du Tribunal

[617] Le commissaire soutient que certains coûts que Secure a inclus dans les sommes alléguées ne sont pas admissibles parce qu’ils sont uniquement subordonnés à la mise en œuvre de l’ordonnance du Tribunal. Secure aurait à composer avec ces coûts pour rendre opérationnelles les installations visées par un dessaisissement, et ce [traduction] « bien avant la date de dessaisissement ». Il s’agit notamment des dépenses associées à [traduction] « tous les coûts liés à l’embauche, à la formation, au redémarrage et à l’exploitation au cours de cette période ». M. Harington a inclus des [traduction] « coûts annualisés pour la période de six mois commençant à la date du prononcé de la décision du Tribunal » à titre de valeur approximative de ces coûts (rapport révisé de M. Harington, aux par. 228.b et 230).

[618] Le Tribunal est d’accord avec le commissaire pour dire que ces coûts ne sont pas admissibles aux fins de l’application de l’article 96. Bien qu’il s’agisse peut-être, pour l’économie canadienne, d’un « coût » associé à la mise en œuvre de l’ordonnance du Tribunal, ce coût ne résultera pas uniquement « de l’application de la Loi » (Tervita CSC, au par. 115). Par ailleurs, il ne s’agit pas de « gains en efficience » qui résulteront du fusionnement au sens du paragraphe 96(1). Il s’agit plutôt de coûts qui se produiront en raison des dessaisissements ordonnés par le Tribunal.

[619] Toutefois, puisque le Tribunal a rejeté la totalité des économies de coûts alléguées par Secure relativement à la rationalisation d’installations (voir le paragraphe 598 des présents motifs), aucun autre rajustement n’est requis aux chiffres allégués par Secure relativement aux coûts qu’elle devra assumer pour mettre en œuvre l’ordonnance du Tribunal.

(f) Gains en efficience qualitatifs allégués

[620] Dans le rapport révisé de M. Harington, plusieurs allégations sont formulées sous la rubrique [traduction]) « Autres avantages qualitatifs » (rapport révisé de M. Harington, au par. 202). Un certain nombre de ces allégations ont trait à des gains en efficience qui, en soi, auraient dû être quantifiables. Elles concernent notamment une réduction du nombre de pièces de rechange dont l’entité fusionnée aurait besoin pour l’entretien, la réalisation d’économies d’échelle à la suite d’une hausse des volumes aux installations absorbantes, et l’optimisation des plans de dépenses en capital de Secure. Comme aucune explication convaincante n’a été fournie pour justifier qu’on n’ait pas tenté de quantifier ou d’estimer ces gains allégués, ceux-ci ne peuvent se voir accorder un quelconque poids dans l’analyse réalisée au titre de l’article 96 (Tervita CSC, aux par. 128, 137, 139, 151, 159, 165. Voir aussi les paragraphes 582 et 583 des présents motifs).

[621] M. Harington a également soutenu que Secure tirera avantage de certaines des pratiques exemplaires internes de Tervita. Cela dit, ces pratiques exemplaires n’ont pas été décrites, et le Tribunal n’est donc pas en mesure de les apprécier.

[622] M. Harington a également évoqué d’autres gains en efficience qualitatifs concernant XXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXX (transcription confidentielle B, à la p. 2565). Cela dit, aucun élément de preuve ne donne à penser que l’ordonnance du Tribunal aura un effet négatif à cet égard. Ainsi, ces gains en efficience ne sont pas admissibles aux fins de l’analyse que prévoit l’article 96 de la Loi.

[623] Enfin, M. Harington affirme que Secure sera en mesure à court terme de gérer plus efficacement ce qu’elle décrit comme des [traduction] « volumes fluctuants », et ce même sans la technologie mentionnée ci-dessus. Toutefois, il n’y a encore une fois aucun élément de preuve donnant à penser que l’ordonnance du Tribunal nuira à cet égard. Par conséquent, le Tribunal ne s’y attardera pas davantage.

(g) Conclusion concernant les gains en efficience allégués par Secure

[624] En somme, pour les motifs exposés aux paragraphes 499 à 509 précédemment, les gains en efficience allégués qui sont pertinents aux fins de l’analyse menée par le Tribunal sont ceux que M. Harington a calculés en empruntant la démarche axée sur l’ordonnance, à savoir une somme actualisée sur 10 ans de 138,5 millions de dollars. Le montant annualisé équivalent se chiffre à 19,9 millions de dollars.

[625] Ces estimations reposent sur la liste des dessaisissements réclamés par le commissaire, au nombre de 41, dont il a été question aux paragraphes 39 et 40 et 369 et 370 des présents motifs, et sur la liste des intégrations d’installations fournie aux tableaux 4 et 5 du rapport révisé de M. Harington. Étant donné la conclusion que le Tribunal a tirée au paragraphe 481 précédemment et selon laquelle seulement 29 dessaisissements devront avoir lieu pour remédier à la DSC qui découlera du fusionnement, l’estimation de M. Harington a été rajustée de 138 456 865 $ à 140 638 674 $ (voir le tableau 16 des présents motifs). Dans le cadre de cet exercice de rajustement, d’autres modifications ont été apportées concernant certaines installations qui soit figurent sur la liste des dessaisissements du Tribunal, soit devront rouvrir.

[626] Pour les motifs exposés aux paragraphes 569 et 570 et 574 à 583 précédemment, la somme de 140 638 674 $ mentionnée ci-dessus a été réduite de 74 720 624 $ pour tenir compte du fait que le Tribunal a rejeté la totalité des sommes alléguées par Secure relativement à la rationalisation d’ITRE et de PDEA (60 449 729 $) et à l’intégration de lieux d’enfouissement (14 270 895 $). Il restait ainsi des gains en efficience allégués de 65 918 050 $ aux fins de l’analyse[103].

[627] Pour les motifs exposés aux paragraphes 614 à 616 ci-dessus, cette somme provisoire de 65 918 050 $ a ensuite été réduite de 22 986 790 $ + 10 725 447 $ = 33 712 237 $ pour tenir compte des [traduction] « économies de coûts organisationnels » alléguées par Secure qui ont été rejetées.

[628] Ainsi, le montant définitif des gains en efficience que Secure a établis selon la prépondérance des probabilités et qui sont étayés par une preuve claire et convaincante est de 65 918 050 $ – 33 712 237 $ = 32 205 813 $. Le montant annualisé équivalent se chiffre à 4 618 433 $.

[629] Les conclusions qui précèdent sont résumées dans le tableau 18 ci-dessous.


 

Tableau 18 – Synthèse des rajustements supplémentaires apportés aux gains en efficience allégués par Secure

 

Valeur initiale

selon l’appendice 4.1

(Rapport révisé de M. Harington)

Valeur rajustée

 

Valeur actualisée sur 10 ans

Équivalent annualisé de la valeur actualisée sur 10 ans

Gains en efficience allégués initialement

138 456 865 $

140 638 674 $

20 168 105 $

Moins les gains en efficience allégués relativement à la rationalisation d’ITRE et de PDEA

(55 359 949 $)

(60 449 729 $)

(8 668 714 $)

Moins les gains en efficience allégués relativement à la rationalisation de lieux d’enfouissement

(11 686 564 $)

(14 270 895 $)

(2 046 499 $)

Moins une partie des gains en efficience allégués relativement aux économies de coûts organisationnels

 

(22 986 790 $ + 10 725 447 $ = 33 712 237 $)

(3 296 391 $ + 1 538 069 $ = 4 834 460 $)

Gains en efficience résiduels aux fins de l’analyse comparative prévue à l’article 96

32 205 813 $

4 618 433 $

[630] Outre les gains en efficience quantitatifs susmentionnés qui seront pris en considération aux fins de l’analyse comparative qu’appelle l’article 96, il n’y a pas de gains en efficience qualitatifs admissibles à prendre en compte dans le cadre de cette analyse (voir les paragraphes 620 à 623 des présents motifs).

[631] Le Tribunal reconnaît que les dessaisissements qui seront ordonnés pourraient ne pas se concrétiser avant une courte période suivant la date du 30 juin 2023 que M. Harington a supposée. Le Tribunal convient avec M. Harington que ce fait n’aurait pas d’incidence importante sur les estimations susmentionnées (transcription confidentielle B, à la p. 2673).

(2) Les effets anticoncurrentiels allégués par le commissaire

(a) La thèse du commissaire

(i) Introduction

[632] Le commissaire soutient que les gains en efficience admissibles allégués par Secure ne surpasseront vraisemblablement pas, ni ne neutraliseront, les effets d’une diminution de la concurrence qui résultera vraisemblablement du fusionnement, c’est-à-dire les effets de la perte sèche au sens de l’article 96. Cette affirmation tient malgré une importante réduction des autres estimations de la perte sèche que le commissaire a présentées au regard des effets hors prix. Comme il est souligné au paragraphe 3 des présents motifs, ces effets hors prix sont liés aux installations visées par une fermeture[104].

[633] Étant donné qu’il a fourni des estimations quantitatives des effets hors prix, le commissaire s’est sciemment abstenu d’affirmer que ces effets ou tout autre effet anticoncurrentiel devraient être pondérés de manière qualitative aux fins de l’application de l’article 96 (transcription publique, aux p. 2894, 3198).

[634] Toutes les estimations quantitatives fournies par le commissaire étaient exprimées en chiffres annuels. Contrairement à Secure, le commissaire n’a pas présenté d’estimations actualisées sur 10 ans. Il a plutôt invité le Tribunal à appliquer le taux d’actualisation retenu par Secure, soit 8 % (transcription confidentielle B, aux p. 1830, 3050 et 3151; transcription publique, à la p. 2624; rapport révisé de M. Harington, au par. 15)[105].

(ii) Effets sur les prix et sur la production

[635] Dans son rapport initial, M. Miller a affirmé ne pas avoir été en mesure de quantifier ou d’estimer pleinement la perte sèche associée aux effets sur les prix et sur la production. Il a toutefois présenté des calculs à titre d’illustration, selon ce qu’il a précisé, afin de montrer que [traduction] « la perte pourrait se situer entre 0,5 million et 2,4 millions de dollars dans le cas des déchets solides, et entre 0,5 million et 2,0 millions de dollars dans le cas des eaux usées », annuellement (rapport initial de M. Miller, au par. 133). Il a plus tard expliqué que ces estimations étaient fondées sur des élasticités de marché de -0,2 et de -0,87 (rapport initial de M. Miller, au par. 163)[106].

[636] Dans son rapport en réplique, M. Miller a révisé son estimation de la perte sèche annuelle associée aux effets sur les prix et sur la production à 6 millions de dollars, soit un montant supérieur au total des limites supérieures des deux fourchettes exposées ci-dessus, soit 4,4 millions de dollars[107]. Selon la description qu’il en a faite, l’estimation révisée de 6 millions de dollars correspond au point médian des effets sur les prix calculés par Mme Duplantis au moyen d’une analyse fondée sur une [traduction] « expérience naturelle » et des effets sur les prix qu’il a lui-même obtenus au moyen d’estimations (rapport initial de M. Miller, au par. 105; transcription publique, à la p. 1014). Il semble que cette estimation révisée reposait sur une élasticité de la demande de -0,2 et tenait compte des services des lieux d’enfouissement, des PDEA et des ITRE, et non seulement des deux premiers types d’installations (transcription publique, aux p. 1013 et 1014).

[637] Le commissaire s’est fondé sur l’estimation révisée fournie par M. Miller concernant la perte sèche associée aux effets sur les prix et sur la production, soit 6 millions de dollars, à la fois dans ses observations finales écrites (au par. 181) et dans sa plaidoirie finale (transcription confidentielle B, à la p. 3187).

(iii) Effets hors prix : méthode axée sur le profit

[638] Le commissaire a d’abord estimé que les effets hors prix totalisaient 78,12 millions de dollars par année environ pour l’ensemble des clients des parties au fusionnement, y compris ceux situés dans des régions où les parties au fusionnement n’étaient pas en concurrence directe avant le fusionnement (rapport initial de M. Miller, pièce 24). Cette estimation reposait sur le profit variable combiné des parties au fusionnement (la « méthode axée sur le profit ») et sur un modèle d’enchère au second prix, lequel est raisonnable s’agissant des marchés dans lesquels la discrimination par les prix est répandue, selon ce qu’affirme le commissaire. L’estimation de 78,12 millions de dollars était une approximation de la perte de surplus subie par les producteurs de déchets lorsqu’ils sont contraints de se tourner vers une autre installation d’élimination des déchets ayant une valeur moindre à leurs yeux.

[639] Cette estimation de 78,12 millions de dollars a été ramenée à 71,81 millions de dollars une fois que M. Miller a eu revu ses estimations des marges pour tenir compte de coûts variables supplémentaires cernés par M. Harington (rapport en réplique de M. Miller, pièce 2). Le chiffre a ensuite été abaissé à 62,25 millions de dollars après que Mme Duplantis ait eu souligné que M. Miller avait inclus la totalité des marges de quatre installations que Secure avait l’intention de fermer seulement partiellement (transcription confidentielle B, à la p. 3133). Après un examen approfondi, le Tribunal a constaté que ce dernier rajustement (c.-à-d. un retranchement de 9,56 millions de dollars) aurait dû être légèrement moindre (c.-à-d. qu’il aurait dû être de seulement 9,26 millions de dollars), de sorte que le bon chiffre révisé est de 62,55 millions de dollars[108].

[640] Au cours de sa plaidoirie finale, le commissaire a fourni d’autres estimations révisées qu’il a produites après avoir compris que celles susmentionnées ne tenaient pas compte des plans d’intégration à jour de Secure (voir les paragraphes 109 à 124 des présents motifs). Concernant la méthode axée sur le profit, le commissaire a retranché 11,69 millions de dollars à son estimation de 62,25 millions de dollars afin de tenir compte de la perte sèche attribuable aux quatre installations que M. Miller croyait être visées par une fermeture, mais qui ne l’étaient pas en réalité (transcription confidentielle B, aux p. 3134 à 3136). Il en a découlé une estimation finale d’environ 50,56 millions de dollars, que le Tribunal a rajustée à 50,86 millions de dollars.

[641] Conjugués, les rajustements décrits dans les deux derniers paragraphes représentent une réduction de 21,25 millions de dollars par rapport au chiffre de 71,81 millions de dollars mentionné au paragraphe 639 ci-dessus, et de 20,95 millions de dollars une fois apportés les rajustements supplémentaires du Tribunal.

[642] Les rajustements susmentionnés sont résumés dans le tableau 19 ci-dessous.


 

Tableau 19 – Rajustements apportés aux estimations du commissaire relativement aux effets hors prix (méthode axée sur le profit)

 

Rajustement

Montant annuel

Observations

 

78 115 753 $

Perte sèche (par rapport au revenu) attribuable aux fermetures d’installations, en dollars de 2019 (rapport initial de M. Miller, à la pièce 24)[109].

(6 304 154 $)

71 811 599 $

Rajustement apporté pour tenir compte des coûts variables supplémentaires allégués par M. Harington (rapport en réplique de M. Miller, à la pièce 2).

(9 563 651 $)

(9 262 603 $)

62 247 948 $

62 548 996 $

Rajustement initial apporté pour tenir compte des fermetures partielles cernées par Mme Duplantis (rapport révisé de Mme Duplantis, à la note de bas de page 10; pièce CA-R-900, éléments à l’appui du rapport d’expert de Mme Duplantis, document de travail 2, aux cellules G40 et H40). Rajustement révisé par le Tribunal afin d’appliquer la méthode de Mme Duplantis à la somme de 71 811 599 $, plutôt qu’à celle de 78 115 753 $.

(11 687 255 $)

 

50 560 693 $

50 861 741 $

Rajustement initial apporté pour exclure quatre installations ne faisant pas partie de la liste définitive des fermetures prévues par Secure. Le Tribunal a rajusté ce montant d’après un point de départ de 71 811 599 $ plutôt que de 78 115 753 $.

 

(iv) Effets hors prix : méthode axée sur la part de marché

[643] Dans l’éventualité où le Tribunal concluait que les effets anticoncurrentiels admissibles aux fins de l’application de l’article 96 se limitent à ceux qui se réaliseront vraisemblablement dans les régions où les parties au fusionnement étaient en concurrence avant le fusionnement (c.-à-d. les 271 régions de chevauchement), le commissaire a fourni d’autres estimations de la perte sèche, cette fois-ci fondées sur la part de marché des parties au fusionnement (la « méthode axée sur la part de marché »). Initialement, ces estimations se situaient à environ 55 millions de dollars en utilisant le modèle d’enchère au second prix, et de 40 millions de dollars en utilisant un modèle connu sous le nom de modèle de Bertrand (rapport initial de M. Miller, pièce 24). Ces chiffres ont été ramenés à 50,99 millions de dollars et à 37,13 millions de dollars, respectivement, dans le rapport en réplique de M. Miller (à la pièce 2) et dans les observations écrites finales du commissaire (aux paragraphes 175 et 176).

[644] Dans ses observations finales, le commissaire a présenté deux ensembles possibles d’estimations rajustées.

[645] Pour le premier ensemble, il a appliqué la réduction de 21,25 millions de dollars qu’il avait utilisée suivant la méthode axée sur le profit (voir le paragraphe 641 des présents motifs). Ainsi, après rajustement, les chiffres de 50,99 millions de dollars et de 37,13 millions de dollars susmentionnés passent à 29,8 millions de dollars (modèle d’enchère au second prix) et à 15,9 millions de dollars (modèle de Bertrand) (transcription confidentielle B, aux p. 3139 à 3142). Le commissaire a affirmé que ces estimations révisées sont prudentes, et ce pour au moins deux raisons. Premièrement, il a affirmé qu’elles n’incluent pas la perte sèche associée au projet qu’a Secure de fermer partiellement plusieurs installations. Deuxièmement, elles résultent de l’application de la pleine réduction de 21,25 millions de dollars à l’estimation de 71,81 millions de dollars obtenue au moyen de la méthode axée sur le profit. Le commissaire a affirmé que la déduction de la totalité de la somme de 21,25 millions de dollars serait une démarche prudente, car la méthode axée sur la part de marché vise seulement les ventes réalisées dans les 271 régions de chevauchement concurrentiel entre Secure et Tervita, alors que la méthode axée sur le profit tient compte des ventes totales tirées des activités menées avant le fusionnement, ce qui comprend les ventes réalisées dans les régions où les parties au fusionnement ne se livraient pas concurrence (transcription confidentielle B, aux p. 3139 et 3140).

[646] Pour son deuxième ensemble d’estimations rajustées suivant la méthode axée sur la part de marché, le commissaire a appliqué le même pourcentage de réduction de 29 %[110] aux sommes de 50,99 millions de dollars et de 37,13 millions de dollars mentionnées précédemment, tout comme il l’avait fait pour la somme de 71,81 millions de dollars suivant la méthode axée sur le profit. Ainsi, une réduction de 29 % appliquée aux estimations de 50,99 millions de dollars et de 37,13 millions de dollars a donné de nouvelles estimations de 36,2 millions de dollars et de 26,3 millions de dollars, respectivement, pour les effets hors prix calculés d’après la méthode axée sur la part de marché. Le commissaire a fait valoir que ce deuxième ensemble d’estimations rajustées convenait mieux que le premier, en ce qu’il ne présentait pas les lacunes décrites au paragraphe qui précède (transcription confidentielle B, aux p. 3140, 3176). Comme il en est question plus en détail ci-après, le Tribunal convient avec le commissaire que, des deux ensembles de réductions dont il vient d’être question, le deuxième est supérieur au premier.

[647] Les rajustements dont il vient d’être question, légèrement modifiés par le Tribunal et tenant compte de la conclusion susmentionnée en faveur du deuxième ensemble de rajustements finaux, sont résumés dans le tableau 20 ci-dessous.


 

Tableau 20 – Rajustements apportés aux estimations du commissaire concernant les effets hors prix[111] (méthode axée sur la part de marché)

 

Montant annuel (modèle d’enchère au second prix)

Montant annuel (modèle de Bertrand)

Rajustements apportés au modèle d’enchère au second prix

Observations

55 140 000 $

40 050 000 $

 

Estimations de départ suivant le modèle de Bertrand et le modèle d’enchère au second prix (rapport initial de M. Miller, à la pièce 24).

50 990 000 $

37 130 000 $

(4 150 000 $)

Rajustement apporté pour tenir compte des coûts variables supplémentaires allégués par M. Harington (rapport en réplique de M. Miller, à la pièce 2).

36,2 M$

36 007 707 $

26,3 M$

26 288 040 $

(14,79 M$)

(14 889 080 $)

Application du rajustement de 29 % retenu dans le cadre de la méthode axée sur le profit. Rajustement additionnel apporté par le Tribunal afin que soit appliqué un pourcentage de rajustement de 29,2 %, à la lumière du ratio moyen de 70,8 % observé entre les estimations obtenues par M. Miller selon la méthode axée sur la part de marché et celles qu’il a obtenues selon la méthode axée sur le profit.

 

[648] En définitive, le commissaire a fait valoir que la somme de la perte sèche associée à ces effets sur les prix et sur la production (6 millions de dollars) et de ses estimations finales des effets hors prix (50,56 millions de dollars suivant la méthode axée sur le profit et 36,2 millions de dollars suivant la méthode axée sur la part de marché, en appliquant le modèle d’enchère au second prix) est supérieure à la portion admissible des gains en efficience annuels allégués par Secure (20,2 millions de dollars)[112].

(b) La thèse de Secure

[649] Secure fait valoir quatre arguments principaux concernant les effets anticoncurrentiels allégués par le commissaire. Premièrement, elle affirme que le commissaire n’a pas correctement quantifié les effets sur les prix et sur la production et qu’il les a de toute façon surestimés. D’après les estimations faites par Mme Duplantis, ces effets se situent entre 1,2 million et 1,6 million de dollars, selon certaines hypothèses[113]. Deuxièmement, Secure fait valoir que les effets hors prix sont dépourvus de fondement juridique, économique et factuel. Troisièmement, Secure soutient que le commissaire ne s’est pas acquitté de son fardeau de présentation que ce soit concernant les effets hors prix ou concernant les effets allégués sur les prix et sur la production. Quatrièmement, Secure prétend que, de toute façon, les gains en efficience qui résulteront vraisemblablement du fusionnement surpasseront et neutraliseront la somme des effets hors prix et des effets sur les prix et sur la production.

(c) Analyse des effets allégués sur les prix et sur la production

(i) Élasticité-prix de la demande

[650] Secure soutient que le commissaire ne s’est pas acquitté de son fardeau de fournir une estimation de l’élasticité-prix de la demande. À cet égard, elle affirme que l’expert du commissaire a présenté une fourchette de valeurs non étayée par des éléments de preuve, soit une fourchette de -0,2 à -0,87. Le dernier chiffre a été [traduction] « supposé » d’après un calcul fait par M. Kahwaty dans l’affaire Tervita TC aux paragraphes 298 à 303 de la décision, alors que celui de -0,2 correspond, selon ce qu’a expliqué M. Miller, [traduction] « à un chiffre rond proche de zéro » (transcription publique, à la p. 1013).

[651] Le Tribunal rejette l’argument de Secure selon lequel le commissaire ne s’est pas acquitté du fardeau qu’il avait de fournir une estimation de l’élasticité-prix de la demande.

[652] Pour s’acquitter de son fardeau au regard des effets allégués sur les prix et sur la production, le commissaire devait notamment établir l’élasticité-prix de la demande (Tervita CSC, au par. 132). À cet égard, il était suffisant de fournir une fourchette d’estimations que Secure pourrait attaquer (Tervita CSC, aux par. 100, 124 et 125, 134 à 136). C’est ce que M. Miller a fait dans son rapport initial, au paragraphe 163. La mesure dans laquelle cette fourchette alléguée était étayée par une preuve claire et convaincante joue sur le poids que le Tribunal y accordera après avoir examiné le dossier de preuve dans son ensemble.

[653] Ainsi, Secure connaissait les arguments à réfuter et a eu entièrement l’occasion de réagir à la fourchette d’estimations fournie par M. Miller et de s’y attaquer, et c’est exactement ce que M. Yatchew a fait dans son rapport d’expert (rapport de M. Yatchew, au par. 8). La situation était tout autre dans l’affaire Tervita CSC. En effet, dans ce cas, le commissaire n’avait pas fourni d’élasticités dans le rapport initial de son experte, mais il avait par la suite présenté une estimation de l’élasticité-prix dans un rapport d’expert déposé en réplique peu de temps avant l’audience (Tervita CSC, aux par. 135 et 136).

[654] M. Yatchew a, à juste titre, affirmé que la preuve présentée par M. Miller n’était aucunement étayée et qu’elle était [traduction] « au mieux, anecdotique ». M. Miller l’a implicitement reconnu en affirmant qu’il n’était pas au courant de l’existence de données ou d’estimations de l’élasticité qui auraient pu lui permettre de quantifier pleinement la perte sèche et que [traduction] « l’exercice économétrique à mener pour obtenir une estimation fiable serait pour le moins difficile » (rapport initial de M. Miller, au par. 163; transcription publique, à la p. 1015). En réponse aux questions de la formation, M. Miller a ajouté ceci : [traduction] « obtenir l’élasticité au moyen d’un tel exercice est en fait incroyablement difficile » (transcription publique, à la p. 1019).

[655] En dépit de ce qui précède, M. Miller a déclaré que la limite supérieure de sa fourchette, soit -0,87, lui [traduction] « semblait plus grande que ce qu’elle aurait dû être selon [sa] compréhension du marché et de la capacité – vous savez, la substitution qui se produirait vraisemblablement aux dépens des [fournisseurs tiers de services de gestion des déchets] » (transcription publique, à la p. 1013). Il s’est toutefois dit confiant au sujet de la limite inférieure de sa fourchette (transcription publique, aux p. 1014, 1017).

[656] Dans son rapport, M. Yatchew a présenté une estimation de l’élasticité-prix de la demande au niveau de l’entreprise en se servant d’un ensemble de données exhaustif de Tervita qui incluait de nombreuses années, et en ayant recours à ce qu’il a décrit comme étant des [traduction] « techniques correspondant à l’étalon de référence » (transcription confidentielle B, aux p. 1726, 1729). Précisément, M. Yatchew a fourni des estimations ponctuelles de -0,24, de -0,13 et de -0,49 pour les services fournis par les lieux d’enfouissement, les ITRE et les PDEA, respectivement (rapport de M. Yatchew, au par. 60). Il a également fourni une estimation moyenne pondérée de
-0,22 pour ces services combinés (rapport de M. Yatchew, au par. 61). À la lumière des différentes analyses qu’il a réalisées, il a convenu que la demande est [traduction] « très inélastique » et qu’une [traduction] « élasticité de marché se situant entre près de zéro et -0,25 serait raisonnable, et qu’il est probable qu’elle se rapproche davantage du bas de cette fourchette » (rapport de M. Yatchew, au par. 64).

[657] Les pièces déposées à l’appui du rapport de M. Yatchew révèlent que les estimations de ce dernier n’étaient pas statistiquement significatives (rapport de M. Yatchew, aux p. 57 à 63).

[658] Le commissaire n’a pas contre-interrogé M. Yatchew. Cela dit, en réponse aux questions que lui posait la formation, ce dernier a reconnu que son analyse comportait plusieurs lacunes, dont le fait que certaines variables comme les frais de transport, les prix pratiqués par d’autres entreprises que Tervita et la durée des contrats n’avaient pas été incluses (transcription confidentielle B, aux p. 1735 à 1739). M. Yatchew a également reconnu que son analyse devait préférablement être interprétée comme fournissant les limites d’une fourchette et non des estimations particulières de l’élasticité-prix de la demande pour les services offerts par les lieux d’enfouissement, les ITRE et les PDEA pris séparément (transcription confidentielle B, à la p.1749). Il a aussi convenu que ces limites reposaient sur son propre jugement et non sur des résultats économétriques précis (transcription confidentielle B, à la p. 1751), et qu’il s’agissait davantage d’[traduction] « ordres de grandeur » que de valeurs précises (transcription confidentielle B, à la p. 1752).

[659] En raison des lacunes que présentent les analyses de MM. Miller et Yatchew, le Tribunal n’a pas été en mesure de tirer une conclusion définitive en se fondant seulement sur les éléments de preuve, et selon la prépondérance des probabilités, en ce qui a trait à l’élasticité-prix de la demande dans les marchés des services des lieux d’enfouissement, des ITRE et des PDEA.

[660] Toutefois, au vu du dossier de preuve dans son ensemble, le Tribunal conclut que, selon la prépondérance des probabilités, l’élasticité-prix de la demande de chacun de ces services se situe vraisemblablement entre -0,1 et -0,3. Cette fourchette ne cadre pas avec ce à quoi MM. Yatchew et Miller ont abouti (voir les observations présentées précédemment et la transcription confidentielle B, à la p. 3401), mais elle est logique compte tenu (i) des éléments de preuve étayant la non-disponibilité, dans les faits, de solutions de rechange aux services des lieux d’enfouissement, des ITRE et des PDEA tiers, (ii) des coûts élevés qui seraient associés à l’approvisionnement autonome, (iii) de la nécessité de recourir aux services de tiers durant les périodes de production élevée, et (iv) de l’absence relative de pouvoir compensateur.

(ii) Hausses de prix

[661] Pour les motifs exposés aux paragraphes à 207 à 215 des présents motifs, le Tribunal a conclu que les estimations de M. Miller sont plus fiables que celles de Mme Duplantis au regard des effets vraisemblables du fusionnement sur les prix. En l’absence d’éléments de preuve convaincants qui mettraient en doute les estimations de M. Miller, le Tribunal a accepté ces estimations d’une manière générale. Celles-ci se situent entre 5 % et 72,3 % dans l’ensemble des 143 marchés pertinents (voir les paragraphes 172 et 201 des présents motifs). D’après une pondération en fonction du revenu, M. Miller a calculé que les hausses de prix seraient en moyenne de 8,9 % aux lieux d’enfouissement, de 24,3 % aux ITRE et de 11,1 % aux PDEA pour l’ensemble élargi des 271 marchés se chevauchant (rapport en réplique de M. Miller, à la pièce 1).

(iii) Estimation de la perte sèche

[662] Comme il est mentionné au paragraphe 635 ci-dessus, M. Miller a initialement estimé que la perte sèche annuelle associée aux effets sur les prix et sur la production se situait entre 0,5 million et 2,4 millions de dollars dans le cas des services de gestion des déchets solides, et entre 0,5 million et 2 millions de dollars dans le cas des services de gestion des eaux usées. Il a toutefois précisé que ces estimations étaient présentées à titre d’[traduction] « illustration » (rapport initial de M. Miller, au par. 163). Il n’a pas fourni d’estimations distinctes selon qu’il s’agissait de services fournis par les lieux d’enfouissement, par les ITRE ou par les PDEA.

[663] Dans son rapport déposé en réplique, M. Miller s’est penché sur la perte sèche associée aux effets sur les prix et sur la production, dans un paragraphe visant à répondre à l’estimation de Mme Duplantis selon laquelle cette perte sèche causée par le fusionnement se situera entre 1,2 million et 1,6 million de dollars, annuellement[114]. Après avoir souligné que les estimations de Mme Duplantis reposaient sur les effets sur les prix qu’elle avait calculés au moyen de son analyse fondée sur une expérience naturelle (laquelle a été rejetée par le Tribunal en fin de compte)[115], M. Miller a affirmé que les estimations de Mme Duplantis concernant la perte sèche qui découlerait d’une réduction de volume augmenteraient si l’effet du fusionnement sur les prix était plus grand. Il a ensuite déclaré ceci : [traduction] « Par exemple, même si l’effet sur les prix se situe entre mes estimations et les siennes, la perte sèche découlant de la transaction complète est d’environ 6 millions de dollars par année (voir la pièce 3) » (rapport en réplique de M. Miller, au par. 105). Cette seule affirmation, qu’il a essentiellement répétée au cours de son témoignage (transcription publique, aux p. 798 et 799, 1014), était sa tentative révisée de quantifier l’ampleur de la perte sèche associée aux effets sur les prix et sur la production.

[664] Pour obtenir son estimation révisée de 6 millions de dollars, M. Miller n’a pas tenu compte de ses hausses de prix révisées à la baisse (voir le rapport en réplique de M. Miller, aux pièces 1 et 3)[116]. S’il l’avait fait, l’estimation aurait été inférieure, mais le Tribunal n’est malheureusement pas en mesure de dire dans quelle mesure l’estimation aurait été moindre.

[665] M. Miller n’a pas non plus tenté de calculer la perte sèche associée aux effets sur les prix et sur la production en utilisant ses estimations révisées des hausses de prix. À la lumière du tableur de Mme Duplantis et du tableur combiné de M. Miller et de Mme Duplantis, le Tribunal comprend qu’il aurait été facile pour M. Miller de quantifier cette perte sèche. De fait, le Tribunal a calculé que si la perte sèche avait été quantifiée en retenant les estimations ponctuelles de l’élasticité qu’a faites M. Yatchew, soit -0,24, -0,13 et -0,49 dans le cas des services des lieux d’enfouissement, des ITRE et des PDEA, respectivement, ainsi que les hausses de prix prévues par M. Miller – que le Tribunal a accueillies de manière générale[117], la perte sèche associée aux effets sur les prix et sur la production serait d’environ 10,5 millions de dollars annuellement. Dans la mesure où ces calculs reposent sur le dossier de preuve, le Tribunal aurait pu être enclin à les adopter, d’autant plus que les parties semblent être d’accord pour dire que l’élasticité-prix de la demande se situe près de -0,2[118] et que Secure était au courant des hausses de prix prévues par M. Miller depuis que le rapport initial de ce dernier avait été déposé.

[666] Cela dit, la formation est d’avis que la jurisprudence ne permet pas au Tribunal de s’en remettre à ses propres calculs de la perte sèche dans les circonstances particulières de la présente affaire, et ce pour deux raisons principales. Premièrement, l’arrêt Tervita CSC nous enseigne que le commissaire est tenu en droit de quantifier les effets anticoncurrentiels mesurables, ou à tout le moins d’en faire une estimation (Tervita CSC, aux par. 124 et 125, 128), à défaut de quoi il ne permettrait pas « aux parties au fusionnement de connaître la preuve qui leur est opposée » (Tervita CSC, au par. 124). Deuxièmement, le commissaire s’est expressément fondé sur l’[traduction] « estimation » révisée présentée par M. Miller concernant la perte sèche annuelle associée aux effets sur les prix et sur la production, soit 6 millions de dollars, tant dans ses observations finales écrites que dans sa plaidoirie finale, sans jamais même évoquer de chiffre précis plus élevé. Par conséquent, l’adoption d’une estimation plus élevée de la perte sèche exacerberait l’éventuel manquement à l’équité évoqué dans le passage cité ci-dessus (voir également Tervita CSC, aux par. 131, 136).

[667] Compte tenu de ce qui précède, il reste au Tribunal (i) les estimations initiales de M. Miller, soit [traduction] « entre 0,5 million et 2,4 millions de dollars dans le cas des déchets solides, et entre 0,5 million et 2,0 millions de dollars dans le cas des eaux usées », annuellement (rapport initial de M. Miller, au par. 133), et (ii) l’estimation révisée de 6 millions de dollars de M. Miller, laquelle est trop élevée parce qu’elle repose sur les estimations initiales de ce dernier concernant les hausses de prix, avant leur révision à la baisse. Malheureusement, le Tribunal n’est pas en mesure de rajuster lui-même à la baisse le montant de 6 millions de dollars présenté par M. Miller. Par conséquent, il ne peut utiliser ce chiffre.

[668] Il ne lui reste donc que les estimations initiales de M. Miller. La formation comprend que la limite inférieure de chacune des fourchettes d’estimations initiales repose sur une élasticité-prix de la demande de -0,2, comparativement à une élasticité-prix de -0,87 dans le cas de la limite supérieure. Après rajustement de ces estimations initiales pour tenir compte de la conclusion du Tribunal selon laquelle l’élasticité-prix de la demande se situe entre -0,1 et -0,3 environ, les estimations annuelles révisées sont de 500 000 $ à 1 500 000 $ pour les déchets solides et les eaux usées combinés[119].

[669] Le Tribunal conclut que cette fourchette de 500 000 $ à 1 500 000 $ par année est celle qui doit être retenue aux fins de l’analyse comparative qu’appelle l’article 96 de la Loi. Toutefois, il est d’avis que la limite supérieure des estimations est probablement beaucoup plus élevée vu ses observations présentées plus loin au paragraphe 715. Voilà pourquoi le Tribunal, plus loin dans les présents motifs, parlera d’une fourchette allant de 500 000 $ à « au moins » 1 500 000 $. Le Tribunal en tiendra compte si l’analyse comparative que prévoit l’article 96 de la Loi donne un résultat « serré » (Tervita CSC, au par. 154).

(d) Analyse des effets hors prix allégués

[670] Comme il est mentionné aux paragraphes 638 à 648 des présents motifs, le commissaire a fait une estimation des effets hors prix au moyen de deux méthodes principales : (i) la méthode axée sur le profit, s’appliquant à l’ensemble des clients de Secure et de Tervita combinés; (ii) la méthode axée sur la part de marché, s’appliquant seulement aux transactions générées à des emplacements clients situés à l’intérieur des 271 régions de chevauchement concurrentiel entre Secure et Tervita. Le commissaire a ensuite fourni deux estimations distinctes découlant de la méthode axée sur la part de marché, selon que le modèle d’enchère au second prix ou le modèle de Bertrand avait été retenu.

[671] Secure n’a pas fourni d’estimations concernant les effets hors prix allégués, parce qu’elle affirmait que ces effets étaient dépourvus de fondement juridique, économique et factuel.

[672] Pour les motifs exposés aux paragraphes 518 à 524 des présents motifs, tout effet se produisant au-delà des 271 régions de chevauchement concurrentiel entre Secure et Tervita est non admissible aux fins de l’application de l’article 96 de la Loi. Par conséquent, le Tribunal rejette l’estimation des effets hors prix que le commissaire a obtenue en ayant recours à la méthode axée sur le profit, à savoir l’estimation de 50,56 millions de dollars dont il a été question au paragraphe 640 des présents motifs et que le Tribunal a ramenée à 50 861 741 $ au bas du tableau 19.

[673] Les effets obtenus au moyen de la méthode axée sur la part de marché sont quant à eux admissibles aux fins de l’application de l’article 96, parce qu’ils concernent les effets d’une diminution de la concurrence entre Secure et Tervita (voir les paragraphes 525 à 540 des présents motifs).

[674] Comme il a été mentionné précédemment, les estimations finales du commissaire concernant les effets hors prix calculés au moyen de la méthode axée sur la part de marché étaient de 36,2 millions de dollars selon le modèle d’enchère au second prix et de 26,3 millions de dollars selon le modèle de Bertrand. Le Tribunal a légèrement rajusté l’estimation obtenue au moyen du modèle d’enchère au second prix, à 36 007 707 $ (voir la note de bas de page 112 et le tableau 20 ci-dessus).

[675] Le Tribunal conclut que le modèle de Bertrand ne convient pas aux faits particuliers de l’espèce, en ce que ce modèle suppose que les prix sont fixés sans négociation et qu’une installation fixera un seul prix, un peu comme un prix affiché, pour un marché donné (rapport en réplique de M. Miller, au par. 89; transcription publique, aux p. 743, 791 et 792, 855 et 856, 862, 871, 1001 et 1002, 1795). Ces hypothèses ne concordent pas avec les éléments de preuve en l’espèce. En particulier, moult éléments montrent qu’il y a négociation entre les fournisseurs de services de gestion des déchets (y compris Secure et Tervita) et leurs clients. De nombreux éléments de preuve étayent également l’établissement de prix sur mesure, y compris une discrimination par les prix, au niveau du client individuel.

[676] Dans la mesure où il ne présente pas de telles lacunes, le modèle d’enchère au second prix est potentiellement mieux adapté aux faits particuliers de l’espèce.

[677] Cela dit, le recours au modèle d’enchère au second prix pour établir les prix a pour conséquence que le profit variable d’une installation visée par une fermeture représente la valeur additionnelle qu’elle générera pour ses clients, et que la totalité de cette valeur représente la perte sèche qui se produit lorsque l’installation ferme (rapport initial de M. Miller, aux par. 137, 138, 145, 152, 153; rapport en réplique de M. Miller, aux par. 97, 101; transcription confidentielle B, à la p. 785). Cette valeur additionnelle résulte de formes de différenciation observables et non observables (rapport en réplique de M. Miller, aux par. 78, 100 et 101; transcription publique, aux p. 832 et 833).

[678] En outre, le modèle d’enchère au second prix suppose une discrimination parfaite par les prix dans chaque marché au niveau du client (transcription publique, aux p. 726, 791 et 792, 823, 842, 855, 862; rapport en réplique de M. Miller, à la note de bas de page 137; rapport révisé de Mme Duplantis, au par. 57). Bien qu’ayant reconnu que la discrimination par les prix n’est pas parfaite dans les marchés pertinents, M. Miller a soutenu que le modèle d’enchère au second prix [traduction] « semblait être une association raisonnable selon ce [qu’il avait] vu dans les données » (transcription publique, aux p. 726, 840, 842 et 843).

[679] Lorsqu’il a appliqué la méthode axée sur la part de marché, M. Miller a adapté le modèle d’enchère au second prix pour exclure les revenus tirés des déchets générés en dehors des 271 régions de chevauchement géographique[120]. Pour ce faire, il a combiné la part de marché et les marges de chacune des installations visées par une fermeture afin d’obtenir le profit variable associé aux déchets générés dans les 271 régions de chevauchement géographique[121].

[680] Dans les formes, M. Miller a calculé comme suit la variation du surplus du consommateur à la suite de la fermeture d’une installation :

Variation du surplus total = σ ln (1 − Part de l’installation fermée)

[681] M. Miller a expliqué que [traduction] « le paramètre σ convertit en dollars la valeur perdue sans unité, c’est-à-dire en profit perdu aux mains des producteurs de pétrole et de gaz en raison de la fermeture » (rapport initial de M. Miller, au par. 155).

[682] Selon M. Miller, parmi les aspects observables et non observables de la différenciation auxquels les clients accordent de la valeur et qui jouent sur le profit variable d’une installation figure la réduction des frais de transport et des délais d’attente pouvant se produire lorsque les déchets sont dirigés vers cette installation. Ils comprennent également des contraintes de capacité moindres comparativement à d’autres installations situées non loin, de meilleures relations avec les représentants auprès de la clientèle, l’accès à des services ou à de l’infrastructure spécialisés et la réputation du fournisseur de services de gestion des déchets (rapport initial de M. Miller, aux par. 148, 153; transcription publique, aux p. 768 à 772, 999 à 1001).

[683] Mme Duplantis a critiqué le fait que M. Miller ait eu recours au modèle d’enchère au second prix vu la matrice factuelle de l’affaire, et ce, pour plusieurs raisons qui ne sont pas toutes pertinentes pour les fins qui nous occupent. Entre autres, Mme Duplantis a affirmé que le profit variable des installations visées par une fermeture ne constitue pas une représentation juste de la valeur perdue par les clients quand les installations ferment (rapport révisé de Mme Duplantis, aux par. 20, 135). À cet égard, elle a souligné que les frais de transport ne représentent qu’une petite portion de l’estimation de la perte sèche globale de M. Miller, alors que les éléments de preuve de sources multiples font ressortir l’importance capitale que les clients accordent aux frais de transport le moment venu de choisir l’endroit où ils achemineront leurs déchets. Mme Duplantis s’est demandé comment M. Miller pouvait considérer les frais de transport comme le seul élément observable de la valeur qui, selon lui, joue sur le profit variable d’une installation visée par une fermeture, tout en y attribuant une si petite portion de son estimation de la perte sèche associée à la fermeture d’installations (rapport révisé de Mme Duplantis, aux par. 136 à 142). Mme Duplantis a insisté sur cette dernière critique en faisant remarquer que M. Miller a accordé une grande attention aux frais de transport dans ses rapports, et qu’il a rarement mentionné, ou étayé au moyen d’éléments de preuve, l’importance d’autres aspects auxquels les clients pourraient accorder de la valeur au moment de choisir une installation de gestion des déchets (rapport révisé de Mme Duplantis, aux par. 137 et 138).

[684] Mme Duplantis a ajouté que la valeur pouvant être accordée à la réputation d’une quelconque installation n’est pas liée à cette installation, mais plutôt à une entreprise particulière. Sur ce dernier point, elle a souligné que les clients des installations visées par une fermeture continueront, après le fusionnement, de bénéficier de la [traduction] « valeur associée à la réputation » combinée de Secure et de Tervita (rapport révisé de Mme Duplantis, aux par. 22 et 23, 148 à 150).

[685] La majorité de la formation souscrit aux critiques exprimées par Mme Duplantis ci-dessus.

[686] En somme, la majorité de la formation considère que, pour ce qui est de la perte sèche, l’estimation d’une grande ampleur à laquelle M. Miller est parvenu en ayant recours au modèle d’enchère au second prix, telle qu’elle a été modifiée suivant la méthode axée sur la part de marché, ne cadre pas avec le reste du dossier de preuve en l’espèce. En d’autres termes, l’estimation de 36,2 millions de dollars de la perte sèche que le commissaire a présentée au bout du compte dans ses observations finales ne trouve pas écho ailleurs dans le dossier de preuve dont dispose le Tribunal[122].

[687] Selon le dossier de preuve, les frais de transport sont le principal facteur dont tiennent compte les clients au moment de décider de l’endroit où acheminer leurs déchets (voir notamment le rapport révisé de Mme Duplantis, à la note de bas de page 170; transcription confidentielle B, aux p. 29, 55, 118, 122, 245, 342 et 343, 351 à 353, 392 et 393, 444 et 445, 498 et 499, 529 et 530, 564 et 565, 591, 593, 686, 890, 1097, 1261, 1585 et 1586; transcription confidentielle A, aux p. 324, 365 et 366, 483 et 484). Selon l’estimation de M. Miller, la perte sèche annuelle attribuable aux frais de transport accrus se situera entre 6,4 millions de dollars (calcul reposant sur la distance parcourue) et 7,2 millions de dollars (calcul reposant sur le temps de déplacement) (rapport initial de M. Miller, aux par. 139, 157, 159, et à la pièce 25). Compte tenu de l’importance des tarifs horaires de transport par camion, le Tribunal est d’avis que la deuxième estimation convient davantage que la première. Le Tribunal est également d’avis que cette estimation est plus exacte que celle inférieure de 2 658 500 $ fournie par M. Harington, essentiellement en raison des lacunes que présentent les estimations de ce dernier (rapport initial de M. Miller, au par. 158)[123].

[688] Dans son rapport en réplique, M. Miller a affirmé avoir retenu une hypothèse prudente, à savoir des frais de transport par camion de 155 $ l’heure, pour arriver aux estimations susmentionnées. Après avoir mentionné que les frais de transport par camion [traduction] « peuvent atteindre 220 $ » l’heure, il a dit penser que son estimation de la hausse des frais de transport se situerait plutôt entre 9,2 millions et 10,2 millions de dollars s’il utilisait ce chiffre (rapport en réplique de M. Miller, au par. 102). Cela dit, M. Miller n’a pas fourni d’éléments de preuve pour étayer la mesure dans laquelle un tarif horaire de 220 $ est réellement payé pour faire transporter des déchets dans les marchés pertinents. En fait, les éléments de preuve de M. Miller au sujet du tarif de 220 $ se limitaient à une seule référence à une [traduction] « fourchette de 150 à 220 $ l’heure » dans la déclaration de témoin de CNRL (rapport initial de M. Miller, à la note de bas de page 321; rapport en réplique de M. Miller, à la note de bas de page 146).

[689] Concernant ce qui précède, le Tribunal considère que le point de départ qui convient pour faire l’estimation des frais de transport accrus est de 7 200 000 $ par année.

[690] Pour de nombreux clients, les frais de transport incluent les délais d’attente. Or, à l’exception de rares éléments de nature anecdotique au sujet d’une éventuelle hausse des délais d’attente à la suite du fusionnement, pratiquement aucun élément de preuve n’indique la mesure dans laquelle ces délais augmenteront vraisemblablement dans une quelconque installation absorbante ou dans l’ensemble de ces installations, globalement, à la suite du fusionnement. La seule estimation quantitative que M. Miller a fournie reposait sur l’hypothèse non étayée d’un ajout de 30 minutes au délai d’attente par voyage, et ce pour l’ensemble des 178 000 voyages qui, selon ce qu’il a présenté, ont été effectués entre les puits des clients et les installations visées par une fermeture en 2019. En supposant des frais de transport par camion de 155 $ l’heure, il a estimé que les clients auraient à payer 13,8 millions de dollars de plus en raison de délais d’attente accrus à la suite du fusionnement. Ce chiffre est passé à 19,6 millions de dollars quand M. Miller a posé pour hypothèse un tarif de transport par camion de 220 $ l’heure (rapport en réplique de M. Miller, au par. 104). Étant donné que les hypothèses de M. Miller ne sont pas étayées, les estimations ne suffisent pas à persuader la formation que, selon la prépondérance des probabilités, les clients auront vraisemblablement à payer des frais de transport additionnels s’approchant ne serait-ce que de l’estimation la plus faible des deux, soit 13,8 millions de dollars, en raison de délais d’attente accrus à la suite du fusionnement. En l’absence d’autres estimations concernant les frais additionnels qui pourraient découler d’une hausse des délais d’attente, la formation n’est pas en mesure de se faire une idée de la hausse à laquelle l’on pourrait vraisemblablement s’attendre, s’il en est[124]. La formation souligne que tant M. Miller que M. Harington ont reconnu qu’il n’existait pas d’éléments de preuve leur permettant de calculer et de quantifier l’ampleur des délais d’attente (transcription confidentielle B, à la p. 2914).

[691] Outre les éléments de preuve étayant l’importance des frais de transport et des délais d’attente, la preuve est très limitée au sujet de la valeur que les clients accordent à d’autres aspects des ensembles de services différenciés offerts à une installation particulière. La preuve est si maigre que la majorité des membres est loin d’être convaincue que cette valeur représente ne serait-ce qu’une part importante de l’écart entre l’estimation finale de 36,2 millions de dollars que le commissaire a faite des effets hors prix annuels en appliquant la méthode axée sur la part de marché[125], d’une part, et l’estimation de M. Miller selon laquelle les frais de transport augmenteront de 7 200 000 $, d’autre part.

[692] La formation souligne que le deuxième chiffre ne représente qu’environ 20 % de la perte sèche totale de 36,2 millions de dollars estimée par le commissaire. Étant donné l’importance accordée aux frais de transport comparativement aux autres facteurs, l’absence de quantification ou d’estimation fiable de la valeur que pourraient vraisemblablement représenter des frais de transport accrus associés aux délais d’attente et les rares éléments de preuve qui concernent les autres aspects des ensembles de services différenciés éventuellement offerts aux installations visées par une fermeture, la majorité des membres n’est pas convaincue du bien-fondé de l’estimation de 36,2 millions de dollars du commissaire. De fait, ce chiffre ne trouve pas écho dans le reste du dossier de preuve. Autrement dit, l’estimation théorique de la perte sèche que M. Miller a obtenue au moyen d’une approche « descendante » n’est pas suffisamment étayée par des éléments de preuve « ascendants» concernant les composantes des aspects « observables et non observables » de la différenciation alléguée pour être persuasive.

[693] Par conséquent, la formation rejette l’estimation de 36,2 millions de dollars fondée sur le modèle d’enchère au second prix et la méthode axée sur la part de marché, qu’elle a ramenée à 36 007 707 $ (au tableau 20)[126].

[694] Ainsi, la seule estimation persuasive dont le Tribunal dispose désormais concernant les effets hors prix est celle de 7 200 000 $ qu’a faite M. Miller des frais de transport additionnels.

[695] Cela dit, cette estimation n’est qu’un point de départ, étant donné que M. Miller l’a produite lorsqu’il s’attendait à la fermeture complète de 29 installations (rapport initial de M. Miller, à la pièce 33). En outre, l’estimation tenait compte d’une hausse des frais de transport pour les clients se trouvant à l’intérieur et à l’extérieur des 271 régions dans lesquelles il y avait chevauchement concurrentiel entre Secure et Tervita avant le fusionnement.

[696] Comme il a été expliqué aux paragraphes 109 et 639 et 640 précédemment, les estimations fournies dans le rapport initial de M. Miller supposaient la fermeture complète de quatre installations qui fermeront seulement partiellement ainsi que de quatre autres installations qui ne fermeront pas. Le Tribunal juge probable que quatre autres installations que M. Miller s’attendait à voir fermer ne cesseront pas leurs activités au bout du compte[127].

[697] En l’absence d’une répartition par installation et par marché de l’estimation de 7 200 000 $ de M. Miller, il est raisonnablement possible d’utiliser l’information fournie à la pièce 7 du rapport en réplique de M. Miller pour faire une approximation de l’importance relative des frais de transport accrus associés aux installations qui ne fermeront pas complètement. Pour ce faire, on peut appliquer à l’estimation des frais de transport accrus de M. Miller le même pourcentage de réduction que le Tribunal a jugé approprié lorsqu’il a fait l’estimation de la perte sèche associée à la fermeture d’installations. À cet égard, le tableau 21 ci-après reproduit et explique davantage les rajustements exposés dans le tableau 19 ci-dessus. En partant de la perte sèche annuelle totale de 71,8 millions de dollars associée aux 29 installations désignées à la pièce 7 du rapport en réplique de M. Miller, puis en déduisant de ce montant la perte sèche associée à chacune des huit installations qui ne fermeront pas complètement, on obtient une perte sèche totale d’environ 28,0 millions de dollars pour les 21 installations visées par une fermeture (voir le tableau 21 ci-après). Ces rajustements additionnels tiennent compte de fermetures d’installations supplémentaires, du moment des fermetures et des seuls effets qui se produiront à l’intérieur des 271 régions de chevauchement.

Tableau 21 – Rajustements additionnels apportés aux estimations du commissaire concernant les effets hors prix[128]

Rajustement

Montant annuel

Observations

 

78 115 753 $

Perte sèche (par rapport au revenu) attribuable à la fermeture d’installations, en dollars de 2019 (rapport initial de M. Miller, à la pièce 24).

(6 304 154 $)

71 811 599 $

Rajustement apporté pour tenir compte des coûts variables supplémentaires allégués par M. Harington (rapport en réplique de M. Miller, à la pièce 2).

(9 262 603 $)

62 548 996 $

Rajustement apporté pour tenir compte des fermetures partielles cernées par Mme Duplantis. Ces quatre installations sont les suivantes : XXXXX XXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXX
XXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXX
XXXXXXXXXXX
.

(11 687 255 $)

50 861 741 $

Rajustement initial apporté pour exclure quatre installations ne faisant pas partie de la liste définitive des fermetures prévues par Secure. Ces quatre installations sont les suivantes : XXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXX XXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXX.

(5 768 030 $)

45 093 711 $

Rajustement supplémentaire apporté pour exclure quatre autres installations qui ne fermeront vraisemblablement pas : XXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXX XXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXX XXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXX[129]

(5 534 616 $)

39 559 095 $

Le Tribunal souligne que les estimations de M. Miller supposent que les installations visées par une fermeture fermeront à la date du fusionnement. Comme il est mentionné à l’annexe 5 des présents motifs, des 21 installations qui fermeront vraisemblablement en raison du fusionnement, XX fermeront après cette date au cours l’année financière 2021-2022, XXX fermeront en 2022-2023 et XX fermeront en 2026-2027. La valeur de la perte sèche exprimée en VAN et en valeur annualisée est rajustée en appliquant la date de fermeture indiquée pour chaque installation. Par exemple, la date prévue de fermeture de XXXXXXXXXXXXXX est le 31 juillet 2022 selon l’annexe 5. Ainsi, l’estimation de la perte sèche associée à cette installation en particulier est exclue pour l’exercice 2021-2022 et elle est exclue en partie (1/12) pour l’exercice 2022-2023. Des rajustements similaires sont apportés pour chacune des installations dont il est question à la pièce 7 du rapport en réplique de M. Miller, à l’exception de celles qui ne fermeront pas tel qu’il est mentionné dans les deux rangées ci-dessus. La réduction globale de la VAN qui en découle pour la période 2021-2033 est présentée ici sous la forme d’un montant annuel équivalent (5 534 616 $).

(11 551 256 $)

28 007 839 $

Comme dans le tableau 20, une réduction additionnelle de 29,2 % est appliquée, d’après le ratio moyen des estimations obtenues par M. Miller suivant la méthode axée sur la part de marché aux estimations qu’il a obtenues suivant la méthode axée sur le profit. Ce rajustement réduit la portée de l’analyse pour n’inclure que les transactions effectuées à l’intérieur des 271 régions où il y avait un chevauchement de la concurrence avant le fusionnement.

 

[698] Le résultat de 28 007 839 $ inscrit dans le tableau 21 correspond à une réduction relative de 60,9 % par rapport à la somme de 71 811 599 $. Le Tribunal est d’avis qu’il est raisonnable d’appliquer le même pourcentage de réduction à l’estimation de 7 200 000 $ qu’a faite M. Miller de la hausse annuelle des frais de transport, de manière à ne tenir compte que des installations que Secure fermera véritablement et des 271 régions de chevauchement concurrentiel. Ainsi, en appliquant la même réduction de 60,9 % à l’estimation annuelle de 7 200 000 $ de M. Miller afin de tenir compte des 21 fermetures (complètes ou partielles), on obtient une valeur de quelque 2 808 132 $ par année à titre d’estimation rajustée des frais de transport accrus dans les 271 régions où il y avait un chevauchement concurrentiel avant le fusionnement[130].

[699] Cette estimation de 2 808 132 $ sera retenue pour les effets hors prix et elle sera ajoutée à l’estimation des effets sur les prix et sur la production à laquelle est parvenu le Tribunal, soit entre environ 500 000 $ et au moins 1 500 000 $ aux fins de l’analyse comparative qu’appelle l’article 96 de la Loi.

[700] Le Tribunal s’arrête pour souligner que les efforts menés par le commissaire pour quantifier les effets hors prix en appliquant parallèlement trois modèles et des méthodes empiriques sont une nouveauté qui est la bienvenue pour les besoins de l’examen des effets anticoncurrentiels des fusionnements que le Tribunal est appelé à mener. Par le passé, les effets hors prix étaient examinés sous l’angle qualitatif. Or, l’accessibilité de données pertinentes sur le marché peut servir à cerner et à quantifier des effets qui relevaient jusqu’ici de la conjecture, bien souvent. La décision de la formation de ne pas accepter l’estimation de 36,2 millions de dollars ne signifie pas qu’il est nécessaire ou suffisant de présenter des estimations ascendantes. Cela dit, en l’absence de liens satisfaisants entre une évaluation « descendante » et le reste du dossier de preuve, les estimations « ascendantes » peuvent être utiles pour appuyer les évaluations. Lorsqu’elles sont mises de l’avant, les estimations « ascendantes » devraient être étayées comme il se doit.

[701] Un membre de la formation accepte que la méthode axée sur la part de marché convient sur le plan méthodologique pour faire l’estimation de la perte sèche associée à la fermeture d’installations, et que cette méthode fournit une démarche valable pour explorer les questions en litige. Le Tribunal a entendu divers témoignages concernant la détermination des prix dans les marchés pertinents, et les estimations obtenues en appliquant le modèle d’enchère au second prix et le modèle de Bertrand ont jeté de la lumière sur la fourchette dans laquelle pourraient se situer les résultats de marché globaux. Le Tribunal souligne que si l’opinion de la minorité des membres avait été retenue, le montant des effets hors prix démontrés aurait été plus élevé.

(e) Synthèse concernant les effets sur les prix et sur la production et les effets hors prix

[702] Pour les motifs exposés au paragraphe 669 ci-dessus, le Tribunal conclut que la valeur annuelle des effets sur les prix et la production qui découleront vraisemblablement du fusionnement se situent entre 500 000 $ et au moins 1 500 000 $.

[703] Pour les motifs exposés aux paragraphes 694 à 699 des présents motifs, le Tribunal conclut que la valeur annuelle des effets hors prix qui découleront vraisemblablement du fusionnement est de 2 808 132 $.

[704] La somme de ces deux estimations donne une fourchette de 3 308 132 $ à au moins 4 308 132 $.

[705] Le Tribunal considère que ces estimations doivent être rajustées pour tenir compte du fait que les effets sur les prix et sur la production et les effets hors prix existent depuis que le fusionnement a été conclu, le 2 juillet 2021. Le Tribunal est d’avis que ces effets font partie des « effets de l’empêchement ou de la diminution de la concurrence qui résulteront ou résulteront vraisemblablement du fusionnement » au sens de l’article 96 de la Loi. En d’autres termes, l’analyse comparative devra se faire entre les gains en efficience admissibles autrement non réalisés sur une période de 10 ans et les effets anticoncurrentiels observés sur une période de 12 ans, tous deux exprimés en valeur actuelle ou en équivalent annualisé.

[706] Le Tribunal reconnaît qu’il en découle une autre asymétrie dans le traitement des gains en efficience et des effets anticoncurrentiels, en ce que les gains en efficience réalisés avant le prononcé de l’ordonnance du Tribunal ne sont généralement pas admissibles, n’étant pas des gains qui « ne seraient vraisemblablement pas réalisés si l’ordonnance était rendue », comme l’exige le paragraphe 96(1) de la Loi. Toutefois, cette asymétrie est le produit du libellé du paragraphe 96(1). Dans la mesure où il existe un fondement solide pour inclure dans l’analyse comparative tout effet anticoncurrentiel s’étant matérialisé avant le prononcé de l’ordonnance du Tribunal et pour exclure des gains en efficience sur lesquels l’ordonnance n’aura vraisemblablement pas d’incidence, la formation ne considère pas qu’il s’agit d’une situation d’un tel absurde qu’elle nécessiterait autrement de chercher une interprétation différente à donner au paragraphe 96(1).

[707] En rajustant la fourchette estimative de 3 308 132 $ à au moins 4 308 132 $ pour tenir compte des effets sur les prix et sur la production et des effets hors prix qui se sont produits depuis que le fusionnement a été conclu, le 2 juillet 2021, on obtient une fourchette révisée de 4 333 591 $ à au moins 5 643 572 $ par année aux fins de la comparaison des montants annualisés sur 10 ans des gains en efficience autrement non réalisés et des effets anticoncurrentiels au cours de la période allant de juillet 2023 à juin 2033[131]. La VAN correspondante est de 30 219 522 $ à au moins 39 354 443 $.

(3) Analyse comparative

[708] Pour les motifs résumés au paragraphe 628 précédemment, le montant final des gains en efficience autrement non réalisés que Secure a établis selon la prépondérance des probabilités, preuve claire et convaincante à l’appui, est de 32 205 813 $, exprimé en VAN. Le montant annualisé équivalent se chiffre à 4 618 433 $.

[709] Pour les motifs résumés aux paragraphes 701 à 707 ci-dessus, le montant final des effets anticoncurrentiels que le commissaire a établis selon la prépondérance des probabilités, preuve claire et convaincante à l’appui, se situe entre 30 219 522 $ et au moins 39 354 443 $, exprimé en VAN. Le montant annualisé équivalent se situe entre 4 333 591 $ et au moins 5 643 572 $ pour les années allant de 2023 à 2033.

[710] Secure ne s’est pas acquittée du fardeau qu’elle avait d’établir que les gains en efficience autrement non réalisés qui découleront vraisemblablement du fusionnement surpasseront et neutraliseront les effets de l’empêchement ou de la diminution de la concurrence qui résulteront vraisemblablement du fusionnement, comme l’exige le paragraphe 96(1) de la Loi.

[711] Le Tribunal s’arrête un moment pour faire observer que la limite inférieure de la fourchette finale des effets anticoncurrentiels vraisemblables mentionnés au paragraphe 707 ci-dessus est proche de la somme de l’estimation à laquelle Mme Duplantis est parvenue pour les effets sur les prix et sur la production (soit une fourchette de 1,2 million à 1,6 million de dollars)[132] et de l’estimation que M. Harington a faite des coûts de transport accrus à la suite de la fermeture d’installations (2 658 500 $)[133].

[712] Il est entendu qu’il n’y a pas de gains en efficience qualitatifs ni d’effets anticoncurrentiels qualitatifs admissibles aux fins de l’application du paragraphe 96(1) (voir les paragraphes 630 et 633 des présents motifs).

[713] Le Tribunal reconnaît que l’analyse comparative donne un résultat que certains pourraient considérer comme étant « serré », du moins si l’on retient la limite inférieure de la fourchette d’estimation des effets anticoncurrentiels (4 333 591 $). Cela dit, il convient de souligner qu’il incombe à Secure de démontrer que les gains en efficience autrement non réalisés qui découleront vraisemblablement du fusionnement surpasseront et neutraliseront l’entièreté des effets anticoncurrentiels qui, selon l’estimation produite par le Tribunal, résulteront vraisemblablement du fusionnement. La réalité étant ce qu’elle est, il n’est peut-être pas faisable dans les faits d’arriver à un calcul précis de l’élasticité-prix de la demande. Dans ce genre de situation, y compris dans la présente instance, le Tribunal devra se prononcer sur une fourchette d’élasticités raisonnables et vraisemblables au vu du dossier de preuve dans son ensemble (Tervita CSC, aux par. 94, 132; Tervita CAF, au par. 124; Tervita TC, aux par. 244 et 245). Comme l’a reconnu la CSC : “[l]es estimations sont acceptables, car [...] le calcul des effets anticoncurrentiels qu’exige l’art. 96 n’a pas la précision avec laquelle on peut examiner un fait survenu » (Tervita CSC, au par. 125). Il s’ensuit que le défendeur qui invoque la défense fondée sur les gains en efficience doit, pour remplir l’exigence qu’implique l’adverbe « vraisemblablement » à l’article 96, démontrer selon la prépondérance des probabilités que les gains en efficience autrement non réalisés qui sont admissibles surpasseront et neutraliseront l’entièreté des effets anticoncurrentiels vraisemblables constatés par le Tribunal, selon la fourchette d’élasticités à laquelle il est parvenu.

[714] Qui plus est, même si l’analyse comparative qu’appelle l’article 96 donnait un résultat pouvant être qualifié de « serré » en l’espèce, le Tribunal serait d’avis qu’il y a lieu de trancher en faveur du commissaire, et ce en raison du caractère prudent de l’estimation que ce dernier a faite des seuls effets hors prix qu’il a été en mesure d’établir selon la prépondérance des probabilités, à savoir les frais de transport accrus qui ont résulté et continueront de résulter du fusionnement. Cette estimation était des plus prudentes pour deux raisons. Premièrement, elle supposait un tarif de transport par camion de 155 $ l’heure, alors que les éléments de preuve font état de tarifs plus élevés et d’une inflation généralisée à partir du moment où la pandémie de COVID-19 a commencé. Deuxièmement, elle ne tenait pas compte d’une éventuelle hausse des frais de transport par camion à la suite de délais d’attente accrus aux installations absorbantes.

[715] De fait, l’estimation qu’a faite le Tribunal des effets sur les prix et sur la production est également prudente. Comme il est mentionné au paragraphe 669 des présents motifs, le Tribunal considère que la limite supérieure de l’estimation des effets sur les prix et sur la production du commissaire est probablement nettement plus élevée que le montant annuel de 1 500 000 $ que le Tribunal a retenu après avoir rajusté l’estimation initiale de M. Miller afin de tenir compte d’une fourchette d’élasticité-prix de la demande moins étendue (de -0,1 à -0,3) que celle qu’avait supposée M. Miller (de -0,2 à -0,87). La raison en est que le Tribunal a été contraint d’utiliser les estimations initiales de M. Miller concernant les effets sur les prix et sur la production seulement parce que l’estimation de 6 millions de dollars que M. Miller a par la suite présentée reposait sur le point médian entre ses estimations initiales (et supérieures) des hausses de prix et les estimations de Mme Duplantis concernant les effets sur les prix. Le Tribunal juge que si M. Miller avait retenu ses estimations révisées (et inférieures) des hausses de prix pour mener cet exercice, l’estimation de la perte sèche associée aux effets sur les prix et sur la production aurait probablement été plus près de son estimation de 6 millions de dollars que de celle de 1 500 000 $ susmentionnée.

[716] Réunies, ces trois considérations dont il vient d’être question et qui reposent sur le dossier de preuve font pencher le Tribunal en faveur de l’exercice de son pouvoir discrétionnaire de rejeter le moyen de défense fondé sur les gains en efficience invoqué par Secure (Tervita CSC, au par. 154).

XVI. Conclusion

[717] Pour les motifs qui sont résumés dans la partie XIII, article C(7) des présents motifs, le Tribunal conclut que le fusionnement a diminué sensiblement la concurrence et qu’il continuera vraisemblablement de le faire dans un avenir prévisible, dans 136 des 143 marchés pertinents. Ces 136 marchés touchés par une DSC sont désignés à l’annexe 3 des présents motifs.

[718] Pour les motifs qui sont résumés dans la partie XIV, article D(5) précédemment, le Tribunal conclut que 29 des 41 dessaisissements demandés par le commissaire suffiraient pour contrer la DSC qui, selon lui, découle du fusionnement. Une synthèse des conclusions du Tribunal est présentée dans le tableau 15 figurant au paragraphe 482 des présents motifs. Le Tribunal ordonne le dessaisissement des 29 installations dont le dessaisissement est requis conformément à ce tableau.

[719] Pour les motifs qui sont résumés dans la partie XV, article B(3) précédemment, le Tribunal conclut que Secure ne s’est pas acquittée du fardeau qu’elle avait d’établir que les gains en efficience qui découleront vraisemblablement du fusionnement et qui ne seraient vraisemblablement pas réalisés si l’ordonnance du Tribunal était rendue surpasseront et neutraliseront les effets de l’empêchement ou de la diminution de la concurrence qui résulteront vraisemblablement du fusionnement, selon ce que prévoit le paragraphe 96(1) de la Loi.

XVII. Dépens

[720] Dans une directive émise le 25 janvier 2023, le Tribunal a demandé aux parties de tenter de s’entendre sur les dépens liés à la présente demande, ou de présenter leurs observations dans l’éventualité où elles n’y parviendraient pas. Le 10 février 2023, les parties ont informé le Tribunal qu’elles avaient convenu que la partie ayant gain de cause devrait recevoir 150 000 $ (taxes incluses) au titre des frais de justice. Cela dit, elles n’ont pas réussi à s’entendre sur les débours. Elles ont chacune présenté des observations et des mémoires de frais détaillés, avec certains éléments de preuve à l’appui pour expliquer les débours et le fondement des sommes demandées respectivement.

[721] Le commissaire soutient qu’il devrait se voir accorder une somme globale de 2,5 millions de dollars s’il obtient gain de cause. Le mémoire de dépens du commissaire fait état de débours totalisant 2 591 343,14 $. La grande majorité de cette somme est liée aux honoraires d’expert, surtout pour les travaux de M. Miller. Si la demande est rejetée, le commissaire fait valoir que le Tribunal ne devrait pas lui ordonner de verser à Secure une somme pour les débours, parce que la présente affaire sert largement l’intérêt public et parce que Secure aurait présenté des estimations exagérées des gains en efficience pour les besoins de la demande fondée sur l’article 104, sans que cela alimente la preuve présentée aux fins de l’application de l’article 92. À titre subsidiaire, le commissaire soutient que, dans l’éventualité où la demande est rejetée, le Tribunal devrait réduire les dépens adjugés pour tenir compte d’un résultat partagé, le cas échéant. Le commissaire a ajouté que, dans cette éventualité, il serait équitable d’accorder une somme globale de 2 millions de dollars à Secure.

[722] Secure a déposé un mémoire de dépens dans lequel elle réclame 5 665 512,79 $ au titre des débours, taxes incluses, dans l’éventualité où la demande du commissaire était rejetée. Ces débours incluent notamment une somme totale de 3 680 108,25 $ pour les témoins experts de Secure (Mme Duplantis, M. Harington et M. Yatchew) et une somme de 1 814 710,10 $ pour le traitement, la gestion et la révision des documents produits par KLDiscovery. Secure fait valoir que ses débours sont raisonnables, nécessaires et justifiés. Dans ses observations sur les débours, Secure ne se prononce pas sur le mémoire de dépens déposé par le commissaire ni sur les débours qu’il conviendrait d’accorder à ce dernier si la demande est accueillie.

[723] Le Tribunal a récemment fait un résumé des principes juridiques applicables aux débours dans la décision P&H, aux paragraphes 768 à 776. Il n’y a pas lieu de les exposer de nouveau en l’espèce. Essentiellement, le Tribunal a le pouvoir discrétionnaire de déterminer le montant des dépens, de les répartir et de désigner les personnes qui doivent les payer. L’identité de la partie ayant eu gain de cause est le facteur le plus important à prendre en considération pour arriver au montant des dépens. Le Tribunal tient également compte de l’intérêt public que revêt l’affaire.

[724] Pour déterminer le montant des dépens, il faut normalement trouver un compromis entre l’indemnisation de la partie qui a gain de cause et la non-imposition d’une charge excessive à la partie qui succombe. Les dépens adjugés ne devraient pas être excessifs ou punitifs, mais ils devraient plutôt refléter un juste rapport avec les dépens réels du litige. De plus, les débours doivent être raisonnables, nécessaires et justifiés. Les frais d'expertise ne sont pas automatiquement recouvrables en entier, et le Tribunal peut les rajuster s’ils ne semblent pas raisonnables. Enfin, comme il l’a répété dans toutes les instances récentes et à l’audition de la présente demande, le Tribunal préfère l’adjudication des dépens sous la forme d’une somme globale à la taxation formelle des mémoires de dépens.

[725] Ayant eu gain de cause, le commissaire a droit à des dépens.

[726] Compte tenu de ce dont les parties ont convenu, le Tribunal accepte qu’une somme globale de 150 000 $ (taxes incluses) devrait être accordée au commissaire au titre des frais de justice.

[727] Pour ce qui est des débours, le Tribunal a tenu compte des positions des deux parties au regard des sommes que réclame le commissaire à ce titre dans la présente instance. La somme demandée par le commissaire a essentiellement trait aux honoraires des experts. Ces honoraires totalisent 2 525 897,84 $, soit 10 000 $ pour M. Johnston, 1 704 964,37 $ pour M. Miller et 810 933,47 $ pour M. Eastman. Parmi les autres débours du commissaire figurent des frais de déplacement totalisant 17 778,57 $, des frais de transcription de 46 359,98 $ et des frais d’impression de 1 306,75 $.

[728] Le Tribunal est convaincu que le mémoire de dépens qu’a présenté le commissaire contient des renseignements détaillés et des éléments suffisants pour expliquer les débours occasionnés et le fondement des différentes sommes demandées. Le mémoire de dépens a été produit conformément aux règles applicables, et des éléments de preuve ont été fournis au sujet de la facturation, du paiement et des pièces justificatives des services fournis et des dépenses occasionnées. La question n’est pas de savoir si les débours en litige ont été engagés, mais plutôt s’ils sont raisonnables, nécessaires et justifiés dans les circonstances. Compte tenu du traitement généralement favorable que le Tribunal a réservé aux témoignages d’expert présentés par le commissaire, et vu le caractère globalement raisonnable des sommes réclamées par ce dernier, le Tribunal est généralement d’avis que les sommes demandées au titre des débours sont raisonnables. Le Tribunal s’arrête pour souligner que les honoraires d’expert réclamés par Secure sont nettement supérieurs à ceux des témoins experts du commissaire. Le Tribunal mentionne également que Secure, dans son mémoire de dépens, n’a pas soulevé d’objections particulières au sujet des sommes que le commissaire a soumises au titre des débours.

[729] Comme il est mentionné précédemment, le Tribunal préfère accorder des sommes globales, par souci de simplification de l’évaluation des dépens. De fait, il existe actuellement « une tendance judiciaire à l’adjudication, autant que possible, d’une somme globale » (Philip Morris Products SA c Marlboro Canada Ltd, 2015 CAF 9, au par. 4). Une somme globale fait gagner du temps et facilite les choses pour les parties, qui évitent ainsi d’avoir à faire des calculs précis et inutilement compliqués. L’adjudication d’une somme globale concorde avec l’objectif d’apporter une solution au litige qui soit juste et la plus expéditive et économique possible. En l’espèce, le commissaire a affirmé qu’une somme globale de 2,5 millions de dollars serait équitable s’il obtient gain de cause.

[730] À la lumière de ce qui précède, le Tribunal accorde une somme globale de 150 000 $, taxes applicables incluses, au titre des frais de justice. La somme totale accordée pour les débours est établie à 2 350 000 $, taxes applicables incluses. Le Tribunal conclut par conséquent que Secure, en l’espèce, doit verser une somme globale de 2,5 millions de dollars au commissaire au titre des débours.

XVIII. Ordonnance

[731] Pour les motifs exposés ci-dessus, la demande déposée par le commissaire est accueillie en partie. Le Tribunal ordonne les dessaisissements mentionnés dans le tableau 15 ci-dessus et à l’appendice A de l’ordonnance, lequel est joint à l’annexe 6 des présents motifs. Les modalités de l’ordonnance du Tribunal sont exposées en détail à l’annexe 6.

[732] Secure dispose de 30 jours à compter de la date de la présente ordonnance pour verser au commissaire la somme totale de 2,5 millions de dollars.

[733] Les présents motifs sont confidentiels. Pour permettre au Tribunal de présenter une version publique des motifs, les parties sont invitées à tenter de s’entendre sur les passages à caviarder pour préserver les éléments de preuve et les renseignements confidentiels qu’ils contiennent. Les parties communiqueront avec le Tribunal au plus tard à la fermeture du greffe le 17 mars 2023, préférablement conjointement, afin de faire connaître leur entente et les points sur lesquels elles ne s’entendent pas quant aux éléments à expurger des présents motifs confidentiels.

FAIT à Ottawa , ce 3 e jour de mars 2023

SIGNÉ au nom du Tribunal par les membres de la formation .

(s) Le juge en chef Paul Crampton (membre présidant l’affaire)

(s) Le juge Denis Gascon

(s) M. Ted Horbulyk

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Édith Malo


ANNEXE 1 – Dispositions législatives pertinentes

Loi sur la concurrence, LRC 1985, c C‐34

Fusionnements

Ordonnance en cas de diminution de la concurrence

Mergers

Order

(1) Dans les cas où, à la suite d’une demande du commissaire, le Tribunal conclut qu’un fusionnement réalisé ou proposé empêche ou diminue sensiblement la concurrence, ou aura vraisemblablement cet effet :

a) dans un commerce, une industrie ou une profession;

b) entre les sources d’approvisionnement auprès desquelles un commerce, une industrie ou une profession se procure un produit;

c) entre les débouchés par l’intermédiaire desquels un commerce, une industrie ou une profession écoule un produit;

d) autrement que selon ce qui est prévu aux alinéas a) à c),

le Tribunal peut, sous réserve des articles 94 à 96 :

e) dans le cas d’un fusionnement réalisé, rendre une ordonnance enjoignant à toute personne, que celle-ci soit partie au fusionnement ou non :

(i) de le dissoudre, conformément à ses directives,

(ii) de se départir, selon les modalités qu’il indique, des éléments d’actif et des actions qu’il indique,

(iii) en sus ou au lieu des mesures prévues au sous-alinéa (i) ou (ii), de prendre toute autre mesure, à condition que la personne contre qui l’ordonnance est rendue et le commissaire souscrivent à cette mesure;

(1) Where, on application by the Commissioner, the Tribunal finds that a merger or proposed merger prevents or lessens, or is likely to prevent or lessen, competition substantially

(a) in a trade, industry or profession,

(b) among the sources from which a trade, industry or profession obtains a product,

(c) among the outlets through which a trade, industry or profession disposes of a product, or

(d) otherwise than as described in paragraphs (a) to (c),

the Tribunal may, subject to sections 94 to 96,

(e) in the case of a completed merger, order any party to the merger or any other person

(i) to dissolve the merger in such manner as the Tribunal directs,

(ii) to dispose of assets or shares designated by the Tribunal in such manner as the Tribunal directs, or

(iii) in addition to or in lieu of the action referred to in subparagraph (i) or (ii), with the consent of the person against whom the order is directed and the Commissioner, to take any other action, or

[...]

[...]

Éléments à considérer

Factors to be considered regarding prevention or lessening of competition

Lorsqu’il détermine, pour l’application de l’article 92, si un fusionnement, réalisé ou proposé, empêche ou diminue sensiblement la concurrence, ou s’il aura vraisemblablement cet effet, le Tribunal peut tenir compte des facteurs suivants :

93 In determining, for the purpose of section 92, whether or not a merger or proposed merger prevents or lessens, or is likely to prevent or lessen, competition substantially, the Tribunal may have regard to the following factors:

a) la mesure dans laquelle des produits ou des concurrents étrangers assurent ou assureront vraisemblablement une concurrence réelle aux entreprises des parties au fusionnement réalisé ou proposé;

b) la déconfiture, ou la déconfiture vraisemblable de l’entreprise ou d’une partie de l’entreprise d’une partie au fusionnement réalisé ou proposé;

c) la mesure dans laquelle sont ou seront vraisemblablement disponibles des produits pouvant servir de substituts acceptables à ceux fournis par les parties au fusionnement réalisé ou proposé;

d) les entraves à l’accès à un marché, notamment :

(i) les barrières tarifaires et non tarifaires au commerce international,

(ii) les barrières interprovinciales au commerce,

(iii) la réglementation de cet accès,

et tous les effets du fusionnement, réalisé ou proposé, sur ces entraves;

e) la mesure dans laquelle il y a ou il y aurait encore de la concurrence réelle dans un marché qui est ou serait touché par le fusionnement réalisé ou proposé;

f) la possibilité que le fusionnement réalisé ou proposé entraîne ou puisse entraîner la disparition d’un concurrent dynamique et efficace;

g) la nature et la portée des changements et des innovations sur un marché pertinent;

g.1) les effets de réseau dans le marché;

g.2) le fait que le fusionnement réalisé ou proposé contribuerait au renforcement de la position sur le marché des principales entreprises en place;

g.3) tout effet du fusionnement réalisé ou proposé sur la concurrence hors prix ou par les prix, notamment la qualité, le choix ou la vie privée des consommateurs;

h) tout autre facteur pertinent à la concurrence dans un marché qui est ou serait touché par le fusionnement réalisé ou proposé.

(a) the extent to which foreign products or foreign competitors provide or are likely to provide effective competition to the businesses of the parties to the merger or proposed merger;

(b) whether the business, or a part of the business, of a party to the merger or proposed merger has failed or is likely to fail;

(c) the extent to which acceptable substitutes for products supplied by the parties to the merger or proposed merger are or are likely to be available;

(d) any barriers to entry into a market, including

(i) tariff and non-tariff barriers to international trade,

(ii) interprovincial barriers to trade, and

(iii) regulatory control over entry,

and any effect of the merger or proposed merger on such barriers;

(e) the extent to which effective competition remains or would remain in a market that is or would be affected by the merger or proposed merger;

(f) any likelihood that the merger or proposed merger will or would result in the removal of a vigorous and effective competitor;

(g) the nature and extent of change and innovation in a relevant market;

(g.1) network effects within the market;

(g.2) whether the merger or proposed merger would contribute to the entrenchment of the market position of leading incumbents;

(g.3) any effect of the merger or proposed merger on price or non-price competition, including quality, choice or consumer privacy; and

(h) any other factor that is relevant to competition in a market that is or would be affected by the merger or proposed merger.

[...]

[...]

Exception dans les cas de gains en efficience

Exception where gains in efficiency

(1) Le Tribunal ne rend pas l’ordonnance prévue à l’article 92 dans les cas où il conclut que le fusionnement, réalisé ou proposé, qui fait l’objet de la demande a eu pour effet ou aura vraisemblablement pour effet d’entraîner des gains en efficience, que ces gains surpasseront et neutraliseront les effets de l’empêchement ou de la diminution de la concurrence qui résulteront ou résulteront vraisemblablement du fusionnement réalisé ou proposé et que ces gains ne seraient vraisemblablement pas réalisés si l’ordonnance était rendue.

(1) The Tribunal shall not make an order under section 92 if it finds that the merger or proposed merger in respect of which the application is made has brought about or is likely to bring about gains in efficiency that will be greater than, and will offset, the effects of any prevention or lessening of competition that will result or is likely to result from the merger or proposed merger and that the gains in efficiency would not likely be attained if the order were made.

Facteurs pris en considération

Factors to be considered

(2) Dans l’étude de la question de savoir si un fusionnement, réalisé ou proposé, entraînera vraisemblablement les gains en efficience visés au paragraphe (1), le Tribunal évalue si ces gains se traduiront :

a) soit en une augmentation relativement importante de la valeur réelle des exportations;

b) soit en une substitution relativement importante de produits nationaux à des produits étrangers.

(2) In considering whether a merger or proposed merger is likely to bring about gains in efficiency described in subsection (1), the Tribunal shall consider whether such gains will result in

(a) a significant increase in the real value of exports; or

(b) a significant substitution of domestic products for imported products.

Restriction

Restriction

(3) Pour l’application du présent article, le Tribunal ne conclut pas, en raison seulement d’une redistribution de revenu entre plusieurs personnes, qu’un fusionnement réalisé ou proposé a entraîné ou entraînera vraisemblablement des gains en efficience.

(3) For the purposes of this section, the Tribunal shall not find that a merger or proposed merger has brought about or is likely to bring about gains in efficiency by reason only of a redistribution of income between two or more persons.

 

ANNEXE 2 – Liste des marchés pertinents

Liste des 143 marchés pertinents dans lesquels il y aura vraisemblablement une diminution sensible de la concurrence selon ce que prétend le commissaire[134]

Marché

Structure

Service

Installation de Tervita la plus proche

Installation de Secure la plus proche

Description

2

De 2 à 1

ITRE

Kindersley

Kindersley

S-O de Saskatoon

3

De 2 à 1

ITRE

West Edson

Obed

O et S-O de Edson

4

De 2 à 1

ITRE

Elk Point

Silverdale

S de Vermilion

5

De 2 à 1

ITRE

Fox Creek

Fox Creek

O de Fox Creek

6

De 2 à 1

ITRE

West Edson

Edson

N et S-O de Edson

7

De 2 à 1

ITRE

West Edson

Nosehill

N-O de Edson

8

De 2 à 1

ITRE

Judy Creek

Judy Creek

O et N de Swan Hills

10

De 2 à 1

ITRE

Willesden Green

Rocky Mountain House

Emplacement du client non visible sur la carte

12

De 2 à 1

ITRE

Fox Creek East

Edson

S-E de Grande Prairie

13

De 2 à 1

ITRE

Valleyview

Fox Creek

S-S-O de Valleyview

14

De 2 à 1

ITRE

Coronation

Kindersley

Entre Lloydminster et Medicine Hat

15

De 2 à 1

ITRE

Lindbergh Caverns

Silverdale

S de Lloydminster

16

De 2 à 1

ITRE

Mitsue

Judy Creek

S de Slave Lake

17

De 2 à 1

ITRE

Gull Lake

Kindersley

S de Elrose

18

De 2 à 1

PDEA

(et ITRE)

West Edson

Edson

S-O de Edson

19

De 2 à 1

PDEA

(et ITRE)

West Edson

Obed

S-E de Hinton

20

De 2 à 1

PDEA

(et ITRE)

West Edson

Nosehill

O-N-O de Edson

22

De 3 à 2

Lieux d’enfouissement

Lieu d’enfouissement South Wapiti

South Grande Prairie

S de Grande Prairie

23

De 3 à 2

Lieux d’enfouissement

Lieu d’enfouissement La Glace

South Grande Prairie

O de Grande Prairie

25

De 3 à 2

ITRE

Elk Point

Silverdale

E de Vermilion

26

De 3 à 2

ITRE

Cavernes Lindbergh

Tulliby Lake

Du N de Cold Lake au N de Lloydminster

27

De 3 à 2

ITRE

Cavernes Lindbergh

Silverdale

N-O de Lloydminster

28

De 3 à 2

ITRE

Gordondale

Dawson Creek

N-E de Dawson Creek

29

De 3 à 2

ITRE

Fox Creek

Fox Creek

Région de Fox Creek

30

De 3 à 2

ITRE

Judy Creek

Fox Creek

À mi-chemin entre Edmonton et Grande Prairie

31

De 3 à 2

ITRE

Fox Creek East

Fox Creek

O et S de Fox Creek

32

De 3 à 2

ITRE

Judy Creek

Judy Creek

N et O-N-O de Whitecourt

35

De 3 à 2

ITRE

Grande Prairie Industrial

Kakwa

O-N-O et E-N-E de Grande Cache

36

De 3 à 2

ITRE

Brazeau

Brazeau

S-O de Edmonton

37

De 3 à 2

ITRE

West Edson

Obed

O de Edmonton

38

De 3 à 2

ITRE

West Edson

Edson

Région de Edson

41

De 3 à 2

ITRE

Boundary Lake

Dawson Creek

N-E de Dawson Creek

42

De 3 à 2

ITRE

West Edson

Nosehill

N-O de Edson

45

De 3 à 2

ITRE

Willesden Green

Rocky Mountain House

Emplacement du client non visible sur la carte

46

De 3 à 2

ITRE

Stauffer

Rocky Mountain House

O-S-O de Ricinus

47

De 3 à 2

PDEA

(et ITRE)

West Edson

Edson

S-O de Edson

49

De 3 à 2

PDEA

(et ITRE)

Judy Creek

Judy Creek

N et O de Swan Hills

50

De 3 à 2

PDEA

(et ITRE)

West Edson

Eccles

O de Edson

51

De 3 à 2

PDEA

(et ITRE)

West Edson

Nosehill

O-N-O de Edson

52

De 3 à 2

PDEA

(et ITRE)

Kindersley

Kindersley

Entre Oyen et Rosetown

53

De 3 à 2

PDEA

(et ITRE)

Gull Lake

Kindersley

N et N-O de Swift Current

54

De 3 à 2

PDEA

(et ITRE)

Obed

Kakwa

Entre Grande Cache, Fox Creek et Hinton

55

De 3 à 2

PDEA

(et ITRE)

West Edson

Nosehill

N-O de Edson

57

De 3 à 2

PDEA

(et ITRE)

Mitsue

Judy Creek

S-O de Slave West

58

De 3 à 2

PDEA

(et ITRE)

Cavernes Unity

Kindersley

N de Fiske

59

De 3 à 2

PDEA

(et ITRE)

Grande Prairie Industrial

Obed

N-E et S-E de Grande Cache

60

De 3 à 2

PDEA

(et ITRE)

Fort McMurray

Athabasca

Entre Fort McMurray et Cold Lake

62

De 4 à 3 ou plus

Lieux d’enfouissement

Lieu d’enfouissement Spirit River

Saddle Hills

N-E de Dawson Creek

63

De 4 à 3 ou plus

Lieux d’enfouissement

Lieu d’enfouissement Silverberry

Saddle Hills

Entre Dawson Creek et Fort St. John

78

De 4 à 3 ou plus

Lieux d’enfouissement

Lieu d’enfouissement La Glace

South Grande Prairie

N de Grande Prairie

79

De 4 à 3 ou plus

Lieux d’enfouissement

Cavernes Lindbergh

Tulliby Lake

N de Lloydminster

80

De 4 à 3 ou plus

Lieux d’enfouissement

Lieu d’enfouissement Willesden Green

Willy Green

O-N-O de Red Deer

86

De 4 à 3 ou plus

ITRE

South Wapiti

South Grande Prairie

S-O et S-E de Grande Prairie

88

De 4 à 3 ou plus

ITRE

South Wapiti

Kakwa

S de Grande Prairie

90

De 4 à 3 ou plus

ITRE

La Glace

Dawson Creek

S-E de Dawson Creek

91

De 4 à 3 ou plus

ITRE

La Glace

La Glace

Entre Dawson Creek et Grande Prairie

92

De 4 à 3 ou plus

ITRE

South Wapiti

South Grande Prairie

S de Grande Prairie

93

De 4 à 3 ou plus

ITRE

Spirit River

Rycroft

Région de Spirit River

94

De 4 à 3 ou plus

ITRE

Grande Prairie Industrial

La Glace

N et S-E de Grande Prairie

95

De 4 à 3 ou plus

ITRE

Grande Prairie Industrial

South Grande Prairie

Région de Grande Prairie

96

De 4 à 3 ou plus

ITRE

South Wapiti

Kakwa

S de Grande Prairie

98

De 4 à 3 ou plus

ITRE

South Wapiti

Kakwa

Entre Grande Prairie et Grande Cache

99

De 4 à 3 ou plus

ITRE

Brazeau

Brazeau

S-O de Edmonton

101

De 4 à 3 ou plus

ITRE

Niton Junction

Brazeau

O-S-O de Edmonton

102

De 4 à 3 ou plus

ITRE

Niton Junction

Drayton Valley

O de Edmonton

104

De 4 à 3 ou plus

ITRE

Gordondale

Dawson Creek

S-O de Dawson Creek

105

De 4 à 3 ou plus

ITRE

Boundary Lake

Dawson Creek

N et N-E de Dawson Creek

106

De 4 à 3 ou plus

ITRE

Gordondale

Dawson Creek

O de Dawson Creek

107

De 4 à 3 ou plus

ITRE

South Taylor

Dawson Creek

Région de Dawson Creek

108

De 4 à 3 ou plus

ITRE

Gordondale

Dawson Creek

S-E de Dawson Creek

111

De 4 à 3 ou plus

ITRE

Brazeau

Brazeau

S-O de Edmonton

116

De 4 à 3 ou plus

ITRE

Willesden Green

Rocky Mountain House

S-O de Rocky Mountain House

117

De 4 à 3 ou plus

ITRE

Brazeau

Brazeau

S-O de Edmonton

119

De 4 à 3 ou plus

ITRE

Stauffer

Rocky Mountain House

Entre Rocky Mountain House et Alhambra

121

De 4 à 3 ou plus

ITRE

Willesden Green

Rocky Mountain House

N-O de Red Deer

123

De 4 à 3 ou plus

ITRE

Eckville

Rocky Mountain House

N-O de Red Deer

124

De 4 à 3 ou plus

ITRE

Buck Creek

Drayton Valley

S-O de Edmonton

126

De 4 à 3 ou plus

ITRE

Buck Creek

Drayton Valley

O-S-O de Edmonton

127

De 4 à 3 ou plus

ITRE

Willesden Green

Rocky Mountain House

O de Red Deer

128

De 4 à 3 ou plus

ITRE

Grande Prairie Industrial

Dawson Creek

O de Beaverlodge

129

De 4 à 3 ou plus

ITRE

Grande Prairie Industrial

South Grande Prairie

S-O de Grande Prairie

130

De 4 à 3 ou plus

ITRE

La Glace

Dawson Creek

O de Grande Prairie

132

De 4 à 3 ou plus

ITRE

Gordondale

La Glace

O-S-O de Spirit River

134

De 4 à 3 ou plus

ITRE

Spirit River

La Glace

Entre Spirit River et Grande Prairie

136

De 4 à 3 ou plus

ITRE

Brazeau

Drayton Valley

S-O de Edmonton

138

De 4 à 3 ou plus

ITRE

Brazeau

Rocky Mountain House

N-O de Rocky Mountain House

142

De 4 à 3 ou plus

PDEA

(et ITRE)

Kindersley

Kindersley

S-O de Saskatoon

143

De 4 à 3 ou plus

PDEA

(et ITRE)

West Edson

Nosehill

N-O de Edson

144

De 4 à 3 ou plus

PDEA

(et ITRE)

Brazeau

Brazeau

S-O de Edmonton

145

De 4 à 3 ou plus

PDEA

(et ITRE)

Brazeau

Brazeau

N-O de Red Deer

146

De 4 à 3 ou plus

PDEA

(et ITRE)

Brazeau

Brazeau

S-O de Edmonton

147

De 4 à 3 ou plus

PDEA

(et ITRE)

West Edson

Obed

O de Edson

148

De 4 à 3 ou plus

PDEA

(et ITRE)

Mile 103

Wonowon

O de Wonowon

150

De 4 à 3 ou plus

PDEA

(et ITRE)

West Edson

Edson

O et S de Edson

152

De 4 à 3 ou plus

PDEA

(et ITRE)

Niton Junction

Brazeau

O-S-O de Edmonton

154

De 4 à 3 ou plus

PDEA

(et ITRE)

South Wapiti

Big Mountain Creek

S-S-E de Grande Prairie

155

De 4 à 3 ou plus

PDEA

(et ITRE)

South Wapiti

Gold Creek

S-S-O de Grande Prairie

156

De 4 à 3 ou plus

PDEA

(et ITRE)

Valleyview

Tony Creek

O-N-O de Fox Creek

157

De 4 à 3 ou plus

PDEA

(et ITRE)

Fox Creek

Tony Creek

O de Fox Creek

159

De 4 à 3 ou plus

PDEA

(et ITRE)

Grande Prairie Industrial

Rycroft

S-S-E de Grande Prairie

160

De 4 à 3 ou plus

PDEA

(et ITRE)

Swan Hills

Judy Creek

Entre Swan Hills et Whitecourt

162

De 4 à 3 ou plus

PDEA (et ITRE)

Grande Prairie Industrial

Emerson

S-O de Grande Prairie

163

De 4 à 3 ou plus

PDEA

(et ITRE)

South Wapiti

Gold Creek

S de Grande Prairie

164

De 4 à 3 ou plus

PDEA

(et ITRE)

South Wapiti

Big Mountain Creek

S de Grande Prairie

165

De 4 à 3 ou plus

PDEA (et ITRE)

Grande Prairie Industrial

Rycroft

S-E de Grande Prairie

166

De 4 à 3 ou plus

PDEA (et ITRE)

Kakwa

Big Mountain Creek

Entre Grande Prairie et Grande Cache

168

De 4 à 3 ou plus

PDEA (et ITRE)

Silverberry

Wonowon

N-O de Fort St. John

169

De 4 à 3 ou plus

PDEA

(et ITRE)

Valleyview

Kaybob

S-O de Fox Creek

171

De 4 à 3 ou plus

PDEA

(et ITRE)

Fox Creek East

Kaybob

S de Fox Creek

172

De 4 à 3 ou plus

PDEA (et ITRE)

Fox Creek East

Kaybob

S-O de Fox Creek

173

De 4 à 3 ou plus

PDEA (et ITRE)

Fox Creek East

Tony Creek

S-O de Fox Creek

174

De 4 à 3 ou plus

PDEA (et ITRE)

Fox Creek East

Fox Creek

S-E de Grande Prairie

176

De 4 à 3 ou plus

PDEA (et ITRE)

Fox Creek

Fox Creek

O-S-O de Fox Creek

177

De 4 à 3 ou plus

PDEA (et ITRE)

South Wapiti

Big Mountain Creek

Entre Grande Prairie et Grande Cache

179

De 4 à 3 ou plus

PDEA (et ITRE)

08-09

La Glace

S-O de Grande Prairie

183

De 4 à 3 ou plus

PDEA (et ITRE)

Judy Creek

Kaybob

Entre Fox Creek et Whitecourt

184

De 4 à 3 ou plus

PDEA (et ITRE)

La Glace

La Glace

S-O de Spirit River

186

De 4 à 3 ou plus

PDEA (et ITRE)

Fox Creek East

Kaybob

S et O de Fox Creek

188

De 4 à 3 ou plus

PDEA

(et ITRE)

Fox Creek East

Fox Creek

Région de Fox Creek

193

De 4 à 3 ou plus

PDEA (et ITRE)

Brazeau

Brazeau

N-O de Red Deer

196

De 4 à 3 ou plus

PDEA (et ITRE)

Gordondale

Gordondale

S-E de Dawson Creek

200

De 4 à 3 ou plus

PDEA (et ITRE)

South Taylor

Dawson Creek

N-O de Dawson Creek

201

De 4 à 3 ou plus

PDEA (et ITRE)

08-09

Pipestone

S-O de Grande Prairie

202

De 4 à 3 ou plus

PDEA

(et ITRE)

La Glace

Emerson

N de Grande Prairie

203

De 4 à 3 ou plus

PDEA (et ITRE)

La Glace

La Glace

O et N-O de Grande Prairie

204

De 4 à 3 ou plus

PDEA (et ITRE)

La Glace

La Glace

S-E de Dawson Creek

205

De 4 à 3 ou plus

PDEA (et ITRE)

La Glace

La Glace

N-O de Grande Prairie

206

De 4 à 3 ou plus

PDEA (et ITRE)

Brazeau

Brazeau

S-O de Edmonton

208

De 4 à 3 ou plus

Évacuation des eaux

(et ITRE)

La Glace

Dawson Creek

S et S-E de Dawson Creek

232

De 4 à 3 ou plus

PDEA (et ITRE)

South Wapiti

Big Mountain Creek

S-S-E de Grande Prairie

233

De 4 à 3 ou plus

PDEA (et ITRE)

Kakwa

Gold Creek

N de Grande Cache

235

De 4 à 3 ou plus

PDEA (et ITRE)

Marshall

Silverdale

Région de Lloydminster

241

De 4 à 3 ou plus

PDEA (et ITRE)

Grande Prairie Industrial

Rycroft

S-E de Grande Prairie

242

De 4 à 3 ou plus

PDEA (et ITRE)

Grande Prairie Industrial

Rycroft

S-O de Valleyview

245

De 4 à 3 ou plus

PDEA (et ITRE)

Fox Creek

Nosehill

N-O de Edson

246

De 4 à 3 ou plus

PDEA (et ITRE)

West Edson

Nosehill

N-O de Edson

247

De 4 à 3 ou plus

PDEA (et ITRE)

Fox Creek East

Fox Creek

Région de Fox Creek

249

De 4 à 3 ou plus

PDEA (et ITRE)

South Wapiti

South Grande Prairie

Emplacement du client non visible sur la carte

251

De 4 à 3 ou plus

PDEA (et ITRE)

Gordondale

Gordondale

N-E de Dawson Creek

252

De 4 à 3 ou plus

PDEA (et ITRE)

Gordondale

Gordondale

O-S-O de Spirit River

255

De 4 à 3 ou plus

PDEA (et ITRE)

Gordondale

Dawson Creek

S-O de Dawson Creek

257

De 4 à 3 ou plus

PDEA (et ITRE)

Gordondale

Dawson Creek

O de Dawson Creek

259

De 4 à 3 ou plus

PDEA (et ITRE)

Gordondale

Dawson Creek

S-E de Dawson Creek


ANNEXE 3 – Conclusions relativement à la DSC, par marché

Marchés avec DSC Marchés sans DSC

 

Marché

Conclusion

Dessaisissements

 

Marché

Conclusion

2

DSC

ITRE Kindersley/Cavernes Unity

 

1

S. O.

3

DSC

ITRE West Edson

 

9

Pas de DSC

4

DSC

ITRE Elk Point/Cavernes Lindbergh

 

11

Pas de DSC

5

DSC

ITRE Fox Creek (Bigstone et HT)/ITRE Fox Creek East

 

21

Pas de DSC

6

DSC

ITRE West Edson

 

24

Pas de DSC

7

DSC

ITRE West Edson

 

33

Pas de DSC

8

DSC

ITRE Judy Creek

 

34

Pas de DSC

10

DSC

ITRE Willesden Green

 

39

Pas de DSC

12

DSC

ITRE Fox Creek (Bigstone et HT)/ITRE Fox Creek East

 

40

Pas de DSC

13

DSC

ITRE Fox Creek (Bigstone et HT)/ITRE Fox Creek East

 

43

Pas de DSC

14

DSC

ITRE Kindersley/Cavernes Unity

 

44

Pas de DSC

15

DSC

ITRE Elk Point/Cavernes Lindbergh/Cavernes Unity

 

48

Pas de DSC

16

DSC

ITRE Judy Creek

 

56

Pas de DSC

17

DSC

ITRE Kindersley

 

61

Pas de DSC

18

DSC

ITRE West Edson/PDEA Moose Creek

 

64

Pas de DSC

19

DSC

ITRE West Edson/PDEA Moose Creek

 

65

Pas de DSC

20

DSC

ITRE West Edson

 

66

Pas de DSC

22

DSC

Lieu d’enfouissement La Glace/Lieu d’enfouissement Spirit River

 

67

Pas de DSC

23

DSC

Lieu d’enfouissement La Glace/Lieu d’enfouissement Spirit River

 

68

Pas de DSC

25

DSC

ITRE Elk Point/Cavernes Lindbergh

 

69

Pas de DSC

26

DSC

ITRE Elk Point/Cavernes Lindbergh

 

70

Pas de DSC

27

DSC

ITRE Elk Point/Cavernes Lindbergh/Cavernes Unity

 

71

Pas de DSC

28

DSC

ITRE Gordondale

 

72

Pas de DSC

29

DSC

ITRE Fox Creek (Bigstone et HT)/ITRE Fox Creek East

 

73

Pas de DSC

30

DSC

ITRE Fox Creek (Bigstone et HT)/ITRE Fox Creek East/ITRE Kindersley

 

74

Pas de DSC

31

DSC

ITRE Fox Creek (Bigstone et HT)/ITRE Fox Creek East/ITRE Kindersley

 

75

Pas de DSC

32

DSC

ITRE Fox Creek (Bigstone et HT)/ITRE Fox Creek East

 

76

Pas de DSC

35

DSC

ITRE South Wapiti

 

77

Pas de DSC

36

DSC

ITRE Edson Ouest/ITRE Willesden Green

 

81

Pas de DSC

37

DSC

ITRE West Edson

 

82

Pas de DSC

38

DSC

ITRE West Edson

 

83

Pas de DSC

41

DSC

ITRE Gordondale

 

84

Pas de DSC

42

DSC

ITRE West Edson

 

85

Pas de DSC

45

DSC

ITRE Stauffer/ITRE Willesden Green

 

87

Pas de DSC

46

DSC

ITRE Stauffer

 

89

Pas de DSC

47

DSC

ITRE West Edson/PDEA Moose Creek

 

97

Pas de DSC

49

DSC

ITRE Judy Creek

 

100

Pas de DSC

50

DSC

ITRE West Edson

 

103

Pas de DSC

51

DSC

ITRE West Edson

 

109

Pas de DSC

52

DSC

ITRE Kindersley

 

110

Pas de DSC

53

DSC

ITRE Kindersley

 

112

Pas de DSC

54

DSC

PDEA Kakwa

 

113

Pas de DSC

55

DSC

ITRE West Edson

 

114

Pas de DSC

57

DSC

ITRE Judy Creek

 

115

Pas de DSC

58

DSC

ITRE Kindersley

 

118

Pas de DSC

59

DSC

PDEA Kakwa

 

120

Pas de DSC

60

DSC

ITRE Fort McMurray

 

122

Pas de DSC

62

DSC

Lieu d’enfouissement Spirit River

 

123

Pas de DSC

63

DSC

Lieu d’enfouissement Silverberry

 

125

Pas de DSC

78

DSC

Lieu d’enfouissement La Glace/Lieu d’enfouissement South Wapiti

 

126

Pas de DSC

79

DSC

Lieu d’enfouissement Elk Point

 

131

Pas de DSC

80

DSC

Lieu d’enfouissement Willesden Green

 

133

Pas de DSC

86

DSC

ITRE South Wapiti

 

135

Pas de DSC

88

DSC

ITRE South Wapiti

 

137

Pas de DSC

90

DSC

ITRE La Glace

 

139

Pas de DSC

91

DSC

ITRE La Glace

 

140

Pas de DSC

92

DSC

ITRE South Wapiti

 

141

Pas de DSC

93

DSC

ITRE Spirit River

 

149

Pas de DSC

94

DSC

ITRE La Glace/ITRE South Wapiti/ITRE Spirit River

 

151

Pas de DSC

95

DSC

ITRE La Glace/ITRE South Wapiti/ITRE Spirit River

 

153

Pas de DSC

96

DSC

ITRE South Wapiti

 

158

Pas de DSC

98

DSC

ITRE South Wapiti

 

161

Pas de DSC

99

DSC

ITRE Stauffer/ITRE Willesden Green

 

167

Pas de DSC

101

DSC

ITRE Brazeau

 

170

Pas de DSC

102

DSC

ITRE Buck Creek/ITRE West Edson

 

175

Pas de DSC

104

DSC

ITRE Gordondale

 

178

Pas de DSC

105

DSC

ITRE Gordondale

 

180

Pas de DSC

106

DSC

ITRE Gordondale

 

181

Pas de DSC

107

DSC

ITRE Gordondale/ITRE South Taylor

 

182

Pas de DSC

108

DSC

ITRE Gordondale/ITRE South Taylor

 

185

Pas de DSC

111

DSC

ITRE Brazeau

 

187

Pas de DSC

116

DSC

ITRE Stauffer/ITRE Willesden Green

 

189

Pas de DSC

117

DSC

ITRE Brazeau/ITRE Willesden Green

 

190

Pas de DSC

119

DSC

ITRE Stauffer/ITRE Willesden Green

 

191

Pas de DSC

121

DSC

ITRE Stauffer/ITRE Willesden Green

 

192

Pas de DSC

124

DSC

ITRE Buck Creek

 

194

Pas de DSC

127

DSC

ITRE Stauffer/ITRE Willesden Green

 

195

Pas de DSC

128

DSC

ITRE La Glace

 

197

Pas de DSC

129

DSC

ITRE South Wapiti

 

198

Pas de DSC

130

DSC

ITRE La Glace

 

199

Pas de DSC

132

DSC

ITRE Gordondale

 

203

Pas de DSC

134

DSC

ITRE Spirit River

 

204

Pas de DSC

136

DSC

ITRE Brazeau

 

205

Pas de DSC

138

DSC

ITRE Willesden Green

 

207

Pas de DSC

142

DSC

ITRE Kindersley

 

209

Pas de DSC

143

DSC

ITRE West Edson

 

210

Pas de DSC

144

DSC

ITRE Brazeau

 

211

Pas de DSC

145

DSC

ITRE Brazeau/ITRE Willesden Green

 

212

Pas de DSC

146

DSC

ITRE Brazeau

 

213

Pas de DSC

147

DSC

ITRE West Edson

 

214

Pas de DSC

148

DSC

ITRE Silverberry/PDEA Mile 103

 

215

Pas de DSC

150

DSC

ITRE West Edson

 

216

Pas de DSC

152

DSC

ITRE Brazeau/PDEA Moose Creek

 

217

Pas de DSC

154

DSC

ITRE South Wapiti/PDEA Kakwa

 

218

Pas de DSC

155

DSC

ITRE South Wapiti/PDEA Kakwa

 

219

Pas de DSC

156

DSC

ITRE Fox Creek (Bigstone et HT)/ITRE Fox Creek East

 

220

Pas de DSC

157

DSC

ITRE Fox Creek (Bigstone et HT)/ITRE Fox Creek East

 

221

Pas de DSC

159

DSC

ITRE South Wapiti/PDEA Kakwa

 

222

Pas de DSC

160

DSC

ITRE Judy Creek

 

223

Pas de DSC

162

DSC

ITRE South Wapiti

 

224

Pas de DSC

163

DSC

ITRE South Wapiti/PDEA Kakwa

 

225

Pas de DSC

164

DSC

ITRE South Wapiti/PDEA Kakwa

 

226

Pas de DSC

165

DSC

ITRE South Wapiti/PDEA Kakwa

 

227

Pas de DSC

166

DSC

PDEA Kakwa

 

228

Pas de DSC

168

DSC

ITRE Silverberry/PDEA Mile 103

 

229

Pas de DSC

169

DSC

ITRE Fox Creek (Bigstone et HT)/ITRE Fox Creek East

 

230

Pas de DSC

171

DSC

ITRE Fox Creek (Bigstone et HT)/ITRE Fox Creek East

 

231

Pas de DSC

172

DSC

ITRE Fox Creek (Bigstone et HT)/ITRE Fox Creek East

 

234

Pas de DSC

173

DSC

ITRE Fox Creek (Bigstone et HT)/ITRE Fox Creek East

 

236

Pas de DSC

174

DSC

ITRE Fox Creek (Bigstone et HT)/ITRE Fox Creek East

 

237

Pas de DSC

176

DSC

ITRE Fox Creek (Bigstone et HT)/ITRE Fox Creek East

 

238

Pas de DSC

177

DSC

ITRE South Wapiti/PDEA Kakwa

 

239

Pas de DSC

179

DSC

ITRE La Glace/ITRE Spirit River/PDEA 08-09

 

240

Pas de DSC

183

DSC

ITRE Fox Creek (Bigstone et HT)/ITRE Fox Creek East/ITRE Judy Creek

 

243

Pas de DSC

184

DSC

ITRE La Glace/ITRE Spirit River

 

244

Pas de DSC

186

DSC

ITRE Fox Creek (Bigstone et HT)/ITRE Fox Creek East/ITRE Judy Creek

 

248

Pas de DSC

188

DSC

ITRE Fox Creek (Bigstone et HT)/ITRE Fox Creek East

 

250

Pas de DSC

193

DSC

ITRE Brazeau/ITRE Willesden Green

 

253

Pas de DSC

196

DSC

ITRE Gordondale

 

254

Pas de DSC

200

DSC

ITRE South Taylor

 

255

Pas de DSC

201

DSC

ITRE La Glace/ITRE Spirit River/PDEA 08-09

 

256

Pas de DSC

202

DSC

ITRE La Glace

 

258

Pas de DSC

206

DSC

ITRE Brazeau

 

259

Pas de DSC

208

DSC

ITRE Gordondale/ITRE La Glace/ITRE Spirit River

 

260

Pas de DSC

232

DSC

ITRE South Wapiti/PDEA Kakwa

 

261

Pas de DSC

233

DSC

PDEA Kakwa

 

262

Pas de DSC

235

DSC

ITRE Elk Point/Cavernes Lindbergh

 

263

Pas de DSC

241

DSC

ITRE South Wapiti

 

264

Pas de DSC

242

DSC

ITRE South Wapiti/PDEA Kakwa

 

265

Pas de DSC

245

DSC

ITRE Fox Creek (Bigstone et HT)/ITRE Fox Creek East

 

266

Pas de DSC

246

DSC

ITRE West Edson

 

267

Pas de DSC

247

DSC

ITRE Fox Creek (Bigstone et HT)/ITRE Fox Creek East

 

268

Pas de DSC

249

DSC

ITRE La Glace/ITRE South Wapiti/ITRE Spirit River/PDEA Kakwa

 

269

Pas de DSC

251

DSC

ITRE Gordondale

 

270

Pas de DSC

252

DSC

ITRE Gordondale

 

271

Pas de DSC

257

DSC

ITRE Gordondale

 

272

Pas de DSC

 


ANNEXE 4 – Résumé des conclusions du Tribunal relativement aux dessaisissements

Liste des dessaisissements demandés par le commissaire et conclusions du Tribunal à cet égard

Installation

Service

Principaux marchés touchés par une DSC

Conclusion du Tribunal

Boundary Lake

ITRE

41, 105

Pas de dessaisissement requis

 

Réglé par le dessaisissement des ITRE Gordondale et Spirit River

Brazeau

ITRE

36, 99, 111, 117, 136, 144, 145, 146, 193, 206

Dessaisissement requis

Buck Creek

ITRE

124

Dessaisissement requis

Coronation

ITRE

2, 14

Pas de dessaisissement requis

 

Réglé par le dessaisissement de l’ITRE Kindersley et des cavernes Unity

Eckville

ITRE

119, 121

Pas de dessaisissement requis

 

Réglé par le dessaisissement des ITRE Buck Creek et Stauffer

Elk Point

ITRE

4, 25, 26, 27, 15, 235

Dessaisissement requis

Fort McMurray

ITRE

60

Dessaisissement requis

Fox Creek East

ITRE

12, 31, 171, 173, 169, 171, 173, 174, 176, 183, 186, 188, 245, 247

Dessaisissement requis

Fox Creek (Bigstone et HT)

ITRE

5, 29, 157, 176, 245

Dessaisissement requis

Gordondale

ITRE

28, 104, 106, 108, 132, 196, 251, 252, 255, 257

Dessaisissement requis

Grande Prairie Industrial

ITRE

94, 95

Pas de dessaisissement requis

 

Réglé par les dessaisissements des ITRE La Glace, South Wapiti et Spirit River

Green Court

ITRE

30, 102, 183

Pas de dessaisissement requis

 

Réglé par les dessaisissements des ITRE Brazeau, Buck Creek, Fox Creek (Bigstone et HT), Judy Creek et West Edson

Gull Lake

ITRE

17, 53

Pas de dessaisissement requis

 

Réglé par le dessaisissement de l’ITRE Kindersley

Judy Creek

ITRE

8, 16, 30, 32, 49, 57, 160 (PDEA), 183 (PDEA), 186 (PDEA)

Dessaisissement requis

Kindersley

ITRE

2, 14, 17, 52, 53, 142 (EA)

Dessaisissement requis

 

La Glace

ITRE

90, 91, 93 (en partie), 94, 95, 128, 130, 202 (PDEA)

Dessaisissement requis

Mitsue

ITRE

16, 57, 49

Pas de dessaisissement requis

 

Réglé par le dessaisissement de l’ITRE Judy Creek

Niton Junction

ITRE

101, 102, 152 (PDEA) (et éventuellement 38, 99, 111 pour certains clients)

Pas de dessaisissement requis

 

Réglé par le dessaisissement des ITRE Brazeau, Buck Creek et West Edson

Silverberry

ITRE

168 (PDEA)

Dessaisissement requis

South Taylor

ITRE

107, 108, 168 (PDEA)

Dessaisissement requis

South Wapiti

ITRE

86, 88, 92, 93, 94, 95, 96, 98, 129 et les marchés suivants des PDEA : 154, 155, 159, 163, 164, 165, 166, 232, 233

Dessaisissement requis

Spirit River

ITRE

91, 93, 134 et éventuellement une partie de 202 (PDEA)

Dessaisissement requis

Stauffer

ITRE

45, 46, 117 119, 121, 127, 138

Dessaisissement requis

Valleyview

ITRE

11, 12, 13

Pas de dessaisissement requis

 

Réglé par le dessaisissement des ITRE Fox Creek (Bigstone et HT) et Judy Creek

West Edson

ITRE

3, 6, 7, 18, 19, 36, 37, 42, 47, 50, 51, 55, 99 (en partie), et marchés des PDEA 143, 147, 150, 246

Dessaisissement requis

Willesden Green

ITRE

10

Dessaisissement requis

 

08-09

PDEA

234

Dessaisissement requis

Kakwa

PDEA

54, 154, 155, 163, 164, 165 166, 177, 232, 233

Dessaisissement requis

Mile 103

PDEA

148, 168

Dessaisissement requis

Moose Creek

PDEA

18, 19 et des parties de 47 144, 146, 150

Dessaisissement requis

Swan Hills

PDEA

 

Pas de dessaisissement requis

 

Réglé par le dessaisissement de l’ITRE Judy Creek

 

Elk Point

Lieu d’enfouissement

79

Dessaisissement requis

Fox Creek

Lieu d’enfouissement

 

Pas de dessaisissement requis

 

 

La Glace

Lieu d’enfouissement

22, 23, 78

Dessaisissement requis

Marshall

Lieu d’enfouissement

79

Pas de dessaisissement requis

 

Réglé par le dessaisissement du lieu d’enfouissement Elk Point et des cavernes Lindbergh

Silverberry

Lieu d’enfouissement

63

Dessaisissement requis

South Wapiti

Lieu d’enfouissement

22, 23, 78

Dessaisissement requis

Spirit River

Lieu d’enfouissement

62

Dessaisissement requis

 

Willesden Green

Lieu d’enfouissement

80

Dessaisissement requis

 

Lindbergh

Caverne

15, 25, 26, 27, 235

Dessaisissement requis

Unity

Caverne

58, 14 et des parties de 2, 15, 142

Dessaisissement requis

 


ANNEXE 5 – Dates de fermeture des installations

 


Nom de l’installation

Date prévue de fermeture

Source

XXXXX

XXXXXXXXXXXXXX

31 août 2027

Rapport révisé de M. Harington, au tableau 5 et à l’annexe 3.2A

XXXXXXXXXX XXXXX

31 juillet 2022

Rapport révisé de M. Harington, au tableau 5 et à l’annexe 3.2A

XXXXXXXXXXXXXX XXXXX

Fermeture temporaire (jusqu’à épuisement de la capacité de XXXX XXXXXXXXX)

Rapport révisé de M. Harington, au tableau 5 et à l’annexe 3.2A, note 2

 

transcription confidentielle B, à la p. 3138

XXXXXXXXXXXX XXXXXXXX

S. O. – [traduction] « Plafonnement en cours »

Rapport révisé de M. Harington, au tableau 5 et à l’annexe 3.2A

XXX

XXXXXXXXXXXX XXXXXXX

30 avril 2022

Rapport révisé de M. Harington, au tableau 4 et à l’annexe F

XXXXXXXXXXX

Fermeture temporaire

 

1er novembre 2021

(fermeture de flux de déchets)

 

 

28 février 2022

(fermeture partielle, réouverture après la fermeture de XXX XXXXXXXX)

 

1er mai 2022

(réouverture après la fermeture de XXX XXXXXXX)

 

 

 

Rapport révisé de M. Harington, au tableau 4 et à l’annexe F, ligne 18

 

 

Rapport révisé de M. Harington, au tableau 4 et à l’annexe F, note 3

 

 

 

 

 

 

XXXXXXXXXXXX

30 avril 2022

Rapport révisé de M. Harington, au tableau 4 et à l’annexe F

 

transcription confidentielle B, à la p. 2345

XXXXXXXXXX

30 avril 2023

Rapport révisé de M. Harington, au tableau 4 et à l’annexe F

 

transcription confidentielle B, aux p. 2671 à 2673

XXXXXXXXXXXXX XXXXXX

 

XXXXXXXXXXXXX XXXXXXXXXXXXX XXXXXXXXXXX XXXXXXXXX XXXXXXXXXXXXX XXXXX

28 octobre 2021

 

 

31 octobre 2021

Rapport révisé de M. Harington, au tableau 4 et à l’annexe F

 

Rapport révisé de M. Harington, au tableau 4 et à l’annexe F

 

XXXXXXXXXXXXX XXXX

30 avril 2023

Rapport révisé de M. Harington, au tableau 4 et à l’annexe F

 

transcription confidentielle B, à la p. 2345

XXXXXXXXXXXXX XXXX

1er novembre 2021

Rapport révisé de M. Harington, au tableau 4 et à l’annexe F

XXXXXXXXXXXXXX

30 novembre 2021

Rapport révisé de M. Harington, au tableau 4 et à l’annexe F

 

transcription confidentielle B, aux p. 2452 et 2453

XXXXXXXXXXXXXX

31 octobre 2022

Rapport révisé de M. Harington, au tableau 4 et à l’annexe F

XXXXXXXXXXXX

1er octobre 2021 XXXXX

30 avril 2022 XXX

Rapport révisé de M. Harington, au tableau 4 et à l’annexe F

XXXXXXXXXXXX XXXX

30 avril 2022

Rapport révisé de M. Harington, au tableau 4 et à l’annexe F

 

transcription confidentielle B, aux p. 2671 à 2673

XXXXXXXXXXX

5 novembre 2021

Rapport révisé de M. Harington, au tableau 4 et à l’annexe F

 

transcription confidentielle B, à la p. 2342

XXXXXXXXXXXXX

24 octobre 2021

Rapport révisé de M. Harington, au tableau 4 et à l’annexe F

 

transcription confidentielle B, à la p. 2355

XXXXXXXXXXX

5 novembre 2021

Rapport révisé de M. Harington, au tableau 4 et à l’annexe F

 

transcription confidentielle B, à la p. 2342

XXXXXXXXXXXXXX

30 avril 2022

Rapport révisé de M. Harington, au tableau 4 et à l’annexe F

 

transcription confidentielle B, aux p. 2671 à 2673

XXXXXXXXXXXXX

3 octobre 2021

Rapport révisé de M. Harington, au tableau 4 et à l’annexe F

XXXX

XXXXXXXXXXXX

30 avril 2023

Rapport révisé de M. Harington, au tableau 4 et à l’annexe F

XXXXXXXXXXXX

30 novembre 2021

Rapport révisé de M. Harington, au tableau 4 et à l’annexe F

 

 


ANNEXE 6 – Ordonnance

 

Dossier no TC-2021-002

 

TRIBUNAL DE LA CONCURRENCE

 

DANS L’AFFAIRE de la Loi sur la concurrence, LRC 1985, c C-34, et ses modifications;

 

ET DANS L’AFFAIRE DE l’acquisition de Tervita Corporation par Secure Energy Services Inc.;

ET DANS L’AFFAIRE d’une demande présentée par le commissaire de la concurrence en vue d’obtenir une ordonnance au titre de l’article 92 de la Loi sur la concurrence.

ENTRE :

 

Le commissaire de la concurrence

(demandeur)

 

– et –

 

 

 

SECURE ENERGY SERVICES INC.

 

(défenderesse)

 

 



ORDONNANCE


 

 

ATTENDU QUE SECURE Energy Services Inc. (« Secure ») a fait l’acquisition des actions émises et en circulation de Tervita Corporation (« Tervita ») le 2 juillet 2021 (le « fusionnement »);

 

ATTENDU QUE le commissaire de la concurrence (le « commissaire ») a déposé une demande en vertu de l’article 92 de la Loi sur la concurrence, LRC 1985, c C-34 (la « Loi »);

 

ET APRÈS avoir entendu les avocats du commissaire et les avocats de Secure, le Tribunal ordonne ce qui suit :

 

  1. DÉFINITIONS

[1] Les définitions qui suivent s’appliquent à la présente ordonnance :

a) « Loi » Loi sur la concurrence, LRC 1985, c C-34, et ses modifications;

b) « affiliée » Au sens du paragraphe 2(2) de la Loi;

c) « jour ouvrable » Jour où le Bureau de la concurrence de Gatineau (Québec) est ouvert;

d) « commissaire » Le commissaire de la concurrence nommé en vertu de la Loi, ainsi que ses représentants autorisés;

e) « renseignements confidentiels » Les renseignements sensibles de nature concurrentielle, exclusive ou autre qui ne sont pas déjà du domaine public et qui appartiennent à une personne ou à son entreprise ou portent sur cette personne ou son entreprise, notamment les renseignements concernant la fabrication, les opérations et les questions financières, les listes de clients, les listes de prix, les contrats, les renseignements relatifs aux coûts et aux revenus, les méthodes de mise en marché, les brevets, les technologies, les procédés ou les autres secrets commerciaux;

f) « entreprise visée par le dessaisissement » L’entreprise exploitée aux installations dont la liste est fournie à l’annexe A;

g) « dessaisissement » La vente, le transport, le transfert, la cession ou toute autre forme d’aliénation des éléments d’actif visés par le dessaisissement, au bénéfice d’un ou de plusieurs acquéreurs, conformément à l’ordonnance et avec l’approbation préalable du commissaire, de manière à ce que Secure n’ait aucun intérêt direct ou indirect à l’égard des éléments d’actif visés par le dessaisissement;

h) « entente relative au dessaisissement » L’entente définitive et contraignante conclue entre Secure et un ou plusieurs acquéreurs pour réaliser les dessaisissements conformément à la présente ordonnance et sous réserve de l’approbation préalable du commissaire;

i) « demandeur au titre d’un dessaisissement » Secure pendant la période de vente initiale ou le fiduciaire des dessaisissements pendant la période de vente par le fiduciaire du dessaisissement;

j) « éléments d’actif visés par les dessaisissements » L’ensemble des droits, titres et intérêts afférents aux éléments d’actif corporels et incorporels, aux biens, aux propriétés, aux engagements et à l’entreprise appartenant à Secure ou utilisés ou détenus par Secure pour leur utilisation dans l’entreprise visée par les dessaisissements, ou relativement à celle ci;

k) « ordonnance » La présente ordonnance, y compris ses annexes. Sauf indication contraire, tout renvoi à une « partie », à un « article », à un « paragraphe » ou à une « annexe » vise, selon le cas, une partie, un article, un paragraphe ou une annexe de la présente ordonnance;

l) « entente relative au processus de dessaisissement » L’entente décrite à l’article 6 de la présente ordonnance;

m) « fiduciaire des dessaisissements » La personne nommée conformément à la partie III de la présente ordonnance (ou tout remplaçant désigné de cette personne) et tout employé, mandataire ou autre personne agissant pour le compte du fiduciaire des dessaisissements;

n) « vente par le fiduciaire des dessaisissements » Les dessaisissements auxquels le fiduciaire des dessaisissements est censé procéder en vertu de la partie III de la présente ordonnance;

o) « période de vente par le fiduciaire des dessaisissements » La période de six mois qui commence à l’expiration de la période de vente initiale;

p) « date d’entrée en vigueur » Date de la présente ordonnance;

q) « première date de référence » A le sens que lui donne l’alinéa 22d) de la présente ordonnance;

r) « période de vente initiale » La période qui commence XXXXXXXXXX et qui se termine XXXXXXXXXXXXXXXXXXX;

s) « éléments d’actif incorporels » Propriété intellectuelle de quelque nature que ce soit, y compris :

i. les brevets, les droits d’auteur, les marques de commerce et les logiciels;

ii. la présentation commerciale, les dessins industriels, les signes distinctifs, les secrets commerciaux, le savoir‐faire, les techniques, les données, les inventions, les pratiques, les méthodes, tout autre renseignement confidentiel ou exclusif d’ordre technique ou commercial, ou lié à la recherche ou au développement ou autre, de même que tous les droits visant à limiter l’utilisation ou la communication de ce qui précède dans n’importe quel ressort;

iii. les droits concernant l’obtention et le dépôt de brevets et de droits d’auteur ainsi que l’enregistrement de ceux‐ci;

iv. le droit de poursuivre et de recouvrer des dommages-intérêts ou d’obtenir une mesure injonctive pour contrefaçon, dilution, appropriation illicite, violation ou non-respect de toute propriété intellectuelle mentionnée ci-dessus;

t) « fusionnement » La transaction décrite dans le premier attendu de la présente ordonnance;

u) « contrôleur » La personne nommée conformément à la partie X de la présente ordonnance (ou tout remplaçant désigné de cette personne), ainsi que les employés, mandataires et autres personnes agissant pour le compte du contrôleur, étant entendu que, si aucun contrôleur n’est nommé, sauf pour ce qui est de la partie X de la présente ordonnance, le contrôleur est le commissaire;

v) « entente sur le contrôleur » L’entente décrite à l’article 34 de la présente ordonnance;

w) « personne » Une personne physique, une société ou une société de personne, une entreprise individuelle, une fiducie ou une autre organisation non constituée en personne morale ayant la capacité d’exercer des activités d’affaires ou commerciales ou une affiliée de ces personnes;

x) « acquéreur » La personne qui acquiert les éléments d’actif visés par le dessaisissement conformément à la présente ordonnance et à l’entente relative au dessaisissement;

y) « documents » Les documents au sens du paragraphe 2(1) de la Loi;

z) « seconde date de référence » A le sens que lui donne l’alinéa 22e) de la présente ordonnance;

aa) « Secure » SECURE Energy Services Inc. et ses affiliées ainsi que leurs administrateurs, dirigeants, employés, mandataires, représentants, successeurs et ayants droit;

bb) « tiers » Toute autre personne que le commissaire, Secure ou l’acquéreur;

cc) « Tribunal » Le Tribunal de la concurrence constitué sous le régime de la Loi sur le Tribunal de la concurrence, LRC 1985, c 19 (2e suppl.).

II. OBLIGATION DE RÉALISER LE DESSAISISSEMENT

[2] Secure déploie des efforts raisonnables sur le plan commercial pour réaliser les dessaisissements.

[3] Pendant la période de vente initiale, Secure déploie des efforts raisonnables sur le plan commercial pour réaliser les dessaisissements conformément aux dispositions de la présente ordonnance.

[4] Pendant la période de vente initiale, Secure transmet au commissaire et au contrôleur tous les 30 jours un rapport écrit décrivant la progression de ses efforts pour réaliser les dessaisissements. Le rapport comprend une description des contacts, des négociations, de la vérification diligente et des offres touchant les éléments d’actif visés par le dessaisissement ainsi que le nom, l’adresse et le numéro de téléphone de toutes les personnes contactées et des acquéreurs potentiels qui se sont manifestés. Secure répond, dans les trois jours ouvrables, à toute demande de renseignements supplémentaires du commissaire sur les efforts qu’elle déploie en vue de réaliser les dessaisissements. Un dirigeant ou tout autre représentant dûment autorisé de Secure atteste qu’il a examiné les renseignements fournis par Secure dans sa réponse et que ces renseignements sont, à sa connaissance, exacts et complets à tous égards importants.

III. PROCESSUS DE VENTE PAR LE FIDUCIAIRE DES DESSAISISSEMENTS

[5] Dans l’éventualité où Secure n’a pas procédé aux dessaisissements pendant la période de vente initiale, le commissaire nomme un fiduciaire des dessaisissements chargé de procéder aux dessaisissements conformément à la présente ordonnance. Cette nomination peut être faite en tout temps avant l’expiration de la période de vente initiale ou à une date ultérieure déterminée par le commissaire.

[6] Dans les cinq jours ouvrables suivant la nomination du fiduciaire des dessaisissements, Secure soumet à l’approbation du commissaire les conditions d’un projet d’entente relative au processus de dessaisissement devant être conclue avec le fiduciaire des dessaisissements et le commissaire, et visant à conférer au fiduciaire des dessaisissements tous les droits et pouvoirs nécessaires pour lui permettre d’effectuer les dessaisissements.

[7] Dans les cinq jours ouvrables suivant la réception de l’entente relative au processus de dessaisissement visée à l’article 6, le commissaire avise Secure de sa décision d’en approuver ou non les conditions. Si le commissaire n’approuve pas les conditions du projet d’entente relative au processus de dessaisissement, il impose d’autres conditions que Secure doit intégrer à la version finale de l’entente relative au processus de dessaisissement devant être conclue avec le fiduciaire des dessaisissements et le commissaire.

[8] Sans restreindre le pouvoir discrétionnaire du commissaire d’imposer d’autres conditions, Secure consent aux conditions suivantes en ce qui concerne les droits, les pouvoirs et les devoirs du fiduciaire des dessaisissements et les inclut dans l’entente relative au processus de dessaisissement:

a) Le fiduciaire des dessaisissements réalise les dessaisissements aussi rapidement que possible et, dans tous les cas, avant l’expiration de la période de vente par le fiduciaire des dessaisissements.

b) Le fiduciaire des dessaisissements déploie des efforts raisonnables pour négocier des modalités relatives aux dessaisissements les plus favorables à Secure qui soient raisonnablement envisageables au moment où elles sont négociées; cependant, les dessaisissements ne font l’objet d’aucun prix minimal. L’opinion du fiduciaire des dessaisissements quant à ce qui constitue des conditions favorables et à ce qu’il est raisonnablement possible d’obtenir est assujettie à l’examen et à l’approbation du commissaire.

c) Sous réserve de la surveillance et de l’approbation du commissaire, le fiduciaire des dessaisissements dispose du pouvoir complet et exclusif de faire ce qui suit pendant la période de vente par le fiduciaire des dessaisissements :

i. réaliser les dessaisissements conformément aux dispositions de la présente partie;

ii. susciter l’intérêt à l’égard d’un dessaisissement possible de quelque façon ou selon quelque procédure qu’il juge souhaitable pour donner une occasion juste à un ou plusieurs acquéreurs potentiels de bonne foi d’offrir d’acquérir les éléments d’actif visés par les dessaisissements, et il est entendu que, pour décider s’il faut poursuivre les négociations avec un acquéreur potentiel, il peut tenir compte des critères d’approbation énoncés à l’article 23;

iii. conclure une entente de dessaisissement avec un ou plusieurs acquéreurs qui liera Secure;

iv. négocier les engagements, assertions, garanties et indemnités devant faire partie d’une entente de dessaisissement, lesquels sont raisonnables sur le plan commercial;

v. embaucher, aux frais de Secure, les consultants, comptables, conseillers juridiques, courtiers en valeurs mobilières, courtiers commerciaux, évaluateurs et autres représentants et assistants qu’il juge nécessaires pour remplir ses fonctions et obligations.

d) Lorsqu’une personne présente de bonne foi une demande d’information concernant un achat éventuel d’éléments d’actif visés par les dessaisissements, le fiduciaire des dessaisissements l’avise que les dessaisissements sont en cours de réalisation et lui remet une copie de la présente ordonnance.

e) Si, de l’avis du fiduciaire des dessaisissements, une personne manifeste un intérêt de bonne foi à acheter des éléments d’actif visés par les dessaisissements et qu’elle signe avec lui une entente de confidentialité satisfaisante, de l’avis du commissaire, afin de protéger les renseignements confidentiels que cette personne peut recevoir dans le cadre de sa vérification diligente des éléments d’actif visés par les dessaisissements, le fiduciaire des dessaisissements :

i. fournit dans les plus brefs délais à cette personne tous les renseignements sur les éléments d’actif visés par les dessaisissements qu’il juge pertinents et appropriés;

ii. permet à cette personne d’effectuer une inspection raisonnable des éléments d’actif visés par les dessaisissements et de tous les renseignements et documents non privilégiés de nature financière, opérationnelle ou autre, y compris les renseignements confidentiels, pouvant être pertinents quant aux dessaisissements;

iii. donne à cette personne un accès aussi complet que possible dans les circonstances au personnel qui participe à la gestion des éléments d’actif visés par les dessaisissements.

f) Le fiduciaire des dessaisissements n’a ni l’obligation ni le pouvoir d’exploiter ou de conserver les éléments d’actif visés par les dessaisissements.

g) Le fiduciaire des dessaisissements transmet au commissaire et au contrôleur, dans les 14 jours suivant le dernier en date des événements suivants : la nomination du fiduciaire des dessaisissements et le début de la période de vente par le fiduciaire du dessaisissement, et par la suite, tous les 30 jours, un rapport écrit décrivant la progression de ses efforts pour réaliser les dessaisissements. Le rapport comprend une description des contacts, des négociations, de la vérification diligente et des offres touchant les éléments d’actif visés par les dessaisissements ainsi que le nom, l’adresse et le numéro de téléphone de toutes les personnes contactées et des acquéreurs potentiels qui se sont manifestés. Le fiduciaire des dessaisissements répond, dans les trois jours ouvrables, à toute demande de renseignements supplémentaires du commissaire sur les efforts qu’il déploie en vue de réaliser les dessaisissements.

h) Le fiduciaire des dessaisissements avise Secure et le commissaire dès la signature d’une lettre d’intention ou d’une entente de principe relativement aux éléments d’actif visés par les dessaisissements et remet à Secure un exemplaire de toute entente de dessaisissement signée lorsqu’il obtient l’approbation du commissaire quant au dessaisissement prévu dans cette entente de dessaisissement.

[9] Secure ne peut participer au processus de dessaisissement pendant la période de vente par le fiduciaire des dessaisissements ni à une négociation avec des acquéreurs potentiels menée par le fiduciaire des dessaisissements. Secure ne peut non plus communiquer avec des acquéreurs potentiels pendant la période de vente par le fiduciaire des dessaisissements, à moins d’en avoir été expressément autorisée par écrit par le fiduciaire des dessaisissements.

[10] Sous réserve de tout privilège reconnu légalement, Secure donne au fiduciaire des dessaisissements un accès complet à l’ensemble du personnel, des documents, des renseignements (y compris les renseignements confidentiels) et des installations liés aux éléments d’actif visés par les dessaisissements afin qu’il puisse effectuer sa propre inspection des éléments d’actif visés par les dessaisissements, en faciliter l’accès aux acquéreurs potentiels et leur fournir des renseignements.

[11] Secure ne prend aucune mesure susceptible d’entraver ou de compromettre, directement ou indirectement, les efforts que déploie le fiduciaire des dessaisissements pour réaliser les dessaisissements.

[12] Secure répond entièrement et dans les plus brefs délais à toutes les demandes du fiduciaire des dessaisissements et lui communique les renseignements qu’il demande. Secure désigne une personne à laquelle incombe en premier lieu la responsabilité de répondre entièrement et dans les plus brefs délais en son nom aux demandes du fiduciaire des dessaisissements.

[13] Secure convient de faire toute démarche et de signer tout document, et de faire en sorte que soit faite toute démarche ou que soit signé tout document dont elle peut assurer l’accomplissement ou la signature, qui sont raisonnablement nécessaires pour garantir que le dessaisissement des éléments d’actif visés par les dessaisissements ait lieu pendant la période de vente par le fiduciaire des dessaisissements et que les ententes conclues par le fiduciaire des dessaisissements lient Secure et soient exécutoires contre elle.

[14] Secure acquitte tous les frais et dépenses raisonnables dûment facturés au ou par le fiduciaire des dessaisissements ou engagés par celui-ci dans l’exercice de ses fonctions au titre de la présente ordonnance. Le fiduciaire des dessaisissements exerce ses fonctions sans caution ni sûreté et rend compte de tous les frais et dépenses engagés. Secure paie toutes les factures raisonnables soumises par le fiduciaire des dessaisissements dans les 30 jours suivant leur réception et, sans que soit limitée cette obligation, Secure se conforme à toute entente conclue avec le fiduciaire des dessaisissements concernant les intérêts sur les paiements en retard. En cas de différend : (i) ces factures sont soumises à l’approbation du commissaire; (ii) Secure acquitte sans délai toute facture approuvée par le commissaire. Toute somme due par la défenderesse au fiduciaire des dessaisissements est payée à même le produit des dessaisissements.

[15] Secure indemnise le fiduciaire des dessaisissements et l’exonère de toute responsabilité à l’égard des pertes, réclamations, dommages, obligations ou dépenses découlant de l’exercice de ses fonctions, y compris tous les honoraires juridiques raisonnables et les autres dépenses engagées dans le cadre de la préparation ou de la contestation de toute réclamation, qu’il en résulte ou non une déclaration de responsabilité, sauf dans la mesure où ces pertes, réclamations, dommages, obligations ou dépenses découlent de la malveillance, d’une négligence grossière ou de la mauvaise foi du fiduciaire des dessaisissements.

[16] Secure indemnise le commissaire et l’exonère de toute responsabilité à l’égard des pertes, réclamations, dommages, obligations ou dépenses découlant de l’exercice des fonctions du fiduciaire des dessaisissements, y compris tous les honoraires juridiques raisonnables et les autres dépenses engagées dans le cadre de la préparation ou de la contestation d’une réclamation, qu’il en résulte ou non une déclaration de responsabilité.

[17] Si le commissaire juge que le fiduciaire des dessaisissements a cessé d’agir ou n’agit pas de façon diligente, il peut le destituer et nommer un autre fiduciaire des dessaisissements. Les dispositions de la présente ordonnance qui concernent le fiduciaire des dessaisissements s’appliquent de la même façon à son remplaçant.

[18] Secure peut exiger que le fiduciaire des dessaisissements et chacun de ses consultants, comptables, conseillers juridiques, courtiers en valeurs mobilières, courtiers commerciaux, évaluateurs et autres représentants et assistants signent une entente de confidentialité appropriée, rédigée dans une forme jugée satisfaisante, de l’avis du commissaire. Il est toutefois entendu que cette entente n’empêche aucunement le fiduciaire des dessaisissements de communiquer tout renseignement au commissaire.

[19] Le commissaire peut demander au fiduciaire des dessaisissements et à chacun de ses consultants, comptables, conseillers juridiques, courtiers en valeurs mobilières, courtiers commerciaux, évaluateurs et autres représentants et assistants de signer une entente de confidentialité appropriée concernant les documents et les renseignements que le fiduciaire des dessaisissements peut recevoir du commissaire dans l’exercice de ses fonctions.

[20] Nonobstant toute disposition de la présente ordonnance, les droits, les pouvoirs et les obligations du fiduciaire des dessaisissements prévus par le présent consentement subsistent jusqu’à ce que les dessaisissements soient réalisés.

IV. APPROBATION DES DESSAISISSEMENTS PAR LE COMMISSAIRE

[21] Les dessaisissements sont subordonnés à l’approbation préalable du commissaire, conformément à la présente partie. Il est entendu que les dispositions énoncées dans la présente partie IV de l’ordonnance s’appliquent au cours de la période de vente initiale, de la période de vente par le fiduciaire des dessaisissements et de toute période subséquente prévue par la présente ordonnance. Si un dessaisissement est une transaction devant faire l’objet d’un avis, la présente ordonnance ne modifie en rien l’application de la partie IX de la Loi.

[22] Le demandeur au titre des dessaisissements suit le processus suivant pour demander une décision du commissaire relativement à son approbation du ou des dessaisissements proposés :

a) Le demandeur au titre des dessaisissements fait dans les plus brefs délais ce qui suit :

i. informer le commissaire de toute négociation avec un acquéreur potentiel qui est susceptible de mener à un ou plusieurs dessaisissements;

ii. transmettre au commissaire des copies de toute entente relative à un dessaisissement qui est signée par un acquéreur potentiel, y compris toute déclaration d’intérêt non contraignante.

b) Le demandeur au titre des dessaisissements informe sans délai le commissaire de son intention de conclure une entente de dessaisissement avec un acquéreur potentiel, ou de la conclusion d’une entente qui, si elle est approuvée par le commissaire, constituerait une entente de dessaisissement au sens de la présente ordonnance.

c) L’avis décrit à l’alinéa 22b) est donné par écrit et fournit l’identité de l’acquéreur potentiel; les détails du projet d’entente de dessaisissement et de toute entente connexe, ainsi que des renseignements sur la façon dont l’acquéreur potentiel satisferait, de l’avis du demandeur au titre des dessaisissements, aux conditions de la présente ordonnance.

d) Dans les 14 jours suivant la réception de l’avis mentionné à l’alinéa 22b), le commissaire peut demander des renseignements supplémentaires sur le dessaisissement proposé auprès de Secure, du contrôleur, de l’acquéreur potentiel et, pendant la période de vente par le fiduciaire des dessaisissements, du fiduciaire des dessaisissements. Ces personnes sont tenues de donner tout renseignement supplémentaire qui leur est demandé. Lorsqu’elles ont donné une réponse complète à la requête du commissaire, ces personnes doivent respecter la procédure suivante :

i. le fiduciaire des dessaisissements fait parvenir au commissaire une confirmation écrite attestant qu’il lui a fourni tous les renseignements supplémentaires qui lui avaient été demandés;

ii. le contrôleur fait parvenir au commissaire une confirmation écrite attestant qu’il a fourni au commissaire tous les renseignements supplémentaires qui lui avaient été demandés;

iii. un dirigeant ou tout autre représentant dûment autorisé de Secure atteste qu’il a examiné tous les renseignements supplémentaires fournis par Secure en réponse à la requête du commissaire et que ces renseignements sont, à sa connaissance, exacts et complets à tous égards important;

iv. un dirigeant ou tout autre représentant dûment autorisé de l’acquéreur potentiel atteste qu’il a examiné les renseignements supplémentaires fournis par l’acquéreur potentiel en réponse à la requête du commissaire et que ces renseignements sont, à sa connaissance, exacts et complets à tous égards importants.

La date à laquelle la dernière des personnes qui, du fiduciaire des dessaisissements, de Secure, du contrôleur et de l’acquéreur potentiel, remet au commissaire la confirmation ou l’attestation requise au présent paragraphe est la « première date de référence ».

e) Dans les sept jours ouvrables suivant la première date de référence, le commissaire peut demander d’autres renseignements supplémentaires sur le dessaisissement proposé auprès de l’une ou l’autre des personnes mentionnées à l’alinéa 22d)). Ces personnes doivent alors donner tout renseignement supplémentaire qui leur est demandé. Lorsqu’elles ont donné une réponse complète au commissaire, le cas échéant, ces personnes doivent suivre la procédure prévue à l’alinéa 22d) relativement aux autres renseignements supplémentaires fournis. La date à laquelle la dernière des personnes qui, du fiduciaire des dessaisissements, de Secure, du contrôleur ou de l’acquéreur potentiel, remet au commissaire la confirmation ou l’attestation requise au présent alinéa est la « seconde date de référence ».

f) Le commissaire avise le demandeur au titre des dessaisissements qu’il approuve les dessaisissements proposés, ou s’y oppose, aussitôt que possible et dans tous les cas au plus tard 14 jours suivant la date à laquelle le commissaire reçoit l’avis prévu à l’alinéa 22b) ou, s’il demande des renseignements supplémentaires conformément à l’alinéa 22d) ou d’autres renseignements supplémentaires conformément à l’alinéa 22e), dans les 14 jours suivant la plus tardive des dates suivantes :

i. la première date de référence;

ii. la deuxième date de référence, le cas échéant.

g) Le commissaire consigne par écrit la décision qu’il prend au sujet de l’approbation du ou des dessaisissements proposés.

[23] Dans l’exercice du pouvoir discrétionnaire qu’il a d’approuver ou non un dessaisissement proposé, le commissaire prend en considération l’incidence probable du dessaisissement sur la concurrence et peut prendre aussi en considération tout autre facteur qu’il estime pertinent, dont (i) les incidences dommageables que pourrait avoir le dessaisissement sur la réalisation des dessaisissements restants; (ii) la question de savoir s’il y a lieu d’élargir le dessaisissement pour en inclure d’autres, afin qu’un ou plusieurs dessaisissements prévus par la présente ordonnance soient réalisés. Avant d’accorder son approbation, le commissaire doit aussi être d’avis de ce qui suit :

a) l’acquéreur proposé est entièrement indépendant et n’a aucun lien de dépendance avec Secure;

b) Secure n’aura aucun intérêt direct ou indirect à l’égard des éléments d’actif visés par le dessaisissement après le dessaisissement;

c) l’acquéreur proposé s’engage à exploiter l’entreprise visée par le dessaisissement;

d) l’acquéreur proposé a la capacité, sur le plan de la gestion, de l’exploitation et des ressources financières, d’exercer une concurrence efficace sur le marché des services de gestion des déchets de pétrole et de gaz dans le bassin sédimentaire de l’Ouest canadien;

e) l’acquéreur proposé procédera au dessaisissement (i) avant l’expiration de la période de vente initiale, si le commissaire donne son approbation pendant cette période; ou (ii) pendant la période de vente par le fiduciaire des dessaisissements, si le commissaire donne son approbation pendant cette période.


 

V. CONSERVATION DES ÉLÉMENTS D’ACTIF VISÉS PAR LES DESSAISISSEMENTS

[24] Afin de protéger les éléments d’actif visés par les dessaisissements dans l’attente des dessaisissements, Secure s’engage à maintenir la viabilité économique, la possibilité de commercialisation et la compétitivité des éléments d’actif visés par les dessaisissements et des entreprises visées par les dessaisissements et s’engage à se conformer à toute décision ou directive du contrôleur relativement à la conservation des éléments d’actif visés par la conservation. Sans restreindre la généralité de ce qui précède, Secure s’engage :

a) à conserver les éléments d’actif visés par les dessaisissements en bon état, sous réserve de l’usure normale, selon des normes qui sont, de l’avis du contrôleur, au moins aussi rigoureuses que celles qui s’appliquaient à la date d’entrée en vigueur;

b) à veiller à ce que la gestion et l’exploitation des éléments d’actif visés par les dessaisissements continuent dans le cours normal des affaires et d’une manière qui, de l’avis du contrôleur, est raisonnablement conforme sur le plan de la nature, de la portée et de l’ampleur aux pratiques antérieures et aux pratiques généralement reconnues dans l’industrie et à l’ensemble des lois applicables;

c) à s’abstenir de sciemment prendre ou permettre que soient prises des mesures qui, de l’avis du contrôleur, sont propres à nuire de façon importante à la compétitivité, aux activités d’exploitation, à la situation ou la valeur financière, à la viabilité et à la qualité marchande des éléments d’actif visés par les dessaisissements;

d) à s’assurer que les éléments d’actif visés par les dessaisissements ne sont pas utilisés dans un autre type d’activités que celles qui étaient exercées à la date de la présente ordonnance, sauf avec l’approbation préalable du contrôleur et du commissaire;

e) à conserver les approbations, les enregistrements, les consentements, les licences, les permis, les renonciations et autres autorisations qui, de l’avis du contrôleur et sous réserve d'une consultation avec Secure, sont recommandées pour l’exploitation des éléments d’actif visés par les dessaisissements et des entreprises visées par les dessaisissements;

f) à prendre toutes les mesures commercialement raisonnables pour honorer les contrats avec les clients et pour maintenir des normes de qualité et de service pour les clients des éléments d’actif visés par les dessaisissements qui, de l’avis du contrôleur, sont au moins équivalentes aux normes qui s’appliquaient durant l’exercice financier précédant la présente ordonnance;

g) à s’abstenir de réduire sensiblement les activités de commercialisation, de vente, de promotion ou toute autre activité liée aux éléments d’actif visés par les dessaisissements ou les entreprises visées par les dessaisissements, sauf avec l’approbation préalable du contrôleur;

h) à s’abstenir de modifier ou de permettre que soit modifiée la gestion des éléments d’actif visés par les dessaisissements qui existaient durant l’exercice financier précédant la date de la présente ordonnance, sauf avec l’approbation préalable du contrôleur;

i) à s’abstenir de modifier ou de résilier les ententes relatives à l’emploi, à la rémunération ou aux avantages sociaux qui existaient à la date de la présente ordonnance à l’égard des employés dont les fonctions sont liées aux éléments d’actif visés par les dessaisissements, sans l’approbation préalable du contrôleur;

j) à veiller à ce que les éléments d’actif visés par les dessaisissements soient dotés d’un personnel suffisant pour assurer leur viabilité et leur capacité concurrentielle, notamment en remplaçant les employés qui partent par d’autres employés compétents pourvu que le contrôleur ait approuvé tant les compétences de ces employés que la nécessité de les engager;

k) à maintenir des niveaux de stock et des modalités de paiement conformes aux pratiques de Secure qui existaient, relativement aux éléments d’actif visés par les dessaisissements, durant l’exercice financier précédant la date de la présente ordonnance;

l) à maintenir séparément et adéquatement, conformément aux principes comptables généralement reconnus au Canada, les grands livres et registres financiers des renseignements financiers importants à l’égard des éléments d’actif visés par les dessaisissements et des entreprises visées par les dessaisissements.

[25] Jusqu’à ce que les dessaisissements soient réalisés, Secure ne peut prendre les mesures suivantes sans avoir préalablement obtenu l’approbation écrite du commissaire :

a) créer de nouvelles charges grevant les éléments d’actif visés par les dessaisissements ou les entreprises visées par les dessaisissements, sauf à l’égard des obligations qui sont contractées dans le cadre des activités normales et qui ne sont pas échues ou en souffrance;

b) conclure des contrats importants liés aux éléments d’actif visés par les dessaisissements ou les entreprises visées par les dessaisissements, se retirer des contrats de cette nature ou prendre d’autres mesures pour modifier les obligations qui en découlent, sauf lorsqu’il est nécessaire de le faire pour respecter la présente ordonnance;

c) apporter des changements importants aux éléments d’actif visés par le dessaisissement ou aux entreprises visées par le dessaisissement, sauf lorsqu’il est nécessaire de le faire pour respecter la présente ordonnance.

[26] Secure fournit les ressources financières suffisantes, notamment un fonds d’administration générale, un fonds de capital, un fonds de roulement et un fonds de remboursement à l’égard des pertes d’exploitation, en capital ou autres, pour maintenir les éléments d’actif visés par les dessaisissements conformément à la présente partie. Si le contrôleur estime que Secure n’a pas fourni, ne fournit pas ou ne fournira pas des ressources financières ou d’autres ressources suffisantes conformément à la présente partie, il renvoie sans délai l’affaire au commissaire, qui prend une décision finale concernant les ressources financières et les autres ressources que Secure doit fournir. Secure est tenue de se conformer à toute décision rendue par le commissaire sur cette question.

VI. CONSENTEMENT DE TIERS

[27] Toute entente de dessaisissement (qu’elle soit négociée par Secure ou par le fiduciaire des dessaisissements) contient une condition obligeant Secure à obtenir les consentements et renonciations de tierces parties qui sont nécessaires pour permettre la cession à un acquéreur de l’ensemble des contrats, approbations et autorisations d’importance inclus dans les éléments d’actif visés par les dessaisissements et leur prise en charge par l’acquéreur, étant entendu, cependant, que Secure peut satisfaire à cette exigence en attestant que l’acquéreur a signé des ententes directement avec une tierce partie ou plusieurs d’entre elles, de sorte qu'une telle cession et prise en charge serait inutile.


 

VII. ENTENTES DE SOUTIEN TRANSITOIRE

[28] Secure, ou le fiduciaire des dessaisissements au nom de Secure, conclut les ententes suivantes en vue de fournir, à la discrétion de l’acquéreur, des services transitoires durant une période d’au plus 12 mois à la suite de la réalisation du dessaisissement, de sorte que l’acquéreur puisse être en mesure d’exploiter l’entreprise visée par le dessaisissement de la même manière qu’elle l’a été durant la période de 12 mois précédant la date d’entrée en vigueur.

VIII. EMPLOYÉS

[29] Secure (pendant la période de vente initiale), ou le fiduciaire des dessaisissements (pendant la période de vente par le fiduciaire des dessaisissements) communiquent à tout acquéreur potentiel, au commissaire et au contrôleur des renseignements sur les employés dont les fonctions concernent le fonctionnement des éléments d’actif visés par les dessaisissements, pour permettre à cet acquéreur de prendre des décisions quant aux offres d’emploi à présenter à ces employés. Le contrôleur vérifie si les renseignements communiqués sont suffisants pour permettre à l’acquéreur de prendre de telles décisions.

[30] Secure :

a) s’abstient d’intervenir, directement ou indirectement, dans les négociations entamées par un acquéreur en vue d’embaucher des employés dont les fonctions concernent le fonctionnement des éléments d’actif visés par les dessaisissements;

b) s’abstient d’inciter ces employés à refuser de travailler pour l’acquéreur ou à accepter de travailler pour Secure;

c) élimine tout obstacle susceptible de dissuader ces employés d’accepter un emploi auprès de l’acquéreur;

d) renonce à l’application de toute clause de non-concurrence ou de confidentialité contenue dans un contrat de travail ou tout autre contrat qui serait susceptible de compromettre la possibilité pour ces employés d’être embauchés par l’acquéreur;

e) verse aux employés embauchés ultérieurement par l’acquéreur ou transfère pour leur compte la totalité des primes pour services actuels ou antérieurs, des pensions et des autres prestations en cours de versement ou constituées, auxquelles ils auraient eu droit s’ils étaient restés au service de Secure.

[31] Pendant une période d’un an suivant la réalisation du dessaisissement, Secure ne sollicite pas ni n’embauche, sans le consentement préalable écrit du commissaire, directement ou indirectement, les services de personnes dont l’emploi est lié aux éléments d’actif visés par les dessaisissements et qui ont accepté un emploi auprès de l’acquéreur, sauf si elles ont été licenciées par ce dernier. La présente ordonnance n’interdit d’aucune façon à Secure de solliciter ou d’embaucher des personnes par la voie d’annonces placées dans un journal, dans une revue spécialisée ou sur un site Web, ou publiées par l’entremise d’autres médias largement diffusés, sous réserve que ces annonces ne ciblent ni n’interpellent les personnes dont l’emploi est lié aux éléments d’actif visés par les dessaisissements.

IX. DÉFAUT DE VENTE PAR LES FIDUCIAIRES DES DESSAISISSEMENTS

[32] Si, à la fin de la période de vente par le fiduciaire des dessaisissements, les dessaisissements n’ont pas été réalisés, ou si le commissaire estime que les dessaisissements ne seront vraisemblablement pas réalisés avant la fin de la période de vente par le fiduciaire des dessaisissements, le commissaire peut, à sa discrétion, demander au Tribunal de rendre (i) toute ordonnance nécessaire pour réaliser les dessaisissements; ou (ii) toute ordonnance nécessaire pour que la transaction n’ait vraisemblablement pas pour effet d’empêcher ou de diminuer sensiblement la concurrence.

X. CONTRÔLEUR

[33] Le commissaire nomme un contrôleur qui sera chargé de veiller à ce que Secure respecte la présente ordonnance. Cette nomination peut avoir lieu en tout temps après la date d’entrée en vigueur. Tout renvoi fait dans le présent consentement à certaines fonctions ou tâches de surveillance dont le contrôleur doit s’acquitter ne diminue en aucun cas le droit, le pouvoir et le devoir qu’a, de façon générale, le contrôleur de veiller à ce que Secure respecte à tous égards la présente ordonnance.

[34] Dans les cinq jours ouvrables suivant la nomination du contrôleur, Secure soumet à l’approbation du commissaire les conditions d’un projet d’entente sur le contrôleur devant être conclue avec le contrôleur et le commissaire, et visant à conférer au contrôleur tous les droits et pouvoirs nécessaires pour lui permettre de s’assurer que Secure respecte la présente ordonnance.

[35] Dans les cinq jours ouvrables suivant la réception du projet d’entente sur le contrôleur dont il est question à l’article 34, le commissaire avise Secure de sa décision d’approuver ou non les conditions du projet d’entente sur le contrôleur. Si le commissaire n’approuve pas les conditions du projet d’entente sur le contrôleur, il impose d’autres conditions que Secure intègre à la version finale de l’entente sur le contrôleur devant être conclue avec le contrôleur et le commissaire.

[36] Nonobstant ce qui précède, Secure consent aux conditions suivantes en ce qui concerne les droits, pouvoirs et devoirs du contrôleur et les inclut à l’entente sur le contrôleur :

a) Le contrôleur a les droits et les pouvoirs qui lui permettent de s’assurer que Secure se conforme à la présente ordonnance, et il exerce ces droits et ces pouvoirs, ainsi que ses fonctions et responsabilités, conformément aux objectifs de la présente ordonnance et en consultation avec le commissaire.

b) Le contrôleur a le pouvoir d’engager, aux frais de Secure, les consultants, comptables, conseillers juridiques et autres représentants et assistants qu’il estime nécessaire pour s’acquitter des fonctions et responsabilités qui lui incombent.

c) Le contrôleur n’a ni l’obligation ni le pouvoir d’exploiter ou de conserver les éléments d’actif visés par les dessaisissements.

d) Le contrôleur agit pour le seul bénéfice du commissaire, respecte la confidentialité et évite tout conflit d’intérêts.

e) Le contrôleur n’a aucune obligation d’agir de bonne foi (sauf lorsque la loi l’exige), de nature fiduciaire ou autre, à l’égard de Secure.

f) Tous les 30 jours après la date de sa nomination jusqu’à la réalisation des dessaisissements et, par la suite, chaque année, au plus tard à l’anniversaire des dessaisissements, le contrôleur présente au commissaire un rapport écrit concernant l’exécution par Secure des obligations que lui impose la présente ordonnance . Le contrôleur répond dans un délai de trois jours ouvrables à toute demande de renseignements supplémentaires faite par le commissaire au sujet de la situation de conformité de Secure.

[37] Sous réserve de tout privilège légalement reconnu, Secure donne au contrôleur un accès complet à l’ensemble du personnel, des documents, des renseignements (y compris les renseignements confidentiels) et des installations nécessaires pour s’assurer que la défenderesse se conforme à la présente ordonnance.

[38] Secure ne prend aucune mesure susceptible d’entraver ou de compromettre, directement ou indirectement, les efforts menés par le contrôleur pour s’assurer de la conformité de Secure à la présente ordonnance.

[39] Secure répond complètement et dans les plus brefs délais à toutes les demandes du contrôleur et, sous réserve de tout privilège légalement reconnu, lui fournit tous les renseignements qu’il sollicite. Secure désigne une personne à laquelle incombe en premier lieu la responsabilité de répondre en son nom aux demandes du contrôleur.

[40] Secure peut exiger du contrôleur et de chacun de ses consultants, comptables, avocats et autres représentants et assistants de signer une entente de confidentialité, rédigée dans une forme jugée satisfaisante de l’avis du commissaire; il est toutefois entendu qu’une telle entente n’empêche pas le contrôleur de fournir des renseignements au commissaire.

[41] Le commissaire peut demander au contrôleur et à chacun de ses consultants, comptables, conseillers juridiques et autres représentants et assistants de signer une entente de confidentialité appropriée concernant les documents et renseignements que le contrôleur peut recevoir du commissaire dans l’exercice de ses fonctions.

[42] Secure acquitte tous les frais et toutes les dépenses raisonnables dûment facturés au ou par le contrôleur ou engagés par celui‐ci dans l’exercice de ses fonctions au titre de la présente ordonnance. Le contrôleur exerce ses fonctions sans caution ni sûreté et rend compte de tous les frais et dépenses engagés. Secure paie toutes les factures raisonnables soumises par le contrôleur dans les 30 jours suivant leur réception et, sans limiter cette obligation, Secure se conforme à toute entente conclue avec le contrôleur concernant les intérêts sur les paiements en retard. En cas de différend : (i) les factures sont soumises à l’approbation du commissaire; (ii) Secure acquitte sans délai toute facture approuvée par le commissaire. Toute somme due par la défenderesse au contrôleur est payée à même le produit des dessaisissements.

[43] Secure indemnise le contrôleur et l’exonère de toute responsabilité à l’égard des pertes, réclamations, dommages, obligations ou dépenses découlant de l’exercice de ses fonctions, y compris tous les honoraires juridiques raisonnables et les autres dépenses engagées dans le cadre de la préparation ou de la contestation de toute réclamation, qu’il en résulte ou non une déclaration de responsabilité, sauf dans la mesure où ces pertes, réclamations, dommages, obligations ou dépenses découlent de la malveillance, de la négligence grossière ou de la mauvaise foi du contrôleur.

[44] Si le commissaire juge que le contrôleur a cessé d’agir ou n’agit pas de façon diligente, il peut le destituer et nommer un autre contrôleur. Les dispositions de la présente ordonnance qui concernent le contrôleur s’appliquent de la même façon à son remplaçant.

[45] Le contrôleur exerce ses fonctions le temps nécessaire pour s’assurer que Secure se conforme à la présente ordonnance.

XI. CONFORMITÉ

[46] Dans les trois jours ouvrables suivant la date d’entrée en vigueur de la présente ordonnance, Secure en fournit un exemplaire à tous ses administrateurs, dirigeants, employés et mandataires et à ceux de ses affiliées qui ont des responsabilités de gestion à l’égard des obligations découlant de la présente ordonnance. Secure veille à ce que ses administrateurs, dirigeants, employés et mandataires ayant des responsabilités touchant aux obligations prévues dans la présente ordonnance reçoivent une formation suffisante sur les fonctions et responsabilités de Secure aux termes de la présente ordonnance, ainsi que sur les mesures à prendre pour s’y conformer.

[47] Il est interdit à Secure d’acquérir, pendant une période de dix ans à compter de la date de la réalisation des dessaisissements, directement ou indirectement, tout intérêt à l’égard des éléments d’actif visés par les dessaisissements, sans l’approbation écrite préalable du commissaire.

[48] Un an après la date d’entrée en vigueur, puis chaque année par la suite à la date d’anniversaire de l’entrée en vigueur, ainsi que chaque fois que le commissaire en fait la demande, le cas échéant, Secure dépose un affidavit ou une attestation, rédigé essentiellement sous la forme prévue à l’annexe B de la présente ordonnance, dans lequel elle atteste qu’elle s’est conformée aux parties VII, VIII et XI de la présente ordonnance et donne les détails :

a) des mesures prises en matière de conformité;

b) des mécanismes établis pour contrôler la conformité;

c) des noms et postes des employés responsables de la conformité.

[49] Si Secure, le fiduciaire des dessaisissements ou le contrôleur apprend qu’il y a eu ou pourrait y avoir eu manquement à l’une des conditions de la présente ordonnance, dans les cinq jours ouvrables suivant la date à laquelle il a connaissance du manquement réel ou possible, il en avise le commissaire et lui fournit suffisamment de détails sur la nature, la date et l’incidence (réelle et prévue) du manquement ou du manquement possible, étant entendu qu’il n’est pas nécessaire d’envoyer un avis de manquement possible si la personne détermine au cours de ces cinq jours ouvrables qu’il ne pouvait pas raisonnablement y avoir eu manquement à l’une des conditions de la présente ordonnance. Dans tous les affidavits et toutes les attestations de conformité déposés auprès du commissaire conformément à l’article 48 de la présente ordonnance, Secure atteste qu’elle a respecté la présente disposition.

[50] Secure notifie au commissaire au moins 30 jours avant

a) toute proposition de dissolution de Secure;

b) tout autre changement important touchant Secure si ce changement est susceptible d’avoir une incidence sur les obligations en matière de conformité découlant de la présente ordonnance, y compris une réorganisation, une acquisition importante, une disposition ou un transfert d’actifs, ou toute modification importante des statuts constitutifs de Secure.

[51] Pour assurer le respect de la présente ordonnance, et sous réserve de tout privilège légalement reconnu, Secure permet à tout représentant autorisé du commissaire, sur demande écrite préalable d’au moins cinq jours ouvrables, sans restriction ni entrave :

a) d’accéder à toutes ses installations, pendant les heures normales de bureau lors de n’importe quel jour ouvrable, et d’inspecter et de photocopier tous les documents en sa possession ou sous son contrôle qui concernent l’observation de la présente ordonnance; les services de copie sont fournis par Secure, à ses frais;

b) d’interroger ses dirigeants, ses administrateurs ou ses employés, lorsque le commissaire le demande.

XII. AVIS

[52] Pour être valide, tout avis ou autre communication requis ou autorisé au titre de la présente ordonnance :

a) est sous forme écrite et livré en mains propres, par courrier recommandé, par service de messagerie, par télécopieur ou par courrier électronique;

b) est envoyé à la partie destinataire à l'adresse indiquée ci‐dessous, ou à toute autre adresse indiquée par la partie destinataire conformément au présent article.

au commissaire :

Commissaire de la concurrence

Bureau de la concurrence du Canada

Place du Portage, 21e étage

50, rue Victoria, Phase I

Gatineau (Québec) K1A 0C9

 

À l’attention du commissaire de la concurrence

Télécopieur : 819-953-5013

Courriel : ic.avisdefusionmergernotification.ic@canada.ca et

avisdefusionmergernotification@cb-bc.gc.ca


une copie devant être acheminée à :

 

Directeur et avocat général principal

Services juridiques du Bureau de la concurrence

Ministère de la Justice

Place du Portage, 22e étage

50, rue Victoria, Phase I

Gatineau (Québec) K1A 0C9

Télécopieur : 819-953-9267

Courriel : ic.cb_lsu_senior_general_counsel-avocat_general_principal_usj_bc.ic@canada.ca et cb_lsu_senior_general_counsel-avocat_general_principal_usj_bc@ised- isde.gc.ca

 

 

à Secure :

 

SECURE Energy – siège social

Brookfield Place

2300, 225 6 Avenue SW

Calgary (Alberta) T2P 1N2

 

À l’attention de Rene Amirault – Chef de la direction

 

une copie devant être acheminée à :

 

Blake, Cassels & Graydon S.E.N.C.R.L.

Robert E. Kwinter; Nicole Henderson; Brian Facey; Joe McGrade

199 Bay Street, Suite 4000, Commerce Court West

Toronto (Ontario) M5L 1A9

Courriel: rob.kwinter@blakes.com

nicole.henderson@blakes.com

brian.facey@blakes.com

joe.mcgrade@blakes.com

 

[53] Tout avis ou toute autre communication donné conformément à la présente ordonnance prend effet le jour de sa réception par la partie destinataire. Il est réputé avoir été reçu :

a) s’il est livré en mains propres, par courrier recommandé ou par messager, au moment de la réception, ainsi qu’en fait foi la date indiquée sur le reçu signé;

b) s’il est envoyé par télécopieur, au moment de sa réception, ainsi qu’en font foi la date et l’heure indiquées sur la confirmation d’envoi;

c) s’il est envoyé par courrier électronique, au moment où le destinataire, par un courriel envoyé à l’adresse de l’expéditeur indiquée dans le présent article ou par un avis envoyé autrement conformément au présent article, accuse réception de ce courriel; toutefois, un accusé de lecture automatique ne constitue pas un accusé de réception pour l’application du présent article.

Tout avis ou toute autre communication reçu après 17 h, heure locale, ou un jour qui n’est pas un jour ouvrable, est réputé avoir été reçu le jour ouvrable suivant.

[54] Nonobstant les articles 52 et 53, tout avis ou toute autre communication qui n’est pas transmis conformément aux articles 52 et 53 est valide si un représentant de la partie au présent consentement à qui est adressée la communication en accuse réception et ne demande pas à ce moment qu'elle soit envoyée différemment.

XIII. DISPOSITIONS GÉNÉRALES

[55] Dans la présente ordonnance :

a) Nombre et genre – À moins que le contexte ne s’y oppose, le singulier comprend le pluriel, et inversement, et le masculin comprend le féminin, et inversement.

b) Délais – Le calcul des délais prévus est effectué conformément à la Loi d’interprétation, LRC 1985, c I‐21, et le samedi est réputé être un « jour férié » au sens de la Loi d’interprétation.

[56] Le commissaire peut, après en avoir informé Secure, proroger tous les délais prévus à la présente ordonnance, à l’exception de ceux prévus à l’article 47. Dans le cas où un délai est prorogé, le commissaire en avise Secure dans les plus brefs délais.

[57] En cas de différend concernant l’interprétation, la mise en œuvre ou l’application de la présente ordonnance ou la conformité à celle‐ci, le commissaire ou Secure peuvent s’adresser au Tribunal pour obtenir des directives ou une ordonnance additionnelle.

FAIT à Ottawa, ce 3e jour de mars 2023.

SIGNÉ au nom du Tribunal par les membres de la formation .

(s) Le juge en chef Paul Crampton (membre président)

(s) Le juge Denis Gascon

(s) M. Ted Horbulyk

 

Traduction certifiée conforme

Édith Malo


 

 

ANNEXE A

 

INSTALLATIONS DEVANT FAIRE L’OBJET D’UN DESSAISISSEMENT

 

Installations de traitement, de récupération et d’élimination

Puits de déversement d’eau autonomes

Brazeau

08-09

Buck Creek

Kakwa

Elk Point

Mile 103

Fort McMurray

Moose Creek

Fox Creek East

Fox Creek (Bigstone et Highway Terminal)

Gordondale

Lieux d’enfouissement

Judy Creek

Elk Point

Kindersley

La Glace

La Glace

Silverberry

Silverberry

South Wapiti

South Taylor

Spirit River

South Wapiti

Willesden Green

Spirit River

 

Stauffer

West Edson

Cavernes

Willesden Green

Lindbergh

Unity

 


 

ANNEXE B

 

FORMULAIRE D’ATTESTATION/AFFIDAVIT CONCERNANT LA CONFORMITÉ

 

Je [nom], de [lieu], atteste par les présentes[135], conformément aux modalités de l’ordonnance du Tribunal de la concurrence datée du 3 mars 2023, que :

  1. Je suis le/la [titre] de [Secure], et je suis personnellement au courant des faits exposés aux présentes, sauf ceux qui sont désignés comme étant fondés sur des renseignements ou sur une opinion, auxquels cas je cite la source des renseignements et je les tiens pour véridiques.
  2. Le dessaisissement (défini dans l’ordonnance) en faveur de [l’acquéreur] a eu lieu le [date].
  3. Suivant l’article 48 de l’ordonnance, Secure est tenue de produire [des rapports annuels/des rapports à la demande du commissaire] attestant qu’elle s’est conformée aux parties VII, VIII et XI de l’ordonnance.

Surveillance de la conformité

  1. Il revient principalement à [Noms/titres] de surveiller le respect de la présente ordonnance.

Distribution de l’ordonnance

  1. Suivant l’article 46 de l’ordonnance, Secure est tenue de fournir un exemplaire de l’ordonnance à tous ses administrateurs, dirigeants, employés et mandataires, et à ceux de ses affiliées qui ont des responsabilités de gestion à l’égard de l’une ou l’autre des obligations découlant de la présente ordonnance, dans les trois jours ouvrables suivant la date d’enregistrement de l’ordonnance. [Nom de la personne] a fourni une copie du consentement à [fournir une liste] le [dates].
  2. Suivant l’article 46 de l’ordonnance, la défenderesse est tenue de veiller à ce que ses administrateurs, dirigeants, employés et mandataires qui ont des responsabilités à l’égard de l’une ou l’autre des obligations prévues dans l’ordonnance reçoivent une formation suffisante sur les responsabilités et devoirs de Secure découlant de l’ordonnance. La formation suivante a été donnée : [liste des personnes ayant reçu la formation ainsi que de celles qui l’ont donnée et description générale du contenu de la formation].

Ententes de soutien transitoire

  1. Suivant l’article 28 de l’ordonnance, Secure est tenue de prévoir des ententes de soutien transitoire. [Décrivez la conformité à cette obligation.]

Employés

  1. Selon les articles 30 et 31 de l’ordonnance, Secure est tenue de prendre différentes mesures à l’égard de ses employés dont les fonctions concernaient le fonctionnement des éléments d’actif visés par les dessaisissements. Secure s’est entièrement conformée aux conditions prévues à ces articles et, plus particulièrement : [Décrivez les mesures prises afin de faciliter le transfert des employés à l’acquéreur, compte tenu des conditions énoncées aux articles 30 et 31]; donnez des renseignements sur le nombre d’employés qui ont été transférés à l’acquéreur.]

Acquisition, réacquisition et changement organisationnel

  1. L’article 47 de l’ordonnance interdit la réacquisition d’éléments d’actifs visés par les dessaisissements pendant une période de 10 ans après la réalisation des dessaisissements sans l’approbation écrite préalable du commissaire. Secure s’est entièrement conformée aux conditions prévues à cet article.
  2. L’article 50 de l’ordonnance exige que le commissaire soit informé de certains changements organisationnels ou d’autres changements apportés à Secure qui pourraient avoir une incidence sur le respect de l’ordonnance. Secure s’est conformée à cette disposition et, plus particulièrement : [décrivez les mesures prises pour que cet engagement soit respecté.]

Avis de violation

  1. Selon ma connaissance et les questions que j’ai posées à [noms des personnes interrogées], je ne suis au courant d’aucun manquement ou manquement probable à l’une des modalités de l’ordonnance au sens de l’article 49 de ladite ordonnance.

 

DATE : [ ]

 


Commissaire à l’assermentation Nom et titre de l’agent ordonnateur

 

 

 

 

 

 


 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

Pour le demandeur :

Le commissaire de la concurrence

Jonathan Hood

Paul Klippenstein

Ellé Nekiar

Pour la défenderesse :

SECURE Energy Services Inc.

Robert Kwinter

Nicole Henderson

Brian Facey

Joe McGrade

 



[1] L’une de ces 25 installations fait l’objet d’une fermeture temporaire.

[2] Il convient de mentionner que, dans les cas où le terme « Tribunal » ou « formation » est employé et que la conclusion porte strictement sur une question de droit, cette conclusion a été rendue uniquement par les membres judiciaires du Tribunal.

 

[3] Les deux approches et les différents rajustements effectués font l’objet d’une analyse à l’article B(2) de la partie XV ci-après.

[4] Le commissaire a tenté de quantifier les effets hors prix, mais il n’a pas fait valoir qu’il fallait attribuer une valeur qualitative à ceux-ci dans l’analyse comparative qu’appelle l’article 96 (Tervita Corp c Canada (Commissaire de la concurrence), 2015 CSC 3 (« Tervita CSC »), aux par. 100, 125 et 126, et 137 à 140).

[5] Cette plage de valeurs est fonction de la fourchette de l’élasticité-prix de la demande établie par le Tribunal.

[6] Comme il en sera question plus en détail au paragraphe C(4)c) de la partie XIII ci-après, certains producteurs gèrent l’élimination de certains types de déchets à même leur site. À la lumière des éléments de preuve présentés au Tribunal, il s’agit principalement de l’eau produite. Certains types de déchets, dont les boues de forage et autres types de boues, les déblais de forage, les eaux usées, l’eau produite ainsi que certaines matières radioactives naturelles, peuvent être éliminés dans une caverne.

[7] On entend par eau produite l’eau extraite du sol en même temps que le pétrole et le gaz. Le terme « eau produite » est parfois employé pour désigner l’eau qui contient des résidus du processus de forage et de fracturation. Les PDEA ne sont pas situés au même endroit que les ITRE.

[8] Les marchés pertinents étant ceux visés par l’allégation de diminution sensible vraisemblable de la concurrence formulée par le commissaire, ils n’englobent pas certains marchés qui pourraient autrement sembler pertinents, y compris deux régions de chevauchement concurrentiel « de 2 à 1 » et une région de chevauchement « de 3 à 2 ». Ainsi qu’il en sera question plus en détail aux paragraphes 249 à 251, ces régions de chevauchement ne satisfaisaient pas au critère de hausse des prix de 5 % établi par le commissaire.

[9] Il s’agit du lieu d’enfouissement Silverberry, situé en Colombie-Britannique. Il en sera question au paragraphe 410. En Alberta, un seul lieu d’enfouissement est autorisé à recevoir des MRN, nommément l’installation Pembina qui appartient à Secure et qui reçoit les déchets dangereux.

[10] En l’espèce, le commissaire n’a pas fait valoir que le fusionnement allait vraisemblablement empêcher sensiblement la concurrence. C’est pourquoi le Tribunal restreindra son analyse ci-après à la DSC alléguée par le commissaire.

[11] Ainsi qu’il en sera question à l’article B(2) de la partie XV, paragraphe 109, M. Miller a inclus dans ses estimations la perte sèche associée à plusieurs installations que Secure ne prévoit pas fermer. Celles-ci ne font pas partie des 25 installations visées par une fermeture mentionnées ailleurs dans les présents motifs.

[12] La quantification des effets hors prix est un exemple particulièrement important de sujet pour lequel la majorité des membres de la formation a préféré certains aspects du témoignage de Mme Duplantis. Il en est question aux paragraphes 682 à 685 des présents motifs.

[13] Les allégations de M. Harington à propos de XX employés constituent un exemple important d’aspect pour lequel le Tribunal a privilégié la preuve de M. Eastman par rapport à celle de M. Harington. Il en est question aux paragraphes 604 à 610 des présents motifs.

[14] Voir les observations formulées aux paragraphes 569 et 570 et aux paragraphes 574 à 583 des présents motifs.

[15] Ces installations ont été désignées ainsi : XXXXXXXXXXXXXXXXX XXXXXXXXXXX XXXXXXXXXXXX XXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXX XXXXXXXX (transcription confidentielle B, à la p. 3138).

[16] La formation n’a pas eu accès à ces fichiers de sauvegarde. Bien que la diminution sensible vraisemblable de la concurrence alléguée par le commissaire ne vise que 143 marchés, M. Miller a estimé la perte sèche pour la totalité pratiquement des 271 régions géographiques de chevauchement entre les parties.

[17] Les témoins en question sont M. Lars DePauw, de l’OWA, M. Cliff Swadling, d’Obsidian Energy Ltd., M. Jeffrey Biegel, de SHARP Environmental (2000) Ltd., M. Barrie Flood, de RemedX Remediation Services Inc. (« RemedX »), et M. Carl Lammens, de PECL.

[18] En l’espèce, le code d’identification des pièces commence par la lettre P (version publique), les lettres CA (version confidentielle, niveau A) ou les lettres CB (version confidentielle, niveau B). Vient ensuite la lettre A (pour « applicant » en anglais, c.-à-d. le demandeur) ou la lettre R (pour « respondent » en anglais, c.-à-d. le défendeur), selon que le document a été déposé par le demandeur (le commissaire) ou par la défenderesse (Secure).

[19] L’application de ce critère, en plus de permettre l’exclusion des régions de chevauchement concurrentiel pour lesquelles le modèle de M. Miller ne prédit aucune hausse de prix ou bien une hausse de prix inférieure à 5 %, a mené à l’exclusion de 56 régions de chevauchement concurrentiel pour lesquelles le modèle avait prédit une baisse de prix. Voir l’analyse présentée aux paragraphes 250 et 251 des présents motifs.

[20] Un petit rajustement a été effectué pour tenir compte du fait que le commissaire semble avoir confondu le marché no 161 et le marché no 162. Puisque le critère de la hausse de prix de 5 % était respecté dans le cas du marché no 162, mais pas dans le cas du marché no 161, seul le marché no 162 a été inclus dans les marchés pertinents.

[21] D’après les données des parties concernant la transaction, il découle de cette hypothèse que le revenu hors marché est plus élevé, dans une proportion variant entre 50 % et 80 % (selon le marché de produit), que le montant réel des dépenses réalisées dans les installations de Secure et de Tervita à l’extérieur du marché.

[22] Dans un marché, le plus grand des deux ratios de détournement estimés affiche une valeur de 0,558 (ou 55,8 %).

[23] Dans ces trois cas d’exception, les ratios de détournement estimés se chiffrent à 0,318, à 0,125 et à 0,170.

[24] Si on exclut les marchés pour lesquels le Tribunal n’a pas conclu en fin de compte à une diminution sensible vraisemblable de la concurrence, on dénombre tout de même 15 marchés « de 4 à 3+ » pour lesquels la valeur du plus grand des deux ratios de détournement est inférieure à 0,400.

[25] Si on exclut les marchés pour lesquels le Tribunal n’a pas conclu en fin de compte à une diminution sensible vraisemblable de la concurrence, on dénombre tout de même 43 marchés « de 4 à 3 (ou plus) » pour lesquels la valeur du plus bas des deux ratios de détournement est inférieure à 0,300.

[26] Transcription publique, aux p. 80, 963 et 1010. La deuxième démarche adoptée à cet égard est la [traduction] « méthode axée sur la part de marché ».

[27] Rapport initial de M. Miller, aux pièces 43 à 45.

[28] Rapport en réplique de M. Miller, aux pièces 4 à 6.

[29] Ces estimations ne concernaient pas seulement les 143 marchés pertinents, mais plutôt l’ensemble élargi des 271 marchés dans lesquels il y a un chevauchement géographique entre les parties. Le Tribunal estime qu’on peut raisonnablement en déduire que les effets sur les prix estimés par Mme Duplantis auraient été plus importants si les calculs avaient été restreints aux 143 marchés pertinents.

[30] Les fournisseurs en question comprennent Secure, les tiers fournisseurs de services de gestion des déchets, les fournisseurs de premier niveau et les entreprises qui s’approvisionnent de façon autonome (rapport en réplique de M. Miller, au par. 45).

[31] L’estimation est prudente en ce sens que la part attribuée aux ventes réalisées à l’extérieur du marché est plus importante qu’elle ne l’est probablement en réalité, ce qui a pour effet de réduire la part de marché de Secure après le fusionnement. La preuve qui donne à penser que la part externe est inférieure à 10 % comprend entre autres le témoignage de M. Miller, ce dernier ayant affirmé qu’[traduction]« en moyenne, six ou sept pour cent [des ventes réalisées dans un marché pertinent] sont attribuables à une installation éloignée » située à l’extérieur du marché pertinent (transcription publique, à la p. 694) et que « la plupart des lots de déchets expédiés hors du marché vont tout de même être acheminés à Tervita ou à Secure » (transcription publique, à la p. 728).

[32] C’est le cas de TAQA dans les marchés nos 47, 49, 50, 51 et 57. Comme il a été mentionné au paragraphe 248 des présents motifs, TAQA n’accepte pas les déchets provenant de tiers. De même, White Cap est désignée comme étant le concurrent restant dans les marchés nos 52, 53 et 58. White Cap a cependant confirmé au Bureau qu’elle n’avait accepté aucun déchet en provenance de tiers au cours de la période visée par la question du Bureau (du 1er janvier jusqu’en octobre 2021) (voir le paragraphe 248 des présents motifs.) C’est aussi le cas de White Swan dans le marché no 60 (voir le paragraphe 246 des présents motifs).

[33] C’est le cas du lieu d’enfouissement Grande Prairie Clairmont (« GPCL »), une décharge municipale, dans les marchés nos 22 et 23. De façon similaire, l’installation Berland de Catapult dans le marché no 55 ne prend en charge que les eaux usées de catégorie II ou de catégorie 1(b). L’installation Cynthia de Wolverine dans les marchés nos 36, 37 et 42 traite également une gamme plus restreinte de flux de déchets que les installations Grande Cache et Mayerthorpe de la même entreprise (voir le paragraphe 239 des présents motifs). Dans l’extrait de la notice annuelle de Secure pour 2020 reproduit au paragraphe 226 des présents motifs, Secure affirme que la plupart de ses concurrents autres que Tervita offrent [traduction] « un éventail restreint de services ».

[34] Au paragraphe 19 de la déclaration de témoin de Chevron, M. Dziuba a affirmé ce qui suit : [traduction] « Toutefois, hormis Secure, aucun autre fournisseur ne répond aux critères du processus de sélection interne de Chevron ou ne représente un concurrent viable sur le marché des déchets solides ou des déchets sous forme d’émulsions. »

[35] C’est le cas des concurrents identifiés suivants :

  • Pure Environmental, dans les marchés nos 25 et 27, et pour la plupart des clients au sein du marché no 26;

  • TAQA, dans les marchés nos 47, 49, 50, 51 et 57;

  • GPCL, pour la plupart des clients au sein des marchés nos 22 et 23;

  • Catapult, dans le marché no 55;

  • MROR, dans les marchés nos 45 et 46;

  • Wolverine (Rycroft), dans les marchés nos 28, 29 et 41;

  • Wolverine (Mayerthorpe), dans les marchés nos 30, 31 et 33;

  • Wolverine (Cynthia), dans les marchés nos 36, 37 et 42.

[36] Le Tribunal souligne que les avocats du commissaire n’ont soulevé aucune objection par rapport aux cartes préparées par Secure, qui sont, ainsi que l’ont fait remarquer les avocats, [traduction] « simplement fondées sur les travaux de M. Miller » (transcription confidentielle B, à la p. 2929).

[37] C’est également le cas dans deux des marchés des lieux d’enfouissement « de 3 à 2 » allégués, soit les marchés nos 22 et 23.

[38] Dans les marchés nos 111 et 117, les parts de marché estimées sont supérieures à 50 %.

[39] Si deux installations appartenant à un même concurrent constituaient des solutions de rechange à distance raisonnable, elles ont été considérées comme une seule solution de rechange à distance raisonnable aux fins de l’analyse.

[40] Si le Tribunal entretenait un doute à cet égard, il a fait preuve de prudence et a considéré que l’installation en question représentait une solution de rechange à distance raisonnable.

[41] M. Dziuba a ajouté que [traduction] « hormis Secure, aucun autre fournisseur ne répond aux critères du processus de sélection interne de Chevron ou ne représente un concurrent viable sur le marché des déchets solides et des déchets sous forme d’émulsions » (déclaration de témoin de Chevron, au par. 19).

[42] Comme il a été mentionné précédemment, pour bon nombre de clients dans les marchés nos 163 et 166, même ces options ne représentent pas des solutions de rechange à distance raisonnable.

[43] Au sein de ces trois marchés, les parts se chiffrent à XXXXXXXXXXX respectivement, les ratios de détournement pertinents, à XXXXXXXXXXXXXXXXXXXXX respectivement, et les marges, à XXXXXXXXXXXX respectivement.

[44] Voir l’analyse exposée à l’article C(3) de la partie XIII des présents motifs.

[45] Il semble que ces installations ne soient autorisées qu’à répondre aux besoins internes, et qu’elles ne sont donc pas mises à la disposition de tiers.

[46] Voir le paragraphe 79(3) de la Loi (« [...] que dans la mesure de ce qui est nécessaire à la réalisation de l’objet de l’ordonnance »).

[47] Voir les paragraphes 36 et 148 des présents motifs.

[48] Au cours de l’audience, le Tribunal a mentionné à plusieurs reprises qu’il était important qu’on mette à sa disposition les éléments de preuve nécessaires pour qu’il puisse analyser chacun des marchés pertinents (voir, à titre d’exemple : transcription confidentielle B, aux p. 1257, 1396 à 1398, 1401 et 1402, 1408 et 1409, 1490, et 1498 à 1501; transcription publique, aux p. 1622, 1629 et 1632). Secure a reconnu qu’elle aussi devait présenter ses arguments par rapport aux questions qu’elle soulevait, comme celles de l’approvisionnement autonome et du pouvoir compensateur (transcription confidentielle B, à la p. 1495). Les avocats de Secure ont souligné que le commissaire avait soulevé un [traduction] « bon point » en affirmant qu’une installation pouvait avoir une incidence sur un grand nombre de marchés, et ils ont dit avoir bon espoir que [traduction] « la question allait pouvoir être élucidée » (transcription confidentielle B, aux p. 1493 et 1494, et 1496). Et c’est effectivement ce qu’a fait le Tribunal.

[49] Bien que le commissaire sollicite aussi le dessaisissement des cavernes Lindbergh situées à proximité et dont il sera question plus loin, aucun élément de preuve ne donne à penser que cette installation touchait des revenus dans le marché no 79.

[50] Il convient de noter que le commissaire ne demande pas le dessaisissement du lieu d’enfouissement Bonnyville, qui est également situé dans la région. XXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXX XXXXXXXXXX XX

[51] Voir les paragraphes 215, 250 et 251 des présents motifs.

[52] L’annexe 3 des présents motifs offre une synthèse des dessaisissements selon le marché.

[53] Ainsi qu’il a été mentionné précédemment, le Tribunal restreint son analyse aux 143 marchés pertinents visés par une allégation de DSC. Comme il en est question plus en détail ci-après, le dessaisissement de certaines de ces ITRE permettrait également de contrer la DSC qui, selon ce qu’a conclu le Tribunal, se produira dans certains marchés des services des PDEA.

[54] L’ITRE Kindersley, qui appartenait précédemment à Tervita, réunit deux installations, nommément l’installation Kindersley East et l’installation Kindersley West, lesquelles sont situées très proches l’une de l’autre.

[55] Pour les autres clients dans les marchés nos 15 et 27, les cavernes Lindbergh représentent l’installation de Tervita la plus proche. Comme il en sera question plus loin, le dessaisissement des cavernes Lindbergh serait nécessaire pour assurer que ces clients ne subissent pas de hausses de prix importantes de la part de Secure.

[56] En plus de son ITRE, Secure possède trois installations d’évacuation des eaux dans cette région, nommément l’installation Kaybob, l’installation Kaybob South et l’installation Tony Creek.

[57] Dans la mesure où certains clients des marchés nos 90, 91 et 93 peuvent être situés plus près de l’ITRE Gordondale, laquelle a fait l’objet d’une analyse précédemment, que de l’une ou l’autre de ces ITRE, le dessaisissement de l’ITRE Gordondale contribuerait également à faire en sorte que la concurrence soit rétablie au niveau requis dans ces marchés.

[58] Au sein du marché no 91, certains clients semblent situés plus près de l’ITRE Gordondale ou de l’ITRE Spirit River que de l’ITRE La Glace.

[59] Voir plus haut l’analyse concernant l’installation Buck Creek et, ci-après, l’analyse portant sur l’installation West Edson.

[60] L’annexe 3 des présents motifs offre une synthèse des dessaisissements selon le marché.

[61] Comme il en est question ci-après, le dessaisissement combiné de cette installation et du PDEA Moose Creek est nécessaire pour contrer la DSC au sein des marchés nos 18, 19, 47 et 150.

[62] Comme il en est question ci-après, le dessaisissement combiné de cette installation et du PDEA Kakwa est nécessaire pour contrer la DSC au sein des marchés nos 154, 155, 159, 163, 164, 165, 177, 232 et 242.

[63] Voir la p. 153 de l’annexe B des observations finales du commissaire.

[64] Toutes ces installations appartenaient précédemment à Tervita.

[65] À l’étape de l’audience consacrée à la présentation de la preuve, la formation a demandé aux experts des parties s’ils s’étaient demandé si des actionnaires de Secure étaient étrangers. Chacun a répondu par la négative (transcription publique, aux p. 2655, 2797). Dans la note de bas de page 291 de ses observations finales, le commissaire a fait référence à deux actionnaires mentionnés à la page 72 de la pièce P-A-156 – avis de tenue de l’assemblée annuelle et d’une assemblée extraordinaire des actionnaires de Secure, le 29 avril 2022. Cela dit, les seules sources concernant le lieu où se trouvaient ces actionnaires étaient des références Web qui n’ont pas été déposées en preuve.

[66] Comme il est expliqué plus loin à l’article (3)c) de la partie XV, les effets de l’empêchement ou de la diminution de la concurrence qui pourraient se produire en dehors des marchés touchés par une DSC sont admissibles aux fins de l’application de l’article 96. Les ordonnances du Tribunal visent à rétablir la concurrence de manière à éliminer le caractère sensible de l’empêchement ou de la diminution de la concurrence. Ainsi, le but des ordonnances n’est pas d’éliminer tous les effets de l’empêchement ou de la diminution de la concurrence. En outre, s’agissant du fusionnement qui pourrait entraîner une perte sèche là où les parties ne font pas concurrence à l’heure actuelle ou ne le feront vraisemblablement pas dans l’avenir, la perte sèche ne peut être prise en considération aux fins de l’application de l’article 96, car elle n’a pas de lien avec « les effets de l’empêchement ou de la diminution de la concurrence qui résulteront ou résulteront vraisemblablement du fusionnement », comme il est énoncé au paragraphe 96(1) de la Loi. Voir les paragraphes 520 à 524 ci-après.

[67] Lorsqu’une puissance commerciale existe déjà, la perte sèche qui découle d’un fusionnement fait intervenir une diminution du surplus du producteur (voir, de manière générale, Tervita TC, au par. 287).

[68] Rappelons que les effets hors prix sont liés aux 25 installations visées par une fermeture (voir les paragraphes 3 et 7 à 10 des présents motifs). Selon ce qui a été allégué, ces effets s’exercent dans les 271 régions géographiques de chevauchement concurrentiel entre Secure et Tervita de même qu’au-delà de celles-ci. En effet, certaines des installations visées par une fermeture reçoivent des déchets de clients qui ne sont pas établis dans l’une ou l’autre de ces 271 régions, de sorte qu’elles ne tiraient pas avantage d’une quelconque concurrence directe entre Secure et Tervita avant le fusionnement.

[69] Comme il a été mentionné précédemment, sont aussi admissibles les gains en efficience qui, étant intrinsèquement liés aux marchés dans lesquels un empêchement ou une diminution sensible de la concurrence se produirait vraisemblablement, ne seraient vraisemblablement pas réalisés dans d’autres marchés si l’ordonnance en question était rendue.

[70] Voir, par exemple, les articles 92, 93, 94, 97, 98, 99, 100 et 103 de la Loi.

[71] Ils demeurent admissibles même lorsqu’ils ne sont pas quantifiables et lorsqu’ils ne sont pas directement liés à une réduction de la perte sèche (voir le paragraphe 515 des présents motifs et Supérieur Propane I, au par. 460).

[72] M. Harington a retenu un taux d’actualisation annuel réel de 8 % pour en arriver à l’estimation de la VAN sur 10 ans.

[73] Le Tribunal croit comprendre que les estimations de Secure relativement aux gains en efficience sont exprimées en dollars de 2020, alors que celles du commissaire concernant la perte sèche sont exprimées en dollars de 2019. En l’absence d’éléments de preuve concernant le facteur de rajustement qu’il conviendrait d’appliquer pour exprimer les estimations de la perte sèche en dollars de 2020, ou pour exprimer toutes les estimations en dollars de 2021, le Tribunal ne dispose d’aucun point de départ pour faire les rajustements. Étant donné qu’une pandémie faisait rage au cours de ces années, le Tribunal considère que cela n’a pas d’importance quelconque. Néanmoins, le Tribunal souligne qu’il lui arrive souvent d’être appelé à comparer ou à mettre en balance des sommes d’argent liées à des périodes différentes. Par souci d’exactitude, les sommes comparées devraient être exprimées dans la même unité de mesure, c’est-à-dire en dollars (ou autres unités monétaires) assortis du même pouvoir d’achat. Dans les instances futures, les parties pourraient faciliter la tâche du Tribunal en lui fournissant des éléments de preuve sous la forme de données économiques utiles, comme les indices des prix du PIB publiés trimestriellement par Statistique Canada et, dans certains cas, les taux de change du marché.

[74] Dans ce tableau, l’expression « ne fait plus l’objet d’une fermeture » signifie « ne fait plus l’objet d’une fermeture ou devra être rouverte ».

[75] Transcription confidentielle B, aux p. 2913, 3032, 3509. Secure soutient que cette réouverture est temporaire. Cela dit, le Tribunal accueille l’argument du commissaire selon lequel cette installation restera vraisemblablement en activité au vu des autres fermetures prévues et des dessaisissements exigés par le Tribunal.

[76] ( ).

[77] Les valeurs équivalentes annualisées et actualisées sur 10 ans reposent sur un taux d’actualisation de 8 % par année pour la période allant de juillet 2023 à juin 2033, en réunissant les données annuelles de chaque période allant de juillet à juin comme une seule valeur en date du 31 décembre.

[78] Valeurs ajoutées pour XXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXX. Valeurs retirées pour XXXXXXXX, XXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXX. À l’appendice 4.1 de son rapport révisé, M. Harington emploie les termes « FST / SWD » plutôt que « TRD / SWD ». Ces deux termes anglais désignent en fait les mêmes installations.

[79] La hausse des frais de transport n’est pas un gain en efficience. Il s’agit plutôt d’un effet anticoncurrentiel devant être pris en compte dans l’autre volet de l’analyse comparative. Par conséquent, ces frais additionnels ont été retirés de la présente liste.

[80] Valeurs retirées pour XXXXXXXXXXX.

[81] Valeurs retirées pour XXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXX XXXXXXXXX.

[82] Mémoire des arguments de Secure, au par. 146; Plaidoiries finales du commissaire, au par. 154. Toutefois, le Tribunal souligne que le commissaire a, au cours de l’audience, posé pour thèse que les gains en efficience allégués par Secure ainsi que les coûts associés à la réalisation de ces gains devraient être analysés à compter de la date de conclusion du fusionnement (transcription publique, aux p. 3095 à 3097).

[83] 140 638 674 $ – (60 449 729 $ + 14 270 895 $) = 65 918 050 $.

[84] À cet égard, M. Harington a affirmé avoir pris en compte ce que Secure considérait comme des coûts fixes et ce qu’elle considérait comme des coûts variables, mais qu’il ne s’y était pas fié pour son analyse, sauf pour ce qui est des réparations et de l’entretien (rapport révisé de M. Harington, à la note de bas de page 66).

[85] Où les services publics contribuaient pour environ XXX du total des coûts hors main-d’œuvre. Encore une fois, M. Harington s’est appuyé sur une analyse de corrélation pour seulement deux autres catégories de coûts, nommément les coûts des produits chimiques (XX) et les dépenses de sous-traitance (XX).

[86].XXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXX XXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXX XXXXXXXXXXXX

[87] XXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXX XXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXxXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXX

[88] Cet élément de coût est présenté aux appendices 1 et 2 de l’annexe I du rapport révisé de M. Harington. À l’instar des données liées aux coûts des services publics, dont il a été question précédemment, les données figurant dans ces appendices font ressortir que les coûts liés à la rémunération varient fortement parmi les installations qui y sont mentionnées. Comme il est souligné au paragraphe 566 des présents motifs, l’élément de coût que constitue la rémunération pesait pour environ XXX de l’ensemble des coûts des lieux d’enfouissement ayant fait l’objet de l’analyse de M. Harington.

[89] Voir notamment l’analyse présentée dans la section qui précède la présente.

[90] Pour les ITRE et les PDEA, voir les appendices G1.1, G1.2, G4.1.1, G4.1.2, G4.2 et G4.3 du rapport révisé de M. Harington. Pour les lieux d’enfouissement, voir les appendices 1 et 2 de l’annexe I.

[91] Le Tribunal prend acte du fait que Secure a inclus certaines dépenses en capital dans son plan d’intégration, principalement au regard des dépenses qui ont été ou seraient réalisées avant 2023.

[92] Par exemple, il semble que M. Harington avait les données utiles à cette fin relativement à l’intégration de différents lieux d’enfouissement visés par une fermeture et installations absorbantes, dont XXXXXXXXXXXXXXXXX XXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXxXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXX.

[93] Le Tribunal prend acte du fait qu’au paragraphe 75 du rapport en réplique de M. Harington, l’auteur présente dans le tableau 2 une comparaison des ratios des dépenses totales/volumes de déchets traités entre les lieux d’enfouissement visés par une fermeture et les installations absorbantes correspondantes. Toutefois, le coût total unitaire et le coût variable unitaire ne reviennent pas au même le moment venu de présenter des données devant faire l’objet d’une comparaison, en ce que le coût variable unitaire pourrait être plus pertinent pour établir une allégation de gains en efficience.

[94] Ces passages traitaient du fardeau du commissaire, mais on peut en dire tout autant au sujet du fardeau qu’impose à la défenderesse l’article 96 (voir les paragraphes 516 et 517 des présents motifs). Le Tribunal ne peut penser à aucune raison de principe qui permettrait d’affirmer que le fardeau de quantifier quelque chose qui est quantifiable devrait s’appliquer au commissaire, mais non à une défenderesse.

[95] XXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXX XXXXXXXXXXXX. Le Tribunal souscrit à la position du commissaire selon laquelle cette installation qui a rouvert demeurera vraisemblablement en activité.

[96] Sous réserve de l’analyse présentée dans la partie XV, alinéa B(1)(c)(vii), ci-après.

[97] XXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXX XXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXX XXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXX (transcription confidentielle B, aux p. 2575 à 2578), XXXXXXX XXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXX (transcription confidentielle B, aux p. 2578 et 2579). Par souci d’exhaustivité, le Tribunal souligne que ces effets allégués ne sont pas admissibles selon la méthode axée sur la date de l’ordonnance.

[98] Il s’agit de la somme des coûts liés aux postes et à la main-d’œuvre pris en compte aux appendices 6.2 et 6.4 du rapport révisé de M. Harington.

[99] Le Tribunal considère qu’il est utile de souligner que M. McLean a déjà travaillé pour Tervita et qu’il possède une riche expérience dans les évaluations de ce genre (transcription publique, aux p. 462 et 463, 470).

[100] Bon nombre de postulats que M. Eastman a remis en question et qui sont décrits au paragraphe 605 précédemment ont été abordés par M. Blundell au paragraphe 124 de sa déclaration de témoin.

[101] 36 645 278 $ – 10 725 447 $ = 25 919 831 $.

[102] 22 986 790 $ + 10 725 447 $ = 33 712 237 $.

[103] 140 638 674 $ – (60 449 729 $ + 14 270 895 $) = 65 918 050 $.

[104] Secure et le commissaire s’entendent pour dire que les listes les plus à jour des installations visées par une fermeture sont fournies aux tableaux 4 et 5 du rapport révisé de M. Harington (transcription confidentielle B, aux p. 3134 à 3136, 3157 et 3158). Le nombre total d’installations visées par une fermeture est de 35 dans ces tableaux. Toutefois, le commissaire s’est reporté aux estimations que M. Miller a fournies concernant les effets de la fermeture d’installations (c.-à-d. les effets hors prix), telles qu’elles sont présentées à la pièce 7 du rapport en réplique de M. Miller, puis il a rajusté ces estimations pour exclure quatre installations ne figurant pas dans les tableaux 4 et 5 de M. Harington, susmentionnés. Vingt-neuf installations faisaient partie de la liste fournie à la pièce 7. Une fois les quatre installations en question exclues, il subsiste 25 installations visées par une fermeture au regard desquelles sont allégués des effets hors prix. Le Tribunal comprend que les calculs de M. Miller ne tiennent pas compte de certaines fermetures partielles qui sont prises en compte dans les tableaux 4 et 5 de M. Harington (transcription confidentielle B, aux p. 3135 et 3136). Il est entendu que pour évaluer les effets hors prix, le Tribunal s’est intéressé aux estimations finales de ces effets, telles qu’elles ont été fournies par le commissaire dans sa plaidoirie finale (transcription confidentielle B, aux p. 3132 à 3148).

[105] Les périodes annuelles (exercices financiers) retenues aux fins des calculs vont du 1er juillet d’une année au 30 juin de l’année suivante. L’actualisation est réalisée en prenant pour hypothèse que les sommes annuelles ont été reçues au milieu de l’année, c’est-à-dire le 31 décembre.

[106] Comme il en sera question plus en détail ci-après, le dernier chiffre a été [traduction] « supposé » à la lumière du calcul fait par M. Kahwaty dans l’affaire Tervita TC, aux paragraphes 298 à 303, alors que celui de -0,2 correspond, selon ce qu’a expliqué M. Miller, [traduction] « à un chiffre rond proche de zéro » (transcription publique, à la p. 1013).

[107] 2,4 millions de dollars (déchets solides) + 2,0 millions de dollars (eaux usées) = 4,4 millions de dollars.

[108] Le rajustement de 9,56 millions de dollars a été calculé en prenant pour point de référence l’estimation initiale de M. Miller, qui était de 78,12 millions de dollars. Le chiffre rajusté révisé par le Tribunal, soit 9,26 millions de dollars, est calculé d’après l’estimation révisée de M. Miller, soit 71,81 millions de dollars.

[109] Le Tribunal comprend que les estimations de M. Miller supposent que les installations visées par une fermeture fermeront à la date du fusionnement. Au vu des conclusions que le Tribunal exposera plus loin, il n’y a pas lieu d’apporter de rajustement pour tenir compte de cette hypothèse.

[110] 21,25 millions de dollars représente 29 % de 78,81 millions de dollars.

[111] Les rajustements sont apportés uniquement dans le cas du modèle d’enchère au second prix, parce que le Tribunal considère que ce modèle présente moins de lacunes que celui de Bertrand compte tenu des faits particuliers de l’affaire. Notamment, le modèle de Bertrand suppose que les prix sont fixés sans négociation et qu’une installation fixera un seul prix pour un marché donné. Ces hypothèses ne concordent pas avec les éléments de preuve en l’espèce. Le Tribunal souligne que Secure a reconnu ce fait (transcription confidentielle B, aux p. 3364, 3375 à 3377).

[112] Ces chiffres sont ceux obtenus avant tout rajustement apporté par le Tribunal. Une fois apportés les rajustements du Tribunal, les estimations passent respectivement à 50 861 741 $ selon la méthode axée sur le profit et à 36 007 707 $ selon la méthode axée sur la part de marché en appliquant le modèle d’enchère au second prix. Précisons que la thèse du commissaire demeurait la même si son estimation finale de la perte sèche était obtenue suivant la méthode axée sur la part de marché en appliquant cette fois le modèle de Bertrand (soit 26,3 millions de dollars) aux fins du calcul des effets hors prix.

[113] Voir la note de bas de page 139 plus loin.

[114] La limite inférieure de cette fourchette reposait sur des options de dessaisissement hypothétiques fondées sur la stratégie de l’[traduction] « installation la plus proche », alors que la limite supérieure reposait soit sur la perte sèche associée à la transaction complète, soit sur des options de dessaisissement hypothétiques fondées sur la stratégie de l’[traduction] « installation concernée » (rapport révisé de Mme Duplantis, à la figure 20). Mme Duplantis a confirmé (transcription confidentielle B, à la p. 2101) que, pour parvenir à ses estimations de la perte sèche liée à une réduction de la production, elle avait reproduit les travaux de M. Miller et utilisé les données de ce dernier concernant les parts de marché, les marges et les revenus, retenant ses propres données seulement pour ce qui est de l’élasticité et des hausses de prix dans ses calculs. La répartition faite par Mme Duplantis de la perte sèche associée aux effets sur les prix et sur la production parmi chacune des 271 régions de chevauchement est présentée dans le tableur de Mme Duplantis et dans le tableur combiné de M. Miller et de Mme Duplantis.

[115] Voir l’analyse présentée aux paragraphes 203 à 208 des présents motifs.

[116] M. Miller a révisé ses estimations des hausses de prix moyennes comme suit : services des ITRE, de 25 % à 24,3 %; services des lieux d’enfouissement, de 13,6 % à 8,9 %; services des PDEA, de 11,4 % à 11,1 % (rapport initial de M. Miller, au par. 129; rapport en réplique de M. Miller, à la pièce 1).

[117] Voir le paragraphe 661 ci-dessus.

[118] Voir l’analyse présentée aux paragraphes 655 et 656 des présents motifs et la transcription confidentielle B, à la p. 3401.

[119] Une élasticité de -0,1 donne des limites inférieures de quelque 250 000 $ pour ce qui est de la perte sèche liée aux déchets solides, et de quelque 250 000 $ dans le cas des eaux usées, soit 500 000 $ au total. Une élasticité de -0,3 donne des limites supérieures d’environ 828 000 $ et 690 000 $ pour les déchets solides et les eaux usées, respectivement. La somme de ces deux montants est de 1 518 000 $ environ.

[120] Transcription publique, aux p. 815, 827 à 829.

[121] Transcription publique, aux p. 815, 825.

[122] Voir la note de bas de page 112 précédemment. Comme le montre le tableau 20, le Tribunal a légèrement modifié l’estimation de 36,2 millions, la ramenant à 36 007 707 $.

[123] La seule exception étant que M. Harington a précisé qu’il avait affirmé par erreur avoir utilisé les données de 2020, ayant dans les faits utilisé les données de 2019, tout comme M. Miller.

[124] La formation souligne que certains éléments de preuve montrent que les clients pourraient ne pas avoir à assumer de frais supplémentaires lorsque le délai d’attente n’augmente pas au-delà d’une certaine limite, par exemple, 30 minutes (transcription publique, à la p. 1803).

[125] Comme il a été mentionné à la note de bas de page 112 précédemment, cette estimation a été légèrement modifiée par le Tribunal, à 36 007 707 $.

[126] Voir la note de bas de page 112 précédemment. Le Tribunal fait observer qu’il faudrait abaisser davantage cette estimation pour tenir compte de certains rajustements apportés aux gains en efficience allégués dont il est question dans le tableau 16, nommément les gains en efficience liés aux installations qui ne fermeront vraisemblablement pas, ou qui fermeront probablement bien après la date de l’ordonnance. Pour les motifs présentés au paragraphe 686 des présents motifs, il n’y a pas lieu de pousser plus loin l’analyse de ces rajustements ici. Il en est toutefois question dans le tableau 21 ci-après.

[127]XXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXxXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXxXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXxXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXxxxxxxxXXX. Le nombre d’installations concernées est donc de XX.

[128] Les quatre premières rangées reproduisent simplement le tableau 19 ci-dessus. Les autres rangées développent les chiffres présentés dans le tableau 19 afin de tenir compte (i) de fermetures d’installations additionnelles, (ii) le moment des fermetures et (iii) des seuls effets qui se produiront dans les 271 régions de chevauchement concurrentiel.

[129] Il est expliqué dans le rapport révisé de M. Harington que XXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXX XXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXxXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXxXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXxXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXxXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXx XXXXXXXXXXXXXX.

[130] Comme il est expliqué aux paragraphes 686 et 693, le Tribunal n’accepte pas les montants de perte sèche présentés à la pièce 7 du rapport en réplique de M. Miller. Cela dit, étant donné que ces valeurs de la perte sèche sont vraisemblablement fortement corrélées avec le volume des livraisons aux 29 installations désignées dans la liste, il s’agit d’une information utile pour faire une approximation et un rajustement en fonction des parts relatives des frais de transport additionnels associés aux installations qui ne fermeront pas ou qui fermeront seulement partiellement. Un autre rajustement aurait pu consister à réduire le montant de 7 200 000 $ en fonction de la proportion d’installations qui ne fermeront pas, soit une fraction (8/29) qui aurait donné une réduction de 27,6 %. La réduction de 60,9 % retenue par le Tribunal en l’espèce est beaucoup plus complète et prudente, et elle est conforme à l’importance cruciale que revêtent les estimations des frais de transport accrus pour établir les effets anticoncurrentiels dans leur ensemble.

[131] Une série de paiements annuels de 3 308 132 $ au cours de la période allant du 2 juillet 2021 au 30 juin 2033 aurait une valeur actuelle de 30 219 522 $ en supposant que cette valeur actuelle soit calculée au mois de juillet 2023. En utilisant ce point dans le temps pour établir la valeur actuelle (et un taux d’actualisation de 8 % par année), il devient possible de faire des comparaisons directes avec les valeurs actuelles des gains en efficience autrement non réalisés, suivant la méthode axée sur la date de l’ordonnance. (Tous les calculs supposent un paiement ponctuel au milieu de chacune des années financières.) Cette valeur actuelle de 30 219 522 $ en juillet 2023 équivaut à une série de paiements annuels de 4 333 591 $ sur 10 ans (de juillet 2023 à juin 2033), exprimés en valeur actuelle. De façon similaire, 4 308 132 $ par année sur 12 ans correspond à une valeur actuelle de 39 354 443 $, ou 5 643 572 $ par année au cours de la période 2023-2033.

[132] Rapport révisé de Mme Duplantis, à la figure 20.

[133] Rapport révisé de M. Harington, au par. 136.

[134] Les rangées ombrées désignent les sept marchés pour lesquels le Tribunal n’a pas accepté l’allégation de DSC du commissaire.

[135] Si le présent document est rédigé sous forme d’affidavit, les mots « atteste par les présentes » sont supprimés et remplacés par « déclare sous serment ». Un affidavit est fait sous serment. Une attestation est faite par un commissaire à l’assermentation.

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